AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,99

sur 147 notes
5
19 avis
4
6 avis
3
4 avis
2
0 avis
1
0 avis
Si je me réfère à ceux que j'ai lus, les romans de l'écrivain espagnol Victor del Arbol sont peuplés de personnages sombres, rongés par la mémoire tragique de l'histoire nationale, hantés par les séquelles de drames familiaux, luttant sans espoir contre un mal-être personnel. C'était le cas dans Par-delà la pluie et surtout dans Toutes les vagues de l'océan, un thriller formidable et complexe dont je garde un souvenir ébloui.

Dans les premières pages de le fils du père, on apprend qu'un homme vient d'en tuer un autre, après l'avoir torturé. Comment cet homme, nommé Diego Martin, un professeur d'université bien établi à Barcelone, en est-il arrivé à commettre un tel crime ? Pour répondre, l'auteur embarque le lecteur dans la généalogie du meurtrier.

D'extraction misérable, originaire de la province d'Estramadure, la famille avait longtemps servi dans la domesticité d'une vaste demeure, la Grande Maison, appartenant autrefois à d'importants propriétaires régionaux. Une condition de soumission humiliante, qui avait pris fin de façon sanglante, lorsque la guerre civile avait porté à leur paroxysme les haines mutuelles de classes.

Frustes, sans formation, portés par des rancoeurs inextinguibles, le grand-père et le père de Diego ont été ballottés dans les équipées militaires de leur époque. Elles ont asséché leurs dernières onces d'humanité et de moralité. Deux mauvais garçons, deux brutes, tueurs à l'occasion, guettant des expédients pour survivre. Ils n'ont cessé de justifier des attitudes ineptes par leur « manque de chance », par la « nécessité de s'en sortir », les excuses classiques des losers qui saisissent les opportunités d'apparence facile, sans réfléchir aux conséquences.

Ces deux hommes, père et fils, se sont mutuellement méprisés et ont trouvé normal de brutaliser leurs femmes. Maltraitées, celles-ci se sont mises au diapason et se sont comportées en mères indignes. Quand ils n'ont pas détesté leurs enfants ou petits-enfants, ces hommes et leurs femmes les ont simplement ignorés.

A l'actif toutefois du père de Diego, le rachat de la Grande Maison en ruine, grâce à un billet de loterie gagnant. Une revanche sociale qui ne rapproche pas Diego de son père — dont on ne connaîtra d'ailleurs le prénom qu'à la dernière ligne du roman ; un artifice littéraire qui n'apporte rien !

Dans ce contexte d'abandon familial, Diego a failli mal tourner. Il s'est pris en charge, a suivi des études, est devenu écrivain, professeur d'université. Il a épousé une femme belle, brillante et riche, qui l'admire. Il s'occupe avec dévouement d'une soeur à laquelle il est très attaché : Liria, une femme au mental fragile, en perdition sociale et physique. Désormais aphasique, elle est hospitalisée sans espoir de sortie.

A l'instar de son père et de son grand-père, Diego ne pourra s'empêcher de saper ses propres fondations. L'auteur l'a fait naître sous le signe du scorpion, ascendant scorpion. Je ne suis pas féru d'astrologie et je n'y connais rien, mais j'ai toujours entendu dire que l'autodestruction était la malédiction incontournable de ce signe.

Comme son père et son grand-père encore, Diego en est arrivé à tuer un homme : l'infirmier en charge de Liria. Peut-être, lectrice, lecteur, te demandes-tu pourquoi ? Eh bien, pour le savoir, tu devras lire le fils du père ! Mais je te préviens ; la lecture de ce long roman très noir est difficile et quelque peu démoralisante. Un livre qu'on pourrait qualifier de feel bad.

La construction est habile, mais complexe. Les cinquante premières pages sont hermétiques et il m'a fallu refeuilleter les premiers chapitres pour avoir une idée à peu près claire de l'identité des personnages, pour appréhender une chronologie s'étendant sur près de quatre-vingts ans, et pour comprendre pourquoi des événements se passent dans l'agglomération de Barcelone, alors que tout a commencé au sud-ouest de l'Espagne.

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
Commenter  J’apprécie          401
En général c'est un livre très sombre, mais fort riche d'enseignements. À travers l'histoire d'une famille Espagnole étalée sur trois générations d'hommes dont l'existence ne fut pas une sinécure, l'auteur ratisse large en terme de thématiques abordées.

Sommes-nous inéluctablement marqués par les tares de nos géniteurs? Les fictions que nous construisons à partir de nos vécus ont-elles une part de vérité qui soit en tout point conforme à la réalité? Avons-nous le droit de porter un jugement global et péremptoire sur la vie de ceux qui nous ont précédés? Qu'est-ce que le bien, le mal? Qui est courageux et qui est lâche? Existe-t-il toujours une rivalité père et fils? Qu'est-ce que l'amour?

Pour voguer sur ces thèmes universels et intemporels, nous parcourons une partie du XXe siècle, en passant par l'Espagne sous Franco, l'Union Soviétique envahie lors de la seconde guerre mondiale, sous oublier une incursion au Sahara Oriental.

Tout au long du livre, l'auteur nous présente des vies faites de misère psychologique et de dénuement matériel, de torpeur intérieure et d'avenirs bouchés. Des existences remplies d'amours trahis, de rêves bafoués, et ce, dans un cycle qui semble, parfois, se répéter sans cesse.

L'histoire se termine sur une note touchante, empreinte d'humanisme et d'espoir. C'est tout en l'honneur de l'auteur après nous avoir fait voir toute cette noirceur.
Bref, c'est encore du grand art de la part de V. del Arbol!
Commenter  J’apprécie          60
Victor DEL ARBOL. le fils du père.

Diego Martin est professeur à l'université. Il vit dans une somptueuse villa en bordure de la mer avec son épouse et la fille de cette dernière. Il est actuellement en prison, détenu dans une unité d'évaluation et de soins psychiatriques . Nous sommes en 2011, en Espagne. Quel est donc l'évènement qui a conduit ce homme a être emprisonné ? Quel délit a-t-il commis ? Pour quel motif ? Diego nous narre son histoire personnelle. Je suis attérée par son histoire. Voilà déjà trois générations frappées par une étrange malédiction ; cette dernière percutte les hommes et se transmet de père en fils… Se poursuivra-t-elle encore pendant combien de générations !

En 1950, son père, Antonio, installé dans la périphérie de Barcelone, fréquentant les tripots clandestins a tué une homme au cours d'une bagarre. Afin de payer sa dette à la société, il est contraint de s'engager dans la légion étrangère, affecté dans un régiment sis dans le Sahara oriental. Lorsqu'il revient en Espagne, il fonde une famille. Son couple survit par enchantement. Il est bagarreur et frappe ses enfants et son épouse. Petit à petit les enfants quittent le domicile. Diego va avoir la possibilité de poursuite des études.

Dans les années 1930, les grands-parents de Diego se sont révoltés face à la puissante famille des Patriota. En effet, ces derniers, riches propriétaires terriens exploitent la famille d'Alma Vitudes, la grand-mère du narrateur. Simon, son époux sera mis en demeure de partir combattre sur le front russe, aux côtés des fascistes dans la division Azul de FRANCO. Il connaîtra l'enfer ce ces combats de la deuxième guerre mondiale dans un pays où règne un climat hostile  et des conditions épouvantables : neige, désert humain, malnutrition, punitions extrêmes, tentatives de désertion, fuites, guerilla, luttes d'autorité entre les divers chefs…. La guerre déshumanise les hommes. le grand-oncle de Diego, Joachim, le frère d'Alma a osé bravé les Patriota, il a été pendu. C'est le début de l'anathème.

Diego est hanté par la malédiction qui pèse sur les père, grand-père, ses ancêtres. Lui aussi, comme ses prédécesseurs va devenir un assassin. Il reconstitue sa généalogie, analyse les situations. Il a remplacé son père dans la fratrie, aidant les uns les autres, portant un regard bienveillant sur sa petite soeur Liria. Cette dernière souffre vraisemblablement de bipolarité. Elle use et abuse de psychotropes, mène une vie dissolue. Internée dans un établissement spécialisé, Diego est alerté par la conduite d'un infirmier, Martin Pearce. Il a découvert d'étranges photos de sa soeur dans l'appartement de cet homme. Il va donc poursuivre son objectif, mettre fin aux agissements de ce thérapeute. Et il devient un meurtrier et attend le jugement des hommes…. Est-ce que la malédiction va cesser ?

Ce roman noir est une recherche de filiation, La haine est présente dans chaque page. La tension sociale est sous-jacente. Nous naviguons dans l'Histoire du XXème siècle, de la guerre civile espagnole aux goulags sibériens russes. La lutte des classes, l'humiliation subie par les enfants, la fuite des pères, le manque d'amour, la force des mères, la peur installée dans ces foyers , l'absence de communications entre les divers membres des familles créent un sentiment d'insécurité, une envie de renverser le système. Ce récit s'achève sur le cri d'amour du père à son fils Diego : « Je t‘ai toujours aimé. Je n'ai jamais su t'aimer. » . Un cri d'amour d'un père lancé trop tardivement à son fils. Je vous recommande de vous plonger dans ce récit vibrant qui mêle à une saga familiale une page de l'Histoire de L'Europe. Bonne journée et belles lectures.

Je suis frappée par la couverture : ce portrait d'enfant en noir et blanc auquel un adulte ferme la bouche et lui tient la tête enserrée dans ces grandes mains… Est-ce pour l'empêcher de parler, de dire des vérités peu avouables…. Est-ce le père qui baîllonne ainsi son fils ?

Un grand merci à l'auteur et à ses traducteurs, Émile FERNANDEZ et Claude BLETON . Je réitère mon avis : les publications des éditions Actes sud, sont toujours de bonne facture ! Mais cela n'engage que moi, pauvre petite lectrice !
( 05/03/2024).
Lien : https://lucette.dutour@orang..
Commenter  J’apprécie          180
D'emblée j'ai été happé par ce récit qui débute comme un roman noir dans lequel « tout le monde ment et tout le monde dit à un moment la vérité». Diego Martin, prof de fac, de la cellule psychiatrique ou il est enfermé, nous révèle qu'il a enlevé Martin Pearce, l'a mis dans le coffre de sa voiture, parcouru 1000 kms jusqu'à la Casa Grande. Là, il l'a torturé et ensuite l'a tué de 2 balles dans la tête et appelé la police. Dès lors se posent à nous tout un tas de questions. Qui est Martin Pearce ? Quel lien entre lui et Diego ? Qu'a-t-il fait pour être assassiné de façon aussi horrible ? Pourquoi avoir fait 1000 kms avant de l'exécuter ? Qu'est cette Casa Grande où il va le tuer ?
● C'est à toutes ces questions -et à bien d'autres- que le roman va répondre. Il va le faire dans un style direct, incisif, sans fioritures, sans images ou métaphores inutiles et sans la moindre phrase de remplissage. Quelques aphorismes ou formules péremptoires superflus peut-être, mais qui correspondent parfaitement à l'esprit espagnol (digo yo). Il construit son récit de façon résolument moderne en passant de la forme autobiographique « je » (Diego se raconte) à celle du narrateur omniscient à la 3ème pers. D'autre part et sans que cela soit le moins du monde gênant pour le lecteur, il fait évoluer ses personnages sur 2 axes ; à travers le temps (1936/ 2011) et l'espace (Estrémadure/ Barcelone/ Sibérie/ Sahara...) . Ainsi on va les suivre à travers l'histoire sur plusieurs générations. Plusieurs thèmes, très espagnols eux aussi, vont être abordés: la famille et ses secrets, l'amour et la haine, la violence et la vengeance, le mensonge et la vérité , la fatalité...enfin, comme vous le voyez, plutôt la « sombra » espagnole que le « sol » qui brille bien peu. C'est cet ancrage dans la réalité hispanique qui m'a beaucoup intéressé. On est loin du simple roman noir.
● La famille. C'est avec la guerre civile et ses conséquences, le thème le plus souvent abordé dans le roman espagnol contemporain, avec le Coeur glacé d'Almudena Grande comme point d'orgue.
Ici, des familles il y en a deux, sur 3 générations. Les Patriota, grands propriétaires en Estrémadure et qui, depuis toujours dominent le Pueblo, et la famille du narrateur, les Martín dont les grands parents ont été les serviteurs à la Casa Grande, exploités et humiliés. Dans les années 50, ils ont émigré en Catalogne, en périphérie de Barcelone ou ils ont vécu dans des conditions déplorables. Les mots envers la cellule familiale, sont durs et sans appel. «  S'aimer, se pardonner, oublier. C'est ce que fait la famille (…) S'étriper, se trahir, se déchirer mais simplement à l'intérieur de chez soi. Ceux du dehors, on ne supporte pas le moindre mauvais regard d'eux contre qq'un du clan ». C'est entre autres ce que Diego ne va pas supporter...et il va larguer les amarres.
● Cette servitude des pauvres envers les riches exacerbe les passions, les rancoeurs, les haines Cette rage endémique qui est en eux, qui est le poison le plus nocif des Espagnols (voir actuellement la violence de genre), va s'exercer, certes pendant la guerre civile, mais aussi à l'intérieur même de la famille. Cette violence et cette rage – « Cain est éternel » disait Machado- continuent de se transmettre de génération en génération sans la moindre marque visible d'amour et de tendresse entre parents et enfants et dans une impossibilité d'aimer les autres. Terrible constat.
● Comme l'affirme la grand-mère, Alma Virtudes, les hommes de la famille sont infectés par le virus du malheur et de l'autodestruction et tous finissent par payer cette colère insensée qui les habite. Diego pourra-t-il échapper à cette malédiction ? Est-on condamné à être fatalement le fils de son père ? Voilà les questions qui se posent.
● Ses relations avec son père ont toujours été conflictuelles. « Je sais que tu me hais. Tu me hais parce que tu m'aimais. Tu te hais toi-même pour m'avoir aimé. » Ce père qui ne l'a jamais protégé, son silence quand il part pour l'université, ce père à qui il pense lorsqu'il aura l'occasion de « pouvoir revenir un jour et le regarder dans les yeux et pouvoir lui dire : « Je suis comme toi. Tu n'es pas meilleur que moi. » Ce père « qui n'a pas su être un homme, comment aurait-il pu être un père ? » lui laissera pourtant une lettre dont le contenu nous tirera quelques larmes à la fin du roman « Je t'ai toujours aimé. Jamais je n'ai su t'aimer ». Tel est le terrible paradoxe sur lequel se clôt le roman.
● Une lueur d'espoir tout de même dans ces mots que Diego, du fond de sa prison, adresse à sa nièce qui vient de naître : « Tu réussiras à briser la chaîne du temps, celle des hommes de notre famille qui détruisent tout ce qu'il y a de bon chez ceux qui s'approchent de nous. » Acceptons-en l'augure car « l'avenir de l'homme est la femme », en France comme en Espagne, si l'on en croit un célèbre poète.
Commenter  J’apprécie          141
Une nouvelle fois Victor del Arbol nous conte l'histoire de 3 générations, de 3 pères qui vont traverser l'histoire espagnole (Décidement en ce moment, je ne lis que cela....) de 1930 à 2010 avec le Mal au centre de ces histoires de fils qui ne sont pas aimés de leur père.
Victor del Arbol est souvent classifié dans les rayons polar, mais ce dernier Opus n'est pas un roman policier, c'est bien le roman qui manquait à son crédit.
L'histoire est complexe, et il faut un peu de temps pour situer les personnages, leur vie, leur destin, leur violence, leurs maux pour mieux comprendre ce prof d'université qui, de la prison où il est en attendant son jugement, nous parle de son lien cassé avec son père depuis 24 ans et de son amour indéfectible vers sa soeur.
Au cours de ce roman, l'histoire du grand-père nous emportera vers la Russie et la brigade Azul que j'avais oubliée et l'histoire de son père nous entrainera vers le sahara et la dernière colonie espagnole pour enfin comprendre comment le malheur (le mal) peut s'installer dans une famille au cours des générations.
La fin est magnifique mais je ne la dévoilerai pas.
Commenter  J’apprécie          60
Nouveauté Actes Sud / actes noirs, le fils du père, selon les échos et bruits de couloir serait le meilleur de Víctor del Árbol. On me prête un exemplaire afin que je découvre cet auteur espagnol qui tisse la petite histoire dans la grande Histoire.

Ce qui s'avère très casse-gueule dans les romans fresques, les romans familiaux comme le fils du père, c'est qu'avec la présentation de toute la famille, on se perd dans les générations, on se perd dans les situations de chacun (Je vous ai pas dit que j'étais un lecteur distrait ?). Víctor del Árbol a presque réussi un sans-faute.Il y a juste un passage dans lequel je n'étais plus certain du degrés générationnel dans lequel je me situais. Pour le reste, le lecture a été d'une fluidité exemplaire ce qui m'a permis d'entrer et ne jamais sortir de le fils du père.

J'en ai aimé la force, la dramaturgie, la structure, la tension, la thématique et les personnages. le fils du père est un roman qui semble manichéen mais ne l'est pas du tout. Il est d'une richesse thématique qui le rend plus profond sans être ennuyeux.

J'ai aimé découvrir cette Espagne par ce prisme là, le prisme d'un microcosme géographique et de 2 familles intimement liées par des rapports de forces ataviques qui fluctuent dans le temps.

Une réussite !
Lien : http://livrepoche.fr/le-fils..
Commenter  J’apprécie          60
L'avis de PRP reflète très exactement mon ressenti, ce qui m'évite d'en rédiger une qui serait également modérée, alors que j'apprécie beaucoup Victor del Arbol. Merci
PRP..........................................................................................................................................................................................................................................................................................................................
Commenter  J’apprécie          40
En septembre 2011, Diego Martin est en Unité d'évaluation et de soins psychiatriques. Diego Martin (quarante ans) marié et professeur d'université, a torturé et tué Martin Pearce (vingt-quatre ans) le 11 novembre 2010, après trois jours d'horreur …

Pourquoi cet homme, d'apparence pacifique, a-t-il commis un tel acte ? Ses écrits durant son internement seront-ils révélateurs ? Pour quelles raisons n'avaient-il pas revu son père depuis plus de vingt ans ?

En juillet 2010, Diégo était pourtant retourné au village (dans l'Estramadure) pour l'enterrement de son géniteur. Il y avait revu ses frères Octavio et Alberto ainsi que sa soeur Liria. Que c'était-il passé dans la Grande Maison, durant leur jeunesse ? …

Victor del Arbol va nous faire plonger dans les souvenirs des uns et des autres, de père en fils, sur trois générations. Essayer de décortiquer la complexité des liens filiaux, analyser le processus du pardon, de la résilience … Car Victor del Arbol a « le chic » pour appuyer là où ça fait mal !

Un très beau roman, sincère et empreint d'humanité (et de nostalgie) comme ce formidable auteur espagnol sait indéniablement en offrir à ses lecteurs ! Voilà un homme doué d'un talent fou pour l'écriture, qui s'exprime « avec ses tripes » !
Commenter  J’apprécie          120
Un gosse efflanqué, côtes saillantes, le regard baissé ou les yeux clos. Deux mains masculines qui embrassent sa tête ou l'emprisonnent, peut-être sur le point de rompre le cou fragile. le noir et blanc de l'image... La photo de couverture du huitième roman de Victor del Arbol génère un malaise. Amour ou violence, l'ambivalence est tapie sur le cliché. Et c'est la force de ce roman que de fouiller les rapports ambigus entre pères et fils.
Diego vient d'une lignée d'hommes maudits. Travailleurs pauvres dans une Espagne bouleversée par L Histoire, ils sont ballottés d'un village de l'Estremadure aux quartiers miséreux de Barcelone au gré des trahisons de l'un, des amours illicites de l'autre, selon les morts violentes ou les humiliations.
Simon, le grand-père a combattu aux côtés des Allemands au sein de la division Azul sur le front russe. Volontaire malgré lui de cette guerre pour être le frère de Joaquim, anarchiste engagé dans les brigades internationales, torturé et pendu au pont du village sous les yeux de toute la population réunie.
Le père, joueur et bateleur, ancien légionnaire, abandonne régulièrement foyer et enfants.
Les mères et grand-mères sont soumises ou méchantes, et souvent les deux à la fois.
Diego a voulu faire table rase de cet héritage maudit, se construire une histoire qui ne serait que la sienne, loin des drames et secrets de cette famille noyée sous les flots ravageurs de l'histoire et des vicissitudes intimes. Il a réussi. Auteur reconnu et enseignant à la faculté, il reste pourtant le fils du père jusqu'à dans son miroir où, chaque jour, il retrouve les mêmes traits, les mêmes sourires et les mêmes moues, comme un écho vengeur.
Et puis, il y a Liria, sa jeune soeur maudite, ensevelie vivante dans son mutisme et sa détresse.

C'est un roman puissant, charnel et bouleversant, qui brasse destins et histoire d'une écriture élégante et sobre.
Au fil des années, les livres de Victor del Arbol délaissent le versant" noir" pour coucher une oeuvre plus intime. Celui ci, bien que paru chez Actes noirs, fait peu cas de la trame policière. Il ya bien eu meurtre, mais le coupable est connu d'emblée. L'attente du procès laisse le temps au travail de mémoire et peut-être aussi à celui du pardon.
Victor del Arbol est assez peu lu en France. Il est reconnu en Espagne comme l'un des écrivains majeurs de sa génération.
Ayant lu chacun de ses romans traduits, j'ai puisé à toutes mes lectures matière à m'émouvoir, à réfléchir ou apprendre.
Enfin, je lui sais gré de cette dédicace complice à Roselyne, formidable libraire toulousaine, qui fait de chaque jour un hymne à la littérature...
Commenter  J’apprécie          354
C'est le 5eme roman de Victor del Arbol et j'aime toujours autant. le fait de lier la grande histoire du monde avec celle d'une famille. C'est toujours dramatique. Dans ce roman on comprend à demi mots les mobiles de Diego Martin, on a du mal à saisir comment il en arrive là. Est ce seulement la répétition de la malédiction qui frappe les hommes de cette famille et dont aucun ne parvient à s'extraire. Ils sont embarqués dans un tourbillon infernal.
Commenter  J’apprécie          30




Lecteurs (434) Voir plus



Quiz Voir plus

Littérature espagnole au cinéma

Qui est le fameux Capitan Alatriste d'Arturo Pérez-Reverte, dans un film d'Agustín Díaz Yanes sorti en 2006?

Vincent Perez
Olivier Martinez
Viggo Mortensen

10 questions
95 lecteurs ont répondu
Thèmes : cinema , espagne , littérature espagnoleCréer un quiz sur ce livre

{* *}