On apprend que "Le chant de Kali" est un roman du début de la carrière de Dan Simmons, ce que le lecteur d'Hypérion ou de L'échiquier du mal reconnaîtra sans peine. Mais ce bref roman, qui tient du policier comme du roman fantastique, annonce déjà les oeuvres et les fresques grandioses qui vont suivre : la repoussante évocation de Calcutta annonce l'horreur des camps nazis ou des bidonvilles de Philadelphie. La littérature, toujours présente chez Dan Simmons, se manifeste en des citations réelles ou peut-être imaginaires au début des chapitres, et dans la référence au fameux poème de Yeats, tant de fois exploité (voir "Le Fléau" de Stephen King), "Le Second Avènement" :
"Tout se disloque. le centre ne peut tenir.
L'anarchie se déchaîne sur le monde
Comme une mer noircie de sang ; partout,
On noie les saints élans de l'innocence.
Les meilleurs ne croient plus à rien, les pires
Se gonflent de l'ardeur des passions mauvaises (...)
Et quelle bête brute, revenue l'heure,
Traîne la patte vers Bethleem, pour naître enfin ?"
Ce poème, que je ne cite pas en entier pour ne pas lasser, est la matrice profonde et secrète de tout le roman. Le poète Robert Luczak est chargé de retrouver dans le cloaque de Calcutta un grand auteur bengali disparu, et se heurte à une société secrète aux pratiques immondes. Ses aventures se doublent d'une dimension mythique (Kali) et métaphysique (le Mal). Mais le lecteur non prévenu ne s'en rendra pas compte et lira le roman au premier degré (roman parfois médiocre d'ailleurs), sans s'arrêter aux multiples signaux discrets d'une signification plus vaste, trop vaste d'ailleurs pour cet ouvrage. C'est un bel essai, mais depuis, nous avons lu mieux.
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Robert Luczak ,poète et journaliste littéraire est envoyé à Calcutta à la recherche d'un mystérieux poète indien disparu depuis huit ans et qui semble avoir réapparu . Il s'y rend avec sa femme d'origine indienne et sa petite fille. Mais sa mission va le confronter aux mystères du pays et de la ville sur laquelle plane l'ombre de Kali et de ses sectateurs. Les descriptions des bas-fonds de Calcutta sont assez prenantes et effrayantes avec une complaisance assez marquée sur le sordide , le macabre et le morbide . Mais la mise en place de l'intrigue est trop longue , trop riche en détails peu utiles, l'action se concentre dans le dernier tiers du livre . Simmons a fait mieux.
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