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Lucien Suel est un poète, et ce livre est plus un long poème en prose qu'un roman. Avec les avantages et les inconvénients que cela peut avoir. Une langue qui coule, de belles images, une jolie balade dans la vie simple et champêtre d'un homme qui s'éteint doucement après avoir goûté des plaisirs simples et universels. Mais aussi un style avec lequel j'ai eu du mal à accrocher. le « tu » pour désigner le personnage m'a beaucoup embêtée, je me suis aperçue que c'est un procédé stylistique que je ne goûte pas du tout et qui m'empêche de rentrer dans le texte, de m'identifier. Je suis restée pendant près de la première moitié du livre un regard extérieur, une sorte d'entomologiste regardant les mouvements semble-t-il erratiques d'un insecte mille fois observé. Et puis cette ponctuation comme semée au hasard, souvent inexistence et parfois coupant un élan en son milieu.
J'ai bien failli abandonner ma lecture, mais vers la moitié ou les deux tiers, la langue et son flot ont fini par l'emporter. Je me suis laissée bercer, j'ai imaginé, j'ai vu les parallèles avec ma propre vie, la crise cardiaque trop précoce en moins je l'espère. Les instants anodins célébrés car ce sont eux qui donnent leur signification à une vie que l'on pourra dire à la fin « bien vécue ».
C'est un beau plus livre, qu'il faut lire assez vite, pour véritablement se laisser happer et en ressentir le mouvement. C'est un bon moment passé à l'air vif et matinal d'un bout de campagne, et que j'ai apprécié de lire pas loin d'un lopin de terre endormi qui est devenu ma propriété il y a quelques semaines et qu'il va me falloir bientôt remettre en production, à l'écoute du sol et au rythme des saisons. Ma place dans le mouvement du monde, dans le passage du temps, une goutte, un relais à transmettre, des moments qui en définitive ne comptent que pour moi mais cela ne les en rend pas moins précieux.
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Je crois que tous les jardiniers pourront s'identifier au personnage de ce récit, retrouveront les sensations qu'ils aiment. Les femmes de jardiniers, les enfants de jardiniers, reconnaitront aussi des gestes qui leurs sont familiers. le bêchage, les feux pour brûler les déchets, les soulagements de vessie sur le compost, tout y est. Dans ce jardin, on retrouve le contact de la nature, la rosée du matin, les toiles d'araignée dans la figure, la boue, le chant des oiseaux, le calme. On suit l'évolution de la vie, la terre retournée, les laitues qui poussent. On comprend qu'une graine contient de l'ADN, l'action du soleil sur la chlorophylle. On ne cherche pas à en savoir plus, mais on se sent en harmonie avec la nature.
Puis, soudain, une douleur dans la poitrine. Tous les souvenirs d'une vie se bousculent. L'enfance à la campagne, le premier amour, le premier concert de rock, la lecture, les enfants, les voyages, les disparus, le jardinage. Il n'y a pas de grandes réflexions sur la mort dans ce livre, juste une vie qui se déroule à toute vitesse.
Alors, bien sûr, on peut reprocher à Lucien Suel un excès de formalisme pour un tel sujet (sujet ô combien éculé, par ailleurs). L'emploi de la deuxième personne du singulier, les phrases aussi longues que les chapitres ressemblent à d'absurdes contraintes oulipiennes. Ces « trucs » ostensibles ont tendance à un peu trop étouffer le sentiment, à mon goût. C'est poétique, peut-être, en même temps on se dit qu'il en faut peu pour faire un style. Cependant les sensations sont bien là, en catalogue. Une vie particulière mais pas extraordinaire ; je crois que l'auteur a capté, ici et là, des sensations assez communes, ses souvenirs ont souvent trouvé des échos dans mes propres souvenirs. Un livre sans prétention mais aussi sans ambition.
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un roman comme une promenade dans le jardin, dans les souvenirs, dans le quotidien des gestes qui font la vie, une promenade qui réveille tous les sens
un roman comme le flashback qui remonte en accéléré à l'instant de la mort
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Naissance,vie, mort. Trilogie jardinière, triptyque universel, ballet incessant, éternel, s'entrecroisant inlassablement, entre deux brins de mauvaise herbe, sous une motte de terre, au nez d'une taupe égarée, derrière un coup de pelle, dans une envolée volatile, à l'ombre d'un châtaigner, parmi les souvenirs.

Enfance, adolescence « adultescence » se frôlent, s'entremêlent, au détour d'un potager, dans les cendres nécessaires, dans les souvenirs végétaux, espoirs terreux, déceptions fruitières, joies récoltées, cycle perpétuel tourbillon de gestes d'émotions de moments poésie du jardin pour dire la fin, le (re)commencement, la nature qui perd ses droits le jardinier qui les lui rend qui l'a si longtemps apprivoisée va bientôt la nourrir de sa chair propre, compost en prose humaine animale végétale la prochaine récolte aura un goût de lui de sa vie de ses bonheurs de son labeur.

Plantation jachère défrichage, alexandrins taillés à coups de bêche, de hache, de râteau, laitues oignons fraises riment ensemble, en choeur, strophes enracinées, métaphores d'herbier, les voyages s'enroulent autour des paysages, l'amour se conjugue à tous les lieux, les époques se délocalisent et les musiques s'entre-résonnent. « au bout du champ un piano droit est posé sur quatre briques au milieu du chemin »

Crucifixion au sol, au centre du jardin, au centre de ta vie, « tu rédiges les versets de la terre tu graves dans la glaise ton corps est ton dernier volume, les rides et les cicatrices les plis et les replis, les bosses et les creux racontent ton histoire et celle de tes frères »

Les fleurs de cerisier sont des boules de papier froissé, qui, comme le fruit, se teintent de rouge à l'approche de la définitive gravité.

Semence des mots, récolte de poèmes, tu sarcles à la main, la mort préfère sa faux. Tu es là, jusqu'à la fin tu es là, tu ne veux pas finir avec les épluchures, alors « tu avances dans le temps du rêve »

« tu n'es plus connecté au serveur de la réalité ici et maintenant, tu glisses dans un autre monde, dans les débris d'images projetées pulvérisées par ton cerveau en capilotade »
les éléments se font souvenir, le jardin déroule le scénario d'une vie, ou chaque graine, chaque parasite joue son propre rôle, dit son texte, et la douleur rappelle le souvenir à la terre.
Lien : http://www.listesratures.fr/
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Un excellent moment! de la même génération que Lucien Suel, j'ai pleinement goûté le travail du jardinier qu'il décrit minutieusement dans le premier chapitre. Puis, c'est la crise et étendu dans son jardin, le héros agonise et sa vie défile, entrecoupée de l'avancée de la mort. Une écriture particulière, écrite au "tu"; des blocs d'écriture avec peu de signes de ponctuation: presque pas de points, beaucoup moins de virgules qu'attendues...(un peu comme Olivier Adam, souvent) Contrairement à ce que je croyais, l'histoire n'a rien à voir avec les deux romans qui suivent: -La-patience-de-Mauricette et-Blanche-étincelle si je n'avais pas lu Mort d'un jardinier c'est qu'il est sorti au moment où j'entrais dans un coma-confusion :à partir du titre, j'ai écris dans ma tête un tout autre "roman" que je n'ai pas eu le talent d'écrire!!
Relecture en mai 2023, après une nouvelle rencontre avec Lucien, c'est le même enthousiasme d'autant que je jardine beaucoup! le texte est rythmé et j'en ai lu une partie à voix haute pour mieux apprécier!
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Je l'ai dévoré d'une traite. Il faut dire que les pages sont courtes... mais les phrases longues, encore que je n'ai trouvé le problème qu'à la fin du deuxième chapitre... En fait, chaque chapitre (de 3 à 6 pages) est constitué d'une seule phrase, mais les virgules et points-virgules ponctuent cette phrase et permettent de respirer.

Lien : http://vdujardin.over-blog.c..
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roman de poète - un flux à l'organisation souterraine, avec pour séparer, sans vraiment séparer, les petits blocs, la virgule, puis le point virgule pour une petite rupture dans l'inflexion, puis le court chapitre pour repartir sur autre piste. La saveur et la dureté du travail du jardin, le flux des moments de la vie, gens, époques, sensations, amitiés, l'amour toujours de celle qui fut trouvée, les parfums, le corps, les saveurs, la nature, les villes et il y a Amsterdam, l'Inde etc... sans ordre chronologique, au fil des idées, des associations. Et pour le lecteur une dégustation nourrie et charpentée
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un roman poétique, tout en scansion, avec des parties autobiogaphiques (la construction de la maison, la musique...) Très onirique, sans ponctuation. Agréable à lire
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Le narrateur, omniscient, non incarné, s'adresse au héros du titre. le tutoiement est fluide : ce n'est pas un dialogue, c'est une adresse. le latin parlait de vocatif et rien n'est plus juste : la voix dresse le portrait du jardinier. Cet homme qui travaille la terre trace aussi des sillons d'encre sur les pages. « Toutes ces grosses boucles blanches qui se détachant sur le fond de la nuit étaient des feuilles de papier roulées en boules, les poèmes ratés que tu avais jetés dans la corbeille à papier, tu ne savais pas que ta corbeille à papier était le ciel d'ici. » (p. 14) La voix raconte le travail de titan du jardinier-démiurge dans son potager-cosmogonie. le labeur semble infini, sans cesse remis sur l'ouvrage patient des saisons. La voix lance un chant joli en hommage à l'entêtement aveugle des semences et à l'attente minutieuse du cultivateur. Mais soudain, le créateur laborieux s'effondre de toute sa hauteur sur son monde. Les hommes meurent-ils dans les choux ?

Une vie de souvenirs déferle, le point final tarde à venir et laisse la place au point-virgule. Il y a encore tant d'événements minuscules à dire avant que le jardinier ne meure ! « Tu penses parfois qu'il y aura une dernière tartine un dernier bifteck une dernière bière. » (p. 81) Il faut raconter les odeurs, les images, les émois, les milliers de sensations qui ont fait que cet homme a été, vraiment, cet homme. Jusqu'au bout, la sensibilité réclame ses droits et les terminaisons nerveuses n'en finissent pas de tressaillir, même si c'est par la seule mémoire. La voix se lance dans une tentative d'épuisement : elle dit cet homme ordinaire, depuis l'enfance, depuis l'indiscernable et l'inutile ; elle dit la succession des choses, les découvertes et les oublis. Au terme de ce passage en revue au seuil de la tombe, une dernière merveille retentit, déchirante : l'amour.

J'aime sentir que j'appartiens à une communauté de lecteur·ices. Ici, je la trouve au détour d'une page, quand la voix en appelle aux beautés de Joris-Karl Huysmans, si cher à mon coeur. Après le lapin mystique (que j'ai évidemment lu pour son titre), je poursuis ma découverte de l'oeuvre de Lucien Suel. Lire les grand·es auteur·ices contemporain·es de leur vivant, c'est la meilleure reconnaissance à leur offrir. Parce qu'outre-tombe, les lauriers fanent aussi. « Tu sais que personne ne viendra, tu vis tes derniers instants en ce jardin sur cette terre. » (p. 156)
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J'ai bien aimé ce livre même si c'est pas mon genre mais je l'ai bien aimé parce que déjà l'histoire est sympa puis aussi je trouve que ce livre donne vraiment la sensation de vivre et de liberté. Lisez-le, ce livre est captivant §
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