Je pensais à l'arrivée dans un nouveau logement, simplement. En fait c'est une succession de logements, de démarches, de recherches, de déménagements pour et avec l'autre, de solitaire désagrègement.
Passant par le récit d'un ton détaché, neutre, si précis que dit comme à travers une somnolence, un rêve, des formalités de l'installation, mais il s'y ajoute aussi les recherches, les visites, le bail, les changements d'adresse, le partage des meubles.
Et cela est dit en petits (ou un peu moins petits) blocs de phrases dans un ordre qui déroute un peu, situations, pensées, la mise en caisse des livres et disques soigneusement classés, l'absence de livres dans un nouveau cadre, le dénuement peuplé, l'acceptation du cadre que l'autre décide, les rencontres avec les personnages accessoires et indispensables, les voisins, la vieille folle du 2ème, l'agent immobilier - les rencontres avec les personnages accessoires et indispensables, les voisins, la vieille folle du 2ème, l'agent immobilier
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Votre dossier ça passe pas. Vous gagnez pas suffisamment d'argent. On peut peut-être essayer comme ça mais c'est pas dit que ça marche. Le tout l'air de penser qu'on lui fait perdre son temps, qu'elle s'en fout complètement de nos histoires, qu'elle se paierait bien un kebab en sortant et qu'elle demandera au type de pas trop forcer sur la mayo parce que merde...
Je ferme la porte derrière moi, la serrure rouillée entre les dents qui raclent. La terre brûlée coule contre le bois qui menace de l'éteindre. Qu'elle brûle aussi la porte et que je ne revienne pas.
Le rebond métallique de la clé dans la boîte aux lettres me rassure : peut-être qu'en réaction, l'immeuble entier se fendra sous son poids
Je te regarde.
Je te regarde peindre.
Je te regarde peindre le mur.
Je te regarde peindre le mur du coin bureau.
Je te regarde peindre le mur du coin bureau ou plutôt non.
Je te regarde peindre le mur du coin bureau ou plutôt non je regarde ton ombre.
Je te regarde peindre le mur du coin bureau ou plutôt non je regarde ton ombre qui s'étend.
Je te regarde peindre le mur du coin bureau ou plutôt non je regarde ton ombre qui s'étend pour peindre
Je ne dirai plus de cet endroit que c'est chez moi.
Je ne dirai plus rien de cet endroit,
ni des précédents,
ni des autres.
Lecture d'un extrait de Jachère, de Philippe Aigrain, par Guillaume Vissac.
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