Défi solidaire 2024
"Quelle est la catastrophe qui n'a pas son côté humoristique ?" La catastrophe en question, c'est
un homme, David Kepesh (dont la suite des aventures est narrée dans un cycle) professeur de littérature à l'université, qui se transforme inopinément en sein. Au secours, un sein qui parle ! à l'hôpital, il traverse plusieurs phases, dont une où il est persuadé d'être "simplement" fou. C'est donc l'histoire d'un sein qui parle (c'est aussi le narrateur) et qui est certain d'être fou, et le docteur cherche à le convaincre qu'il est sain d'esprit : on apprécie l'ironie.
Cet étrange oeuvre évoque bien sûr la Métamorphose de Kafka (où le héros Gregor, qui n'est pas le narrateur, se transforme en insecte : je l'ai lu à quinze ans). Cela dit, sa clef littéraire est dévoilée plus tard à la toute fin, un poème de Maria
Rilke, que je ne connais que de nom, et encore c'est parce qu'une bibliothèque parisienne le porte . Cette farce tragique est elle, comme elle serait chez Buzzati dont je lis le K pour le défi solidaire, une exercice/jeu littéraire ? Ce n'est pas vraiment mon impression. le roman sortant de l'ordinaire, il m'est difficile de l'évaluer, même si j'en reconnais l'aspect comique et obscène (mentionnés sur le quatrième de couverture). L'écriture de Roth est en effet pleine d'humour et j'ai pris plaisir à la lire.
Il est question d'un sein masculin et plein de libido et de désir. Etrangement, je pense qu'on en "apprend" davantage sur la psyché masculine que féminine (à supposer qu'il y ait deux psychés distinctes : je pense que non, mais c'est un autre débat). Et puisqu'on parle de rôles de genre : certains passages m'ont paru un peu sexistes, notamment lorsqu'il est question de l'infirmière, "vieille" (cinquante-six ans), et "grosse". Certes, l'oeuvre date de 1972.
La fin du livre est belle le rebondissement est que le narrateur s'adresse en fait à un auditoire dans le cadre d'une conférence : cet élément de contexte arrive d'un coup et l'effet de surprise est bien là, pour moi en tout cas . le livre a vocation à être bref, et il l'est. le monologue, sans me bouleverser, m'a bien plu; modulo le passage sexiste. A vrai dire, j'avais commencé "
j'ai épousé un communiste", du même auteur et avais abandonné très vite, et j'ai rencontré cette fine tranche de livre en bibli, inopinément, nez à nez.
Je conclurais par le début du livre : un incipit très bien trouvé, qui à partir d'une magnifique rose, d'une rose horrible et d'une rose ordinaire, fait comprendre que tout peut être extraordinaire, mais que tout de même il y a des choses plus extraordinaires que d'autres. Oui oui, monsieur
le sein qui parle.