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Elif Shafak est une auteure turque dont j'affectionne tout particulièrement les romans. Elle part ici de l'hypothèse que pendant 10 minutes et 38 secondes après la mort notre esprit fonctionne encore.

C'est ce qui arrive à son héroïne, Tequila Leila, dont le corps gît au fond d'une benne à ordures où son assassin vient de la jeter.

Leila revoit son enfance en Anatolie, sa fuite à Istanbul, son travail dans un bordel et surtout ses amies qui, comme elle, sont de grandes blessées de la vie.

Elif Shafak donne la parole à ceux que la bonne société rejette jusque dans la mort : « Ce n'était pas juste de reléguer Leila au cimetière des Abandonnés alors qu'elle n'était pas abandonnée du tout. Leila avait des amis. Les amis de toute une vie, loyaux, aimants. Elle ne possédait peut-être pas grand chose d'autre, mais des amis, si, sans l'ombre d'un doute. »

La société turque est dépeinte de façon très réaliste et sans complaisance, comme toujours dans les romans de cette auteure.

La ville d'Istanbul y est également un personnage à part entière : « Istanbul était une ville liquide. Rien ici de permanent. Rien qui semble établi. Tout avait dû commencer des milliers d'années auparavant, quand les lames de glace fondirent, que les eaux montèrent, et que toutes les formes de vie connues furent détruites. Les pessimistes avaient été les premiers à fuir les lieux, sans doute ; et les optimistes à choisir d'attendre pour voir comment les choses allaient tourner.(…) Quand les déluges commencèrent, les eaux jaillirent de toutes parts, noyant tout sur leur passage -animaux, plantes, humains. Ainsi furent formés la mer Noire, la Corne d'Or, le Bosphore, la mer de Marmara. Tandis que les flots se répandaient, ensemble ils créèrent un îlot de terre sèche, sur lequel serait un jour construite une puissante métropole. »

Un excellent roman à découvrir !
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Alors que Tequila Leila, prostituée à Istanbul, s'apprête à rendre son dernier soupir dans une benne à ordures, elle espère que ses fidèles amis sauront la retrouver, et lui offrir une sépulture digne de ce nom. Avec nostalgie, elle profite des ces dernières 10 minutes et 38 secondes pendant lesquelles l'activité cérébrale continue malgré l'arrêt du coeur pour se souvenir des goûts et des odeurs qui ont marqué sa vie, ont fait d'elle ce qu'elle est devenue, et lui ont donné cette famille d'adoption inestimable : Sabotage Sinan, Notalgia Nalan, Zaynab122, Jameelah et Hollywood Humeyra.

Ce nouveau roman d'Elif Shafak, auteure turque de renom dont j'apprécie autant les livres que les discours, n'est pas seulement une plongée dans les bas fonds d'Istanbul, une étude sociologique des mécanismes à l'oeuvre pour transformer une jeune fille campagnarde de bonne famille en prostituée perdue. Comme souvent dans les contes orientaux, l'histoire n'est qu'un prétexte à l'évocation de thèmes bien plus vastes : la condition féminine en Turquie, la libération sexuelle des années 70, les combats pour l'égalité de tous, la Guerre Froide au Moyen-Orient, les liens familiaux et amicaux, les conflits religieux, l'inconnu de la vie après la mort et bien sûr, le charme éternel d'une ville millénaire à nulle autre pareille – Istanbul. Nains, transsexuels, homosexuels reniés par leurs familles, hétérosexuels aux rêves piétinés et aux vies cachées, c'est toute une panoplie de personnages victimes de la tradition turques qui s'exposent ici sans le moindre filtre, attachants et terriblement vivants.

Si j'ai préféré la douce évasion de la première partie, j'ai énormément apprécié de retrouver la plume d'Elif Shafak, mais surtout son amour inconditionnel pour Istanbul, que je partage depuis de nombreuses années. Jouant sur l'ensemble de nos sens, elle nous immerge entièrement dans cette ville aux multiples facettes, dans cette culture incroyablement riche et malheureusement injuste avec tant de Stambouliotes. C'est avec un texte chargé politiquement qu'Elif Shafak nous révèle Istanbul dans toute sa splendeur et ses contradictions, à jamais au carrefour de l'Orient et de l'Occident.
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Istanbul, cité entre deux continents, bercée de lumière et baignée par la mer.

Tequila Leila y exerce le plus vieux métier du monde. Jusqu'à une tragique soirée où elle finira assassinée.

10 minutes et 38 secondes, c'est le temps qui lui reste entre le moment de sa mort biologique et la mort de son esprit.

Ce sera le moment pour elle de se souvenir. Des moments heureux, des mensonges, des cicatrices au corps et à l'âme. de cette vie brisée, illuminée néanmoins par l'amour et l'amitié.

Véritable plongée dans la cité d'Istanbul que nous propose Elif Shafak, oubliez cependant la ville touristique et venez découvrir plutôt ses bas-fonds.

La vie des reclus, des pestiférés de la ville : prostitués, travestis, réfugiés…

Difficile pour eux d'être accepté dans une société turque marquée par le patriarcat. D'une société dans laquelle l'honneur doit être sauvegardé avant tout, avant même la protection des victimes d'abus.

Pour autant, c'est une véritable famille de coeur qui s'agglomère autour de Tequila Leila. Une famille qui fera tout pour assurer sa dignité jusqu'à la fin.

Récit qui m'a fait passer du rire aux larmes au fil des pages et des histoires de ces laissés pour compte d'une dignité à toute épreuve.

En résumé, une très bonne lecture !
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Si les grands moments de la vie, naissance, mariage, retraite, mort sont marqués d'une date précise, l'esprit met du temps à s'accommoder du nouvel état. Rien n'est aussi instantané. A l'instant t où le coeur s'arrête, il reste 10 minutes et 38 secondes pendant lesquelles les circuits cérébraux continuent à fonctionner. C'est dans ce monde étrange que nous croisons Tequila Leila, prostituée, assassinée et jetée dans une poubelle d'Istanbul. Au fil de ces 10 minutes 38 secondes, Leila convoque les moments importants de sa vie. Ces moments de l'enfance qui ont figé son destin, ces moments de rencontre avec cinq personnes, les cinq amis qui l'accompagneront au-delà de la mort.

Leyla Afife Kamike est née le 6 janvier 1947 dans la ville de Van. Sa vraie mère, Binnaz, seconde et jeune épouse du tailleur Haroun, est contrainte de donner son enfant à Suzan, la première épouse stérile. La vie de Leyla commence dans le mensonge, le silence qu'obligent les traditions et superstitions.

Quand, à seize ans, enceinte, elle annonce à son père avoir été régulièrement abusée sexuellement par son oncle depuis l'âge de six ans, ce dernier privilégie la sauvegarde de l'honneur à la défense de sa fille. Pour échapper à un mariage forcé, aidée par Sinan, son meilleur et seul ami, Leyla prend le bus pour Istanbul, ville de la liberté. Elle troque « le « y » de yesterday contre le « i » d'infini » et devient Tequila Leila. Jeune et naïve, elle est vendue à un bordel par un couple qui l'avait aidée à la gare.

« Cette ville la surprendrait toujours; des moments d'innocence se dissimulaient dans ses coins les plus sombres.»

Les rencontres avec Nalan, un ouvrier qu'elle retrouve des années plus tard en femme dans une prison, avec Jameelah, une africaine ayant fui son pays, avec Zaynab122, une naine adepte de tasséomancie, puis avec Humeyra, une chanteuse qui a fui un mari violent, sont des moments d'innocence et de grâce dans cette ville cosmopolite pleine de contradictions.

« Istanbul n'était pas une ville pleine d'opportunités, mais pleine de cicatrices. »

Leila y découvre aussi les rivalités politiques avec D/Ali, un étudiant trotskiste qui l'entraîne en mai 1977 sur la place Taksim où des snipers tirent sur une foule de manifestants. Istanbul est une ville de troubles et de chaos où le taux de criminalité est important.

Après une longue première partie intitulée L'esprit, qui balaie le passé de Leila, nous suivons avec le corps, l'action du groupe des cinq amis ; incapables d'accepter que le corps de leur amie, non réclamé par une famille qui l'a bannie, soit enterré anonymement dans le cimetière des Abandonnés.

Ce lieu, situé dans le village de Kilyos, près d'une station balnéaire existe réellement. On y enterre tous les non-désirés, les indignes, les non-identifiés, plus récemment les corps des migrants ramassés sur les plages, avec au mieux une planchette en bois portant un numéro.

Le groupe des cinq commence une folle aventure pour sauver l'âme de leur amie.

Avec ce roman, aux reflets d'Istanbul, Elif Shafak raconte l'histoire de la Turquie d'aujourd'hui. Superstitions, prophéties, croyances maintiennent les hommes sous contrôle. L'honneur, la religion contraignent les femmes à une soumission totale au pouvoir des pères ou maris. Leyla a grandi avec la honte et le remords, la culpabilité qu'on lui a ancrée dans la tête. « Istanbul, la ville où finissaient par aboutir tous les mécontents et les rêveurs » ne pourra l'en guérir. Fort heureusement, Elif Shafak, offre aux laissés pour compte la force de l'amitié.

Fidèle à son univers, Elif Shafak, nous offre une belle histoire de femme, bafouée par sa famille mais entourée de belles personnes dans une Turquie pleine de contrastes.
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Comment une personne qui a construit des amitiés magnifiques toute sa vie peut-elle être enterrée ainsi ? Et c'est son adresse pour l'éternité ? Ce n'est pas juste. Rien n'est juste dans ce roman qui crie la rage d'être une femme en Turquie. Surtout avant 1990. Ici, la violence faite aux femmes est prégnante. Ce roman est un combat, une mise au point qui donne la parole aux parias d'Istanbul. Ces 10 minutes et 38 secondes est le temps nécessaire où la vie égale enfin la mort, où l'une enlace doucement l'autre, et même si ce passage est fragile, il défie toute douleur et toute injustice. C'est juste un moment de tendresse intense.
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Ce livre est le premier que j'ai acheté après le confinement serré de mars 2020. J'avais une grosse envie de lecture et d'ailleurs, et même si je ne l'ai lu que bien des mois plus tard, « 10 minutes et 38 secondes dans ce monde étrange » a parfaitement rempli sa mission.
Saviez-vous que durant plusieurs minutes après l'arrêt du coeur, le cerveau continue de fonctionner ? A partir de cette observation, Elif Shafak a imaginé ce qui a bien pu traverser l'esprit de Leila, prostituée stambouliote assassinée. du fin fond de la poubelle où son corps git, nous suivons donc les dernières pensées de cette femme turque pas franchement gâtée par la vie, et par la même occasion découvrons aussi la condition féminine dans la Turquie du milieu du XXème siècle. Pas de surprise, ce n'est pas bien brillant, à commencer par son enfance dans une famille aimante mais étouffante, gangrénée par ses secrets et ses traditions. Leila s'enfuit à Istanbul pour y échapper, mais tombe sur encore pire…
J'ai adoré la construction du livre, où les 10 minutes et dernières 38 secondes de Leila sont égrainées au rythme des chapitres, nous faisant ainsi découvrir au fur et à mesure sa vie. L'écriture d'Elif Shafak est belle et décrit presque amoureusement la ville d'Istanbul, que ce soit ses beaux quartiers ou bien ses bas-fonds. Cela prend d'autant plus de valeur quand on sait que l'auteure vit exilée en Angleterre, fuyant la politique actuelle de son pays d'origine.
Bref, une super découverte.
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Elle est en train de mourir, physiquement, mais son esprit vagabonde toujours dans les méandres de son passé. Pendant 10 minutes et 38 secondes, Leila revit les moments clé de son existence. Ses flashbacks se déclenchent par le souvenir d'une odeur, d'une ísaveur. Et c'est ainsi que nous allons découvrir qui fut cette femme, prostituée, maintenant au fond d'un container, au bout de sa vie.
« Leila commençait à comprendre que les sentiments de tendresse doivent toujours rester cachés, qu'ils ne peuvent être révélés que derrière une porte close et ne jamais être évoqués ensuite. »

Ce livre s'organise en trois grandes parties.
L'esprit : A ce stade, pendant que la vie quitte progressivement le corps de Leila, son esprit lui renvoie ses derniers messages. Savoir ce qu'elle a vécu, comment elle a vécu, étouffée par la tradition et la soumission. Recherche de la liberté, en quête d'évasion, qu'elle finira par trouver en fuyant à Istanbul. Une nouvelle vie. Un nouveau tournant… Et puis on fait connaissance avec ses cinq amis, aux noms si spéciaux : Nalan, Sabotage, Jameelah, Zaynab, Humeyra. Ils sont tous un peu écorchés, ils auront tous un rôle essentiel aux côtés de leur amie commune.
Le corps : Son esprit s'est éteint. Son corps sans vie est découvert et emmené à la morgue. Ses amis sont dévastés, la tristesse et son manque les submergent. Mais ils sont bien là. Ils sont sa famille, absente et dans le déni. Leur amitié est plus forte et ne cessera jamais de se renforcer. Jusqu'au bout et même au-delà… Ils sont prêts à tout, même dans l'extrême, pour Leila…
L'âme : Un seul mot peut résumer cette dernière partie : liberté…

Je suis devenue la sixième amie de Leila. Je me suis attachée à cette bande de copains, j'ai eu l'impression de les comprendre, de les écouter. Cette histoire est une vraie leçon d'amitié, de volonté, de courage et de renaissance. Ce roman a ce petit quelque chose qui m'a changée, qui instruit sur le mode de vie du pays, qui m'a touchée, j'ai eu du mal à partir, à le refermer. Mais je vais le garder très précieusement….

« Le chagrin est une hirondelle, dit-il. Un jour vous vous réveillez et vous vous dites, ça y est il s'est envolé, mais il n'a fait qu'émigrer dans un autre endroit, il se réchauffe les plumes. Tôt ou tard il revient se percher de nouveau dans votre coeur. »

https://littelecture.wordpress.com/2020/03/14/10-minutes-et-38-secondes-dans-ce-monde-etrange-de-elif-shafak/
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Si notre esprit survivait à notre mort ? S'il survivait juste 10 minutes et 38 secondes ? Serait-ce assez pour refaire le chemin de notre vie ? C'est là que nous conduit l'auteur, sur le chemin de la vie de Tequila Leila, prostituée découverte assassinée dans une poubelle d'Istanbul. On remonte le temps avec Leyla, la fillette éprise de liberté, courant dans la campagne les cheveux aux vents, fuyant les gestes abominables de son oncle, la sévérité de son père, la folie de sa tante. Puis son arrivée dans Istanbul, la Magnifique, ville pleine de promesses, dont Leyla, devenue Tequila Leila, ne connaîtra que les bas fonds. L'auteur égrène les minutes, les souvenirs. Les rencontres, les amis comme les 5 doigts de la main devenus sa véritable famille, l'amour aussi, sur fond d'événements historiques. Les dernières minutes de Leyla dans ce monde étrange, celui bizarre entre la vie et la mort mais aussi celui anormal où les femmes subissent toujours la domination masculine.

Un roman en 3 parties inégales, la première L'Esprit la plus longue, déroule la vie de Leila, une vie d'aventures. La deuxième le Corps prend le relais et s'intéresse au traitement du l'enveloppe charnelle de Leila par les autorités et ses amis. La troisième, de quelques pages, décrit son dernier voyage, celui de L'Âme de Leyla enfin libérée.

Un excellent roman, très intéressant par sa construction, à l'écriture très agréable ♥
Lien : http://www.levoyagedelola.com/
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Quelle beauté que cette couverture colorée et soyeuse ! On peut dire que ça donne envie… Je sais que c'est futile, mais je reste sensible à l'objet-livre : la couverture, la qualité du papier …

Reçu dans la sélection du prix Elle, un roman en demi-teinte : une bonne idée de départ mais mal exploitée, à mon avis.

Istanbul. Leila, une jeune prostituée, est assassinée et balancée aux ordures. Mais son esprit continue de fonctionner, pendant exactement 10 minutes et 38 secondes, soit le temps de se remémorer des souvenirs et de raconter ce qui l'a amenée à terminer si brutalement sa courte existence.

Premier roman que je lis de cette auteure (et première incursion dans la littérature turque tout court), j'en ressors mitigée. La première partie du roman, où Leila se remémore certains souvenirs depuis sa plus tendre enfance jusqu'aux événements qui l'ont conduite à la prostitution, m'a bien accrochée. Mais, au fil du roman, j'ai vu mon intérêt faiblir : la deuxième partie se concentre sur les amis de Leila, qui cherchent à savoir qui l'a assassinée et, bizarrement, j'ai perdu tout intérêt. Trop de dispersions ? Je ne m'explique pas vraiment pourquoi la sauce n'a pas pris, malgré un bon début.

Un roman qui se veut un portrait de femme cherchant, à tout prix, à vivre sa vie, éprise de liberté, dans la société turque, mais qui manque de style dans l'écriture, qui s'éparpille un peu trop dans sa seconde partie, et qui n'exploite pas assez l'idée originale de départ … En effet, ces « 10 minutes et 38 secondes » ne sont finalement qu'un prétexte à découper chaque souvenir en chapitres, mais sans pousser plus loin l'idée du cerveau qui, juste après la mort, continue de fonctionner … Dommage !
Lien : https://histoiresdenlire.be/..
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Lu dans le cadre du jury Grand Prix des Lectrices Elle 2020, catégorie roman

« de même que l'amer peut se dissimuler sous le doux, ou l'inverse, dans tout esprit il y a une trace d'insanité, et dans les profondeurs de la folie luit un grain de lucidité ».

Monsieur Chaplin, flâneur nocturne trouve la porte close. Il attend patiemment devant…
Sa maîtresse est partie rejoindre le bleu, l'harmonie et la liberté.
Pendant, 10 minutes et 38 secondes, temps au cours duquel le cerveau aurait une activité post-mortem, coincée dans une benne à ordure car assassinée, Leila, prostituée expérimentée sur les rives du Bosphore, va revenir sur les moments de son enfance et sa destinée de femme.
C'est le récit d'une multitude de malentendus de l'existence et des combats d'une vie.
Cette fille d'Anatolie, qui n'appartient ni à sa mère ni à son père, s'insurge contre les conventions, les préjugés, les croyances, habitée par la méfiance.
Elif Shafak dresse le portrait d'une femme obstinée, libre qui fait de sa vie un combat.

« Même si tu te crois en sécurité ici, ça ne veut pas dire que ce soit l'endroit qui te convienne, riposta le coeur. Parfois c'est là où tu te sens le plus à l'abri que tu es le moins à ta place. »

Ce personnage rayonnant, a suivi son coeur lors de sa naissance : elle avait l'odeur des anges qui ne voulaient pas la libérer, a hésité à rejoindre le reste de l'humanité. Sa naissance présageait donc l'avenir : elle deviendra une âme rebelle.
La honte, la culpabilité, le mensonge, le silence, les traditions et superstitions, l'obscurantisme et le patriarcat, la brutalité des hommes vont déterminer la vie de Leyla.
Elle ne croit pas au dieu de son père qui a choisit l'honneur et a décidé de consacrer sa vie à répandre la crainte de dieu car « C'est une affaire grave de croire quelqu'un ».

Cette femme déterminée et courageuse va s'enfuir pour Istanbul où elle choisira sa famille constituée de marginaux tellement humains : Nalan, l'ouvrier transsexuel, Jameelah l'africaine exilée, Zaynab122, la naine tasséomancienne, Humeyra, la chanteuse en fuite car violentée par son mari.
Les bannis de cette cruelle société turque vont se battre dans une seconde partie pour la dignité de Leyla et lui offrir l'inhumation qu'elle mérite. Car comme tous les maudits elle doit se retrouver dans le cimetière des abandonnés.

L'auteure, féministe qui lutte pour les droits des hommes contre ce pouvoir obscurantiste d'Erdogan, elle-même exilée, décrit une Turquie qu'elle a du quitter dans un roman jugé obscène par les autorités. Elle dresse un magnifique portrait de femme et raconte avec élégance ces minorités.

Cette première découverte d'Elif Shafak m'a donnée envie de lire ses autres romans qui sont à l'origine de son exil.
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