De Marie-Thérèse Charlotte de France, Madame Royale, puis duchesse d'Angoulême, j'avais déjà lu : « La princesse effacée » d'Alexandra de Broca.
Ici, on (re)découvre la princesse dans un récit à la première personne, comme un témoignage qui nous serait délivré par-delà le temps.
L'auteur a fait de nombreuses recherches. Elle s'est bien sûr appuyée sur les 18 feuilles du journal écrit par
Marie-Thérèse durant sa captivité, mais aussi sur les archives, sur les minutes des différents procès, sur les témoignages des contemporains ayant approchés les prisonniers du temple de plus ou moins près…
Le récit est bien sûr fictif mais sonne étrangement juste à nos oreilles. Il est évident qu'une fillette de onze ans qui voit sa vie basculer sans réellement comprendre pourquoi et qui va rester prisonnière jusqu'à ses 17 ans, dont plus d'un an sans avoir connaissance de l'exécution de sa mère et de sa tante, va avoir un regard sans complaisance sur les révolutionnaires.
Le titre du livre vient du surnom que lui donnait sa mère,
Marie-Antoinette, et un de ses oncles (je ne sais plus si c'était le comte de Provence ou le comte d'Artois) :
Mousseline la sérieuse ou Mousseline la triste, du à son exceptionnelle gravité.
Très proche de ses parents, tout en précisant que sa mère était plus stricte que son père, la fillette a le caractère de
Marie-Antoinette (un révolutionnaire dira de la reine : «
Louis XVI n'a qu'un homme à ses côtés, c'est la reine » et napoléon qualifiera, des années plus tard,
Marie-Thérèse de « seul homme de la famille ») et de sa grand-mère qui lui a donné son nom.
C'est (selon l'histoire) au crépuscule de sa vie qu'elle décide de rendre public les évènements tels qu'elle les a vécus. Si la majorité du livre tourne autour de la révolution, une seconde partie, plus courte, raconte ce qu'il s'est passé après qu'elle ait été échangée contre des prisonniers (dont l'infâme Drouet, celui qui a dénoncé son père lors de la « fuite » de Varenne).
Marie-Thérèse a embarrassé les révolutionnaires. D'un côté elle était fille de roi, donc une « ennemie », d'autant plus que les révolutionnaire ne reconnaissait pas comme valable la loi salique qui interdit aux femmes de régner. D'un autre côté, c'était une fillette, un peu trop grave, un peu trop réservée, ayant vécu un emprisonnement éprouvant, et les chefs de la révolution craignaient que le peuple ne prenne fait et cause pour elle (d'ailleurs lorsque l'échange contre les prisonniers a eu lieu, ils l'ont fait partir de nuit et sous un faux nom… juste au cas où).
Le mieux pour eux était de la laisser dans l'ombre, oubliée. Dans des conditions de détentions lamentables qui ne se sont légèrement améliorées qu'après la chute de
Robespierre.
Marie-Thérèse a toujours gardé une haine tenace envers les révolutionnaires (on peut le comprendre), haine qui ne s'est pas étendu à la France ou au peuple français qu'elle a toujours aimé. Quitter la France pour l'exil fut un vrai déchirement pour elle.
Lorsque son oncle d'Artois va monter sur le trône, elle va le voir, impuissante, se rapprocher d'un extrémisme monarchique qu'elle condamne aussi sévèrement que l'extrémisme révolutionnaire. Hélas, il ne prendra en compte ses conseils que trop tard.
Par la voix de la duchesse,
Sylvie Yvert nous livre un portrait nouveau de
Louis XVI, plus qu'un homme incapable de décision et faible, elle nous dépeint un homme résolu à ne pas recourir à la violence, prêt à renoncer à la monarchie absolue mais pas à ses convictions (d'où son refus de signer la loi faisant des prêtres réfractaires des criminels).
Quelques soient les souffrances du peuple, quelle que soit la part de manipulation de la part des grand bourgeois, les conditions de détention de la famille royale après l'exécution de
Louis XVI ont été lamentables, surtout en ce qui concerne les enfants.
On a un peu trop tendance à parer les révolutionnaires de toutes les vertus, et les nobles de tous les vices, en oubliant que les monstres, eux, n'ont pas de classe sociale.