Benalla et gilets jaunes ...
Plus le livre est court, plus ce qui s'en dégage nous paraît pertinent. Les quatre micro-parties explorent des champs qui stimulent notre intellect. Les deux centrales, fidèles au projet de Rambaud de chroniquer ironiquement les soubresauts du pouvoir, dressent en détail le déroulement de l'affaire Benalla et évoquent le mouvement des gilets jaunes même s'il ne s'appesantit pas, nous laissant comprendre qu'il y a eu suffisamment de littérature à ce sujet rendant inutile toute tentative de sa part.
Non, le plus passionnant, le plus croustillant demeure ce qui fait office de prologue et d'épilogue à l'ouvrage. Ses relations juvéniles avec la veuve de Picabia et surtout sa rencontre avec
Marcel Duchamp où celui-ci lui confie son amusement de trouver des crétins pour acheter ses inepties conceptuelles.
Et puis il y a
Virginie Despentes et l'apostrophe qui lui est adressé. Rambaud sort son fleuret et engage l'escarmouche avec sa partenaire du jury Goncourt. Il dresse la liste de ses griefs, se désole avec combativité et touche à l'endroit du reproche. La conclusion de Rambaud n'est pas formulée mais on la devine : puisqu'on nous reproche d'être des hommes blancs, nous ne pouvons par réaction, qu'en exalter la fierté. Il instruit en quelque sorte le procès de tous ces délirants de l'intersectionnel qui soutiennent l'idée que l'on pourrait avoir côte à côte dans la même rue une mosquée et un bar gay où l'on cohabiterait sans heurt.
Pour conclure, une chronique du pouvoir de plus pour Rambaud qu'il agrémente de détails plus personnels, un récit autobiographique et une harangue où il n'hésite pas à croiser le fer.
La mince épaisseur du volume, même sans y expurger ces rajouts, est peut-être le signe d'un essoufflement du projet initial, qu'il finira consciencieux le règne de Macron mais arrêtera définitivement sa scrutation républicaine après son départ.
Samuel d'Halescourt