« Á la ligne » nous parle de l'usine, le travail à la chaine ou plutôt la ligne, ça parle aussi de poésie, celle d'
Apollinaire, d'
Aragon et de
Césaire. C'est un drôle de mélange c'est la vie, à l'usine et au dehors, la vie d'avant et celle du présent, pas très drôle, épuisante même, mais faut bien gagner des sous. Intérimaire, c'est précaire et les horaires changent tout le temps.
Tout tourne autour de l'usine : « Je suis l'usine, elle est moi elle est-elle et je suis moi » La conserverie de poisson tout d'abord : vider les caisses de chimères, cuire les crevettes et les bulots. Les horaires décalés, la fatigue, toujours et les dimanches qui passent trop vite. Puis les abattoirs, travail harassant, avec les bonbons Arlequin qu'on s'offre, cadeaux dérisoires qu'on suce et qui rythment le temps.
Il y a aussi les chansons, celles qu'on fredonne sur les lignes pour supporter la pénibilité, la répétition du travail : Les chansons populaires de Paradis, Cloclo, Bruel, Cabr
el, Sardou et d'autres.
Joseph Ponthus chante Barbara, Reggiani, Brel. Il cherche les couplets oubliés, ça occupe. Il écoute Bach chez lui.
L'écriture, c'est une gifle.
Ce sont des vers libres agencés en brefs chapitres, sans ponctuation et ça se lit en apnée. C'est un long récit, une sorte de chanson de geste de notre époque.
« J'écris comme je travaille
Á la chaine
Á la ligne »
J'ai aimé la lecture de ce récit, c'est percutant, ça gueule et c'est tendre aussi. Pourtant,
il y a ce passage qui m'a dérangé :
« …Je viens de comprendre pourquoi y a vachement plus de sang par terre dans mon nouveau frigo que dans les autres
— Hein
— Les onglets ont débarqués »
J'ai trouvé cette saillie sexiste et mal venue.