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Ce livre est complètement déjanté et loufoque au possible.
Impossible de vous en restituer mon ressenti tant je ressors déboussolée par cet étrange livre. Moi qui ai tant aimé les deux derniers romans d'Emilie, Lunch-box et le prince à la petite tasse, j'avais envie de découvrir ses anciens opus.
Me voilà donc à lire L'enlèvement des sabines.

Une poupée gonflable en guise d'au-revoir pour Sabine qui quitte son entreprise pour se lancer dans la poésie, c'est original comme cadeau. Ça devient surtout très gênant quand il faut voyager dans le train avec cette poupée sexy.

À côté de cette autre Sabine parfaite il y a un petit monde qui gravite. Tous cinglés. La mère de Sabine qui m'a bien fait rire tant elle est maboule à s'exciter sur la boîte vocale de sa fille à tout bout de champs. 2' pour laisser un message à sa fille alors qu'un condamné à mort a tout le temps qu'il veut pour son dernier message. Pauvre mère.

Puis il y a le mari de Sabine, Hans, metteur en scène. On ne sait pas trop ce qu'il fait là ni à quoi il sert mais bon les présentations sont faites.

Ce roman s'articule autour de multiples formes de narration: des dialogues scènettes pour Hans et Sabine, un monologue déjanté quand c'est la mère qui gueule, des lettres que Sabine écrit à sa poupée, et bien d'autres formes.

Bref, c'est un roman qui m'a semblé très brouillon sans fil conducteur avec un mic mac de style en tout genre. J'ai retrouvé certes avec plaisir l'humour singulier de cette auteure. Mais c'est à peu près tout. Ses derniers romans sont bien plus aboutis selon moi. Encore heureux.
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« L'enlèvement des Sabines » est un roman assez surprenant qui se lit facilement. Il est moderne dans sa construction et dans les sujets qu'il aborde mais ne me semble pas entièrement abouti.
Émilie de Turckheim raconte l'histoire de Sabine une jeune femme de 40 ans qui vit avec un célèbre metteur en scène. Elle a choisi de ne pas avoir d'enfant et bien que tout l'oppose à sa soeur Fanny, elle apprécie sa nièce prénommée Kassaline.
Car Sabine est une mal aimée.
Aux yeux de sa mère Fanny, sa soeur aînée, est une femme parfaite. Elle est avocate et a une vie de famille équilibrée. Sabine elle, est réservée et son travail consiste à fabriquer de faux livres pour la décoration.
Pourtant, quand elle a quelque chose à dire ou à faire elle ne fait pas semblant. C'est ce que lui reproche sa mère en permanence en lui laissant des messages sur son répondeur téléphonique. On ne sait pas si c'est à cause du harcèlement téléphonique de sa mère ou de la vie avec Hans son mari qui a quelque chose du pervers narcissique mais Sabine ne va pas très bien, elle voit des mouches qui sont de plus en plus nombreuses.
Pourtant elle décide de prendre sa vie en main en démissionnant de son travail pour écrire des poèmes. Alors quand ses collègues lui offre une poupée gonflable prénommée également Sabine elle est surprise mais n'ose pas refuser. Un cadeau c'est un cadeau, même encombrant. Et puis, la Sabine siliconée va devenir son objet transitionnel, sa confidente au quotidien.
Pourtant cette histoire qui commence comme une comédie va basculer dans le drame, miroir acide et cruel de notre société.
La particularité de ce roman en dehors de son sujet un peu étrange c'est le mélange des modes de narration. Ce doit être la mode car en ce moment je ne lis que des romans qui utilisent des constructions originales en multipliant les styles : le dialogue, le monologue, la troisième personne du singulier, des fragments de discours, une interview... mais au final je n'ai pas vu le rapprochement avec L'enlèvement des Sabines, le tableau de Poussin évoquant la domination des femmes par la violence.


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Je referme ce livre avec un sentiment mitigé...
J'ai aimé le rythme de l'écriture d'Emilie de Turckheim, tout comme dans "Pop Corn Melody" sorti en 2015. Ici, le changement de style narratif appuie encore sur cette instabilité de souffle; comme si l'on passait du sprint à la course de fond et inversement. Comme si on percevait les battements de coeur tantôt affolés, tantôt léthargiques de l'héroïne, prénommée Sabine.
L'intrigue tourne autour de cette quadragénaire qui n'a jamais réussi à avoir d'enfant, qui souffre de ne pas être la préférée de sa mère et qui décide de quitter son boulot pour se mettre à écrire de la poésie.
C'est d'ailleurs à l'occasion de son pot de départ que le cadeau de ses collègues, une poupée gonflable, prénommée elle aussi Sabine, que l'incongruité de sa place au coeur de la société va se révéler. En effet, Sabine est une femme que l'on a toujours qualifiée d'effacée, à tel point qu'elle se sentirait presque invisible. le monde qui l'entoure se révèle violent, agressif pour une personnalité aussi éteinte. Tout l'émeut; y compris cet espèce de double en plastique...
Mais c'est là où le bât blesse: où donc veut nous amener l'auteure? J'avoue ne pas encore avoir compris... Est-ce une réflexion sur la femme dans la société? Sur la violence qui nous entoure? Sur la folie?
Vraiment, je demeure perplexe...
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La femme et la poupée
Émilie de Turckheim nous revient avec un roman aussi original que dérangeant, aussi gonflé que la poupée qui y joue un rôle prépondérant.

La vie de Sabine n'est pas des plus joyeuses. Entre un compagnon tyrannique, un travail décevant, une mère qui n'a que peu de considération pour elle, elle esaie de faire bonne figure. Avant de toucher le fond, elle décide de démissionner pour se donner un peu d'air. Pour son pot de départ une surprise l'attend. Ses collègues ont choisi de lui offrir une poupée qui porte le même prénom.
Cette seconde Sabine mesure 1,58 m pour 40 kg. Fabriquée par une entreprise familiale située au Mans, elle est faite en élastomère thermoplastique «avec toucher effet peau et finitions réalistes».
Son premier réflexe est de revendre cet encombrant cadeau: «Ayant passé l'âge de jouer à la poupée, je la revends sans y avoir touché. Prix proposé: 6 999 € ». Sauf que Sabine a quelques atouts. Elle est silencieuse, calme et toujours présente.
Elle ne téléphone pas de manière intempestive comme le fait la mère de Sabine en se plaignant que le répondeur n'accepte pas de messages plus longs que deux minutes. Des messages qui montrent tout à la fois que cette ancienne mannequin à une bien piètre image de sa fille et une préférence affirmée pour sa soeur Fanny, une avocate «responsable et bosseuse».
La poupée Sabine écoute avec un sourire gentil sa nouvelle «propriétaire», bien loin de ce que lui fait subir Hans, son mari metteur en scène prompt à la dévaloriser ou même à l'humilier.
Émilie de Turckheim a eu la bonne idée de proposer entre les chapitres quelques dialogues éclairants qui viennent alterner avec le long monologue de la narratrice. Des discussions qui illustrent la difficulté à dialoguer de manière apaisée, des débuts qui ne seraient sans doute pas importants, s'ils ne s'accompagnaient de préjugés blessants.
« L'époux. — L'humanité entière sait pourquoi tu ne conduis pas ! Tes grands-parents sont morts dans un abominable accident de voiture! Grillés dans les flammes! Pauvre petite fille ! Tout le monde perd ses grands-parents, Claire ! Et c'était il y a vingt-cinq ans !
L'épouse. — Ils sont morts sous mes yeux! J'ai passé un mois en réanimation à l'hôpital! J'ai eu des greffes de peau! J'ai failli mourir!
L'époux. — Moi j'ai failli mourir d'une intoxication à la salmonellose en colonie de vacances. Tout le monde a failli mourir une fois dans sa vie. On n'a pas tous des chauffeurs pour autant.
L'épouse. — Inculte.
L'époux. — Qu'est-ce que tu racontes ?
L'épouse. — Quinze jours de vacances et tu n'emportes pas un seul livre.
L'époux. — Tu vas encore me faire chier avec cette histoire de livres? En vacances, je me repose! Je ne fais rien! Je me vide la tête!
L'épouse. — Il n'y a rien à vider! Ta tête est déserte! Même Dieu n'est pas dans ta tête! Tu n'as pas de Dieu! Tu ne vois pas Dieu! »
Et tandis que la situation empire, un petit miracle se produit : Sabine aide Sabine à s'émanciper… allant même jusqu'à transformer les sarcasmes de son mari en jalousie. Dès lors le roman prend une toute autre dimension. La violence sourde et le machisme rampant viennent se fracasser sur la solidarité nouvelle entre la femme et la poupée. le rôle de l'homme et de la femme au sein du couple sont remis en question et vont finir… mais vous le découvrirez par vous-mêmes !
Ce roman est sélectionné pour le prix Anaïs Nin 2018 qui récompense «une oeuvre qui se distingue par une voix et une sensibilité singulières, l'originalité de son imaginaire et une audace face à l'ordre moral». Inutile d'ajouter que L'Enlèvement des Sabines répond parfaitement à ces critères.

Lien : https://collectiondelivres.w..
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Emilie, c'est moi, Alexandra, une des premières lectrices de L'Enlèvement des Sabines.

Dites-donc, vous ne faites pas dans la dentelle, je vais avoir deux minutes pour énoncer l'extase souriante et cynique que m'a procurée cette lecture.

Alors, comme ça, Sabine en a soupé de son boulot et décide de tout plaquer pour écrire de la poésie. N'en rêvons-nous tous pas ? de sortir des griffes du quotidien, de ce que l'on subit tous les jours, cinq jours sur sept. Mais beaucoup d'entre nous sommes déjà si honteux d'admettre s ‘ennuyer au travail… Alors on se tait, et on continue notre sale besogne.

Sabine ne va pas partir les mains vides, puisqu'elle reçoit en cadeau de départ une jolie poupée, grandeur nature, au nombril déformé et à la cicatrice de varicelle sur le visage. Histoire de se donner bonne conscience sur les critères trop souvent élitistes des canons de beauté.

C'est avec un humour corrosif et dénué de compassion que vous nous exposez toute la violence des qu'en-dira-t-on. Vous nous plongez dans l'absurdité que nous bénissons, malgré nous, de l'incandescence folle de la recherche de la perfection : avoir un gendre idéal, représenter le couple parfait, pour le meilleur et pour le pire, mais surtout pour le meilleur, puisque nous fermons tous les yeux sur le pire, former une famille, car avoir des enfants n'est-il pas le dessein de toutes femmes ? Ne pas en vouloir, ou ne pas pouvoir en avoir, ferait-elle de nous des sous-femmes ?

Réussir, faire rire, toujours avoir le bon propos, avoir un travail honorable et être l'épouse et la mère parfaites.

Emilie, vous faites voler en éclats tous ces dogmes qui font de nous des moutons de Panurge. Et nous, les femmes, les objets de convoitise et de violence chez les hommes. Sabine, en protégeant sa poupée, tente de protéger toutes les femmes, du désir de propriété des hommes. A commencer par elle-même.

Toute cette violence insidieuse nous appartient et nous entoure. On joue les saintes Nitouche, et les hommes se jouent d'autant plus de nous.

Toutes ces cérémonies de pacotille, ces apparats de bienveillance ne sont que de la poudre aux yeux.

Sabine l'a bien compris et tente de s'extirper, non sans mal, de ces diktats en se voilant le regard de mouches sur les yeux. Ces mouches qui bourdonnent sur la réalité, la vérité, qu'elle-même semble être la seule à voir !

Entre la décrépitude de son couple et de son compagnon égocentré, Hans, les exigences extravagantes de sa soeur perfectionniste, relayées par sa mère déployant toutes les forces possibles à la rabaisser, il aura fallu une poupée en plastique, l'autre Sabine, pour révéler la vraie Sabine. L'aider à s'arracher des regards lubriques des hommes, aux équations logiques et résolues des vies qu'on cherche à tracer sans bavures.

Entre monologues désopilants laissés sur le répondeur de Sabine par sa mère, des dialogues incisifs entre Sabine et Hans, metteur en scène qu'on crie au génie, et les confidences de l'héroïne auprès de son double sur ses amours et la violence des hommes qui ne voient que des chiennes, Emilie, vous décapez la littérature dans le fond, comme dans la forme.

Je ne sais pas si ma chronique a dépassé les deux minutes, mais relevez que L'Enlèvement des Sabines m'a fait sourire, exploser, jubiler, rire, m'interroger, et finalement penser que la réussite absolue réside dans un seul précepte : être ce que l'on veut être. Et avoir le courage de l'être.
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Si Sabine a manifesté, auprès de ses collègues, sa fascination pour un couple japonais atypique, (vu à la télé), elle est loin de s'imaginer que son cadeau de départ sera une love doll, appelée en japonais «  ai dôru ».
Pourquoi ce choix ? Que va penser son homme, Hans? Que faire de cette Sabine 2? Passer une annonce ? En attendant, Sabine cède en fait sa confidente. Quand Hans, metteur en scène, la veut dans sa pièce, tout bascule. On devine la volonté de dénoncer la violence faite aux femmes, qui entre en résonance avec notre société.

Telles des miscellanées se mêlent des rêves,les monologues d'une mère envahissante, aux paroles culpabilisantes, diverses conversations, bribes de discours, interviews.
Maintes thématiques abordées sans tabou: le harcèlement au travail , dans le train, la solitude, les relations familiales, le couple,la procréation,la folie, même le recyclage des livres !
Emilie de Turckheim témoigne d'une audace créative vivifiante, d'une imagination délirante. de la comédie à la soudaine cruauté quand le monstre tapi surgit.

Un roman singulier tout en ellipse, chargé de références littéraires, mythologiques, dont la liberté de ton peut déstabiliser. le côté théâtral divertit, mais le tragique sidère. Un OLNI !
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Sabine quitte son travail après 15 ans de bons et loyaux services, pour se retrouver avec une poupée grandeur nature en guise de cadeau de départ.

La société est tellement exigeante, elle impose sa normalité, faire des enfants ou pas, et même jusqu'au nombre qu'il faut avoir.
Je parle en connaissance de cause, j'ai fait le choix de n'en avoir qu'un, vous n'imaginez pas l'outrage que c'est, aux yeux de la populace.
Les jugements et les réflexions piquantes qu'il faut supporter.

Le personnage principal subit une mère tyrannique et destructrice, j'avoue avoie eu envie de l'assommer à plusieurs reprises, quelle horreur.

Que penser de ces sex dolls, je suis très partagée sur le sujet.
D'un côté, je me dis que si ça doit enlever la frustration sexuelle et les pulsions que les "monstres" ne savent pas contrôler, alors tant mieux.
Il y aura peut-être moins de femmes violées et donc moins de passage à l'acte.
Mais d'un autre côté, je suis très gênée par cette reproduction fidèle de la femme, orifices compris.
La poupée, elle, est toujours d'accord pour faire l'amour et il ne faudrait pas que du coup, au contraire, l'homme finisse par se passer du consentement de la femme et passe à l'acte.

Que dire sur ce roman, c'est assez difficile, je suis sur une impression d'originalité et de bizarrerie, mais n'est-ce pas ce que je cherche quand je me tourne vers la littérature blanche.
Il faut savoir qu'elle est concernée à 10% dans mes choix de lecture.
L'aspect psychologique est particulièrement fort, et ce à tous les niveaux.


Lien : https://leshootdeloley.blogs..
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Sabine démissionne et pour fêter son départ, ses collègues lui offrent une poupée aussi grande qu'elle, une sex doll, à la place du ficus attendu. Et cerise sur le gâteau, cette poupée s'appelle Sabine, comme elle. Après un temps d'étonnement teinté de honte, elle deviendra finalement sa confidente, son oreille attentive et peu à peu son instrument de libération.

Emilie de Turckheim m'étonne et m'enchante ! Je l'ai découverte avec son roman Popcorn Melody et j'avais été tellement emballée que j'ai sauté sur celui-ci sans réfléchir.

Et j'ai bien fait.

Ici elle joue avec tous les styles de parole : théâtre, poésie, interview, monologue à un répondeur téléphonique, dialogue au supermarché… C'est l'originalité de ce roman. Elle met en scène les petites violences théâtrales de la vie (comme cette dispute au supermarché entre un mari et sa femme pour du fromage râpé… C'est succulent) et se questionne, nous questionne sur le rapport de couple.

« Un couple est le plus bizarre des groupes humains. » nous dit-elle page 115 et illustre-t-elle à travers les différents tableaux qu'elle nous expose.

La violence est aussi bien présente dans le rapport mère-fille. Une mère érudite, qui fait constamment référence à la mythologie pour illustrer ses propos et peut-être pour rabaisser sa fille, une mère tyrannique, une mère abusive.

Ce texte est jubilatoire, j'ai ri, j'ai acquiescé, j'ai souligné la hardiesse, j'ai apprécié la justesse des réflexions, et j'ai retenu la profondeur sous la légèreté.

Brillant et dérangeant !
Lien : https://krolfranca.wordpress..
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Une fable féministe, un conte philosophique qui surprend dans le fond comme dans la forme, avec plein de trouvailles narratives qui s'agencent toutes avec une remarquable précision. Sabine est un paradoxe : elle est le personnage le plus effacé, et pourtant, elle s'est libérée en rejetant les rôles assignés aux femmes : mère, épouse et fille. Absurde, grinçant et bien moins léger qu'il n'y paraît.
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Il était une fois Sabine. Quadragénaire plutôt timide, plutôt effacée, plutôt soumise. Soumise à une mère abominable, mal-aimante, despotique, insupportable… Soumise à un conjoint dont le pseudo génie artistique est supposé légitimer la tyrannie qu'il impose autour de lui.

Sabine a un rêve : écrire de la poésie, et vivre de sa plume. Prenant son courage à deux mains, elle démissionne de l'emploi qu'elle occupait depuis…trop longtemps. Lors de la traditionnelle cérémonie d'au-revoir, celle où chaque employé partant reçoit le traditionnel ficus (ailleurs, c'est aussi le bonzaï, j'en suis témoin ), elle découvre avec stupeur que ses collègues lui ont offert … une sex-doll ! (prénommée Sabine : eh oui, ils ont un humour fou chez Gutenberg)

« Une poupée aussi grande qu'elle, une cicatrice de varicelle en relief sous le nez, le bleu des yeux scintillant de fièvre … »

Elle, "la fille à ours", va se prendre peu à peu au jeu, voir en ce double en élastomère thermoplastique cette alliée dont elle a toujours manqué. Commence alors entre Sabine et Sabine un face-à-face étonnant. Les carences enfantines vont remonter à la surface. Les souvenirs aussi. Et les non-dits. C'est un peu comme si la Sabine de chair et d'os naissait à nouveau à sous le regard de celle dont on peut changer les yeux. Elle, si en retrait face à une soeur-préférée et à une matriarche ancien mannequin, va se révéler à elle-même. Elle va renoncer à la vente initialement envisagée de cette étrange invitée , faisant d'elle une confidente, nouant avec elle des dialogues dont le lecteur saura saisir toute la saveur, et tout l'effroi.

« Tu ne peux pas t'imaginer comme la violence a le sommeil léger. Elle dort juste sous la peau des hommes, un rien la réveille. J'ai reçu des réponses à ma petite annonce. Des dizaines, avec des fautes d'orthographe comme de l'acné sur un front d'adolescent. On me demande si tu es vierge, si ta matière est assez résistante pour supporter les coups de poing… »
Emilie de Turckheim a une fois encore trempé sa plume dans l'encrier d'un univers décalé, nécessairement dérangeant (oui, il faut faire bouger les consciences !). Elle dénonce avec ce style si particulier la violence, celle de la société, celle faite aux femmes. Elle libère la parole. Elle incise, et son scalpel est le sarcasme : celui qui provoque, subversif, atypique, aussi léger que fort, cynique, et tellement, tellement essentiel dans ce monde ! La liberté et la libération (des carcans sociétaux entre autres) sont des thèmes chers à cette autrice que j'aime autant que sa maison d'édition, les Editions Héloïse d'Ormesson. Il fallait oser les aborder comme elle l'a fait dans « L'Enlèvement des Sabines ». Brillamment !
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