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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Michel Pastoureau retrace ici la place du loup dans notre culture. Quel regard porte-t-on et a-t-on porté sur lui ? Quelle place occupe-t-il dans la littérature (roman de Renart, livres de jeunesse, La Bible ? Dans la sculpture ? Toutes les peurs liées à cet animal sont-elles justifiées ?
A travers onze chapitres qui regroupent des textes étayés par une iconographie abondante, l'auteur réhabilite certaines vérités à travers les travaux des historiens et réfute certains écrits (notamment le sens donné à la couleur rouge portée par le petit chaperon).
Indépendamment de la beauté du livre, de ce que l'on y apprend, j'aime beaucoup l'écriture de Michel Pastoureau. car il est un formidable raconteur ! On entend ses mots, son ton, sa conviction à travers son écriture et son enseignement est toujours limpide.
J'avais déjà lu "Le roi tué par un cochon".
Je vous encourage vivement à lire cet homme si ce n'est déjà fait.
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Le regard de l'historien sur un animal qui fut et est toujours source de fantasmes et de polémiques . Appuyé sur une remarquable iconographie Pastoureau de l'Illiade à Tex Avery nous amène à une féconde réflexion : ce que les images disent sur le loup mais surtout ce qu'elle disent sur nos sociétés à chaque époque . Passionnant et stimulant.
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Que peut nous apprendre sur une époque un loup ? Pour qui n'est pas habitué à l'histoire cette question peut paraître saugrenue ; pourtant dans ce livre l'historien médiéviste Michel Pastoureau va nous montrer de manière simple, efficace et rapide que le loup peut nous apprendre beaucoup sur l'époque qui l'utilise. La chose est rendue possible à l'historien grâce à sa recherche de code récurrent, d'image employée, d'écrit, qu'il replace dans le contexte d'époque. Et après lecture de ce livre, le moins que l'on puisse dire c'est que le loup est bavard.

Pour débuter son livre, l'auteur va commencer par nous montrer ce que le loup renvoie comme image selon les régions et les époques. Partant des mythologies d'Europe en passant par le christianisme, l'historien va nous dévoiler les diverses images qu'il peut refléter dans les sociétés d'époque, - en sachant tout de même que les bons et mauvais côtés se retrouvent dans toutes les périodes.
C’est ainsi qu’on découvrira pour commencer, que dans la mythologie nordique il possède une image plutôt négative à cause de la légende de Fenrir, alors que dans les mythologies grecque et celte, l’image est plutôt bénéfique puisqu’il accompagne régulièrement les dieux celtes comme Lug ou Cernunnos dans leurs déplacements et est un attribut d'Apollon. Alors qu'avec Rome c'est encore une autre histoire, l'image est double.
Avec le christianisme cependant, l’image tend à se stabiliser. Si la Bible est peu prolixe à son sujet, les hommes d’église par la suite sont plus bavards. Ils font du loup un faux prophète ou un animal rusé, et s’en servent aussi pour mettre en évidence la puissance des hommes de Dieu face au mal, comme dans la légende de Saint Blaise. Toutefois, comme le montre cet extrait ci-dessous, l'image du loup peut être adoucie pour calmer l'imagination des populations d'époque

"L'histoire lupine la plus célèbre de l'hagiographie médiévale est celle du loup Gubbio, en Ombrie, un loup colossal, vorace, insatiable et particulièrement cruel qui terrorisait la ville et la contrée. Saint François d'Assise (1181-1226), qui avait eu vent de ce fléau, vint à la rencontre de la bête et lui parla chrétiennement. Il l'appela "Frère loup", lui reprocha son comportement, tout en reconnaissant que c'était la faim qui le poussait à agir ainsi. Puis il demanda de s'amender et de faire la paix avec les habitants de Gubbio, qui en échange, promit-il le nourriraient. le fauve ferma son énorme gueule, inclina la tête, s'agenouilla devant la le saint et fit comprendre qu'il se soumettait. le pacte fut respecté : les gens de Gubbio donnèrent régulièrement à manger au loup, qui désormais vécut familièrement parmi eux et devint une sorte d'animal protecteur de la cité. Quand il mourut de vieillesse, il fut pleuré de tous les habitants. Tuer le loup, le diaboliser, le domestiquer : telles ont été les premières stratégies médiévales pour lutter contre le fauve et contenir les peurs - justifiées ou non - qu'il faisait naître. Mais cela n'a pas suffit. A l'époque féodale, les clercs ont donc eu recours à un autre moyen pour le rendre moins effroyable et menaçant : le bafouer, l'humilier, le ridiculiser. Ce fût le rôle des fables et des contes d'animaux, particulièrement du Roman de Renart." P.44

Tout cela est certes bien beau, mais sachez que l'auteur va au-delà de l'image que le loup renvoie dans les religions et mythes. Ne fuyez pas encore ! La suite est meilleure. En effet, il va montrer comment dans le domaine temporel les loups ou au moins le son du mot, va être utilisé sur quelques blasons de riche famille afin de faire référence au nom de famille ou au prénom, où toutefois le loup y garde sa force brutale.
"C'est en Navarre et en Galice que les armoiries au loup sont les plus nombreuses. Il ne s'agit pas tant d'un emprunt à la faune locale (les loups abondent dans les forêts du nord de l'Espagne) mais d'un usage fréquent à toute l'Europe : choisir une figure héraldique dont le nom forme un jeu de mots avec celui de la famille ; de telles armoiries sont dites parlantes". P. 84
Néanmoins, si dans l'image il garde sa puissance, dans la littérature il en va tout autrement. Bien sûr dans les fables (même dans les fables antiques) et les contes qui remontent à cette époque comme le Petit Chaperon rouge (an mil), le loup est encore féroce. Cependant, l'auteur va nous montrer que dans le temps sa représentation peut changer, et servir par exemple à moquer la politique, les moeurs nobles, comme on le voit à l'époque Féodale dans le Roman de Renart (écrit comme ses représentations).
Outre ceci et toujours dans le domaine temporel, Michel Pastoureau va aussi nous faire découvrir que le loup peut même être le sujet d'écrits scientifiques comme l'atteste certains bestiaires de médecine, et même être un livre de stratégie amoureuse comme dans le Bestiaires d'Amour, quand il n'est pas seulement une source de croyance et de superstition.
Des croyances et superstitions que l'époque actuelle essaye de faire disparaître en réhabilitant le loup dans l'opinion publique. Les religions européennes étant lointaines ; les contes pour enfants ou encore certains travaux de zoologues participent effectivement à améliorer son image.

"Du XV au XVIII siècle, les loups constituent partout, ou presque, un fléau, et leurs victimes ne sont plus seulement des moutons ou des chèvres, comme dans l'Antiquité ; ce sont des enfants, voire des adultes lorsque sévit la rage. Tous documents d'archives, tous les registres paroissiaux, toutes les chroniques, l'affirment et le confirment : sous l'Ancien Régime, lorsque certaines circonstances sont réunies - hivers interminables, famines épidémies, guerres - les loups attaquent les humains et mangent les cadavres des soldats. le nier, comme le font aujourd'hui certains éthologues et zoologues, est malhonnête." P.107

Les religions lointaines, OK. Vous vous demandez peut-être pourquoi je vous ai dit cela.
Tout simplement parce que le contexte a énormément joué dans la peur ou la méfiance du loup. Et la religion n'y est bien sûr pas étrangère avec ses écrits comparatifs, ou encore avec la chasse au loup-garou qui se fait en même temps que la chasse aux sorcières dès la fin du Moyen-âge. Toutefois, Michel Pastoureau va montrer comment la conjoncture joue aussi sur la peur du loup.
En effet, l'auteur a remarqué que les crises climatiques, agricoles, sociales, favorisent cette peur, puisque la faim les fait rôder proche des villes et villages, et les rend particulièrement féroces. Ce qui lui permet d'affirmer cela, c'est aussi le fait que pendant deux siècles (12 et 13ème) la peur du loup semble diminuer avant de revenir vers la fin de l'époque médiévale. Ces deux siècles correspondant effectivement a une accalmie, puisque cette période est marquée par une reprise de la culture, la puissance des villes… avant que la guerre de 100 ans, le retour de la peste et le schisme d'occident renversent toute cette stabilité. (Tout ça dès le 14ème siècle. Ils ont été gâtés à l'époque !)

Temporel, spirituel, conjoncturel, mythique, voilà donc le panel d'approche que propose ce livre. Tout cela est certes parfait, mais avant de finir je dois dire que ce livre possède un autre petit atout : l'auteur va aborder rapidement ses autres domaines de recherche comme sur les couleurs. Ceci va lui permettre de battre en brèche des petites choses avancées par des psychanalystes tarés sur les contes, mais aussi chemin faisant, nous donner l'envie de lire ses autres livres sûrement tous aussi passionnants (ça tombe bien, j'en ai trois autres sous la main).

En résumé, c'était une lecture très enrichissante. Autant visuellement qu'en connaissance. L'auteur nous donne pour l'Europe la longue évolution du loup dans les divers supports d'expression, en abordant tant le côté légendaire que scientifique d'époque, sans oublier l'époque contemporaine. Un livre à lire donc, et à lire sans peur de se faire croquer.


Merci à Babelio et aux éditions du Seuil.

Lien : http://encreenpapier.canalbl..
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Très belle collection dédiée aux animaux, écrite par le grand historien Michel Pastoureau (dans la même collection : "Le corbeau", "Le taureau", "La baleine").
Pourquoi le loup est-il un animal mal aimé ? Comment cela s'est-il traduit dans les représentations culturelles au fil des siècles ?
Ce livre est très intéressant, complet, accessible au grand public et richement illustré. Lecture indispensable.
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Très intéressant et bien illustré. Une histoire du loup à travers le temps, l'histoire, les arts. On peut voir qu'il est plus diabolisé à la renaissance qu'au Moyen âge mais aussi toutes les croyances invraisemblables sur l'ingestion de certaines de ses parties. On le voit sur les blasons, à travers la bête du Gévaudan... Un texte bien écrit mais accessible!
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