AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Sandman Mystery Theatre tome 1 sur 1

Guy Davis (Illustrateur)John Watkiss (Illustrateur)R.G. Taylor (Illustrateur)
EAN : 9781401263270
328 pages
Vertigo (21/06/2016)
5/5   1 notes
Résumé :
Written by comics legend Matt Wagner and illustrated by acclaimed artists Guy Davis, John Watkiss and R.G. Taylor, this first volume of the complete SANDMAN MYSTERY THEATRE collects issues #1-12 of the classic Vertigo series and features an insightful introduction by author and pop culture historian Dave Marsh.

The year is 1938, and the world is holding its breath—mesmerized by the onrushing storm that will soon engulf it in fire and steel. In New Yor... >Voir plus
Acheter ce livre sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten
Que lire après Sandman Mystery Theatre, tome 1Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Ce tome est le premier de la série, il contient les épisodes 1 à 12 (parus en 1993/1994) qui forment 3 histoires complètes.

-
- The tarentula (épisodes 1 à 4) - Tout commence par un rêve dans lequel apparaît la silhouette d'une femme en tenue de deuil avec voilette, puis un soldat de la première guerre mondiale avec masque à gaz, et enfin une toile d'araignée avec des cadavres de femmes. Wesley Dodds se réveille. Ailleurs Dian Belmont (25 ans) force la main à son père (le procureur du district de New York) pour sortir dans une boîte de jazz avec ses copines. À l'issue de la soirée, l'une d'entre elles est enlevée par une personne qui se fait appeler la Tarentule. Cette histoire se déroule en 1938. Albert Goldman a profité de l'époque de la prohibition et garde de bons contacts avec ses anciens associés. Wesley Dodds a hérité de la fortune laissée par son père. Sous son identité de Sandman, Dodds enquête en consultant les archives de lieux où il entre par effraction, et en questionnant des suspects soumis à l'action du gaz qu'il utilise.

Au départ, il s'agit d'une idée éditoriale mercantile pour savoir comment étendre la franchise Sandman rendue très lucrative par les récits de Neil Gaiman sur Morpheus (à commencer par Preludes & Nocturnes). À l'arrivée, une vague silhouette portant le casque de Morpheus apparaît fugitivement le temps d'une case de la première page et ce sera tout pour ce tome. Les relations entre les 2 Sandman seront clarifiées dans Sandman Midnight Theatre (paru en 1995). Wesley Dodds est hanté par des rêves plus ou moins prémonitoires. Et c'est tout pour les liens entre les 2 séries.

Donc inutile de venir chercher une dose supplémentaire du Sandman de Neil Gaiman dans cette série, il n'y en a pas. Matt Wagner s'empare d'un vieux superhéros de l'âge d'or de DC Comics pour replonger dans l'ambiance des pulps, mais avec un réalisme accru. le lecteur retrouve bien l'archétype du millionnaire oisif, avec majordome et belle demeure. Il retrouve également un thème plus récent qui est que les promenades nocturnes relèvent plus d'une contrainte, d'une fatalité, que d'un plaisir. Wesley Dodds cache bien son identité lors de ses activités nocturnes, mais uniquement avec un masque à gaz (justifié par le fait que son arme principale repose sur un gaz particulier), et il porte des habits de ville traditionnels, pas de costume moulant aux couleurs agressives.

Wesley Dodds bénéficie donc d'une aisance financière qui lui permet d'avoir du temps libre et de quoi financer ses 2 gadgets : un gaz aux propriétés hypnotiques et soporifiques, et une voiture dédiée à ses escapades nocturnes. Matt Wagner s'attache à rendre le plus crédible possible les activités officieuses de son héros. Sa position de nanti lui permet de croiser les gens influents à New York. Wagner reprend donc l'archétype du grand bourgeois à l'abri des soucis matériels, et introduit des modifications en montrant que Wesley Dodds est habité par sa mission du fait de rêves qu'il en peut pas contrôler, tout en étant un individu très réservé. C'est sa conscience et sa sensibilité aux actes de barbarie qui le contraignent à agir.

Pour ce qui est de l'intrigue proprement dite, Matt Wagner baigne dans son élément. L'année 1938 n'a pas été choisie au hasard, et Wagner insère des références culturelles et politiques régulièrement. Il a l'art et la manière d'immerger le lecteur dans des scènes banales révélatrices (un inspecteur expliquant à un autre au comptoir, qu'il a rompu les relations avec sa soeur parce qu'elle a épousé un noir). Il a concocté une intrigue qui entremêle les actes de barbarie (tortures et sévices sur des femmes) d'un détraqué sadique, avec des enjeux économiques issus de l'abolition de la prohibition en 1935.

Enfin, le caractère de Wesley Dodds et de Dian Belmont imprime une coloration particulière au récit. Wesley s'adonne à l'origami et à la poésie, et Dian veut contribuer à la société, autrement que par le sort de bonne épouse qui lui est réservé à cette époque, compte tenu de sa classe sociale. Les illustrations contribuent également fortement à installer une ambiance spécifique. Guy Davis est alors un débutant et son style déjà très particulier n'a pas encore l'aspect immédiat qu'il prendra dans la série consacrée au Bureau of Paranormal Research and Defense (il est possible de commencer avec Plague Of Frogs). Ses pages présentent une forte densité de cases : 8 en moyenne par page. Chaque personnage dispose d'un visage remarquable, généralement bien en chair, éloigné des canons actuels de la beauté émaciée. Chaque page prouve qu'il a effectué de sérieuses recherches sur l'architecture de l'époque, les tenues vestimentaires et les modèles de voiture. Dans sa façon de représenter les visages, il ne cherche pas le beau, mais chaque expression est parlante, sans être exagérée. Au premier regard, le lecteur a l'impression que ses cases sont un peu chargées en nombre de traits. Il préfère utiliser des entrelacs de traits fins pour figurer les ombres, plutôt que des aplats. Il faut donc un peu de temps pour s'habituer à cette esthétique différente, avant de pouvoir apprécier la richesse des illustrations et leur efficacité. Il faut également un peu de temps pour accepter le parti pris de David Hornung, le metteur en couleurs qui a un sens bien à lui de la couleur.

Matt Wagner développe un personnage peu utilisé dans l'univers DC, ayant un lointain rapport avec Morpheus, pour écrire une histoire bien noire dans le New York de 1938. Wagner et Davis se détachent complètement du monde des superhéros pour revenir à leurs sources, mais sans tomber dans le stéréotype de la justice expéditive (il est impossible de confondre Sandman avec le Shadow).

-
- Épisodes 5 à 8 "The Face" (illustrations de John Watkiss) - En février 1938, Dian Belmont et 3 copines s'offrent un bon repas dans un restaurant de Chinatown, à New York. Dian y croise Jimmy Shan (Zhang Chai Loa de son nom chinois), un de ses anciens amants, et un chinois pur souche. En sortant du restaurant, elles repèrent un masque accroché à un mat de mobilier urbain. En le décrochant, l'une d'entre elles découvre une tête tranchée en dessous. C'est le premier symptôme d'une guerre des triades en plein Chinatown, sans que la police officielle (celle des blancs) n'y puisse grand-chose.

Guy Davis laisse sa place à John Watkiss pour les illustrations. Ce dernier est tout aussi éloigné des styles traditionnels des comics que son prédécesseur. Il aime bien marier un encrage appuyé, à un encrage plus fin. Il ne souhaite pas rendre les visages particulièrement séduisant ou attirant ; il préfère se concentrer sur une impression globale avec des surfaces noires appuyées pour poser la forme en générale, et quelques traits un peu plus fins pour apporter les éléments complémentaires. À la lecture, cela donne des expressions qui se déchiffrent du premier coup d'oeil, sans ambigüité. Mais si vous aimez détailler les dessins, vous serez surpris par cette technique de composition qui fait coexister des surfaces parfois informes avec des traits structurants plus clairs, tout en restant un peu grossier.

Cela n'empêche pas Watkiss de réussir des compositions marquantes telles que Dodds en train de pratiquer la méditation dans sa chambre, ou la classe de dandy de Jimmy Shan. En fait Watkiss est à l'unisson de la narration : des images brutales et sans concession pour asséner une ambiance et une apparence, avec un fond travaillé tant pour la composante historique que pour la dramatisation. Effectivement ces illustrations permettent au lecteur de pleinement se projeter à cette époque et dans ce quartier. Pour la petite histoire, la mise en couleurs de Dave Hornung a été atténuée car il avait choisi une couleur jaune vif pour la peau des asiatiques qui avait été jugée offensante par certains lecteurs, alors qu'Hornung était dans la droite ligne du parti pris narratif, à savoir un récit de genre s'appyant sur des codes narratifs tels que le péril jaune.

-
Épisodes 9 à 12 "The Brute" (illustrations de R.G. Taylor) - À New York dans le quartier portuaire, un marin en train de lutiner une péripatéticienne sur le quai se fait agresser et tuer par un individu de plus de 2 mètres avec une très forte carrure. Arthur Reisling (un organisateur de combats de boxe très prospère) propose à Wesley Dodds de participer au financement d'une expédition scientifique en Antarctique. Ramsey est l'un des boxeurs participants aux combats organisés par l'entreprise de Reisling, il perd plus souvent qu'à son tour. Reisling lui propose de participer à des combats clandestins, plus dangereux mais beaucoup plus rémunérés. Or Ramsey a sa petite Emily (sa fille) à nourrir et à soigner (elle semble souffrir de la tuberculose). Dian Belmont continue à chercher en quoi elle peut contribuer à la société de manière constructive.

Cette partie est illustrée par R.G. Taylor dans un style moins marqué que celui de Watkiss, un peu plus proche de celui de Guy Davis, et tout aussi irréconciliable avec le style superhéros. Les composantes d'époque, sont bien respectées, même si elles sont moins détaillées que chez Watkiss. Les formes sont un peu plus esquissées, et les visages moins élaborés. Taylor se rapproche plus de dessins rapides portant la narration avec une vision artistique moins sophistiquée que celle de Watkiss.

-
Avec ces 2 histoires, Matt Wagner sublime le genre "pulp" de ces récits pour atteindre un récit riche, accessible, sensible, palpitant, brutal et intelligent. Il respecte les codes des pulps : récit d'époque, enquête sur un meurtre brutal et répugnant, héros portant un masque et disposant d'un gadget technologique (ici les cartouches de gaz de Sandman), descente dans les milieux populeux. Il dépasse les stéréotypes du genre de toutes les manières possibles. L'enquête ne se limite pas à taper sur les suspects et les indics jusqu'à remonter au coupable : il y a une vraie intrigue, avec un mobile plausible à chaque fois et un criminel autant servi par son intelligence que par la force. Il intègre plusieurs caractéristiques de la fin des années 1930 (abâtardissement du jazz noir par les blancs, racisme ordinaire, misère sociale, arrogance des classes favorisées, etc.).

Et puis il y a la relation naissante entre Wesley et Dian qui prend des allures de séduction complexe, fondée sur bien autre chose qu'une simple attirance physique. Il y a le sentiment d'insatisfaction de Dian Belmont qui refuse de se conformer à ce que sa position sociale lui dicte (profiter des sous de papa jusqu'à trouver un mari, puis profiter de ses sous à lui). Il y a les éléments très "pulp" dont le caractère fruste et basique permet à Wagner de montrer l'essence même du sujet qu'il traite. Emily (la fille du boxeur) est rapidement décrite. Ses propos ne ressemblent pas à ceux d'une fille de son âge, ils sont dramatisé exprès pour ajouter un pathos artificiel. Non seulement elle vit dans le dénuement, mais en plus elle souffre d'une maladie incurable pour laquelle le père ne peut même pas acheter les médicaments faute d'argent. Et pour faire bonne mesure, elle devient la victime d'un acte ignoble. Mais par ces artifices, Wagner expose l'horreur de la maltraitance des enfants d'une manière magistrale qui n'autorise pas le voyeurisme malsain. Impossible de rester de marbre devant ces horreurs narratives. Et quand il le faut, Wagner sait aussi user de subtilité. Lorsqu'il intègre le racisme ordinaire de l'époque, les termes méprisants sont présents. Mais c'est finalement Zhang Chai Loa qui aura la remarque la plus terrible quand il fait observer à Dian qu'elle ne l'appelle que Jimmy (surnom américanisé) et jamais de son vrai nom (= racisme ordinaire de l'individu qui ne fait pas le pas en avant pour rencontrer l'autre dans sa différence culturelle). Pour elle, Jimmy ne sera intégré que lorsqu'il aura adopté la culture du pays et abandonné la sienne.

Ces 2 histoires sont la preuve éclatante que la littérature de genre peut être aussi pertinente et profonde que la littérature générale.
Commenter  J’apprécie          20


Videos de Matt Wagner (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Matt Wagner
Dead Boy Detectives | Bande-annonce officielle VF | Netflix France
Livres les plus populaires de la semaine Voir plus
Acheter ce livre sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten


Lecteurs (1) Voir plus



Quiz Voir plus

Ce film d'horreur et d'épouvante est (aussi) un roman

Jack Torrance, gardien d'un hôtel fermé l'hiver, sa femme et son fils Danny s'apprêtent à vivre de longs mois de solitude. Ce film réalisé en 1980 par Stanley Kubrick avec Jack NIcholson et Shelley Duvall est adapté d'un roman de Stephen King publié en 1977

Le silence des agneaux
Psychose
Shinning
La nuit du chasseur
Les diaboliques
Rosemary's Baby
Frankenstein
The thing
La mouche
Les Yeux sans visage

10 questions
966 lecteurs ont répondu
Thèmes : cinema , horreur , epouvanteCréer un quiz sur ce livre

{* *}