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Critiques de Alain Robbe-Grillet (112)
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Dans le Labyrinthe

Dans une ville assiégée, sur le point de tomber, un homme essaie de se rendre à un rendez-vous important mais il ne sait plus trop où et toutes les rues se ressemblent. En plus il pleut, il neige, il fait un temps à l'image du désarroi de cet homme. Il marche des heures et des heures dans des rues qui se ressemblent toutes et semblent se multiplier à l'infini.....

C'est un roman (essai?) difficile à lire, à l'atmosphère lourde, monotone et pourtant on se doit de lire jusqu'au bout.
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Les gommes

Avis chrono'



Agréable surprise avec ce roman déroutant mais qui se laisse tout de même comprendre. Un bijou d'allusions dissimulées et de jeux d'énigmes! Un polar qui aurait presque une intrigue avec un crime qui n'en finit pas de finir et des quasi-personnages.



___________________________



Une relecture! Oui, vous ne rêvez pas! C'est déjà un exploit en soi et quand vous saurez que ce même roman, lu en 2006 avait reçu de moi dans mon petit classeur jaune ce commentaire définitif "L'auteur a écrit avec les orteils" il était très improbable que j'y remette jamais les pieds et pourtant...



Quelle promotion! Cette fois, j'ai aimé. Beaucoup... Voilà qui va faire plaisir à certaines d'entre vous, grandes relectrices!



Vous allez voir comme je vais bien vous vendre ce vieux Nouveau Roman des années cinquante...



Résumé:



19h30, le tueur tire sur la victime. La balle va prendre quelques détours (elle va mettre 24h à finir le boulot), durant lesquels nous allons suivre Wallas, chargé de cette délicate enquête... Toute une journée à errer dans une ville labyrinthique, à échaffauder des hypothèses autour d'un crime dont le lecteur connait dès le départ tous les détails: identité du tueur et des commanditaires, déroulement minutieux du crime...





Mon avis rien qu'à moi que j'ai pas copié chez les autres:



Et pourtant... C'est un grand tour de force de bâtir une intrigue policière sur l'impression qu'il n'y a plus rien à découvrir! Quand presque chaque page est un indice...



La fin vous surprendra tout de même, s'il vous vient l'envie de vous lancer dans ce roman. Comme une nouvelle, ça ne prend toute son ampleur qu'à la seconde lecture. Avec un peu d'expérience aussi. (Whouah.. j'ai vieilli, alors...? Zut)



Attention, le style est spécial. Il ne faut pas être trop attaché à ces choses futiles que sont une chronologie, une attribution nette des paroles à un locuteur identifiable ou une envie de bien comprendre ce qui arrive. Quelques scènes "fausses" se glissent de ci, de là et on tourne en rond comme dans un aquarium. Un aquarium rond. Parce qu'il y en a aussi des rectangulaires. Pensez au marque-page pour éviter l'impression de relire un passage qui ressemble à douze autres.



Pour les amateurs, il y a encore beaucoup à dire dans ce roman... Par exemple, sur le tarot marseillais (là, je cède la parole à mon charmant collègue E. ) et à l'histoire d'Oedipe qu'il vaut mieux connaître un peu pour admirer le travail hallucinant de Robbe-Grillet.



Hé! Et pourquoi les gommes, au fait? Pendant tout le roman, Wallas cherche une gomme précise, LA gomme idéale. Le Graal de la papeterie! Pendant que l'assassin lui passe sous le nez...

Ce pauvre garçon n'est jamais où il faudrait... Il cherche aussi un docteur pendant une bonne centaine de pages et quand il le trouve... L'entevue nous est résumée en trois lignes et ne sert à rien... Un livre agaçant... Comme j'aime ça!



Conclusion:



Est ce que j'ai pas été gentille avec ce livre que je détestais? Y'a que les imbéciles qui changent pas d'avis!



C'était tellement bien que je me suis lancée dans La Jalousie, du même auteur... Aïe aïe aïe...
Lien : http://talememore.hautetfort..
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Le voyeur

N°1868– Avril 2024.



Le voyeur – Alain Robbe-Grillet – Les Éditions de Minuit.



Le titre peut avoir une certaine connotation malsaine, sexuelle voire érotique. Nous sommes cependant dans le « nouveau roman » où tout est inattendu. C’est en effet l’histoire de Mathias, représentant en montres, « voyageur de commerce » comme on disait alors, qui revient dans son île natale avec le projet d’en vendre 99 aux deux mille habitants du lieu en une journée, une gageure. Il sera dénommé « le voyageur » tout au long de ce roman. Durant son bref séjour, il va forcément être reconnu, va rencontrer des gens de sa connaissance, et d’autres qui prétendaient le connaître mais dont il n’avait aucun souvenir. Il va être confronté malgré lui à une mort suspecte, celle de la petite Jacqueline, une petite allumeuse tombée d’une falaise. La nudité du corps retrouvé laisse penser à un crime sexuel. On se sait trop pourquoi, il se met à supposer qu’il en est coupable et se persuade qu’il a semé des preuves derrière lui et ce d’autant plus qu’il croit avoir été vu sur la scène de crime. C’est un peu comme si, devant un tel événement, il se comportait comme un meurtrier qui ne se souviendrait plus de rien et qui voudrait se disculper en s’inventant des preuves de sa culpabilité… et en les faisant disparaître. Cette attitude est d’autant plus mystérieuse et inexplicable qu’aucun soupçon ne pèse sur lui, que les coupables potentiels sont nombreux, qu’on évoque même la légende locale d’un crime rituel remontant à la nuit des temps et surtout que la gendarmerie n’intervient même pas pour ce qui reste un regrettable accident.

C’est le deuxième roman de notre auteur, paru en 1955 et qui, boudé lors de sa publication au point de faire polémique mais qui a reçu le Prix des Critiques. Je poursuis la relecture de ses livres qui s’inscrivent dans le style du « Nouveau roman ». J’ai lu celui-ci, écrit, apparemment’ comme un roman policier classique d’ailleurs bien écrit et agréable à lire, avec certes un luxe de détails superflus, mais dont la touche originale s’impose au fil du texte. Certes Mathias n’est pas un personnage anonyme comme le soldat de « Dans le labyrinthe » mais certaines scènes sont répétées plusieurs fois différemment, avec parfois un décalage dans le temps, des monologues sans suite, obscurs, mais également répétitifs, des épisodes ou l’imagination prend le dessus de sorte qu’on ne sait plus trop ce qui s’est réellement passé et la raison des visions furtives que Mathias a de ce qu’il considère comme un meurtre pour lequel il veut se constituer un alibi.

Robbe-Grillet distille le suspense avec talent mais, le livre refermé, je me demande si j’ai vraiment lu un roman policier puisque je me suis longtemps cru dans un thriller psychologique. Il n’y a en effet ni enquête policière, ni même meurtre, à part dans la tête de Mathias qui s’en accuse dans son for intérieur. Apparemment la disparition de Jacqueline n’a rien de surprenant puisque chacun s’y attendait, seul Mathias s’en sent coupable parce que sans doute il se remémore un fait tragique remontant à son enfance îlienne autour de la mystérieuse Violette, ou qu’il est tout simplement obsédé par les petites filles. C’est sans doute ce qui expliquerait le titre et de « voyageur » il deviendrait « voyeur ». Tout cela n’est pas sans égarer le lecteur et caractérise l’esprit de ce mouvement littéraire qui à l’écriture d’une aventure préfère l’aventure d’une l’écriture selon le mot de Jean Ricardou.



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Dans le Labyrinthe

N°1867– Avril 2024.



Dans le labyrinthe – Alain Robbe-Grillet– Les Éditions de Minuit.



Le décor est celui d’une ville déserte refroidie par la nuit de l’hiver, un théâtre de guerre de défaite et d’armée en déroute. Il n’y a personne dans les rues et les rares habitants se claquemurent chez eux. Seul un café accueille les hommes, majoritairement des civils, et constitue un contraste avec la suite. Un soldat, un conscrit, fatigué, à l‘uniforme sale cherche un endroit inconnu qu’il ne trouve pas, frappe à une porte, interroge les occupants. Il semble avoir une mission à remplir dont il veut s’acquitter, remettre le paquet qu’il porte à son destinataire. Les paroles qu’ils échangent sont rares, la méfiance est de mise à cause des espions potentiel, le soldat veut remplir la mission qui lui a été confiée mais il est comme un zombi dans ce décor froid, glauque et impersonnel. Les dialogues sont économes, les des descriptions techniques précises mais semblent cependant superflues, l’ambiance labyrinthique, comme le texte qui la suscite, les personnages aussi insaisissables que des fantômes et ce soldat, loin d’être le héro de ce texte comme il pourrait l’être dans le roman traditionnel, disparaît derrière une prose écrite sans recherche littéraire, dans un déroulé descriptif où les séquences se croisent et se succèdent sans réel suivi, au détriment d’une intrigue plus soutenue et le lecteur peut facilement s’y perdre. Lui aussi est dans un labyrinthe. Il est difficile de saisir les postures successives de ce soldat qui se trouve dans des situations différentes au fil du texte. Il croise aussi un enfant, une femme et d’autres personnages tout aussi insaisissables et l’épilogue est à la mesure de cette histoire.



Je continue à intéresser au « nouveau roman » qui, lors de sa manifestation dans le paysage littéraire m’avait laissé sur ma faim, parce qu’il a constitué un moment particulier, une expérience d’évolution (de révolution?) de l’écriture et je recherche, à travers les écrivains qui l’ont incarnée, ce sur quoi elle a débouché, l’empreinte qu’elle a laissée dans la culture de l’écriture romanesque actuelle.

Tout cela me semble s’inscrire dans cette expérience littéraire de destructuration du roman classique que Jean Ricardou définit lui-même non comme «  l’écriture d’une aventure mais l’aventure d’une l’écriture ». Pourquoi pas après tout mais, à titre personnel, le livre refermé je suis de plus en plus perplexe.









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La jalousie

"La Jalousie" (1957) peut être considéré comme un exploit narratif. Il s’agit du troisième roman de Robbe-Grillet (le quatrième si l’on prend en compte "Un Régicide", son premier récit, qui fut publié plus tard).

Nous sommes très vite plongés dans un état d’incertitude, pour ne pas dire de malaise, en raison de cette caractéristique narrative que je m’interdis de dévoiler pour ne pas divulgâcher… à vrai dire, cet exploit n’est pas la seule perturbation qui vient brouiller notre lecture, il y a aussi la manière dont Robbe-Grillet joue avec le temps : il est en effet quasiment impossible de reconstituer la succession des événements, certains étant d’ailleurs racontés plusieurs fois, avec des variantes…

Cette incertitude contraste avec les descriptions minutieuses des lieux, avec cette stabilité, cette matérialité du monde environnant, lequel apparaît dès lors totalement indépendant de nous, dénué de la moindre connivence avec le narrateur, comme avec le lecteur. C’est une constance, chez Robbe-Grillet, de séparer l’homme et le monde, qui lui est extérieur, étranger. D’où sa critique très pertinente de la célèbre page de "L’Étranger" de Camus, la scène du meurtre (à lire dans « Pour un Nouveau Roman ») …

Les caractéristiques formelles qui apparaissent dans "La Jalousie" pourraient être considérées comme gratuites, comme une volonté du jeune romancier de bousculer les codes du roman traditionnel. Cette volonté est certes réelle, et l’auteur la revendique dans son essai déjà cité. Mais il y a plus que cela : les incertitudes liées à la narration prennent tout leur sens si on les relie au titre du roman dont c’est le thème. Ce sentiment, dont Spinoza aurait probablement dit qu’il s’agit d’une passion triste, plonge un individu dans la perte de soi, ce qu’exprime parfaitement bien l’effacement du narrateur, personnage invisible, dépourvu de nom, qui devient presque inexistant.

La réduction à l’inconsistance, la noyade dans l’incertitude, voilà où nous mène la jalousie…

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La jalousie

Ceci n'est pas un roman. Ceci est une histoire qui se résume en une ligne ou deux.

Ou alors on peut appeler ça un roman didascalique.

Ou alors c'est comme si on décidait que les notes de bas de pages prenaient la place de la page et de son contenu conventionnel.

C'est comme certains disent et comme vous pouvez en faire un constat vous-même, vous découpez tout en menu morceaux et que l'objet ou le sujet perd ainsi tout sens, n'existe plus. Déconstruction par la surdescription. Parce que c'est ça, ici, Robby décrit tellement son sujet, qu'il n'y en a plus.

C'est un sacré exercice de style. Mais passé le moment de "surprise", c'est chiant.

Et il n'est absolument pas question de jalousie, si ce n'est celui ou celle du système de volets permettant en principe aux personnes à l'intérieur de voir sans être vues, ce qui est EXACTEMENT l'inverse dans ce roman. "Tout" est "vu" et d-écrit de l'extérieur, avec une froideur parfaite. Aucun sentiment. Les sentiments seront obtenus de surcroît. Selon ce que l'un ou l'autre projettera de sa lecture.

L'ennui peut en être un.

C'est le risque. Pour le lecteur comme pour l'auteur.

Robby, lui, il aime le risque.
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La belle captive

Un régal pour les amateurs de surréalisme et d'inquiétante étrangeté.
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La jalousie

Oserai-je avouer qu'à la fin du roman je n'avais rien compris ? C'est donc en lisant quelques critiques après avoir lu le roman que j'ai enfin compris un peu mieux ... il faudrait peut-être que je le relise maintenant ... mais rien ne justifie que je sois puni deux fois ...
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La maison de rendez-vous

N°1869– Avril 2024.



La maison de rendez-vous – Alain Robbe-Grillet – Les Éditions de Minuit.



Kong-Kong dans les années 20, c’est, pour le béotien que je suis l’objet d’idées reçues voire de fantasmes, le jeu, l’argent, les réceptions, les trafics, la drogue, l’espionnage, la prostitution... Le narrateur dont nous ne saurons rien nous raconte une histoire bien étrange qui commence dans une maison de luxe, la Villa Bleue où se donnent de bien singuliers spectacles, gouvernée par la non moins étrange Lady Ava aux précieux chiens noirs. Il nous fait partager son admiration pour la beauté des femmes eurasiennes et leurs robes érotiquement fendues, croise des personnages au comportement bizarre qui pour certains meurent assassinés, le tout dans une ambiance à la fois raffinée de cette maison de rendez-vous et la saleté des rues chinoises, le petit peuple des coolies, les fumeries d’opium, le trafic de filles mineures, les tentatives empoisonnement, les chantages, les policiers véreux, les escroqueries en tout genre, les crimes camouflés en accident qui égarent le lecteur qui finit par le plus rien comprendre. Égaré, le pauvre lecteur l’est en effet puisque dans ce récit labyrinthique et parfois contradictoire, ce même narrateur raconte plusieurs versions d’une même histoire, donnant une explication beaucoup plus terre à terre des faits antérieurement relatés, révélant la vraie nature des gens, transformant les lieux auparavant décrits et détruisant ainsi l’ambiance moite patiemment tissée. Dans les diverses descriptions qu’il fait, notamment des femmes, il sollicite même l’imagination du lecteur, si celui-ci veut bien entrer dans son jeu. Robbe-Grillet tient même à apporter quelques précisions audit lecteur avant qu’il ne lise ce roman.

Je poursuis mon exploration du « nouveau roman ». Je suis de plus en plus perplexe.



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La jalousie

N°1865– Avril 2024.



La jalousie – Alain Robbe-Grillet – Les Éditions de Minuit.



L’auteur choisit de traiter un sentiment très humain où se mêlent l’anxiété, l’insécurité, la peur de perdre une chose ou un être à qui on est attaché. S’y ajoutent de la colère, de la frustration, de la tristesse et on pense inévitablement à un contexte amoureux avec le triangle traditionnel, le mari, la femme, l’amant… Oui, mais, nous sommes dans le « nouveau roman » où rien n’est vraiment comme dans les fictions romanesques habituelles.

Nous sommes dans une plantation de bananes, c’est à dire dans un climat chaud et humide et le titre de ce roman joue d’une part sur l’émotion et d’autre part sur cette sorte de contrevent à lattes, fréquent sous ces latitudes, qui permet d’observer au dehors sans être vu. La rédaction du texte donne à penser que le narrateur observe la scène de loin, comme absent de la pièce et surtout muet, mais sa présence effective est envahissante. Pourtant de lui nous ne saurons absolument rien. De sa femme, A, nous ne savons pratiquement rien non plus, sinon que le narrateur la désire ardemment, la décrit amoureusement en train de se coiffer, admire la beauté de sa chevelure, la soupçonne d’accorder ses faveurs à Franck, un séducteur très présent auprès d’elle et dont elle apprécie la compagnie alors qu’elle s’ennuie avec son mari qui l’épie en permanence et craint surtout qu‘elle ne le quitte. Elle est assez hypocrite pour lui cacher une aventure adultère avec Frank et les dialogues qu’ils ont ensemble, en présence du narrateur, ont quelque chose de convenu où l’on peut voir une volonté de lui cacher une liaison. Franck est marié à Christiane, très inexistante dans ce contexte et qui se préoccupe surtout de la santé fragile de leur fils. Toutes choses égales par ailleurs, elle est un peu le pendant du narrateur, mais elle ne se manifeste pas.

L’attitude de ce couple donne à penser qu’ils ont quelques années de mariage derrière eux, que le temps y a fait son œuvre dévastatrice, y insinuant l’ennui et les soupçons, tuant l’amour, à supposer qu’il ait jamais existé entre eux et y substituant pour le narrateur une jalousie maladive entretenue par le jeu de A dans lequel on peut voir une volonté de séduire Franck, de lui céder ou, à tout le moins, d’en donner l’impression, surtout quand elle émet son opinion sur le roman dont ils partagent la lecture et qu’elle admet l’adultère d’une épouse blanche avec un noir. Quand ils sont ensemble, la scène est souvent vue à travers les irrégularités d’une vitre, ce qui me paraît symbolique de leurs relations floues. Bizarrement le narrateur-mari ne réagit pas face aux absences parfois nocturnes de sa femme, comme s’il ne voyait rien ou ne voulait rien voir pour la garder auprès de lui, tolère qu’elle fasse chambre à part, que Franck soit souvent chez eux et que lui’ dîne souvent seul. On ne sait rien de lui mais il est évident que c’est un homme seul, fataliste, résilient, assurément malheureux, comme quelqu’un qui s’en remet au hasard pour voir cesser une situation dont il est prisonnier. Les rares paroles qu’il échange avec sa femme ont trait au quotidien de la plantation .

A la lecture de ce roman j’ai eu l’impression d’une certaine immobilité du temps, comme s’il s’était arrêté de fuir, comme s’il était à l’image de cette météo, inchangée, comme si cette ambiance malsaine ne devait jamais finir. J’ai été aussi un peu perdu dans le déroulé des évènements, volontairement bouleversés dans leur chronologie.



L’ambiance de cette maison coloniale est pesante notamment du fait de la présence du narrateur devenu voyeur, de son silence mais surtout des soupçons pourtant non exprimés qui l’accompagnent. Je note que la narration de l’auteur recèle un luxe de détails techniques, précis, géométriques, arithmétiques biologiques ou topographiques, c’est à dire scientifiques, pas désagréables à lire mais assez superflus. Était-ce ainsi que l’auteur, avec la technique du narrateur-voyeur, souhaitait révolutionner l’art du roman ? Sur le seul plan de la rédaction, il y a une succession de paragraphes qui, sans aucune transitions, parlent de choses fondamentalement différentes. Quant à la présentation des « tables », elle est originale. Pourtant à l’inverse d’autres œuvres du même auteur, j’ai porté de l’intérêt à cette histoire, peut-être à cause du thème et malgré le peu d’action du roman, mais, le livre refermé, cette lecture m’a laissé assez perplexe, même si je ne suis pas ennemi de l’évolution des choses et de la littérature en particulier.

C’est le quatrième roman de Robbe-Grillet (1922-2008) publié en 1957 qui, contrairement aux œuvres précédentes a bénéficié d’un accueil favorable et à été traduit en 30 langues.





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Les gommes

Manifeste pour un nombre de mots limités dans les critiques sur Babelio

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Intrigué par le terme "nouveau roman", je me suis décidé (avec un peu de retard...) à lire cet ouvrage bien mystérieux.

Il y est question d'un meurtre (enfin presque) dont l'élucidation va perdre notre enquêteur. En fait Wallas (c'est son nom) va se perdre tout seul dans cette ville, où il multiplie les détours, les aller-retours, les rendez-vous manqués, les visites dans des papeteries... Une narration très étrange pour une histoire qui ne l'est pas moins. Le suspense et la recherche de la vérité laissent vite la place aux déambulations, aux hésitations, aux incertitudes. C'est envoutant.

Le style est assez élaboré, assez beau. Quelques pages de descriptions très précises, chirurgicales (la chair d'une tomate par exemple, un manteau, une photographie...) sont savoureuses.
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Projet pour une révolution à New York

Extrait de ma chronique :



"Certes, comme l'écrit à juste titre Jean Pierrot, il a fallu attendre Dans le labyrinthe pour que l'oeuvre d'Alain Robbe-Grillet manifeste ouvertement "la dimension imaginaire et plus particulièrement onirique qu'elle recelait sans doute dès le départ", mais à partir de ce moment (1959), il devient difficile de la nier (ce que certains critiques font pourtant très bien), surtout quand l'auteur, pour enfoncer le clou, met explicitement en scène une séquence de rêve.





C'est le cas dans Projet pour une révolution à New York (1970), où le narrateur se retrouve, page 172 et suivantes, à gagner en rêve un terrain vague, délimité par une palissade de panneaux publicitaires, reprenant tous des séquences du roman, et remplis d'objets au rebut, jouant tous un rôle dans le roman – autrement dit, cet espace onirique est la matrice même du texte."
Lien : https://weirdaholic.blogspot..
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Souvenirs du triangle d'or

Un jeu de miroirs ou répétitions, de mises en abyme, et de digressions où le lecteur se voit piégé dans le labyrinthe fantasmatique du narrateur.

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Les gommes

Un barbouze maladroit enquête sur un faux meurtre dans une ville portuaire nordique que nous arpentons inlassablement avec lui. Construction et style, très originaux, ne nuisent absolument pas à la fluidité de la lecture, enchantée par un humour constant. C'est beaucoup plus facile à aborder que la Route des Flandres de Claude Simon, autre parangon de ce qu'on a appelé nouveau roman. Et le titre? Le personnage principal entre régulièrement dans un commerce pour demander un type particulier de gomme à effacer qu'il ne trouve jamais. Le rapport avec l'histoire? Aucun (mais peut-être n'ai-je pas compris).
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Les Gommes (suivi de) Clefs pour les Gommes

Relire "Les gommes" après plus d'un demi-siècle était une gageure. Je me souviens que ce roman, annonciateur d'un courant littéraire qui fit les beaux jours de l'intelligentsia parisienne pendant la seconde moitié du vingtième siècle, m'avait particulièrement ennuyé. Derrière une vague trame politico-policière à la poursuite d'un supposé assassin, le roman décrivait sur une pleine journée l'errance d'un pseudo-policier entre la résidence bourgeoise de la supposée victime, la clinique du docteur Juard, qui avait rédigé l'acte de décès, et le commissariat principal de la ville, où l'on aurait bien aimé se débarrasser au plus vite de cette affaire mettant en cause deux notables. De rue en rue, au sein de cette ville portuaire du Nord embrumée à souhait, où il n'a encore jamais mis les pieds et ne dispose bien entendu d'aucun système de positionnement géographique (époque oblige), Wallas mène son enquête, sans aucun indice. Il essaie de se reconnaître dans cette ville à la géographie si particulière, où l'on revient sans cesse sur ses pas, et au passage demande son chemin ou pose des questions sur les acteurs du drame, prétextant l'achat d'une petite gomme pour le dessin, d'où le titre. Et pourtant, relisant enfin ce livre que j'avais préféré oublier, quelle n'a pas été ma surprise de me trouver en face d'un récit plein de fraîcheur, avec une merveilleuse écriture tout en finesse. L'humour, ou plutôt une tendre ironie, affleure à toutes les pages, avec une attention apportée à maints petits détails de la vie ordinaire, à ce paysage urbain qui imprime sa marque profonde sur les habitants. Comme dans un tableau de Matisse, c'est le décor, soigné, qui envahit la toile et constitue le sujet, les personnages se trouvant relégués à de vagues silhouettes à peine entraperçues. C'est ainsi qu'on se rend compte que le Nouveau Roman, loin d'être cantonné à la sphère universitaire, a imprégné la littérature moderne, et ce bien au-delà de nos frontières, nous habituant petit à petit à ce qui pouvait nous paraître au départ comme un caprice d'intellectuels en manque d'inspiration. Il suffit de lire Paul Auster ou bien encore les auteurs japonais les plus actuels pour retrouver ce souci du détail, cette obsession des distances, de l'orientation, de l'angle sous lequel on perçoit la réalité, mille et une petites choses plaquées en apparence sur la trame romanesque mais constituant l'intérêt principal du récit. Et maintenant, c'est certain, il va falloir relire aussi "La modification" (Michel Butor) et autres Simon ou Sarraute : plaisir du temps retrouvé…

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La jalousie

L'architecture et l'abstraction tortueuse , les descriptions axées, orientées, la géométrie rendent toute représentation mentale quasi impossible dans ce roman. On ne sait pas d'où le narrateur observe, si ce n'est entre les jalousies, à la dérobée, sa femme et ce qui se passe dans son intimité comme dans ses plantations. L'auteur est un grand théoricien du Nouveau-Roman et je salue la prise de risque que représentait le renouveau du roman ainsi que l'originalité incontestable de l’œuvre mais le style manque de chaleur. Attention, c'est le point de vue d'une lectrice qui a toujours du mal avec la géométrie et ce genre de représentation visuelle, je n'y vois aucune couleur, je trouve ça froid, sans saveur. L'Enfer d'Henri-Georges Clouzot avec Romy Schneider et Serge Reggiani traite d'un sujet similaire, de la jalousie, avec plus de style, plus de passion tout en étant aussi torturé. Peut-être que l''auteur gomme tellement son texte qu'il ne reste que l'absence, des blancs typographiques, ce qui laisse finalement un sentiment de manque.
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Les demoiselles d'Hamilton

Sur les photos de David Hamilton, Robbe-Grillet décline une fois encore fantasmes et structures répétitives propres à ses désormais classiques Topologie d'une Cité fantôme et Souvenirs du Triangle d'or.

Pas indispensable mais résolument beau à regarder, fascinant à lire.
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Pour un nouveau roman

Très intéressante analyse du roman et ce que devrais être la démarche d’un écrivain (qui travaille son art) comme un artiste. La musique est passé à l’atonal. La peinture n’est plus figurative. Mais le roman reste a(e)ncré sur les principes balzaciens. Alors pourquoi le roman a souvent un héros ? Pourquoi un roman suit une histoire ?
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Les gommes

Que dire... Personnellement, je trouve que Robbe-Grillet maîtrise son style, maîtrise son sujet (s'il y en a un ou s'il n'y en a qu'un), et on entre plutôt facilement dans ce "nouveau roman". Probablement qu'à son époque ça avait pu avoir un (petit) côté révolutionnaire. Actuellement, il est un livre bien fait, sans éclat, sans grandes surprises, au sujet d'un banal confondant, et qui ne laisse donc que peu de traces. Je suis néanmoins content de l'avoir lu, pour enfin comprendre et savoir ce que c'est, mais j'ai l'impression de ressortir indemne de cette lecture. J'estime que trois étoiles, ni plus ni moins, sont justifiées.
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Un roman sentimental

Alain Robbe-Grillet est mort, en voici la preuve. Qu'en reste-t-il ? La monotonie de l'horreur, un récit méticuleux de l'insoutenable, la provocation obscène. Le roman de trop ? Peut-être un testament. Robbe-Grillet se lâche. Il s'offre un dernier plaisir, celui de la forme classique. Ce faisant, il nous emmerde. On lit, dégoûté, vaguement excité parfois, à notre plus grande honte. Sentiment de déjà lu, Sade, bien sûr, rien de nouveau sous le soleil de Satan. Robbe-Grillet est mort après avoir (faut-il le regretter ?) assassiné le nouveau roman : "Revenons à des récits qui ne perdent pas le lecteur, faisons le chier mais en lui montrant bien que c'est mal". Plus rien d'ambigu, plus rien de subtil, plus rien de caché, plus rien de secret, plus rien. Galerie des horreurs, regret de la bicyclette rouge et de l'ombre du pilier. Sans doute Alain Robbe-Grillet a-t-il écrit cela pour que l'on retrouve le plaisir de lire ce qui est vraiment bon dans son oeuvre, ses premiers romans, ceux qui taisent ce qui est dit trop manifestement ici, ceux qui laissent le lecteur imaginer les viol(ence)s en sous-main, ceux qui, parce que personne ne sait vraiment ce qui est raconté, sont mille fois plus dangereux que ce fatras dégueulasse. Robbe-Grillet a pondu de la merde pour éclairer ses bijoux.

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