Dans sa préface, l'auteur précise que ces histoires sont sordides c'est à dire contiennent des faits, des personnages "méprisables, ignobles ou mesquines". Il nous plonge dans une Espagne du début des années 80 que je connais mal. le souvenir du franquisme est vivace, la démocratie ne satisfait pas tout le monde, beaucoup se plaignent du manque de reconnaissance. La nouvelle qui donne son titre au recueil plonge Pepe Carvalho dans les milieux de la télévision et le force à consommer sans relâche les oeuvres du réalisateur assassiné. le temps presse : celui qui l'a engagé risque d'être limogé d'un jour à l'autre, et notre détective tient à être rétribué pour sa peine. le Madrid de la Movida ne lui convient pas vraiment, et il est plus suiveur que véritable enquêteur, dans ce Madrid nocturne composé de lieux à la mode presque aussitôt démodés. Pepe ne se pose pas en moralisateur - mais s'il fallait lui poser la question, je suis sûre qu'il ressent de la compassion pour le coupable, non pour la victime irréprochable aux yeux de la morale bourgeoise.
La fameuse morale bourgeoise en prend un sérieux coup dans Jordi Anfruns, sociologue sexuel, la troisième nouvelle. Une jeune fille de bonne famille, pourrie gâtée par maman et chassée de la maison à cause de ses frasques, est retrouvée assassinée. Je ne vous parle même pas du scandale, ni des disputes entre les parents, ni encore de la droiture de la soeur aînée, mariée et mère de famille respectable. L'enquête de Pepe Carvalho va donner un grand coup de pied dans toute cette respectabilité - et il en paiera les conséquences aussi.
Plus courtes sont les nouvelles pairs.
Rendez-vous avec la mort à Up dans Down nous emmène, avec son titre qui n'est pas sans rappeler
Agatha Christie, dans les méandres des boites de nuit à la mode (encore une fois) où un assassinat est in-con-ce-vable - et a pourtant lieu. le signe de Zorro est la rencontre de plusieurs misères, toutes plus sordides les unes que les autres. S'en sortir est impossible - si ce n'est par la mort. Quant à Pepe Carvalho, je lui laisse le mot de la fin :
"Non, je n'ai jamais eu la tentation morbide de savoir ce qu'il est advenu des coupables dans les affaires que j'ai résolues, encore moins quand la responsabilité incombait à la police et aux juges. Je découvre des assassins, à la police et aux juges d'en faire des victimes. Côté victime, d'ailleurs, je me suffis à moi-même".
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