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"Que voulez-vous ? Ce pays est ainsi. Il y a deux faces à tout. Une main droite et une main gauche, un ordre et son désordre." Ce pays, c'est Haïti dont Lyonel Trouillot s'évertue, livre après livre, à nous raconter l'humanité blessée, entre dictatures et tremblements de terre, mais aussi solidarité et main tendue vers un avenir meilleur. Ne m'appelle plus Capitaine raconte la rencontre entre une jeune bourgeoise, plus brun-pêche que noire, et un vieil homme à la santé précaire comme perdu dans le passé et ressassant les souvenirs d'un amour qui l'a laissé exsangue, il y a bien longtemps. Deux personnages aux antipodes, qui se reniflent avant de s'accepter puis s'apprivoisent avant peut-être de partager un projet commun. Dans une langue parfois hachée et scandée, parfois ample et déliée mais toujours empreinte d'une poésie âpre, l'écrivain se joue des clichés et clame son amour du peuple, celui qui semble baisser les bras quand tout joue contre lui mais qui se remet en marche parce qu'il faut bien vivre. Un beau livre, un peu court, de l'un des écrivains majeurs d'un pays dont la richesse en littérature est inversement proportionnelle au dénuement de la plupart de ses habitants.
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Dans le cadre d'un stage de journalisme, Aude, fille d'une riche famille de Port-au-Prince choisit d'interviewer le Capitaine, un vieil homme du quartier pauvre du Morne Dédé, un ancien quartier de rébellion lors de la dictature.

« de là où tu viens, les autres n'existent que lorsque vous avez quelque chose à leur prendre. »

Celle qui vit du côté des nantis, de ceux qui se sont enrichis sur le dos des autres, ceux qui, comme son frère se perdent dans la drogue et la folie va côtoyer les laissés pour compte. La première approche n'est pas facile. le quartier de Morne Dédé s'amuse avec la jeune femme dans sa belle voiture. Mais, le Capitaine la chaperonne, il a des choses à lui dire. Ses secrets appartiennent aussi à la famille d'Aude.
J'aime cette figure de vieux sage qui de ses belles phrases délivre des préceptes de vie. de sa bouche coulent les souvenirs, la mémoire des destins perdus du quartier. Sa voix laisse aussi planer le mystère, celui d'une femme qui ne doit plus l'appeler Capitaine. Qui est cette femme qui hante sa mémoire?

Aude approfondit son enquête dans les archives et auprès de son oncle Antoine qui, lui aussi a autrefois connu Capitaine et la femme mystérieuse.

L'auteur capte l'attention par la richesse de ses personnages, mais aussi par ce mystère personnel qui illustre la vie politique de Port-au-Prince.

En très peu de pages, Lyonel Trouillot détaille chaque protagoniste, ceux de Morne Dédé comme ceux de la famille d'Aude. Il illustre ainsi cette faille entre les indifférents qui se sont enrichis sur le dos des malheureux et ceux auxquels il ne reste que la richesse du coeur.
Dans une prose riche et poétique, Lyonel Trouillot incarne les destins personnels, le contexte politique du Port-au Prince au temps de la dictature et l'humanité des humbles.
« Si quelqu'un te demande la lune, tu peux dire que par amour, sans être certaine de réussir, tu vas quand même essayer. La lune ne dépend pas de toi. Elle a sa fierté et garde ses distances. Tu peux sauter très haut et ne jamais l'atteindre. Mais si quelqu'un te demande de lui tendre la main et que tu n'es pas invalide, si tu dis « essayer » c'est que tu te fous de sa gueule. Ta main, elle est à toi et bouge sous ton contrôle. En bien comme en mal, si ces mots veulent dire quelque chose, on est souvent ce qu'on décide. »
Lien : https://surlaroutedejostein...
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Aude, aspirante journaliste de 20 ans, décide d'enquêter sur un quartier défavorisé de Port au Prince, ville qu'elle avait l'impression de connaitre puisqu'elle y est née. Seulement, elle, elle connait les beaux quartiers parce qu'elle est blanche et riche. Là, elle découvre la misère, la pauvreté et la rancoeur. Elle arrivera cependant à entrer dans le coeur des gens, dont le vieil homme surnommé Capitaine qui va peu à peu se livrer. Un très joli roman qui se dévore!
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« Ne m'appelle pas Capitaine » Lyonel Trouillot (Actes Sud 140p)
Un roman coup de poing. Haïti : Aude, une jeune fille de « bonne famille », gosse de riche qui vit en vase clos dans son monde, n'ayant jamais mis les pieds dans un des faubourgs pauvres de Port-au-Prince, s'ennuie dans son univers familial et amical aussi aisé que futile. Pour ses cours de «journalisme par correspondance» (! une occupation comme une autre), elle choisit de faire le portrait d'un quartier en déshérence, par le biais d'un de ses habitants, vieil homme apparemment rustre, mais porteur d'une mémoire de toute une frange de la population locale. Aude va nouer des liens avec un jeune garçon de ce faubourg qui va l'introduire dans ce monde, et au fil des rencontres avec le vieux «capitaine», elle va prendre conscience d'un univers de pauvreté endémique, de la dictature d'un pouvoir tortionnaire, de la corruption, la misère effarante qui engendre les déchainements d'agressivité… le vieil homme lève peu à peu le voile sur un pan de son histoire intime, bouleversée par une rencontre qui a laissé une trace indélébile.
C'est un portrait sans concession d'un monde de riches qui vivent sur le dos d'une population misérable sans lui accorder un regard. C'est la lumière crue sur les dégâts qu'engendre la misère extrême, et sur la soif de solidarité qui persiste encore ici ou là, malgré tout. C'est la révolte, nécessaire, qui se cherche une voie. C'est aussi une histoire d'apprivoisements mutuels. C'est un beau, très beau roman, écrit d'une plume ciselée, qui détaille avec finesse les ressorts des comportements humains, qu'on ne lâche pas avant de l'avoir terminé. Comment ne pas vibrer et frémir avec et pour ce peuple haïtien, toujours prisonnier de la surexploitation ?
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Un livre bien écrit et interessant mais trop court (155 pages), alors que certains thèmes méritaient plus d'attention.
Je n'ai pas pu m'empêcher de penser au superbe Bord de canal d'Alfred Alexandre, situé en Martinique mais abordant également le thème de la jeunesse noire et laissée pour compte de Fort-de-France.
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Lyonel Trouillot est l'un des auteurs majeurs de la francophonie.

Il fait partie de l'élite intellectuelle haïtienne. Son héroïne, Aude, fait partie de l'élite des riches blancs du sommet de Montagne Noire à Port-au-Prince. Pour une enquête journalistique destinée à valider une formation à distance, elle est amenée à decouvrir la ville du bas de la Montagne, là où les dictatures et peut-être les séismes (mais il n'en est pas question) n'ont laissé que ruines et où se réfugie la misére. C'est là qu'elle rencontre Capitaine, mémoire tourmentée de ce lieu. Ce vieux Capitaine habité par tant de disparus qu'il ne veut plus être nommé Capitaine.

Aude, quant à elle, héroïne de ce roman initiatique, commence à prendre conscience de l'artifice et du mensonge dans lequel elle vivait et peu à peu, elle devient elle même, libérée de ces mensonges
Lien : http://www.lirelire.net/2018..
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Le roman de Lyonel Trouillot, auteur haïtien vivant lui-même en Haïti, part du personnage de Aude, une jeune fille blanche, issue d'une très riche famille protégée par le pouvoir. Désoeuvrée, elle s'inscrit à une école de journalisme par correspondance, et dans ce cadre va devoir sortir de son milieu, pour un « devoir. »

Elle va rencontrer alors à la fois un personnage, un quartier, l'histoire de son pays et modifier peu à peu sa vision désenchantée du monde. En déclenchant les souvenirs du « Capitaine » un vieil homme riche d'histoires et de l'histoire du quartier et de l'île. En le faisant remonter dans son passé, elle lui offre sans le savoir une occasion de renouer avec la vie.



J'ai eu un drôle de rapport avec de roman, parce que ce fut d'abord visuel. Je dois le dire, les couvertures des livres papier m'importent et jouent souvent sur mes choix. (ici j'ai reçu ce livre sans l'avoir choisi.) Et j'ai longtemps adoré les livres d'Actes Sud aussi pour leurs couvertures.

Mais quand j'ai vu celle-ci… Grosse déception je l'ai trouvée affreuse.



Et après coup, je suis certaine que cela a influé sur ma première approche du roman.

Je pense pouvoir dire qu'avec une autre couverture, mon approche aurait de suite été plus confiante.

Je suis donc entrée dans cette lecture presqu'à reculons. Néanmoins, quand j'en étais au point de devoir poster mon avis de la page 100, j'étais déjà embarquée dans l'histoire. Sans passion, mais de façon dévorante, embarquée. Même si j'ai retrouvé des ambiances dues à mes lectures de Dany Laferrière et à un précédent roman de l'auteur (« Yanvalou pour Charlie » que j'ai préféré), j'ai apprécié cette lecture.



Je craignais un peu le cliché de la petite fille riche et blanche qui découvre la vie en sortant de son milieu, et adoptée gentiment après des épreuves par les noirs du quartier pauvre. le roman pourrait frôler cela, mais l'évite avec une intrigue, un style et des personnages en profondeur. Les personnages principaux que sont Aude et les jeunes du Morne Dédé, Jameson, Magda, et les autres sont surprenants de diversité et le passage à l'écriture de leur langage presque oralisé parfois, sonne bien et donne chaleur et naisssance dans mon imaginaire au lieu où vit Capitaine et où il héberge ces jeunes. le récit m'a baladée habilement entre des univers bien cloisonnés, que malgré un livre court j'ai pu ressentir sans superficialité.

La rencontre entre les deux classes sociales est rude, heurtée, dérangeante : les codes et hypocrisies du milieu familial d'Aude, avec sa mère hallucinante de préjugés, sa tante ultra-raciste, son potentat de père, et l'oncle… L'oncle à la marge qui justement lui a permis de rencontrer ce fameux Capitaine. Elle pourrait facilement être impossible. (Aude parlant du Morne -dédé : « Etrangement, je me sentais plus dépaysée que lors de mes premières visites à Paris et New-york »…)

C'est donc loin d'être gagné dès le départ.

Mais si Aude n'a jamais franchi les limites du petit monde policé à l'intérieur de son milieu, elle a déjà en elle des brèches, qui la font douter des certitudes de sa famille bien-pensante. Au fil du récit, les liens s'enrichissent, sans être faciles, gagnent en beauté, génèrent des choix, provoquent des conséquences.



Lyonel Trouillot signe encore un ouvrage engagé, vivant et toujours plain d'espoir, du côté de la vie.

J'aime son écriture qui alterne les types de narration, les styles en fonction des personnages. Et cette absence de cynisme. La plongée dans Haïti est passionnante pour découvrir un autre monde par la lecture. Et j'ai beaucoup aimé l'évolution difficile, mais sensible des personnages vers une humanité plus tissée de rencontres et d'ouvertures, de pulsion de vie. Une lecture humaniste donc qui va bien au-delà de la découverte de Haïti.
Lien : http://lautremagda.hoibian.c..
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Pour une ou deux raisons, ce roman n'est pas tout à fait un coup de coeur, mais il n'en est pas passé loin. C'est le premier que je lis de cet auteur haïtien, je ne connaissais pas du tout son style ni ses thèmes, je l'ai acheté sur la base du titre (incroyable) et de la couverture de l'illustratrice anglaise, Kemi Mai, qui est superbe.

La confrontation de deux personnalités et de deux milieux sociaux aussi différents que ceux de Francis (alias le Capitaine, ancien champion et enseignant en arts martiaux) et de Aude, jeune fille riche qui s'est inscrite un peu par désoeuvrement à un cours de journalisme par correspondance, et doit réaliser une enquête sur un quartier qu'elle ne connaît pas, du point de vue d'un témoin. Ce roman écrit d'une voix puissante et un peu folle allie l'amour des mots, du récit et des vies, de destins divers, à une étude sociologique d'un quartier de Port-au-Prince en Haïti, le Morne Dédé, presque un personnage à part entière. le quartier est réel, et le Capitaine nous conte la déshérence sociale à mesure que les habitants quittaient les lieux, ou parfois mouraient dans les geôles de la dictature. Il est la mémoire, l'héritier généreux de toutes ces existences ignorées qu'il fait revivre dans ses monologues, héritage qui convainc Aude d'essayer autre chose, de sortir des rails pour découvrir la fraternité et une action, un travail social modeste qui prend du sens.

Le roman est plus complexe qu'il n'y paraît, car derrière l'écran de l'histoire de son quartier, Francis cache autant que possible sa propre histoire, voire son identité, car il est en soi un mystère, et l'on sent bien qu'il faut qu'il parle pour réparer. Cela se fera grâce à l'oncle d'Aude, Antoine, qui partage un passé politique commun avec Francis, et qui réconciliera la jeune fille avec elle-même, tout en l'éloignant du cercle par trop prévisible de la famille et des connaissances d'un "bon milieu". Aller au bout des mots permettra à tous de prendre un nouveau départ, et d'allumer l'espoir dans les yeux des jeunes protégés du Capitaine (sous ses airs bougons).

Un bémol pour moi, dans une construction certes virtuose mais parfois déstabilisante pour ne pas dire décousue. Lyonel Trouillot aime les mots, cela se voit, sa langue est riche et colorée, les belles formules abondent, mais comme cela arrive parfois, avec un sens de l'expression un peu systématique, un peu trop visible aussi. C'est tout de même un magnifique voyage riche en humanité, pour faire découvrir un pays meurtri, toujours résilient mais proche de l'agonie.
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Née dans une riche famille de Port-au-Prince, Aude mène une existence de petite fille gâtée, loin de la misère des bas quartiers. Pour tromper l'ennui, elle s'est inscrite à une formation de journaliste et doit, pour un devoir, quitter le confort et aller à la rencontre des habitants du Morne Dédé, un quartier pauvre. Son interlocuteur : le Capitaine, un ancien maître des arts martiaux, témoin d'années de lutte et de rébellion.

Les premiers instants sont tendus, à l'image de ces rues qui se jouent de la jeune fille dans sa voiture tout neuve.

Entre la jeune fille et le vieux sage, ce sont deux mondes qui s'affrontent et se découvrent. N'ayant a priori rien en commun, le dialogue pourrait tourner court mais pourtant la communication passe. Chacun y trouvant son compte, dépassant l'un la rancoeur, l'autre les préjugés.

Ce sont alors des secrets de famille, l'histoire mouvementée de Haïti, des souvenirs de l'ombre qu'ils partagent, faisant place à la vie et aux sentiments. Une lecture toute en découvertes et émotions.
Lien : https://nahe-lit.blogspot.co..
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Lyonel Trouillot, c'est un auteur dont j'ai beaucoup entendu parler par une de mes professeurs de français du collège car il vient d'Haïti, ce pays qu'elle affectionnait beaucoup et pour lequel nous faisions aussi des actions humanitaires ! Combien de fois m'a-t-elle parlé des premiers romans de cet auteur même après mes années collèges quand je la croisais ? Mais jamais je n'avais franchi le pas ! Quelques années après sa disparition, j'ai enfin pris le temps de le découvrir avec une pensée affectueuse pour elle tout au long du livre.

Dans ce roman, l'auteur nous livre une rencontre entre deux classes sociales de Port-au-Prince. C'est rude, et parfois dérangeant, mais tellement véridique !

Un roman très court qui aurait pu être un peu plus développé mais son faible nombre de pages en fait à la fois un condensé d'humanité et un ouvrage engagé où l'auteur cherche l'espoir d'un pays uni sans ségrégation.

Malgré un style haché qui peut perturber la lecture (ce fut mon cas dans la première partie du livre), on retrouve une certaine poésie et pudeur dans les mots de Lyonel Trouillot.
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