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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
En 1989, dans un village de Croatie, Silva, jeune fille de 17 ans, disparaît à la sortie d'une soirée entre amis. Au début, la famille, la police, les villageois se mobilisent à minima pour la chercher. Puis, le temps passant, la guerre des années 1990 surgissant, seul le frère jumeau de Silva, Mate, continue sans relâche la traque de sa soeur, soutenu par leur mère, leur père aillant jeté l'éponge.

A travers la recherche de Silva, fil conducteur de ce roman, nous suivons l'histoire d'un drame familial percuté par l'évolution de la société croate, de 1989 à 2017.
Un roman choral et intimiste qui déroule avec lenteur le craquèlement d'une famille amputée d'un membre à travers les transformations de la Croatie. Une atmosphère de fin d'époque qui mêle intelligemment le vacillement d'une famille à celui d'un pays.
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En fait c'est l'histoire de deux disparitions que nous raconte « L'eau rouge », celle de la jeune Silva qui est le coeur du roman mais aussi celle de la Yougoslavie qui n'est pas moins importante dans le destin des personnages. L'équilibre cosmique est rompu dans le petit port de Misto, qu'une enfant du pays disparaisse ou soit même assassinée n'est pas concevable, que le pays construit par Tito dans la lutte contre les nazis s'effondre en quelques mois et qu'il faille à nouveau se battre ne l'est pas plus.

Jurica Pavicic prend son temps pour explorer toutes les fissures causées par l'absence inexplicable de Silva, pour montrer comment des vies sont consumées par la crainte, l'angoisse, le remords et l'incompréhension.
La famille qui éclate au fil du temps entre renoncement, rancune ou recherche obsessionnelle, le policier hanté par cette enquête inaboutie, l'ancien fiancé qui se détruit, un présumé coupable qui espère se racheter dans la guerre, tous sont rongés et passent à côté de leur vie.

Si les personnages sont noyés dans leur peine, ils subissent les changements politiques et économiques. le régime communiste offrait à tous une molle pauvreté, un futur morose mais sans danger et c'est cet avenir que Silva voulait s'épargner par tous les moyens, quitte à transgresser les règles. Dans les années suivantes arrive un rattrapage capitaliste qui laisse usines et ouvriers sur le carreau, pour les habitants de Misto il ne reste qu'à vendre les terres pour que des villages de vacances fassent rêver les riches européens de la côte dalmate.

Mais au milieu de ce monde en transformation le policier devenu un vieil agent immobilier saura aller opiniâtrement au bout de l'enquête et découvrir la tragédie quasi antique qui se cache au bord de l'eau rouge
Il n'y a rien d'haletant dans « L'eau rouge », le lecteur sent le temps qui passe et les failles qui s'élargissent dans les coeurs. L'atmosphère devient de plus en plus crépusculaire en passant du petit village méditerranéen sous le soleil d'été aux zones industrielles couvertes d'entrepôts, des vieilles maisons de famille aux barres d'immeubles et à la fin ne restent que des vaincus mais qui auront tous lutté à leur manière.
Grand roman d'atmosphère dont l'issue ne libère pas le lecteur qui continue à espérer pour Silva.
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On peut pas dire que je croise souvent le chemin d'auteur croate mais j'ai beaucoup aimé la rencontre avec celui-ci. L'écriture est très cash et va droit au but.
L'énigme policière prend une place fluctuante et sert de support à l'évocation d'une tranche d'histoire de la Croatie et le mécanisme destructeur de la disparition d'un enfant dans une famille, tout éclate autour pour eux et autour d'eux. Les événements s'entrecroisent jusqu'à la résolution 30 ans après par l'inspecteur de police d'origine devenu agent immobilier( pas banal!) mais toujours attentif à cette disparition qui l'a marqué. Une belle trouvaille presentée par les éditions bordelaises Agullo.
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L'histoire commence en 1989, à Misto, petit port sur la côte dalmate, non loin de Split. Jakov et Vesna mènent une vie sans histoire avec leurs deux enfants, deux jumeaux Mate et Silva.

Lorsque Silva, 17 ans, leur annonce qu'elle sort, ils ne relèvent pas la tête, sans savoir qu'ils ne la reverront pas. Elle disparaît sans laisser de trace. C'est une fille joyeuse, remuante, elle se rendait à la fête des pêcheurs, comme tout le village.

Les policiers débarquent et commencent à enquêter. Qu'a-t'il pu se passer durant la soirée ? Certains l'ont vue, d'autres taisent ce qu'ils savent. Vesna est folle d'inquiétude et pousse Jakov et Mate à mener l'enquête de leur côté. Elle n'a pas confiance dans la police.

Chaque chapitre est consacré à un personnage, ce qui nous permet de suivre les pensées des uns et des autres, leur désespoir, leur loyauté envers Silva, même si ce que le père et le frère découvrent est loin de correspondre à l'idée qu'ils se faisaient de la jeune fille.

Je dirais que c'est plus un roman noir qu'un polar. Certes l'histoire se déploie autour de la disparition de Silva, mais il y a aussi les états d'âme de l'enquêteur, la stupéfaction de tous lorsque la guerre éclate, faisant exploser le pays qu'ils connaissaient.

Les années de guerre passent, façonnant un pays tout différent, la Croatie. Jakov et Mate reprennent leurs recherches, même si Mate s'est marié entre temps. le couple de Jakov et Vesna n'a pas résisté à cette quête sans fin. Il n'y a pas que la famille qui continue à s'interroger. L'enquêteur a été empêché de continuer ses investigations en 1989, il n'était pas dans la bonne ligne politique. Il reprend le dossier sous une autre casquette, n'étant plus policier.

J'ai été captivée par ce roman à l'intrigue solide, bien construit, avec comme toile de fond la guerre et ses destructions et lorsqu'elle est finie, les ravages dûs à l'argent facile. le petit port de pêche fait l'objet comme bien d'autres de projets touristiques mirifiques qui détruisent tout un mode de vie et un paysage, mais auxquels bien peu résistent.

J'ai apprécié également l'habileté avec laquelle l'auteur nous mène dans de fausses directions, révélant petit à petit des facettes de Silva et un dénouement loin de ce que l'on pouvait envisager au départ.

Un auteur que je relirai sans hésiter.
Lien : http://legoutdeslivres.haute..
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Nous sommes en 1989, dans une Yougoslavie où les tensions nationalistes vont amener une véritable guerre civile.
Silva, une lycéenne, disparait un soir après avoir été vue à la fête locale.
La vie de la famille va en être bouleversée pendant des décennies.
Le père va inlassablement déposer des affichettes dans tout le pays.
La mère va conserver la chambre telle quelle, comme un autel.
Et le frère ne va jamais abandonner ses recherches, allant jusqu'à mettre en péril sa vie de famille.
A noter le rôle essentiel (on le verra à la fin) du policier chargé de l'enquête.

C'est un roman choral qui, sous un aspect de thriller, prend son temps et déroule des tranches de vie sur fond de troubles politiques pendant trois décennies.
Malgré quelques longueurs, le roman réussit à restituer une atmosphère de fin d'époque en liant adroitement le bouleversement de la famille à celui du pays tout entier.
L'enquête devient peu à peu le fil conducteur d'une fresque sur les transformations de la Croatie.
L'auteur est croate et mérite que l'on suivre ses prochaines parutions.
Ce livre a eu le Prix du polar européen à Quai du polar.
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« Je ne souhaiterais cela à personne, pense Gorki »


En cet instant de septembre 1989, à Misto, près de Split, Vesna et Jakov sont encore heureux. Jakov est assis à table, plongé dans ses mots fléchès. Vesna s'emploie à essuyer les assiettes.

Et voilà l'instant où Silva, 17 ans, est près de la porte, dans sa robe à fleurs, ses baskets aux pieds. Elle se tient debout, comme si elle attendait qu'on l'applaudisse et prononce trois mots brefs. Elle dit « j'y vais ».

Personne ne lève la tête, personne ne répond au salut de Silva qui d'une voix joyeuse, leur signifie partir à la fête. Parce que, alors, personne ne pouvait savoir, personne ne pouvait imaginer.

Au petit matin, Silva n'est pas rentrée. Mate, son frère jumeau, se réveille avec la gueule de bois. Il est allé lui aussi à la fête des pêcheurs tout comme elle. Rien de mal n'a pu arriver. Personne n'est réellement inquiet.

Le tragique de l'attente démarre et notre imaginaire fait le reste. le film défile devant nous. Chaque seconde, chaque minute, les faits et gestes des parents sont décomposés devant nos yeux, l'expectative se fait de plus en plus poignante et l'angoisse monte !

On assiste à la déflagration qui va dynamiter jour après jour une famille concomitamment avec la Yougoslavie. C'est terrible, comment poursuivre des recherches quand tout s'écroule autour de vous et pourtant, Mate, va tenter de mener sa propre enquête malgré l'effondrement des structures autour de lui.

Roman policier très bien construit qui parfois se met en retrait au profit de l'histoire de ces trente dernières années, de 1989 à 2017, en ex Yougoslavie. C'est un polar à plusieurs niveaux de lecture qui sonde à la fois, la détresse des parents, leur réaction face à leur malheur, leur sentiment de culpabilité, les prises de conscience. Chacun dans ce village doit faire face à ce drame comme il doit faire face au drame qui se joue entre les peuples de l'ex Yougoslavie.

L'auteur nous donne à assister au désastre et à la reconstruction de la Croatie tout en consacrant un chapitre à chacun des intervenants qui ne peut sortir indemne d'une telle épreuve : la disparition d'un enfant. Mais Jakov et Vesna, tout comme Mate, connaissaient-ils réellement Silva ?

Le récit est doté d'une construction intelligente. Chaque chapitre est consacré à un acteur du drame. Chacun de ces passages analyse l'impact psychologique qu'occasionne la disparition de Silva sur chaque membre de la famille, des amis, des connaissances, sans oublier la police. L'auteur par le truchement de la destinée des uns et des autres, nous dresse un diagnostic de trente années qui ont vu la fin du règne de Tito, la guerre des Balkans, la crise économique, le libéralisme économique qui n'échappe pas à la corruption ni à l'urbanisation effrénée propice aux malversations, sans oublier ceux qui se sont achetés une virginité grâce à la guerre. Il y a un avant et un après même lorsque l'on est descendant des partisans de la première heure, l'élite rouge, au prénom évocateur comme Gorki.

Ce roman intimiste décortique minutieusement, avec lenteur, les états d'âme de toute la famille mais aussi de tous les intervenants. Un tel drame engendre, de manière sournoise, des incidences sur les comportements d'autant qu'il ne faut pas sous estimer les êtres humains. le roman évolue dans une ambiance nimbée de rancoeur, de jalousie, de frustration, de regret, de souffrance mais aussi d'amour et d'espoir.

C'est le deuxième roman policier que je lis et qui sort de l'ordinaire. Terra Alta de Javier Cercas comme celui-ci de Jurica Pavicic. A mes yeux, celui-ci souffre de quelques passages un peu longs, dus à la lenteur de la narration et à la minutie avec laquelle l'auteur analyse la psychologie et la destinée de chacun mais il est à découvrir sans hésitation, c'est un excellent roman.
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Dans ce polar noir se déroulant en Croatie dès 1989, Silva, une jeune fille de 17 ans disparaît durant la fête des pêcheurs. Nous suivons alors l'enquête au fil des années dans cette région au destin tourmenté.

Au départ, l'écriture de l'auteur me laissait perplexe : les répétitions m'empêchaient de me concentrer sur l'histoire. Mais finalement j'ai aimé la plume pleine de métaphores. Elle nous plonge sans problème dans l'atmosphère sombre, inquiétante et dramatique de l'histoire.

« On admire Ursula comme on admire un vase grec ou des vestiges archéologiques : comme quelque chose de beau qui s'est abîmé irrémédiablement il y a longtemps. »

Concernant l'histoire, l'enquête se déroule dans une Croatie en mutation. Découvrir l'enquête durant ces différents bouleversements (politiques, économiques, etc.) a été très intéressant, tout comme voir la vie des personnages évoluer en fonction du régime en place ou des guerres.

Au fil des pages, les destins des personnages se croisent, les pièces du puzzle s'assemblent et tout devient clair. Bref, je vous conseille fortement ce polar.
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vec la disparition de Silva, un soir de fête de village sur la côte dalmate, c'est tout un monde qui bascule. Celui de son frère jumeau, Mate, et de ses parents, qui n'auront de cesse de la chercher pendant presque 30 ans.
Cette disparition coïncide avec la chute du communisme en Yougoslavie, la guerre, le délitement, l'explosion du tourisme et de la spéculation immobilière. Derrière le drame intime et familial, les bouleversements de l'Histoire.
Un roman brillant où les points de vue se succèdent pour traverser les années; un parfait équilibre entre intrigue, psychologie et histoire.
Bref, une lecture passionnante !
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Journaliste, écrivain et scénariste, Jurica Pavicic est né et vit à Split, en Croatie, où il collectionne les récompenses littéraires depuis des années. L'Eau rouge, son premier roman traduit en français, a été plébiscité début juillet lors de l'édition de Quais du Polar, à Lyon.

En première approche, le synopsis de L'Eau rouge ressemble aux scénarios de nombreux téléfilms policiers proposés sur nos chaînes TV traditionnelles. Un crime ou une disparition mystérieuse survient dans une petite bourgade du territoire. La police judiciaire débarque, lance l'enquête, entend les proches et les témoins. Les villageois semblent abasourdis, mais ils taisent leurs secrets, leurs inimitiés, leurs rancoeurs. Difficile de démêler le faux du vrai et de briser la loi du silence…

L'auteur nous embarque à Misto, un petit village tranquille de la côte dalmate, sur la mer Adriatique, à une demi-heure de voiture de Split, grand port industriel et touristique, véritable capitale régionale. Les familles de Misto ont vécu dans la sérénité jusqu'à la disparition de Silva, une très jolie jeune fille de dix-sept ans, au lendemain d'une soirée festive, en 1989. Les heures, les jours ont passé, puis les mois, les années ; Silva n'a pas réapparu ; on n'a pas retrouvé son corps. Les conjectures vont bon train ; a-t-elle été accidentée, assassinée, enlevée ? A-t-elle quitté Misto de son plein gré pour voyager, pour aller vivre dans une grande ville ? Des ragots, des rumeurs ont circulé. A Split, où elle poursuivait ses études, Silva aurait fréquenté des personnes peu recommandables. Vrai ou faux ?

Comme on l'imagine, l'absence pèse terriblement sur la famille, qui reste persuadée que Silva est vivante, d'autant qu'un témoin affirme l'avoir vue prendre des billets d'autocar le jour de sa disparition. A l'affut de la moindre piste, Mate, frère jumeau de la jeune femme, sillonnera l'Europe pendant vingt-six ans dans l'espoir de la retrouver… Puis, un jour de 2015, un jour comme les autres…

Jusqu'à ce jour-là, le roman était suspendu à une incertitude presque insoutenable. Désormais, les questions qui se posent ne sont plus les mêmes. C'est quasiment un second roman qui commence, aux pages aussi captivantes que les précédentes. Les personnages restent les mêmes. Depuis le début du livre, chapitre après chapitre, l'auteur rapporte leurs témoignages. La narration est écrite au présent. Sa tonalité, grave, sobre, presque solennelle, évoque un enseignant explicitant un événement historique ou un chroniqueur télé présentant une émission criminelle.

L'auteur insère d'ailleurs son thriller dans un contexte d'actualités historiques. En 1989, lorsque Silva disparaît, Misto est un vieux bourg dalmate un peu endormi. Les institutions sont celles de la République Fédérative Socialiste de Yougoslavie, fondée au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Après la chute du Mur de Berlin, qui précipite l'effondrement des régimes communistes, la Croatie revendique son indépendance, en dépit de l'hostilité de l'Armée populaire yougoslave. S'en suivent plusieurs années de conflit armé, alternant cessez-le-feu et offensives militaires ponctuées de crimes de guerre dans chaque camp.

En 2015, La République de Croatie a depuis longtemps imposé sa constitution démocratique et son économie libérale. Les grands paradigmes nationaux ont basculé. Discrédités pour leur passé marxiste, les héros de la Résistance au nazisme, qui avaient marqué leur emprise sur les institutions yougoslaves, ont été déboulonnés au profit des vainqueurs de la guerre d'indépendance. Parmi eux, hélas, des délinquants ont su profiter des événements pour se blanchir et acquérir des galons dans la nouvelle élite croate. La corruption prolifère, encouragée par des investisseurs étrangers prêts à tout pour mettre en valeur le potentiel touristique du littoral.

L'auteur s'étend avec une lucidité amère sur les transformations subies par Misto, où les résidences secondaires se multiplient et où l'inauguration d'un vaste complexe hôtelier de grand luxe finit d'enfouir dans l'ombre l'aspect traditionnel du vieux bourg.

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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J'ai acheté ce livre au rayon policier, pensant acquérir un nouveau thriller. S'il n'était que ça, L'eau Rouge serait un policier assez médiocre avec des enquêteurs peu sympathiques et une intrigue qui avance lentement.
Mais l'eau rouge est beaucoup plus que cela. C'est un roman sur l'absence, la difficulté à communiquer dans l'épreuve, avec la révolution yougoslave et la naissance de la Croatie moderne en toile de fond.
Le roman a quelques longueurs, c'est vrai, mais cela vaut la peine de les surmonter.
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