AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Les pierres songent à nous (25)

Qu'il me soit permis de revenir à ma propre expérience qui fut celle de beaucoup d'autres. J'étais un provincial. Je ne savais pas comment m'y prendre pour apprivoiser une ville aussi redoutable et enchevêtrée que Paris. Je visitai quelques musées et monuments réputés. Je m'aperçus que les parisiens les longeaient, qu'ils en usaient comme des repères familiers mais qu'ils ne s'y attardaient pas. J'entrepris de longues dérives et je fus parfois guidé par le génie des lieux. Mais l'inspiration vint souvent à me manquer. Je dressai donc une carte sentimentale de quelques quartiers avec lesquels je me sentais en connivence. (p. 17)
Commenter  J’apprécie          220
Le Jardin public apparaît comme une pause au sens musical du terme : non point seulement un moment de repos au cours d'une déambulation fatigante mais comme un silence dans une partition. (...)
Le jardin constitue une échancrure dans un ciel et une terre dérobés. Quand vous estompez la présence (...) de l'un de ces jardins majeurs, c'est tout un pan de la cité qui s'assombrit et perd de son sens (p. 35)
Commenter  J’apprécie          180
Un domicile n'est pas, ne devrait pas être coupé d'une ville ou du moins d'un dehors peuplé d'autres existences. Les enfants, en revenant de classe, rapportent quelque chose de l'école, de la rue. La ménagère, tout en faisant ses courses, arpente son quartier, retrouve ses repères habituels et dit, en quelque sorte, sa messe quotidienne. (p. 13)
Commenter  J’apprécie          141
La rue doit constituer un lieu d'accueil et de confiance réciproque. Disons qu'il ne faut pas, pour autant, lui ôter tout à fait les qualités, voir la rugosité d'un dehors. Certes, il existe des placettes qui respirent l'intimité et il faut respecter leur douceur provinciale. Mais le vent, la pluie, le froid, en certaines saisons, affirment "leur caractère" ( comme on pourrait le dire d'un être humain). Lutter contre le vent, subir une averse, se protéger d'une chaleur aveuglante constituent des événements qui modulent une temporalité trop uniforme et le dedans, quel qu'il soit, apparaît alors comme une récompense. (p. 39)
Commenter  J’apprécie          130
Il faut aménager la rue, la rendre agréable : ainsi l'homme quelconque a le sentiment que l'on a pensé à lui; la rendre habitable : alors les hommes, au lieu de se replier sur eux-mêmes, dans leurs domiciles, vivent pendant quelques instants ensemble et s'affirment concitoyens du même territoire. On voit la portée sociale, éthique d'un tel effort d'aménagement qui ne se réduit pas à des considérations d'ordre esthétique ou fonctionnel.
( p.40)
Commenter  J’apprécie          120
Les portes du dehors

Imaginairement, naturellement, une porte permet de pénétrer dans un dedans, chaud, accueillant, protégé et quand " on prend la porte ", cela ne va pas sans fracas. A plus forte raison, la ville a constitué pour les hommes ce lieu vers lequel ils dirigeaient leurs pas pour trouver refuge ou pour augmenter leur dignité sociale- à tel point que l'on n'entrait pas dans une ville d'un seul mouvement mais par une somme de défilés étroits, de " stations ", de goulots, de tremplins successifs.Ce fût le cas de jeunes gens ambitieux du XIXe siècle qui allaient de leur campagne ( de leur manoir délabré ou de leur ferme) à une sous-préfecture puis à une ville importante de Province et enfin à la Capitale.

( p.95)
Commenter  J’apprécie          110
Rencontres urbaines

A l'inverse, les routards, les marginaux ont à repérer des lieux d'accueil dans une ville parfois inconnue : des gares, certains carrefours, certains jardins, certains trottoirs. " Certains" , le mot me paraît important. Car il sous-entend que ces gens- là doivent disposer d'un sens réel de la ville pour discerner des lieux susceptibles de les accueillir. Là, ils s'interpellent, ils évoquent leurs voyages, leurs exploits.Une bouteille de vin en plastique passe de main en main.Toutes ces conduites relèvent à l'évidence, de l'échange.
( p.75)
Commenter  J’apprécie          90
Le jardin des humbles

Les plus actifs, s'ils disposent d'un " jardin ouvrier" le préfèrent au jardin public.N'étant plus soumis au contrôle d'un maître ou d'un contremaître, ils prennent tout leur temps, une valeur précieuse qui leur manqua pendant tant d'années. Ils contemplent encore plus qu'ils ne tourmentent leur terrain modeste.A l'instant de choisir leurs outils du jour, d'endosser de vieux vêtements, de se couvrir d'un chapeau de paille par forte chaleur, de considérer la tâche qu'ils entreprendront.(...)
Ainsi ils multiplient à loisir les pauses, chacun de leurs gestes prend l'allure d'un rite qu'ils officient. Tandis que leurs mains s'affairent, leurs regards rêvent. Ce jardin caressé amoureusement, inspecté minutieusement, ils l'emportent avec eux à l' instant du crépuscule et ils le perpétuent dans la nuit de leurs songes.
( p.69)
Commenter  J’apprécie          80
Les tumultes de la nature, du chaos au paysage

Il n'empêche que quelque chose vient d'ailleurs que des hommes.Dans un Jardin public, j'entends le gravier crisser : cette perception fugace déchire délicatement mon ouïe et m'enseigne que je suis pas seul au monde et que j'ai de multiples façons de m'ouvrir à lui dans le recueillement, dans l'assourdissement- tout comme il existe de multiples manières de le parcourir, de cheminer en lui, sur lui.Je songe à une autre expérience ordinaire.Je contemple un arbre centenaire.Je prends conscience de la lenteur de la croissance d'un tel arbre, par rapport à laquelle le rythme de mon existence paraît d'une fébrilité presque maladive.Comment accorder cette métrique à la mienne?
Si à la suite d'un effort de sympathie, je m'y associe, j'échappe miraculeusement à ma condition .
Commenter  J’apprécie          60
Les tumultes de la nature, du chaos au paysage

(...) Il n'empêche que quelque chose vient d'ailleurs que des hommes. Dans un jardin public, j'entends le gravier crisser: cette perception fugace déchire délicatement mon ouïe et m'enseigne que je ne suis pas seul au monde et que j'ai de multiples façons de m'ouvrir à lui dans le recueillement, dans l'assourdissement- tout comme il existe de multiples manières de le parcourir, de cheminer en lui, sur lui.Je songe à une autre expérience ordinaire.Je contemple un arbre centenaire.Je prends conscience de la lenteur de la croissance d'un tel arbre, par rapport à laquelle le rythme de mon existence paraît d'une fébrilité presque maladive. Comment accorder cette métrique à la mienne ? Si à la suite d'un effort de sympathie, je m'y associe, j'échappe miraculeusement à ma condition.
( p.79)
Commenter  J’apprécie          60






    Lecteurs (13) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (5 - essais )

    Roland Barthes : "Fragments d'un discours **** "

    amoureux
    positiviste
    philosophique

    20 questions
    853 lecteurs ont répondu
    Thèmes : essai , essai de société , essai philosophique , essai documentCréer un quiz sur ce livre

    {* *}