De Racine, ma pièce préférée. Je la retrouve chaque fois comme si c'était un film noir des années 40 -50 dont le cinéma américain avait le secret: d'un côté,
Athalie et sa clique, cruels, sans scrupule, qui tiennent par la terreur ceux qu'ils oppressent et qui n'osent se révolter.Dans leur rang, le traître, le transfuge, encore plus acharné que ses complices. En face un petit groupe bien décidé de passer à l'action...Ils ont un plan avec leur arme secrète: l'enfant, légitime héritier du trône. Merveilleuse création que ce rôle: la candeur de son âge, mais aussi la finesse, la subtilité qui lui permet de ne pas se trahir quand on l'interroge.
Bientôt le piège se referme sur
Athalie. Dès que la véritable identité de l'enfant est proclamée, le peuple relève la tête , et dans le combat final la juste cause triomphe .
J'aime aussi cette pièce car elle donne des Juifs une image valorisante alors que plusieurs de nos grands écrivains n'échappent pas à un antisémitisme virulent (qui n'est que le reflet des préjugés présents dans la société de leur époque): dans un poème,
Ronsard regrette que l'empereur Titus n'ait pas exterminé tous les Juifs de Palestine; Malherbe accuse les assassins de son fils d'être "fils de ces bourreaux" qui ont crucifié le Christ. Plus près de nous, Daudet, le charmant conteur qui tente de nous apitoyer sur le sort de la chèvre Blanquette dresse dans sa nouvelle "A Milianah," le portrait d'un Juif: sournois, intéressé, de mauvaise foi, pleurnichard...la totale.
La fameuse tirade du songe d'
Athalie à une telle puissance d'évocation qu'elle résiste même à la mise en musique par Henri Salvador!