Géopolitique de la Méditerranée

Le partenariat euroméditerranéen tente par tous les moyens de rapprocher le nord, le sud et l’est du bassin afin de réduire la fracture qui caractérise la région. Fondée sur l’ouverture commerciale des pays méditerranéens et le soutien financier européen, la coopération euroméditerranéenne s’inscrit dans la logique de développement régional. Certes le processus de Barcelone a mis en place les bases du partenariat euroméditerranéen qui a donné naissance, par la suite, à l’Union pour la Méditerranée ; toutefois les objectifs, à savoir bâtir un espace de paix, de sécurité et de prospérité partagée, n’ont pas pu être atteints.
Les résultats peu satisfaisants du partenariat euro-méditerranéen ont nourri les revendications des peuples de l’Afrique du Nord, ce qui a amorcé un mouvement révolutionnaire à ampleur différente selon les pays. Les partis islamistes sont les principaux bénéficiaires de cette révolution, leur triomphe exprime un besoin de changement, une aspiration à la démocratie et la recherche de la justice sociale et de la croissance économique durable. Le Printemps arabe place le monde arabe à la croisée des chemins et impose dans le cadre de la nouvelle géopolitique de la Méditerranée de soutenir le processus de transition démocratique et investir pour la liberté ce qui ne manquera pas de réduire la fracture entre le Nord et le Sud.

La région méditerranéenne, berceau de grandes civilisations et des trois religions monothéistes, est le témoin de plusieurs réalités : l’interdépendance socioéconomique entre pays développés et pays en développement, le poids majeur des prétextes religieux et de l’ethnicité dans les conflits, le jeu des alliances et la dynamique géostratégique des ressources naturelles… La Méditerranée fait également preuve de grandes marges de progrès et de croissance : le « Printemps arabe » au sud et la crise des dettes souveraines au nord en sont des illustrations.
Marqué par une hétérogénéité démographique, culturelle et économique, le bassin méditerranéen reste porteur à la fois d’un idéal commun et de la peur de l’autre. Les moments forts de la communauté méditerranéenne, aux contours variables selon les âges (Empires grec, romain, ottoman ou almohade par exemple), ont laissé des traces dans la science, l’urbanisation ou encore l’art de vivre.
Face au fossé qui s’est installé entre les différentes rives et à l’absence d’une dynamique géopolitique exclusive à la région, de nouvelles initiatives ont été lancées, à l’image de l’Union pour la Méditerranée. Son évolution plus qu’à demi-teinte ne devrait pas conduire à un scepticisme forcené. La convergence économique et la vitalité retrouvée des sociétés civiles pourraient donner corps à une communauté méditerranéenne des peuples.

L’historien Fernand Braudel se plaisait à décrire la Méditerranée comme « non pas une civilisation, mais des civilisations entassées les unes sur les autres ». Voyager en Méditerranée, c’est, écrivait-il, « trouver le monde romain au Liban, la préhistoire en Sardaigne, les villes grecques en Sicile, la présence arabe en Espagne, l’islam turc en Yougoslavie » . L’histoire méditerranéenne est riche d’une histoire partagée par des empires si différents : Empires grec, romain, ottoman, abbasside ou almohade. La Méditerranée est aussi le bassin de confrontations majeures (croisades, période coloniale, guerre froide…) et le territoire de nœuds et de ressources stratégiques.

Le ralliement opportuniste des puissances occidentales aux élites militaires et aux grandes familles au pouvoir n'était pas étranger à la permanence des équipes gouvernantes. Cette situation s'explique par deux raisons : d'une part, les puissances occidentales préféraient traiter avec des gouvernements autocratiques mais stables et fiables. D'autre part, l'alliance avec les pouvoirs en place leur permettait de maîtriser la manne pétrolière et d'en drainer la rente et les surplus vers leurs pays.