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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Michel del Castillo n'était pas historien de formation, et il le reconnait humblement. Fils d'exilés républicains, abandonné par ses parents, il a grandi entre camps de réfugiés, STO et maison de redressement. Pas le bon moyen pour faire de grandes études. Bien qu'abondamment sourcée, son oeuvre manque donc un peu de rigueur académique et de précision ; le déroulé de la guerre civile notamment reste assez flou. Pour autant, cette biographie est une référence. La raison en est simple : l'effort de neutralité. Soixante ans après sa fin, la guerre d'Espagne déchaîne toujours les passions.

Patiemment, il déconstruit aussi bien les thuriféraires que les opposants acharnés, ceux qui ont paré le Caudillo de toutes les vertus comme ceux qui lui ont dénié la moindre qualité. Pour cela, il s'appuie simplement sur les faits. Oui, Franco fit tuer sans le moindre état d'âme des dizaines de milliers de civils, couvrit les atrocités commises par ses troupes. Oui il était dénué de culture, bigot, et selon l'expression de l'auteur « son uniforme lui tenait lieu de cadre de pensée ».

Il n'en était pas moins un militaire brillant, qui accomplit de véritables exploits pendant la guerre du Riff, notamment la retraite de Chaouen. C'était aussi un diplomate excellent, qui réussit à tenir son pays en dehors de la Seconde Guerre mondiale ; un bon politicien, qui unifia un camp nationaliste initialement aussi divisé que les Républicains ; un homme d'état pragmatique et réaliste, sous le règne duquel l'Espagne connut un développement économique et humain sans précédent, et qui sut décoloniser rapidement et pacifiquement. Même en tenant compte de l'encadrement de la population, on ne peut pas non plus nier sa popularité, ni qu'il fut peut-être le seul dictateur de l'histoire à avoir planifié une transition vers la démocratie.

L'auteur s'attaque également au camp républicain, rappelant notamment que la mainmise des staliniens sur ses institutions n'avait rien d'une légende, et que, contrairement à ce qu'on pu dire certains historiens, la répression et les massacres côté républicain n'avaient rien de « spontanés ». Ils n'étaient pas aussi centralisés que côté franquiste, car chaque milice disposait de sa « tcheka » qui agissait comme bon lui semblait et exécutait qui elle voulait ; pour autant le ministère de l'Intérieur gardait sur elles un certain contrôle, et touchait notamment sa part sur les « réquisitions ». Une analyse qui mériterait cependant d'être poussée plus loin, tant l'équilibre des pouvoirs était précaire au sein de la République espagnole.

Surtout, il dénonce l'aveuglement dont l'extrême-gauche a toujours fait preuve sur le sujet. Oui, le camp républicain a fait usage des mêmes méthodes que le camp franquiste. Oui ses milices ont pillé, violé, assassiné. Moins que leurs adversaires, certes. Mais est-ce une raison suffisante pour ne pas en parler ? On ne peut guère soupçonner l'auteur de sympathie personnelle avec le franquisme ; en revanche, il ne cache pas sa sympathie pour les anarchistes, et son hostilité aux staliniens. Mais peut-on vraiment l'en blâmer…
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Livre important et pour moi capital car il m' a amené à une "révision déchirante" sur la guerre d'Espagne .
Au delà de la biographie ,très complète, d'un "militaire chimiquement pur" au courage physique indéniable, à l'étroitesse intellectuelle identique, chef de guerre inspiré et victorieux, politique avisé et prudent, dictateur qui brilla par sa longue vie et sa froide cruauté, ce livre raconte l'histoire de l'Espagne et de cette fameuse guerre civile où la République ne pouvait pas vaincre dans les circonstances qui furent celles de l'époque mais il m'est particulièrement douloureux de reconnaitre que si les nationalistes avaient été vaincus, les choses auraient été encore pires !
Dans cette guerre (et Michel del Castillo le montre très clairement, preuves à l'appui ) et même avant son déclenchement, l'imbécillité romantique des anarchistes, les querelles et les magouilles des socialistes (Ca ne vous rappelle rien ?) et la montée en puissance des communistes staliniens ont fini par faire du camp républicain (théoriquement légitime au départ ) une abomination dont la deuxième guerre mondiale puis la guerre froide qui suivit ont donné de nombreux exemples ( dont KATYN n'est qu'un des plus éclatants ) . La lecture de la postface de Michel del Castillo (20 pages) est particulièrement éclairante .
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Passionnante biographie du Caudillo, écrite avec une neutralité qui doit profondément déranger les tenants des camps nationalistes et républicains. Car ce qui frappe dans ce très bon livre, d'une grande qualité d'écriture, c'est l'absence de parti pris. Oui Franco était un élève médiocre, une personnalité fade, que rien ne destinait à priori à diriger un pays. Tout sauf un intellectuel. Mais del Castillo détaille comment cet homme a trouvé dans l'armée, dans sa rigueur militaire, tout à fois un moyen de s'épanouir et de prendre de la densité. Les combats coloniaux menés au début du vingtième siècle au Maroc lui ont fait franchir les grades hiérarchiques militaires, au prix de batailles menées sans scrupules ni grande humanité. Sa gestion de l'académie militaire de Saragosse qu'il créée le fait remarquer du pouvoir. Dans l'Espagne bloquée des années vingt et trente, où les oppositions sociales se font plus fortes sans qu'aucune issue démocratique n'apparaisse, Franco n'est qu'un général, certes reconnu par ses pairs, mais se contentant de servir les gouvernements successifs en fonction du moment. Ce n'est pas un opposant de la première heure à la République ; lui trouver de l'ambition politique à ce moment est trop tôt. Car c'est par l'enchaînement des circonstances et par opportunisme que Franco va progressivement accepter de participer activement à la rébellion militaire contre le pouvoir de gauche, déjà miné par les oppositions de partis et tracté en sous main par Staline depuis Moscou. Il va s'imposer comme le principal chef militaire et finir par prendre le pouvoir pour lui, tout en menant une guerre sans merci. Etait-il fasciste, comme il a été catalogué après guerre pour sa collusion avec Mussolini et Hitler, ou profondément réactionnaire gouverné par une vision passéiste de l'Espagne ? Comment expliquer dés lors qu'il soit resté aussi longtemps en poste ? Aucune volonté de concorde ou de pardon chez cet homme demeuré inflexible. L'Espagne a fini par décoller économiquement à son époque, doit-on lui en porter ce crédit ?
Del Castillo reprend tous ces événements les remet dans le contexte pour ne pas les interpréter après coup en fonction d'une relecture historique facile quand on connaît la suite de l'Histoire. Cet ouvrage a été assez contesté à sa sortie en 2008. J'espère au moins que ses contempteurs ont pris la peine de le lire complètement, car ils y auraient alors sans doute appris beaucoup de choses de la part d'un auteur qui a vécu cette guerre civile enfant de l'intérieur et en a subi les oppositions.
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Le livre commence par cette citation de Jorge Luis Borges :
"La vérité historique n'est pas... ce qui se passe ; c'est ce que nous pensons qui s'est passé."
Eh bien M. del Castillo a l'honnêteté d'avoir analysé d'autres biographies sur Franco. Il a la modestie qui convient face à la vérité de l'homme Franco. Il essaie d'être juste, aussi objectif que possible. C'est ce qui fait que j'ai aimé cette biographie. L'être Franco n'était sans doute pas tout à fait ce qu'il en pense, mais il s'en approche en tentant d'être objectif (mais l'est-on jamais complètement ?).
Non il ne le rend pas sympathique. Oui, il l'explique en grande partie. Certes Franco restera comme chacun un être plein de mystères. Cela n'atténue en rien l'antipathie que l'on peut avoir pour lui.
Personnellement, je ne suis pas d'accord avec la 4e de couverture lorsqu'il est dit "Ce témoignage hautement littéraire". 1. ce n'est pas un témoignage et 2. ce n'est pas une oeuvre littéraire au sens absolu mais une biographie, ce qui n'enlève en rien la qualité d'écriture de l'auteur.
Et ce n'est pas non plus l'histoire de la guerre civile. C'est la biographie d'un homme. Ce qui fait ce qu'il est.
Ce n'est pas l'analyse d'un mythe, mais celle d'un homme. Ce qui me va. Cela enlève à Franco l'aura que certains lui ont collé sur la tête, les pour comme les contre.
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