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Depuis qu'Elif Shafak écrit directement en anglais, ses lecteurs fidèles ont noté un léger changement de style, peut-être également lié aux traductions, mais rien de rédhibitoire ni susceptible de diminuer l'intérêt pour une romancière aujourd'hui considérée comme persona non grata en Turquie. Sa nostalgie d'Istanbul, de sa cuisine de rue par exemple, est palpable dans 10 minutes et 38 secondes dans ce monde étrange, récit éclaté de la vie et la mort d'une fille d'Anatolie devenue prostituée sur les rives du Bosphore. Ombres et lumière sur la ville ottomane, le livre est avant tout un hommage à tous les déclassés de cette ville "liquide et féminine", ces parias qui finissent dans le cimetière des abandonnés, sans pierre tombale à leur nom. Roman épique et un brin chaotique, l'ouvrage commence par ces 10 minutes et 38 secondes pendant lesquelles son héroïne, assassinée, se remémore des instants de son existence à travers des souvenirs olfactifs, de l'enfance à sa vie de femme. le livre se termine par des épisodes tragico-comiques autour de la tentative de ses meilleurs amis pour lui offrir une sépulture décente. Comme toujours, en bonne alchimiste littéraire, Elif Shafak mélange les genres, à partir du réalisme magique, en passant par le burlesque et le drame. Sans oublier un aspect politique très fort, puisqu'en Turquie tout écrit l'est nécessairement, même si le roman évoque des révoltes du passé, dans les années 70, principalement. Les événements liberticides de l'époque, l'intolérance des autorités et la répression systématique de l'opposition , font évidemment écho à ce qu'il se passe aujourd'hui dans le pays de coeur d'Elif Shafak.
Lien : https://cin-phile-m-----tait..
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Tequila Leila est une prostituée retrouvée morte un matin dans une benne à ordure. Pendant que son corps refroidit, son esprit s'évade et revient, minute après minute, sur les souvenirs de moments de sa vie, sans ordre ni chronologie, souvenirs d'enfance, de famille, d'amitiés, de goûts, d'odeurs. le compte à rebours des 10 minutes et 38 secondes s'écoule peu à peu. En revenant sur son histoire, nous lisons surtout celle d'Istanbul et de la Turquie depuis la fin des années 1950. La profession de Leila n'est qu'anecdotique. L'essentiel de sa vie repose sur ses cinq amis, tous très différents mais qui sont unis par elle et pour elle. le roman emprunte des chemins détournés pour nous raconter l'histoire d'une femme, de ses réussites et de ses échecs, de son destin à la fois banal, trivial, et hors normes. Même en connaissant l'issue, on cherche à comprendre la vie de Leila et on la suit dans les ruelles de la ville et les méandres de sa vie. J'ai apprécié l'absence de parti-pris narratif, l'originalité qui ne va pourtant pas de soi car la lecture n'est pas du tout ce à quoi on pourrait s'attendre et c'est agréable de s'y laisser surprendre.
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Le corps d'une femme est découvert dans une benne à ordures; le cadavre est celui de Leïla Tequila, prostituée, brutalement assassinée dans une rue d'Istanbul.
10 minutes et 38 secondes, c'est le temps pendant lequel son esprit va continuer à fonctionner après sa mortbiologique, le temps pour elle de partager quelques souvenirs émouvants et nous raconter son histoire de 1947 à 1990: l'histoire de Leila, jeune femme d'une bonne famille originaire d'Anatolie, devenue prostituée en quittant les siens et arrivant sur les rives du Bosphore.
Dans ce 11ème roman, Elif Shafak, réussit brillamment à nous faire partager le parcours de Leila, sa vie et sa mort tragique, comme dans un conte.
En toile de fond, elle évoque l'histoire de sa Turquie d'origine (l'inauguration en 1973 du pont sur le Bosphore, reliant l'Europe au continent asiatique, ou aussi la répression sanglante d'une manifestation de 1977...).
Elle traite également de thèmes variés qui lui tiennent à coeur (la place de la femme dans la société turque, la place de la famille et des amis, l'égalité entre tous, l'homosexualité, la libération sexuelle dans les années 70, la transformation du pays, la montée de l'islam et la fragilité de la laïcité ...).
On sent que l'auteure aime Istanbul, cette ville incroyable, qu'elle arrive à rendre si réelle, vivante et attachante. La mégalopole ottomane est ici, un personnage à part entière.
A travers les personnages de Leila et ses cinq amis, tels des exclus de la société stambouliote, Shafak nous immerge dans cette cité tentaculaire, au carrefour de l'Orient et l'Occident.
On s'attache à ces personnages, "indésirables", pourtant bien "vivants"grâce à leur magnifique amitié pour la défunte Leila.
J'ai apprécié ce roman, profondément humain, cruel et tendre à la fois.
Une histoire d'amour et d'amitiés, dont on ne sort pas indemne.
Une fois de plus, Shafak réussit à peindre un beau portrait de ces laissés pour compte, relégués aux marges de la société stambouliote.
Pour ne rien gâcher, une magnifique couverture, clin d'oeil aux faïences d'Iznik (pour les connaisseurs).
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Du feel-good pas trop mal foutu, l'histoire d'une prostituée retrouvée morte dans une benne à ordures d'Istanbul.

L'occasion d'approcher la condition de la femme en Turquie et de donner la voix à celles (et ceux aussi) que l'on entend jamais.

Un livre gentil et bienveillant aux nombreuses ellipses sur les sujets trop glauques, et pour autant sans complaisance tant les non dits sont clairs (un exercice d'équilibrisme assez réussi)
Lien : https://www.noid.ch/10-minut..
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Un livre difficile à noter pour moi car si la première partie "l'esprit" m'a emballée, le seconde "le corps" m'a terriblement ennuyée. En fait, c'est comme si ces 2 parties avaient été écrites par des auteures différentes.

L'esprit: c'est l'esprit de notre héroïne, Leila, retrouvée morte dans une benne à ordures. L'esprit de Leila continue de fonctionner précisément 10 minutes et 38 secondes suite à son décès et nous emmène, de sa naissance à sa mort, au fil de ses souvenirs. J'ai beaucoup aimé ces flash back, très bien amenés. Les liens avec les odeurs. Son enfance auprès de cette famille aux nombreux secrets, aux nombreux abus. J'ai moins aimé les 5 chapitres de 2-3 pages dédiés aux 5 amis de Leila (un peu courts pour s'y attacher, un peu longs pour les ignorer).

Le corps
La seconde partie est complétement différente. Il s'agit d'une sorte de rocambolesque périple mené par ses 5 amis. Je me suis vraiment ennuyée dans cette partie, en fait, je ne vois même pas ce qu'elle est venue faire là, je trouve qu'elle gâche cette très belle première partie. Idem pour l'écriture, que j'ai beaucoup appréciée dans la première partie, mais alors dans la seconde... les descriptions des actions de chacun des 5 amis à chaque moment de leur périple (l'ami no 1 qui conduit, le no 2 qui s'assied à l'arrière, le no 3 qui perd sa pioche, le no 4 qui picole, le no 5 qui pleure... et rebelotte pour l'action suivante), pas compris du tout.

Quoi qu'il en soit, je retenterai volontiers une lecture de cette auteure, Elif Shafak, car j'ai trouvé l'idée de ce roman excellente, ainsi que son écriture dans la première partie.

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Deuxième lecture pour moi de cette auteure et deuxième réussite. Elif Shafak s'intéresse à des thèmes qui me tiennent à coeur : destins de femme, sort des laissés-pour-compte, aperçu de la grande histoire à travers celle de ses personnages.

Ici, elle nous retrace la vie de Leila qui est découverte assassinée au début du roman. J'ai été très touchée par Leila qui a connu des événements profondément injustes, et par le parcours qui a été le sien. Cette jeune fille devenue prostituée et reniée par sa famille va se forger sa propre famille avec cinq amis de coeur. Elle a une force de caractère incroyable et une gentillesse immense, toujours prête à aider son prochain, malgré les vicissitudes de la vie.

Elif Shafak rend ici un bel hommage à l'amitié, celle sans laquelle nous ne sommes rien.

Mais l'auteure dénonce également dans son roman : elle dénonce la structure de certaines familles (plusieurs femmes), les secrets profondément enfouis, le désir de garder une certaine harmonie au sein de la famille ce qui signifie ici cacher un fait grave. J'ai été bouleversée par Leila qui a eu le courage de dire à ses parents ce qui lui est arrivé mais propos dont on n'a pas tenu compte.
Elif Shafak dénonce également le massacre de 1977, les mauvais traitements subis par les prostitués et les travestis, la religion poussée à l'extrême.

Les personnages haut en couleurs étaient très attachants et c'est finalement un réconfort de se dire que Leila avait su bien s'entourer et remplir sa vie de petites joies. Je dois avouer avoir lu certains passages en riant, malgré la gravité du sujet.

J'ai été étonné de découvrir l'existence de ce cimetière des Abandonnés de Kilyos, près d'Istanbul. Quelle tristesse....
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Ce roman débute par un meurtre.

Pas de suspens de ce côté-là, on sait que notre héroïne finit dans une benne à ordures, dans une ruelle sordide d'Istanbul.

Sauf que le lecteur se retrouve d'emblée aux côtés de l'esprit de Leila, notre héroïne morte. On comprend alors que le titre représente le laps de temps entre la mort biologique et l'extinction définitive de l'esprit qui occupait jusqu'alors les lieux. L'extinction ou sa libération vers d'autres cieux, une autre dimension ou même le néant, selon les croyances de chacun.

Minute après minute, chapitre après chapitre, Leila se remémore des instants de sa vie, depuis sa naissance jusqu'au tournant tragique de son destin. On découvre alors ce que fut le début de sa vie dans un petit village d'Anatolie (la partie asiatique de la Turquie), sa famille, ses secrets, ses tourments, ses mensonges, le poids de la religion et le déshonneur.

La Leila adulte est une prostituée, une citoyenne de seconde zone, une indésirable pour sa famille et la société bien comme il faut. Son esprit nous raconte au fil des chapitres comment elle en est arrivée là. Comment et pourquoi elle a quitté sa famille et un avenir tout tracé, comment elle a atterri dans la rue des bordels à Istanbul ? Qui sont ces cinq amis qui tiennent tant à elle, quelle a été leur histoire à eux ? D'où viennent-ils et pourquoi sont-ils aussi des indésirables ?

A travers ces six personnages, on part à la rencontre de vies, de lieux, de tragédies différentes.

Comme à son habitude, Elif Shafak fait preuve de beaucoup de douceur dans sa narration, autour de thèmes pas franchement mielleux. Profondément humaniste, elle contrebalance tous les travers de la société turque par des valeurs réconfortantes. La noirceur peut être repoussée par la lumière et l'espérance.

Le poids des traditions et de la religion, la rigidité, l'intolérance, la répression, le jugement, les lois, le rejet, la misère, la souffrance... tout cela est jugulé par la force et la chaleur de l'amitié et l'amour. Un îlot de réconfort dans une tempête en furie.

Toutes ces vies ballottées ont remué mes émotions. le samsara de l'existence est comme un fleuve déchainé qui emporte tout sur son passage, rendant chaque minute, chaque seconde comme un rêve éphémère et déjà oublié. L'être humain s'échine à se pourrir la vie et celle de ses congénères en inventant tout un tas de règles morales aussi rigides que destructrices, des principes ridicules qui ont pourtant le pouvoir de briser des vies. Il suffirait pourtant de distiller dans ce monde un peu plus de souplesse, de tolérance et de bienveillance. Cette bienveillance existe déjà, certes, par petites touches, et c'est ce qui rend la vie de certains plus tolérable, mais ce n'est pas assez.

Elif Shafak signe ici un roman en faveur du droit des femmes, toutes en général, et les prostituées en particulier, dans un pays (la Turquie) où tant reste encore à faire. (Et pas que la Turquie d'ailleurs).

Bonne lecture.
Lien : https://lebouddhadejade.blog..
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10 minutes 30 secondes sans ce monde étrange, c'est une traductrice de Pamuk qui m'avait conseillé de lire Elif Shafak. J'ai commencé par La Bâtarde d'Istanbul, qui m'avait enchantée, puis continué par 10mn 30s. Une histoire triste, avec Tequila Laila qui est retrouvée morte dans une poubelle. Une femme a qui la vie ne lui a apporté que des malheurs, sauf quelques amis qui veulent l'enterrer dans un cimetière respectable. Un roman sur le désespoir, mais aussi sur l'amitié.
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Un roman qui me laisse mitigée.
J'ai beaucoup apprécié l'écriture,  poétique et fluide. L'ayant lu en français, je constate que le traducteur a fait un travail de grande qualité.  de même,  le pitch du roman et sa structure narrative, découpée en flash-backs sur les moments clés de l'existence de Leila, l'héroïne,  m'ont vraiment enthousiasmée et l'incursion dans la ville d'Istanbul m'a été très instructive.
Cependant, un manque de rythme s'installe au fil des pages et, vers le milieu du livre, mon enthousiasme s'est quelque peu émoussé. Également, j'en suis arrivée à confondre les personnages secondaires tant ils sont survolés. Difficile donc de s'y attacher.
Les dernières pages rattrapent un peu le reste, meme si le roman reste très inégal.
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L'esprit humain reste-t-il quelques minutes à travailler et à réfléchir sur sa vie qui s'est écoulée après que son coeur s'est arrêté de battre ?
« 10 minutes et 38 secondes dans ce monde étrange » est un roman humain, beau et triste, qui touche à des tabous fermés dans un État islamique laïc. Laila, avait 6 ans et son oncle en avait 43 lorsqu'il l'a violée, et il a répété cet acte odieux à plusieurs reprises jusqu'à ce qu'elle tombe enceinte de lui. Ses parents ne tenaient pas l'oncle pour responsable de ce qu'il avait fait, c'était plutôt elle qui péchait, la criminelle et la déchue, à leur avis.
Laila s'est enfuie de l'environnement de sa famille pour respirer la vie loin de l'injustice. Mais elle est tombée entre les mains d'un réseau de prostitution, et elle a exercé le seul métier dont elle pouvait vivre. Elle a appris à connaître des femmes de son environnement.
Elif Shafak comme elle l'a toujours souligné, donne la parole aux outsiders, à ceux auxquels personne ne fait généralement attention, les gens dont on veut détourner le regard. Leila et ses cinq amis appartiennent à cette catégorie : elle est une prostituée, Nostalgia Nalan (une transgenre), Zaynab122 (une petite personne que les gens voient comme une bizarrerie), Sabotage Sinan (son meilleur ami d'enfance qui la garde secrète de sa famille), Humerya (une ancienne chanteuse de boîtes de nuit) et Jameelah (victime de trafic d'êtres humains depuis la Somalie).

C'est Un roman sur :
- la mort, l'amitié, le viol et l'inceste.
- L'extrémisme religieux
- Les prostituées, le transgenre et le point de vue de la société sur leur droit.
- le Trafic sexuel de filles et de femmes après les avoir promises sous l'illusion de les faire travailler comme domestiques.
- le sort qui attend les femmes accusées d'actes immoraux.
- Les grandes villes et les actions inhumaines et immorales qui s'y déroulent sous le nez de la loi.
- le Mépris des femmes et oppression des filles et des femmes
Même l'inhumation dans les cimetières diffère d'une personne à l'autre : les prostituées, les transgenres, les suicidés, etc. morts, les parias, les criminels, les petits et les inconnus y sont enterrés. Étrangers et maudits dans le monde et dans le cimetière.
C'est encore un livre qui renforce la compréhension des gens, de leurs décisions, de leur vie et de leurs comportements.
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