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Citations sur Les Insolents (100)

Mais si elle est vraiment honnête, quand elle ne réfléchit pas au fait qu’elle n’est pas,en train de travailler, elle est heureuse, ici. Même si elle n’a plus l’amitié de Jean. Même si elle n’a plus les dîners chez Jacques, les fins de nuit chez Margot, les coups,d’un soir trouvés au coin d’une rue. Même si elle sait que dans cette vie, elle ne pourra jamais s’offrir ce qu’elle veut . Ni tableau de Joan Mitchell, ni sculpture de Giacometti, ni maison dessinée par un disciple de Mies van der Roche. Elle est heureuse ici. De la musique, des livres, quelques objets et quelques meubles, elle n’a pas besoin de beaucoup plus. Elle ne sait pas ce que ça dit d’elle, mais ça lui ressemble, ça l’a fait se sentir chez elle partout où elle s’installe, et elle pense comme Jacques. Bientôt, vivre dans l’instant et se trouver là où on a envie avec qui on a envie sera tout ce qui restera. ( p166, 167 )
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Avant de pouvoir s’y mettre, il faut simplement qu’elle trouve comment créer quelque chose de réellement nouveau. Elle voudrait pouvoir oublier tout ce qu’elle connaît, ce qu’elle a écouté, ce qu’elle sait faire, simplement se mettre au piano et voir ce qui sort. Pas comme un enfant qu’on collerait devant les touche, mais presque. Créer dans une ville, c’est le faire en résonance avec ce qu’on voit, ce qu’on entend, ce qu’on lit. Créer seul au milieu de nulle part, c’est aller chercher ce qui se passe en dedans. Elle ne veut plus être en résonance avec l’extérieur, elle veut savoir ce qu’elle a l’intérieur. Est-ce que c’est parce qu’elle ne sait pas encore fonctionner comme ça qu’elle n’arrive pas à commencer. Est-ce que son ego est moribond, ici, sans défis autour d’elle. Est-ce qu’elle ne sait composer que dans l’intensité. Travailler jusqu’à l’épuisement, n’aller dormir que quand elle tombe de fatigue, ne s’interrompre pour manger que quand elle se sent affamé. Rien ne déclenche de sentiment d’urgence, ici. Tout appelle à l’inaction, à la contemplation. Il manque la pression de la deadline qui transforme le tâtonnement désespéré en diamant brut. Le perfectionnisme qui l’a rend folle, qui reste porteur tant qu’elle travaille et qui devient paralysant si elle bascule dans la.procrastination. L’urgence et la concentration, quand les heures se transforment en jours sans qu’elle les voie passer et que de la magie jaillissent des épiphanies. ( page 165, 166 )
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Elle sait que sa profession va disparaître. La vidéo va remplacer le vrai cinéma et ce ne sera plus de l’art, donc on n’aura plus recours à des artistes pour en composer les BO. Plus personne ne payera plus pour de l’art, il sera gratuit ou on s’en passera. Ce sera un hobby, rien de plus et les BO ne seront plus qu’un fond sonore exécuté à la chaîne. C’est déjà le cas sur Netflix, aucun des films ou des séries n’a jamais de morceaux renversants, tout au plus un générique d’intro qu’on finit par reconnaître quand on l’entend. Des réalisateurs qui savent faire du boulot bien fait, il y en a des tas, mais des types qui ont un univers et un style à part, il n’y en a pas des masses, et tôt le monde veut travailler avec ces quelques-là, et les places sont trop rares pour que la,totalité de ceux qui sont vraiment doués puissent le faire. Elle sait qu’elle a de la chance. La sortie du Marvel qu’elle a fait est repoussée à cause du Covid et ça reporte aussi le dernier paiement, mais elle a encore de quoi vivre tranquillement, alors que pour beaucoup d’autres musiciens, plasticiens ou dramaturges de son entourage, tout se retrouve sur pause et c’est la merde. Et tout le monde est d’accord, il n’y a plus que la frustration d’essayer de faire de l’art dans une époque qui s’en fout. ( page 164, 165)
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Les rares fois,où elle jette un œil à des annonces sur Tinder ou sur OkCupid, si l’étiquette sexuelle qui est cochée fait partie de ces trucs trop compliqués pour elle, elle zappe parce que la,personne lui prendrait sûrement la tête de ne pas avoir besoin d’en avoir une. De toute façon, à partir de quarante ou quarante-cinq ans, ça n’existe plus trop de tomber sur des gens pour lesquels on va avoir du désir tout en partageant des goûts, des objectifs et une même façon de voir la vie. C’est comme quand on cherche un appart, on se dit qu’on veut à la fois la baignoire, la terrasse et le chauffage collectif, et en cours de route on est obligé de renoncer à certains critères, et elle ne comprend pas le compromis en amour, alors elle préfère être seule. ( page 143 )
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Quand ils avaient eu une phase mannequins en même temps, et que Jacques racontait que les types.qu’il ramenait se plaignaient tous de leur visage, qu’ils se sentaient comme des aliénas qu’on ne pouvait jamais s’empêcher de fixer quand ils arrivaient quelque part, alors qu’eux, en poussant la porte d’un restau, ils se voyaient juste comme les jeunes peintres ou poètes aspirants qu’ils étaient, et être des objets de désir permanent leur donnait envie de se défigurer à l’acide. Alex entendait plus ou moins la même chose venant des filles avec qui elle traînait, et Jacques et elle levaient les yeux au ciel tellement c’était grotesque de chercher à devenir mannequin si on ne veut pas se faire remarquer. Et quand elle et Jacques parlaient de sexe, ils tombaient d’accord qu’il n’y avait rien de plus qu’avec des gens simplement mignons, à moins d’être du genre à se regarder être avec l’autre pour mémoriser des pauses et se les repasser plus tard, et que si la personne n’avsit pas de charme, rien ne faisait en tomber amoureux. ( p 140, 141 )
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Et puis, petit à petit, il avait commencé à se relever un peu de tout ça. Il s’était réinscrit à son école pour se remettre à niveau. Il suivait les cours sur internet et s’était remis à voir ses amis. Et tant qu’il était sur son ordinateur à travailler, tout allait bien, mais dès qu’il sortait, il ne supportait rien. Quand il était dans une pièce avec d’autres gens, il ne voulait pas être le centre de l’attention. Il ne voulait pas qu’on le regarde avec compassion, qu’on lui parle avec précaution. Il ne voulait pas être une,personne qui avait subi ça. Il voulait se réinventer , devenir quelqu’un qu’on ne puisse jamais imaginer en victime. Son moteur intérieur avait changé. Il s’était mis à devenir imprévisible, ironique, cynique, et pour finir complètement nihiliste. Il défiait les gens en permanence, les regardait droit dans les yeux quand ils lui parlaient, attendait les remarques ou les conseils de chacun pour ensuite,détruire leurs croyances. Il leur assénait que la vie n’avait pas de sens réel, pas de logique, pas de rapport de cause à effet, que ça ne servait à rien de tout faire bien, de travailler dur, d’être poli ou gentil, que tout était arbitraire, absurde et gratuit. Plus il rencontrait de gens, plus il attendait qu’ils le déçoivent et ça ne ratait pas. Et avec les filles, il était odieux, il ne s’attachait plus à aucune, débarquait juste pour les baiser, puis, une fois qu’il avait éjaculé, il devenait indifférent et repartait en se sentant vide, inhabité. ( p 127, 128 )
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En fait il ne raconterait rien sur ces deux mois à l’hôpital. Ni la nourriture par perfusion en attendant que sa mâchoire se remette et que son palais cicatrise, ni la morphine qui lui donnait des nausées, ni les anxiolytiques dont on le gavait qui -é faisaient dormir tout le temps ou compter sans jamais vraiment se retrouver dans un réel état d’éveil. Ni la télé éteinte qu’il fixait par moments en songeant que c’était inutile de demander qu’on l’allume vu qu’il n’y aurait personne pour changer les chaînes. Ni la tête de sa mère, la première fois qu’elle était venue, devant son visage tuméfié comme les contusions violacées qu’il voyait sur ses bras. Il ne lui raconterait pas ça parce que ce serait trop glauque à écouter. Mais il lui décrirait les flics, ça oui, il dirait non mais imagine, les mecs mettent des semaines à venir te voir et quand ils se pointent enfin, ils veulent pas te croire que c’est arrivé de manière complètement gratuité, sans déclencheur ni rien. Ils veulent absolument que tu leur donne des signes distinctifs, comme s’ils ne pouvaient rechercher que les gens qui ont des cicatrices ou des tatouages en travers du front. Et c’est que dans les films qu’ils s’emmerdent à visionner les caméras du métro pour voir si le type que t’as décrit est passé dans la station avant toi.
Il ne lui raconterait pas non plus l’infection urinaire qui lui avait au moins permis d’échapper à la sonde et aux couches qu’on lui avait mises les premiers jours, et l’infirmière qui avait essayé de le faire rire en disant que c’était comme pour les astronautes. Il ne lui confierait pas combien il était gêné quand il devait lui demander de venir glisser la bassine sous lui. Ni les moments où elle débarquait avec son chariot pour le laver. ( p 120, 121 )
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En fait non, il ne lui raconterait pas ces détails-là. Il dirait juste qu’il s’était fait tabasser salement. Il ne dirait pas non plus qu’il était resté à terre pendant des heures, avant qu’une gardienne multi-immeubles le découvre en venant faire sa tournée de ménage au lever du jour. Il ne dirait pas non plus qu’elle était restée assise par terre à côté de lui à lui tenir la main pendant qu’elle appelait les secours avec son téléphone à elle, et qu’on lui posait des questions qu’elle répétait à Léo, mais comme il ne pouvait pas répondre, il serrait ses doigts dans les siens aussi fort qu’il pouvait pour montrer qu’il était toujours Ivan et qu’il fallait qu’il soit secouru. Il zapperait peut-être aussi le réveil à l’hôpital, complètement à l’horizontale sur le dos, intubé, avec un collier servical, le poignet droit plâtré, l’épaule gauche prise dans un truc en métal qui maintenait son bras à distance du reste de son corps, et deux sangles en travers du torse qui tenaient une grande plaque sous son dos. Allongé là et réveillé, mais sans bouton d’appel pour qu’une infirmière vienne, à revoir des images de l’agression mais aucune de l’arrivée du SAMU, du transport à l’hôpital, du passage en soins intensifs ou des opérations. Sa mère n’avait même pas encore été prévenue depuis quatre jours qu’il était là, il n’avait pas ses papiers sur lui, il avait fallu attendre qu’il se réveille et qu’on le désintube pour qu’il puisse donner le numéro.
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Et donc le boulot que je devais,commencer était dingue. Je devais rejoindre un projet en Suisse, une équipe qui travaillait à créer le premier cerveau synthétique avec l’aide de l’intelligence artificielle. Une équipe internationale d’informaticiens, de mathématiciens, de biologistes, de physiciens. Je travaille sur l’intelligence artificielle, c’est ça que je fais, enfin que je faisais. Donc il est une heure du matin et je rentre à pied. Je suis pas inquiet de traverser un quartier que je ne connais pas, je regarde seulement mon iPhone pour me diriger. Et puis devant une impasse, je vois un type sous un lampadaire qui a l’air de le fixer. Je bosse dans un fast-food, donc j’ai l’habitude que des gens veuillent sans arrêt quelque chose et qu’ils me fixent pour que je vienne vers eux. Donc sans m’en rendre compte , par réflexe, je vais vers le type pour voir ce qu’il veut. Et là j’ai à peine le temps d’enlever mes écouteurs avant de prendre le premier coup. Dans le plexus pour me bloquer la respiration, et le deuxième dans la trachée pour m’empêcher de crier. Même si j’avais pu retrouver un peu de souffle pendant que le mec m’a traîné vers le fond de l’impasse, ça ne m’aurait pas servi longtemps, il m’a attrapé par la nuque pour me précipiter la tête dans le mur. Je suis tombé et j’étais sonné mais à ce stade je pouvais encore respirer. (…) Tant que je bougeais pas, il se contentait de me regarder, et chaque fois que je le redressais, il balançait un autre coup. Des coups précis, rapides, comme quelqu’un qui sait à quel endroit frapper pour obtenir quel dégât. J’ai eu dix-sept fractures au total. La mâchoire, le poignet, l’épaule, le bassin, une vertèbre fissurée, des côtes fêlées de chaque côté. Jusqu’à ce que j’arrive plus du tout à le redresser. Et puis ça s’est arrêté, il est parti. Je pouvais ni bouger, ni appeler à l’aide parce que je m’étouffais à cause du sang qui me coulait dans la gorge. J’avais froid, des douleurs qui m’élançaient de partout et chaque respiration me prenait le peu de force qui me restait. Je savais pas qu’elle heure il était, mon téléphone avait dû tomber quelque part. Tout ce que j’arrivais à faire, c’était de garder les yeux rivés sur un papier de bonbon dans une plate-bande. J’étais persuadé que si je perdais connaissance, je me réveillerais pas. Plus tard, on m’a dit que si j’avais saigné autant de la bouche, c’était parce que mes incisives supérieurs s’étaient plantes dans mon palais. ( page 118, 119 )
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Il ne peut pas rester comme ça, à Paris une semaine sur deux, enfermé à vivre comme un enfant sauvage qui ne fait rien d’autre que regarder la,télé, manger des trucs à emporter et s’en foutre d’avoir un sommeil complètement aléatoire. Dès qu’il se retrouve en Bretagne, il se remet à se comporter normalement. Qu’est-ce que Jeff a dit, déjà ? Que même si la mairie n’a déplacé que les familles avec les enfants, au moins les habitants du quartier sont soulagés parce qu’une fois qu’on ne voit plus ces familles, on peut oublier qu’elles existent? C’est ça qu’il lui faut, ne plus voir certaines choses pour oublier qu’elles existent. Mais ce n’est pas ça qui l’a fait planter Jeff au bout d’une demi-heure. C’est d’entendre le mot « fracasser ». Un épicier s’est fait fracasser le crâne. Il sait ce que ça veut dire, c’est ce qu’on lui a fait. ( p 115 )
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