Tout le monde voulait prendre la tête de cette affaire et garder les informations pour soi. Le cynisme commencerait à régner. Aucune agence ne coopérerait. Et finalement, l’enquête aboutirait à un échec. Adèle avait déjà vécu une configuration similaire, plusieurs fois par le passé. Plus il y avait d’agences travaillant sur une enquête et plus la probabilité qu’elle se résolve diminuait. Les gens ne parvenaient pas à être sur la même longueur d’onde.
Mais dans ce cas précis, des vies étaient en jeu. Comme celle de Ha Eun. D’autres vies pouvaient terminer dans un champ, dans le sang. Des cadavres pouvaient surgir.
Elle ne pouvait pas laisser faire. C’était son travail. C’était sa mission. Elle leva son téléphone d’une main tremblante. Elle ouvrit son répertoire et renversa la tête en arrière avec un soupir. Elle fit défiler ses contacts encore et encore.
Rien ni personne ne pouvaient lui venir en aide.
Et pourtant, pour une raison obscure, elle hésita en voyant le numéro de son père. Parfois elle changeait son nom (papa) d’autres fois, elle revenait au classique : Le Sergent. Aujourd’hui, c’était le Sergent.
Elle appuya sur son numéro pour lancer un appel vidéo. Pendant un
On aurait dit qu’ils n’avaient pas la moindre préoccupation. Et pourtant, elle trouvait cela étrange. Même s’ils avaient la conscience tranquille, la plupart des gens n’appréciaient pas la présence de la police. D’ailleurs, les personnes qui se distançaient de la société pour vivre en autarcie auraient sans doute encore moins d’intérêt à aider la police. Donc pourquoi étaient-ils si indifférents à sa présence ? Pourquoi se fichaient-ils que deux agents fouillent leur maison ?
Était-ce parce qu’ils n’avaient rien à cacher ? Ou parce qu’ils étaient certains que leur secret était protégé ?
Les personnes inexpérimentées ne parvenaient pas à entailler aussi profondément les tendons, les muscles et la chair d’un seul coup.
Un fermier ? Un boucher ? Ou… Adèle commença à avoir des frissons – peut-être un meurtrier accompli. Une autre étudiante internationale – une autre victime loin de sa famille et de ses amis. Ils devraient passer d’autres appels. Elle entendrait d’autres parents fondre en larmes. Encore plus d’expectatives pèseraient sur elle.
Elle était assez jolie et l’énergie qu’elle dégageait donnait parfois à Adèle l’impression d’être vieille. Beatrice Marshall suivait les règles, mais s’était révélée plus d’une fois une personne de confiance. Elle avait fait tout ce qui était en son pouvoir pour couvrir Adèle dans la station de ski, et avait même enfreint une règle ou deux pour elle. Adèle était heureuse de retrouver un visage familier.
Il avait un visage d’oiseau de proie avec ses sourcils épais et foncés ainsi que ses pommettes extrêmement marquées. Il coiffait habituellement ses cheveux en arrière avec de la brillantine, mais il était actuellement échevelé. Une mèche lui tombait au milieu du front. Lorsqu’il passa une main dans ses cheveux en tentant de dompter les mèches rebelles, la lumière de la lune illumina sa silhouette.