Dernière oeuvre que je comptais relire dans le cadre de notre Challenge Ai Yazawa que je faisais avec Les instants volés à la vie, ce titre tient une place tout particulière et n'est pas une relecture facile ^^!
Nana est d'abord arrivé à un moment particulier de ma vie de lectrice. Les premiers shojos que j'avais lu dans les années 90 étaient tous des titres avec une touche fantastique et d'aventure, que ce soient Sailor Moon, Basara, Fushigi Yugi, Angel Sanctuary ou X, par exemple. Nana lui appartient à une nouvelle vague de shojo arrivée après où les histoires sont plus sentimentales. Sauf qu'avant on avait plutôt suivi les histoires de collégiens ou de lycéens comme dans Marmalade Boys, Peach Girl ou Mars. Avec Nana, ce sont deux jeunes femmes à peine adultes que nous allons suivre dans leurs déboires professionnels et sentimentaux, ça n'a plus rien à voir, ça change tout !
Dans le même ordre d'idée, Nana, qui est la dernière oeuvre en date d'Ai Yazawa, toujours inachevée à ce jour suite à des problèmes de santé de celle-ci, arrive aussi dans sa bibliographie après une longue maturation amenant l'autrice d'histoires de collégiens/lycéens (Marine Blue, Tempête aux couleurs des cerisiers, Je ne suis pas un ange, Gokinjo, Last Quarter) jusqu'à des histoires désormais de jeunes adultes (Paradise Kiss et maintenant Nana). Et dans ma relecture de son oeuvre, j'ai pu sentir cette lente évolution souhaitée par l'autrice vers des personnages plus vieux avec des thématiques différentes et pourtant si proches, des thématiques qu'elle semble avoir fait grandir au fil de ses sagas.
Le premier tome de Nana est une oeuvre un peu à part. Prévus à l'origine comme seulement deux oneshots, aucune série n'était programmée à ce moment-là, on peut donc les lire à part comme un prologue. On y suit d'abord la vie d'une première fille, Nana, amoureuse de l'amour, qui a un vrai coeur d'artichaut mais qui a été marquée par sa dernière histoire. Elle décide de suivre sa meilleure amie dans l'école d'arts plastiques de sa ville, sans vrai but en dehors de tourner la page. Elle flashe sur un type direct mais échaudée veut juste restée amie avec lui. La deuxième histoire est consacrée à une autre fille qui s'appelle également Nana, mais qui a bien plus de caractère. Heurtée par l'enfance et la vie familiale compliquée qu'elle a eu, elle est désormais chanteuse dans un groupe de rock qui a un certain succès, mais le guitariste qui est également son petit ami a une opportunité qui va tout changer.
Autant, j'ai d'emblée été très très agacée, pour ne pas dire que j'ai détesté, la première Nana, son caractère pleurnichard, son côté égocentrique et ses drames incessants, autant j'ai de suite été charmée et touchée par la seconde Nana, son caractère fort derrière lequel elle cache bien plus de drames et de blessures que la première, son histoire d'amour belle et passionnelle. C'est elle qui m'a fait vibrer la première fois et c'est encore le cas 20 ans plus tard !
Dans ce titre, Ai Yazawa reprend avec force l'ambiance triste et mélancolique qu'elle avait déjà proposé dans Last Quarter et par moment dans Paradise Kiss. Elle offre une vision désespérée de l'amour et des relations humaines en général, en dehors de l'amitié qui est ici la seule bouée à laquelle se raccrocher. Ainsi que ce soit la première Nana et ses amours sans retour ou son histoire dramatique avec un homme marie, ou la seconde Nana qui va devoir faire un choix terrible en tant que femme et artiste, les deux sont blessées par l'amour. A l'inverse, elles ont des amis fantastiques sur lesquels compter.
Pour cela, on sent bien le goût de l'autrice pour les belles relations d'amitié. La meilleure amie de la première Nana : Junko, est un mélange d'anciens personnages secondaires forts qu'on a pu croiser dans ses oeuvres précédentes, tout comme Yasu, le meilleur ami / grand-frère de l'autre Nana, dont le caractère bienveillant s'inspire aussi du même type de personnages qu'elle a déjà développés autrefois. Ai Yazawa exploite à merveille tout ce qu'elle a déjà écrit auparavant ici.
Cependant, autant la seconde histoire autour de ce groupe de rock est belle, riche et entraînante, autant la première qui est presque exclusivement centrée sur les histoires de coeur plus que pénible de la Nana pleurnicharde est lourde à cause d'une narration qui alourdi les pages de texte et de texte à n'en plus finir... Le mélange entre sérieux et humour que l'autrice maîtrise plutôt bien habituellement est déséquilibré cette fois malheureusement à cause d'une héroïne trop criarde et insupportable !
Quant à l'édition de Delcourt, qui date quand même de 2002 (wow), elle a plutôt bien supporté le poids des années. Certes les noirs sont trop profonds au point d'être illisibles parfois. Certes la traduction est un peu datée sur certaines expressions. Mais la reliure est toujours aussi souple, le papier a gardé le même grain, la mise en page ne fait absolument pas tache même 20 ans plus tard (ce n'est pas le cas pour tous les titres...) au point d'avoir presque l'impression d'avoir un livre neuf entre les mains ! Le seul défaut majeur que je note, c'est les marges trop restreintes qui font que parfois le texte se perd dans la reliure au milieu et est difficile à lire. Cependant, je regretterai toujours que le titre n'ait pas bénéficié au fil des ans d'une remise en avant...
Nana est donc un titre majeur dans mon histoire avec les mangas au féminin. Je suis ravie de replonger dans sa lecture et ce même si ce premier tome n'est pas le plus intéressant de la série. Il pose cependant les bases d'une suite que je sais superbe, émouvante et déchirante !
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