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Critiques de Alejo Carpentier (110)
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Le Partage des eaux

Voici un hymne à la vie sauvage. Le style de l'auteur peut paraître un peu mou au départ mais rassurez-vous, il monte en puissance au cours de la lecture.



Le narrateur, un musicologue, s'ennuie ferme dans sa vie d'intellectuel New-yorkais. Les gens qu'il y rencontre sont superficiels. Par hasard on lui confie une mission pour le compte d'une université : aller chercher des instruments de musique primordiaux au fin fond de la forêt équatoriale.



Pas très chaud au départ, il se dit que finalement, le billet lui est payé et que cela fera une espèce de distraction dans sa vie. Il arrive au Venezuela (ce n'est pas dit textuellement mais on le devine très bien) pile au moment où un putsch est en cours dans la capitale qu'il est obligé de quitter manu militari avec sa maîtresse New-yorkaise qui s'appelle Mouche et parle le français.



Après avoir un temps songé à seulement passer des vacances et acheter chez le premier marchand de babioles les instruments qu'il était venu chercher, il décide finalement de se rendre en forêt pour essayer d'en trouver de vrais.



Peu à peu il se trouve envoûté par la nature et par les gens qu'il rencontre : nature très rude mais belle, gens très rude mais vrais. Son acolyte devient une véritable gène. Dans le même temps, il rencontre une indigène envers laquelle il ressent de plus en plus d'attirance. C'est bientôt la fin de son histoire avec la New-yorkaise et le début d'une autre avec l'indigène, de plus en plus profond dans la forêt, avec de rudes explorateurs et des amérindiens.



Je vous laisse ici sur la pirogue, si vous souhaitez découvrir la fin de l'histoire. Notez simplement que le titre original " Los Pasos Perdidos " est plus évocateur et plus subtil que le titre français. Le traducteur a renoncé à le transcrire directement sous la forme " Les Pas perdus " car le terme " paso " signifie aussi " passage " et les deux sens sont importants (aspect temporel et aspect spatial).



La morale de l'histoire pourrait être " saisir l'instant avant qu'il ne disparaisse à jamais ", du moins c'est ma vision sortie des eaux, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Histoires étranges et fantastiques d'Amérique l..

"Cela n'est pas possible, et pourtant, cela est."

(J. L. Borges, "Livre de Sable")



Si vous me dites : "fantastique latino-américain", je vous réponds : "Macondo".

Marquez représente sans doute le mieux ce que j'imagine sous le terme "réalisme magique", et sa "magie" restera toujours connectée avec la chaleur humide et l'odeur des bananiers qui se dégagent des pages de "Cent ans de solitude" : cet air qui ondule en créant toutes sortes de mirages qui transforment le réel en irréel, féerique ou inquiétant.

C'est comme une bulle de savon colorée qui flotte dans un monde rationnel, et il ne faut pas appuyer dessus, sinon elle explose et toute la magie est brisée.



Bien sûr, cette anthologie ne serait pas complète sans un récit de Marquez. J'ai appris dans un petit médaillon, dédié à chaque auteur, que Macondo de Marquez doit beaucoup à Yoknapatawpha County de Faulkner... mais oui ! Mais tandis que Faulkner utilise le procédé classique du "courant de conscience", pour créer des histoires aussi inquiétantes qu'"Une rose pour Emily", les auteurs de l'Amérique latine vont créer quelque chose à part, en distordant la réalité et en y rajoutant des éléments absurdes et oniriques. La géographie aidante, nous nous sentons subitement à mille lieues des auteurs à l'héritage européen.



Toutes les histoires du recueil (une bonne trentaine) ne sont pas du "réalisme magique", mais elles sont toutes "étranges" ou "fantastiques". Que vous préfériez un conte plutôt classique dans le style de Poe, une bizarre histoire humoristique, une terreur pure et dure ou un récit psychologique, vous y trouverez toujours votre bonheur. Les auteurs comme Quiroga, Borges, Marquez, Bioy Casares, Cortazar, Vargas Llosa et bien d'autres sont à votre service... donc, à lire de préférence dans une confortable chilienne avec un gros verre de mocochinchi à la main.



Forcément, chacun ses goûts (ce qui est aussi valable pour le mocochinchi; à ne surtout pas confondre avec Monchhichi !), alors je vais dresser mon propre palmarès, en commencant par "Anaconda" d'Horacio Quiroga. En général, les histoires d'animaux m'ennuient profondément, mais il y avait quelque chose de paralysant, voire venimeux, dans ce récit sur un Grand Conseil de serpents de la jungle, qui vont se liguer contre leur ennemi commun, l'homme.

En me disant qu'il n'y aura probablement pas mieux, j'ai relu avec plaisir "L'Aleph" de Borges et l'histoire de Marquez sur le plus beau noyé du monde, avant de tomber sur le "Retour aux sources" d'Alejo Carpentier. Son histoire m'a fait penser au "Masque de la mort Rouge" de Poe par son esthétisme baroque, sauf que Carpentier s'y prend autrement. Don Martial va se lever de son lit de mort pour vivre sa vie à l'envers, et l'histoire réserve plein d'images insolites, comme ces bougies qui se consomment en grandissant, le piano qui redevient clavecin, et don Martial qui oublie la musique pour ressortir ses soldats de plomb. Un voyage d'un néant à l'autre, assez dérangeant, somme toute...

Pour vous détendre, vous pouvez enchaîner sur "L'Aiguilleur" de Juan José Arreola, une histoire qui décrit d'une façon tout à fait drôle et tout à fait absurde le fonctionnement des chemins de fer au Mexique. Cela vous amusera d'autant plus que même dans notre beau pays, à un moment ou à un autre nous avons probablement tous vécu les mêmes tourmentes que le pauvre voyageur d'Arreola.

Si vous voulez quelque chose de plus costaud dans le style "terreur classique", prenez "Aura" de Carlos Fuentes. Pour les amateurs de récits psychologico-bizarres, l'histoire de chiens d'Elena Garro devrait faire l'affaire.

Et pour finir vraiment en beauté, pourquoi pas "L'homme aux champignons" de Sergio Galindo, une des histoires les plus étranges que je n'ai jamais lues.

Seulement, méfiez vous des enfants trouvés dans une belle clairière pleine de champignons. Vous ressentez d'abord une grande euphorie, et le reste n'est plus qu'un rêve... D'ailleurs, saviez-vous en quoi consiste le métier d'un "homme aux champignons" ?



Il est toujours précaire de noter une anthologie qui regroupe tant d'auteurs difficilement comparables. Certaines histoires m'ont laissée de marbre (je m'excuse notamment auprès de João Guimares Rosa !), mais ce fut un beau voyage, et 4/5 devrait convenir.
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Concert baroque

Pourquoi ai-je deterre ce billet? Suite a des demangeaisons furieuses. Un desir non refrene d'aiguillonner des amis lecteurs (et une certaine lectrice en particulier). Un besoin subit de lire leurs ressentis.





Alors? Alors ouvrez grand vos Oreilles! Ouvrez grand votre Esprit! Laissez vous penetrer par le foisonnement musical de cette partition ou les lettres remplacent les notes. Car Alejo Carpentier nous a donne la un vrai concerto ou les mots et les phrases se deguisent, se melangent, se battent, se font l'amour a un rythme effrene. Il faut le lire a haute voix.



Et l'histoire aussi est baroque: un magnat mexicain voyage en Europe pour y sentir l'esprit de ses ancetres espagnols, ou tout simplement pour le plaisir. Decu par Madrid il pousse jusqu'a Venise ou il rencontre en pleine periode de carnaval Vivaldi (le pretre roux, le venitien), Scarlatti (le napolitain) et Haendel (le saxon), qui cooperent et s'affrontent en une orgie musicale. Il convainc Vivaldi de composer un opera sur le theme de la conquete du Mexique par Cortes et la perte du dernier roi azteque, Moctezuma (ou Montezuma dans le livre). Assistant a l'opera, il s'indigne contre les libertes que prend le livret sur la verite historique, mais la musique finit par transformer sa plus intime verite: "Je suis le petit fils d'espagnols qui virent le jour a Colmenar de Oreja et Villamanrique del Tajo, fils d'un estremegne baptise a Medellin comme Hernan Cortes. Et pourtant… plus se deroulaient les accords de la musique… plus vif etait mon desir de voir triompher les mexicains… j'epousais le parti des americains, brandissant les memes arcs, souhaitant la ruine de ceux a qui je dois mon sang et mon nom."





Dans un curieux et delirant mélange de styles et de temps, on s'assoiera sur la tombe de Stravinsky, dont Vivaldi denigrera la musique, et on s'extasiera aux sonorities plus-que-baroques de la trompette de Louis Amstrong. Alejo Carpentier (un patronyme a sonorite tres francaise. Ah! Ses aieux!) prend un malin plaisir a melanger toutes les facettes de sa culture musicale en une petulance toute cubaine. Pour notre plus grand Bonheur!



P.S. Je mets un exemple de la prose baroque de Carpentier en citation.







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Le royaume de ce monde

Ca lui a pris 16 ans a Alejo Carpentier pour publier un deuxieme bouquin. Au premier abord le lecteur peut penser qu'il poursuit la meme veine (s'il n'a pas lu l'introduction-manifeste et s'il ne sait pas qu'entretemps il a desavoue son premier livre, Ekoue-Yamba-O). Mais tres vite les differences sautent aux yeux. Je dois avouer que j'y etais prepare d'avance, sachant deux ou trois choses sur Carpentier. Dans Ekoue il narre le destin tragique d'un noir cubain, l'innocent Menegildo Cue, s'appuyant sur des descriptions ethnographiques de coutumes et cultes importes d'Afrique. Dans Le royaume de ce monde il utilise des descriptions semblables pour perfiler le devenir de tout un territoire, Haiti, dans une vision liberationniste de son histoire. Il depasse le "negrisme" decoratif.



A travers le personnage de Ti Noel, un esclave qui s'affranchira, le livre suit les differentes phases de la lutte de liberation haitienne. Et leurs different leaders, eleves ici au niveau de heros mythiques. Le manchot Mackandal, meneur du premier soulevement (en 1757, j'ai fait mes recherches), Bouckman qui dirige la deuxieme vague de la revolte (1791), et enfin le roi noir Henri Christophe (1807-1820).



L'auteur est present. Il se veut la conscience lucide de son personage, Ti Noel, qui après avoir toute sa vie admire et aide les differents insurges, voit un roi noir devenir le plus cruel des despotes ramenant de facto dans l'ile un esclavage pour tous, ne laissant d'autre issue qu'une nouvelle revolte sanglante, de noirs contre d'autres noirs negriers. Mais le dernier chapitre ne s'intitule pas pour rien Agnus Dei, agneau de Dieu, figure du sacrifie pour le bien des autres, de tous. La marche de l'histoire fait des meandres mais elle a quand meme un sens et une raison.



C'est après une visite a Saint Domingue et Haiti en 1943, ou il sera impressionne par les restes de la citadelle de La Ferriere et du chateau de Sans Souci, que Carpentier entreprend l'ecriture de ce roman. C'est un des precurseurs du nouveau roman historique latino-americain. Precurseur aussi et surtout du nouveau realisme magique, que dans son introduction programmatique il appelle "real maravilloso". Ce "reel merveilleux" est selon lui un trait caracteristique de l'histoire americaine (et pas seulement latino-americaine).



Après toutes ces palabres, est-ce-que l'auteur a rempli son contrat? Eh bien, ce fut pour moi une lecture tres agreable. Le style est tres baroque, rythme et precieux a souhait, mais je garderais l'adjectif merveilleux pour d'autres qui l'ont suivi, Asturias, Garcia Marquez, et j'en oublie…



3 etoiles? Plutot 4!

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Le royaume de ce monde

Un roman court, mais rempli de révolte, de fureur et de maléfices!

Dans Le Royaume de ce monde, rien ne change pour Ti Noël, hors les maîtres qui fouettent, punissent et exécutent.

Les noirs se soulèvent, la révolte est réprimée et ça recommence!

Les nouveaux maîtres, noirs puis métisses se révèlent pires que les colons blancs... Leurs sinistres appétits exacerbés par l'humiliation passée, et brutalement stoppés par de nouvelles révoltes!

Ti Noël suit le mouvement, de chaos en chaos, dans ces tableaux à la démesure de la folie avide de ceux qui détiennent le pouvoir.

Ti Noël, esclave perdu aux dés, à Santiago de Cuba par son maître...

Ti Noël qui redevient esclave, pour avoir voulu retrouver la terre de son premier maître!

... Comme si le balancier de l'horloge de ce Royaume n'en finissait pas de revenir au même point.

Un roman court, beau, puissant et lancinant comme ces tambours qui résonnent de plus en plus forts et obsédants au fur et à mesure qu'ils approchent.
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Ekoué-Yamba-O

Lisant le billet de dbacquet sur ce livre je me suis rappele que j'en avais poste un il y a belle lurette. J'ai essaye de le retouver et miracle! Des fois qui cherche trouve! Je le reposte: il ne date que de 2016, il est encore tout jeune.





Ecue-yamba-o est pour moi une variante du mythe de Nemesis: la revanche de l'oeuvre sur son auteur, Alejo Carpentier. Joie et Bonheur! La vengeance est un plat qui se partage avec les lecteurs. Je m'invite au repas!



Carpentier en avait ecrit une premiere mouture en 1928 alors qu'il etait emprisonne a Cuba pour ses idees politiques. Reecrit lors d'un long sejour en France, le livre fut publie en Espagne en 1933, et rapidement desavoue par l'ecrivain, sous pretexte qu'il ne depasserait pas le pittoresque superficiel. Ce n'est qu'en 1977, contraint par les nombreuses impressions pirates qui circulaient, qu'il a assume pleinement sa paternite et permis une edition academique.



La trame? le premier quart du XXe siècle a Cuba. La vie et la mort d'un noir, dans un milieu empreint de magie, de traditions africaines revendiquees et remodelees. Menegildo Cue est le fils d'un paysan qui a du ceder sa petite parcelle de terre a la grande compagnie sucriere americaine. Il grandit illettre et aide son pere, devenu charretier, a transporter la canne a sucre a la raffinerie. Suite a une rixe – sanglante – pour une jeune femme qu'il aime, il est emprisonne et se retrouvera, libere, a La Havane, dans un entourage qui l'initie au "naniguismo", une sorte de vaudou. Il finira par etre tue dans une bagarre de bandes vaudousiennes antagonistes.



La description de la vie des pauvres noirs a la campagne est interessante, mais j'ai surtout apprecie la deuxieme partie, qui se passe en ville. le vaudou n'y est pas presente seulement comme un culte, mais comme une revolte, une facon d'affirmer la dignite, l'honneur des noirs face a l'avilissement impose par les blancs. La parole dans les rites y est aussi importante que la musique, scandee par le rythme des tambours. La transe est une apotheose delivrante, dans tous les sens de cet adjectif. Les defavorises invoquent dieux et pouvoirs magiques importes d'Afrique pour se proteger, pour supporter leur marginalisation et lutter contre elle. C'est aussi une fete. Une fete ou les tambours, les quatre tambours rituels, "parlent", invoquent les deites et les heros, invitent les autres instruments et scellent le groupe. La fete comme reponse et contrepartie a la domination.



Je ne sais si Carpentier a voulu exalter la culture afrocubaine. En tous cas il lui donne une place en literature, differente des diverses etudes ethnologiques qui l'ont precede et suivi, permettant a mon avis au lecteur d'eprouver pour elle beaucoup d' empathie . J'ai lu le livre avec interet, n'en deplaise aux manes de Carpentier. Sans plus, bien sur; ce n'est pas un chef-d'oeuvre. C'est plutot la matiere brute que l'auteur raffinera plus tard dans "Le royaume de ce monde". Mais ca c'est peut-etre pour un prochain compte-rendu.



Trois etoiles donc. Tout de meme!





P.S. Et merci a dbacquet!

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Ekoué-Yamba-O

Ce premier roman d'Alejo Carpentier nous plonge au coeur de la société afro-cubaine dans la première moitié du XXe siècle. Nous suivons Menegildo Cué, dès sa naissance, dans une modeste case de paysans cubains. La famille vit à côté d'une usine à sucre, la centrale San Lucio, où viennent travailler des haïtiens, des Jamaïcains, des galiciens... A son adolescence Menegildo s'éprend de Longina, une jeune Haïtienne qui a été vendue à un manoeuvre de la centrale, l'un de ses compatriotes, ivrogne et querelleur. Ce qui conduira Menegildo à commettre un homicide et à être emprisonné. Mais le Noir Antonio, un cireur de chaussure appartenant à une puissante confrérie, veille sur la destinée de son cousin. Menigildo est libéré de prison et retrouve Longina. Ils décident de rester en ville où la vie n'est pas moins agitée. Alejo Carpentier, grâce à un style très riche, traduit assez bien ce monde afro-cubain, où la politique côtoie la sorcellerie.
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Histoires étranges et fantastiques d'Amérique l..

Je suis un anaconda. J'ai avalé cette anthologie de 505 pages avec grand plaisir et je ne suis pas repue, je vous préviens. Vous aurez droit à de petits billets sur certaines histoires que je compte bien relire ou écouter.

Claude Couffon un très grand spécialiste a réuni en 1989 la crème de la crème, d'un continent formidablement divers et prolixe (voir la liste complète dans "résumé"). Une trentaine d' histoires signées des plus grands écrivains hispanophones et lusophones du XXe. Tous désormais classiques. Tous ont écrit de superbes textes étranges ou fantastiques. Ne me demandez pas quelle est la différence, je vous goberais tout cru sur votre oreiller de plumes ce soir. Ces définitions varient tous les ans et sont toujours indigestes tant il y a d'exceptions. Je suis bien davantage sensible à la maîtrise du cuento ou conto, qui est considéré là bas comme un des beaux arts.

« J'ai lutté, écrit Quiroga, pour que le conte n'ait qu'une seule ligne, tracée d'une main certaine du début jusqu'à la fin. Aucun obstacle, aucune digression ne devait venir relâcher la tension de son fil, le conte est, au vu de sa fin intrinsèque, une flèche soigneusement pointée qui part de l'arc pour aller directement donner dans le mille. »



Ces fins archers sont tous les héritiers de plusieurs traditions écrites et orales amérindiennes, africaines, européennes. Ils ont le don de vous faire gober le surnaturel comme si de rien n'était. On l'accepte d'autant plus volontiers qu' on aime entendre des histoires, entre plaisir et horreur, qui nous sortent littéralement de l' ordinaire pour mieux l'interroger.



J'ai savouré des histoires qui sont indisponibles à ma connaissance en français actuellement :

-Oscar Cerruto : Les Vautours***** un voyageur croise le regard magnétique d'une femme dans un tramway et plonge dans un cauchemar.

-Juan Bosh : La Tache indélébile*** : un conte fantastique civique...si, si.. qui vous fait perdre la tête (voir citation).

-Juan Jose Arreola : L'Aiguilleur***** : un voyageur cherche en vain son train et dialogue avec l'aiguilleur. Une nouvelle absurde et drôle.

-Elena Garro : le Jour où nous fûmes des chiens****La cruauté du monde vue à travers l'imagination innocente d'une petite fille.

-Virgilio Diaz Grullon : au-delà du miroir*** Un homme à la recherche de sa véritable identité.

-Sergio Galindo : L'homme aux champignons ****Une terrible fricassée familiale.



Merci beaucoup Bobby.

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Retour aux sources

Retour aux sources est la nouvelle la plus fameuse d’Alejo Carpentier, le créateur du réalisme magique latino-américain. Elle a été écrite en 1944 et publiée en 1963 à la Havane. Dans cette nouvelle, le temps s'inverse littéralement.



Une grande maison coloniale est en démolition au premier chapitre. Un vieux « nègre » s’assoit dans le jardin sous une statue de Ceres délabrée et frappe le sol avec un bâton.

La maison se reconstruit, et Don Martial, Marquis de Capellanas, l’aristocrate mourant qui la possédait autrefois voit sa vie repartir à rebours : sa maladie disparaît, il récupère, se rétracte de la longue confession faite au prêtre sur son lit de mort. Sa maîtresse se lève, s’habille et quitte sa maison. Martial est déprimé par la vente de la maison. Il prend une maîtresse suite au décès de sa femme. La maison et son contenu rajeunissent. Etc etc. Sa vie est refondue, rembobinée comme un film rejoué à l'envers en 12 fuseaux , jusqu'à sa naissance, une époque où « il ne savait pas son nom », puis au-delà, jusqu'à une époque où « tout retourne à son état premier».

A la fin les ouvriers chargés de la démolition reviennent constater que la maison a disparu.



Il y a mille et une choses à découvrir dans cette nouvelle.

Alejo Carpentier était un musicien et un musicologue réputé. Son récit est construit savamment selon la récurrence ou forme rétrograde c’est-à dire lue de la dernière note à la première, avec des coups de tonnerre et des motifs répétés : la statue de Ceres (déesse de la fertilité et de l’agriculture), l’horloge, le miroir.

Les descriptions de la maison, des meubles qui s’agrandissent, des objets aux différents stade de la vie de Martial sont formidables : précises, foisonnantes, sensorielles, luxuriantes à mesure que la terre originelle reprend ses droits (voir citations).

La magie est déclenchée par le vieux « nègre » qui provoque la régression. Il est une sorte d’intercesseur entre le temps chronologique et le temps à rebours cyclique. Il réapparaîtra plus tard avec Melchor le cocher noir de la propriété et « mage » comme son nom l’indique, qui apprend tant de choses au jeune Martial en cachette du père détesté.

Suite à sa longue confession, on pense que Martial est un homme sans scrupules, on se demande s’il n’a pas tué la marquise mais à mesure qu’on déroule le film à rebours on révise notre jugement. Il devient en effet de plus en plus sympathique. Martial se dépouille de ses attributs colonialistes, des convenances, des tabous, il retrouve sa liberté, son innocence, sa vie est plus agréable, plus ludique, il devient plus joyeux, plus sauvage, plus animal et finit au-delà de sa naissance par fusionner avec la semence nourricière.

Retour aux sources figure dans l’excellente anthologie Histoires étranges et fantastiques d’Amérique latine, dans le recueil Guerre du Temps et autres nouvelles (folio) et je vous recommande chaudement l’écoute du podcast gratuit.
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La cité des colonnes

Alejo Carpentier évoque La Havane à travers les éléments les plus caractéristiques de son architecture : la profusion des colonnes, des grilles, l'éventail des vitres au dessus des portes, brisant le soleil, les recoins de pénombre, etc., un enchevêtrement de style qui en souligne l'esprit baroque. Ce livre, qu'accompagnent les photographies de Paolo Gasparini, invite à la flânerie et au voyage.
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Histoires de lune

Histoire de lunes  a été écrit et publié pour la première fois en français en 1933, dans les Cahiers du Sud, une revue d'avant-garde surréaliste. C'est une des premières nouvelles d'Alejo Carpentier ( 1904-1980) et elle est magnifique ! Très riche, musicale, magique !



Atilano est cireur de chaussures et membre des "Crapauds", l'un des groupes Ñáñigo d'un petit village cubain en apparence bien tranquille. Il se transforme avec le croissant de lune en "Glissant". C'est une créature mythologique qui prend la forme d'un arbre, et viole des femmes la nuit. On organise alors une chasse à l'homme, le curé s'offusque de toute cette sorcellerie, les tambours résonnent dans l'église, les hommes partent dans la montagne consulter le sorcier, le coupable est désigné mais…

La nouvelle mêle magie vaudou (confréries Ñáñigo), christianisme et mythologie (afro-cubaine et Ovidienne) au rythme des tambours. On est pris par le crescendo, le son de plus en plus frénétique des tambours jusqu'à la transe violente, la guerre civile qui s'ensuit puis ce sera le carnaval...l'interprétation de Jean Topart est excellente, elle restitue le rythme et l'oralité du texte, avec les différentes voix narratives qui coexistent : celle de la raison, celle de l'irrationnel. Les descriptions sont fameuses, saisissantes, sensationnelles en particulier celle de la transe vaudou.

A travers cette nouvelle on comprend que les croyances animistes persistent à Cuba pour le meilleur et le pire. L'Eglise catholique est tournée en dérision dans l'épisode du carnaval sensé apaiser les tensions entre les confréries. Et la fin révèle que le maire ne s'embarrasse pas de justice pour faire respecter l'ordre.



La nouvelle en français figure dans le recueil des éditions Gallimard avec le premier roman d'Alejo Carpentier Ekoué-Yamba-O traduit de l' espagnol en 1927.

Sinon on peut lire en espagnol « Historia de lunas » sur le web.
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Le Partage des eaux

Fruit de ses excursions dans la grande savane vénézuélienne et champ d’expérimentation de son réel-merveilleux, ce roman d’Alejo Carpentier relate les aventures d’un musicologue qui fuit la grande ville déshumanisée et découvre un prometteur continent vierge et idéalisé, véritable voyage introspectif dans l’espace et le temps. Le monde américain primitif y est magnifié pour les potentialités qu’il recèle.

L’écriture hautement érudite, le mystère du récit, les références mythologiques enlacent le lecteur pour mieux le déstabiliser et l’emmener dans une quête orphique. La langue narrative est incroyablement caribéenne, faite de dérives baroques et de distorsions, rythmée par la répétition de motifs telle une respiration.

Ce voyage aux confins de l’humanité, du temps et de la musique s’effectue par étape, chacune spatialisée, dont l’histoire, la géologie et la culture semblent cristallisées et dont la composition romanesque devient la métaphore d’un temps mythique. Ces étapes sont autant de caps existentiels que le voyageur franchit. Lui-même enchâssé dans un temps comme suspendu, il revient en lui-même sans échapper à l’échec, notamment sentimental, mais poursuit ses « pas perdus ».

Ce voyage qu’Alejo Carpentier nous invite à partager nous signifie que nous sommes contemporains de tous les temps de l’homme et que l’opposition entre civilisation et barbarie est vaine. Ce monde des « pas perdus – pasos perdidos » où le temps, l’espace, les valeurs, le progrès sont bousculés raconte un univers latino-américain résolument hybride, remettant en cause la solidité d’une modernité univoque, orpheline de ses origines.

Le partage des eaux a contribué à installer la notoriété internationale d’Alejo Carpentier. A très juste titre.
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Le Siècle des lumières

Sans doute le plus abouti des romans d'Alejo Carpentier tant la maîtrise en est parfaite et la maturité d'écriture indéniable. Dans ce livre, L Histoire, passion de l'auteur, est au service d'une fiction aussi théâtrale que baroque. Alejo Carpentier choisit pour son roman un temps historique précis : celui des débuts de l'émancipation latino-américaine et de l'influence de la toute jeune Révolution française, dans un lieu propice aux brassages des populations et des idées : les Caraïbes.

Les protagonistes fictifs côtoient des personnages réels, cernés par les paradoxes de l'idéal révolutionnaire : violence, barbarie, intolérance, idéalisme, cynisme, pragmatisme.

Cette fresque historique quasi épique n'a pas uniquement valeur de construction romanesque ou de réflexion méditative sur l'émancipation des peuples latino-américains. Alejo Carpentier y voit une spirale infernale répétée à l'infini dans laquelle les révolutions entraîneront toujours l'humanité, à l'image de la conclusion chaotique de son roman.


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La danse sacrale

Oeuvre sublime d'Alejo Carpentier, fruit d'une longue gestation, véritable somme de ses engagements, de son humanisme horrifié par les préjugés sociaux et raciaux, de ses identités européennes et latino-américaine et de ses convictions, La danse sacrale est une vaste fresque historique, idéologique et humaine, largement fondée sur le désir de témoignage. Le récit très dense couvre à la fois une grande diversité géographique (Cuba, Espagne, France, Venezuela...) et les grands événements de l'histoire contemporaine. Alejo Carpentier construit ses protagonistes comme des archétypes incarnant les horreurs de la guerre tout autant que les idéaux exaltés de ceux qui veulent révolutionner le monde : il réussit à forger des confrontations émouvantes entre des destins individuels et collectifs, rendant L Histoire presque palpable.

Le titre emprunté au Sacre du printemps de Stravinski est un symbole en soi du triomphe annoncé d'une révolution que l'auteur a ardemment souhaitée. Cependant, sans se départir de son enthousiasme quant à la révolution cubaine, Alejo Carpentier rétablit l'équilibre en défendant la beauté et l'harmonie universelle d'une humanité plurielle et ouverte.
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Le Partage des eaux

Après avoir terminé la lecture de ce livre, je n’ai tout d’abord pas su comment l’interpréter. J’ai d’abord pensé qu’il s’agissait d’un hymne à la vie sauvage, dans la mesure où le lecteur est, après un début un peu lent, plongé au cœur de la forêt amazonienne, avec sa sauvagerie mais aussi ses curiosités remarquables, puis les choses sont devenues progressivement plus claires dans mon esprit.



Le titre original de l’ouvrage est « Los pasos perdidos » ce qui signifie « les pas perdus », expression que j’interprète à la fois comme « la perte du passage » (l’auteur ne parviendra en effet pas, à bord de sa pirogue, à retrouver « la porte », c’est à dire le passage qui lui permettrait de rejoindre sa compagne, la belle Rosario) mais aussi comme « le temps perdu » (l’auteur, pétri de civilisation occidentale, se rend compte que, depuis des années, il vit en mode « décalé » par rapport à la réalité et au sublime qui lui sont offerts par la forêt primitive).



Dans un style fouillé, constellé de références littéraires, musicales et historiques, Alejo Carpentier, nous fait toucher du doigt ce qui est pour lui une bien triste évidence : la réalité de la vie occidentale est sale, décevante, terrifiante et incompréhensible, alors même qu’il existe à portée de mains un monde beau et vrai, primordial, sans artifices. Ce monde mythique ne nous est accessible qu’au prix d’épreuves : les chapitres du récit sont l’occasion de voir passer notre héros (l’auteur) d’événements en événements jusqu’à une ultime tentative de renaissance en un homme nouveau, pur et vrai. Mais cette tentative ne sera pas couronnée de succès et, tel Sisyphe, notre héros (l’auteur) devra recommencer depuis le début et redoubler d’efforts : mais ce sera peine perdue, et Alejo Carpentier nous montre que l’homme occidental est victime d’une forme supérieure d’aliénation.



Dans ce livre, le voyage n’est qu’un prétexte : les épreuves constituent une étape obligatoire dans ce processus de renaissance. La forêt amazonienne est la matrice originelle d’où la vie est issue : pour renaître, encore faut-il s’oublier au cœur de cet espace sauvage où le temps perd de sa linéarité (que sont le passé, le présent et le futur dans la moiteur et l’éternité de la forêt primitive ?) et gagne en épaisseur (l’air n’est-il pas chargé de poussières, d’insectes et d’odeurs ?). Le personnage principal est anonyme : il n’est en effet nul besoin de donner un nom à cet homme qui est en recherche de la vérité, de la beauté et de lui-même, car derrière cet homme c’est en fait chacun d’entre nous qui se cache. La musique joue un rôle important dans ce livre : l’auteur, comme notre héros, est musicologue, et il resitue l’évolution musicale (de l’origine du son brut aux richesses de la musique contemporaine) dans son contexte et dans sa dimension universelle, s’agissant de traduire au final des émotions intemporelles : joie, peur, désir, mort … Or, s’agissant de provoquer des émotions, la forêt primitive n’est pas en reste ! Elle est même capable de toutes les prouesses, quitte à recourir à la magie : d’ailleurs, notre musicologue n’hésite pas à entreprendre la composition d’un thrène pour faire en sorte que ressuscite enfin l’homme primordial et qu’il soit comme Adam et Eve avant le pêché, au pays du réel merveilleux, au « pays de l’Immuable » comparable au Quatrième jour de la Genèse.



D’aucuns trouveront peut-être le style d’Alejo Carpentier un peu mou, mais, dans la chaleur et l’humidité constante de la forêt amazonienne, pouvait-il utiliser un style dur, incisif et rapide ? En guise de conclusion, voici un livre qui oppose la vie de l’homme urbain et la vie de l’homme véritable : la vie du premier est caractérisée par des artifices (la ville est un simulacre où chacun agit, comme Ruth, actrice, derrière un masque), la routine désespérante , la solitude, l’errance, la violence, la perte de sens (que d’autodafés au début du 20ème siècle) et l’emprisonnement, quand celle de l’homme véritable, nettoyé de ses oripeaux, est caractérisée par la pureté de la forêt primitive, un monde beau et vrai, primordial, sans artifices. Une utopie ? Certes. Mais ne nous faut-il pas rêver de temps en temps ?
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Le royaume de ce monde

Court roman, Le Royaume de ce monde du grand prosateur Alejo Carpentier propose une fiction historique ébouriffante basée sur le processus d'indépendance d'Haïti (Saint Domingue à l'époque).

Mettant en scène l'histoire de l'hégémonie coloniale Blanche du point de vue de la communauté des esclaves Noirs, l'auteur revisite furieusement et de façon ouvertement romancée l'élan historique de la transition d'Haïti de l'esclavage vers l'émancipation et de la colonie vers la république : de la première grande révolte d’esclaves en 1791, jusqu’à la révolution de 1804 et la déclaration d’indépendance d’Haïti, première république Noire, le tout sous l'égide des idéaux émancipateurs de la Révolution française.



Carpentier utilise à merveille l'antagonisme culturel et religieux entre les deux communautés comme catalyseur des secousses historiques haïtiennes : la culture et la religion européennes des élites dominantes, statiques, voire conservatrices, et celles dynamiques des esclaves dominés et invisibles, chaque communauté proposant une lecture contradictoire de l'Histoire. Brouillant la frontière entre évènement historique et surnaturel, mobilisant des causalités irrationnelles pour dire l'Histoire, ce dynamisme du sacré, constant dans la littérature de Carpentier, se déploie dans une suite de métamorphoses, rituels ancestraux, mythes et personnages historiques revisités, et illustre une thèse majeure de l'auteur : la puissante vigueur du prodigieux.



Dans Le royaume de ce monde, l'auteur expose également avec brio un thème qui lui est cher parce que prégnant sur tout le continent latino américain, dans son histoire comme dans son identité : le syncrétisme culturel d'une part (largement étudié par l'anthropologue cubain Fernando Ortiz et ses analyses sur la transculturation que Carpentier connaît bien), et acculturation d'autre part.

C'est sur fond de ce panorama que ce roman évoque la stabilité des structures dominantes coloniales qui réaffirment les privilèges et les exclusions et que les révoltes et les républiques ne modifient pas : les mulâtres républicains haïtiens prendront le pouvoir et domineront à leur tour. Pour Carpentier, tout renversement historique n'est qu'un conflit d'intérêt où la place dominante est à saisir au détriment des dominés, la couleur de peau devenant bien plus un déterminant social et culturel que racial. Alejo Carpenier développe ici la même vision historique que dans son ouvrage Le siècle des Lumières : l'Histoire comme chaos infernal infiniment répété dans lequel bouleversements et révolutions entraînent les hommes. Mais Carpentier offre à l'humain une issue possible à cette fatalité de la condition humaine : persister dans ce désir sauvage d'exister et "d'aimer au milieu des fléaux".



Enfin, et je terminerai par une idée centrale évoquée dans le prologue de l'auteur (dans la version originale de son édition) : "la chronique de l'Amérique n'est rien d'autre que la chronique du réalisme merveilleux". Carpentier instaure, dans une prose ciselée et virtuose, un langage singulier en connectant baroque et réalisme magique, comme voie privilégiée pour rendre compte des réalités latino-américaines.
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Le recours de la méthode

Pour Alejo Carpentier, l'expérience latino-américaine est un tout. Ce livre brillantissime n'échappe pas à cette règle. Son héros extravagant, le Premier Magistrat, archétype de tous les tyrans, est entre deux mondes : Paris où il mène grand train avec un visage mondain et son pays latino-américain où il réprime brutalement toute opposition.

Lors d'une première rébellion, sa route dictatoriale va croiser celle d'un étudiant, lui aussi archétypal, allégorie de tous les révolutionnaires utopistes. Le dictateur, cartésien dans ses discours, barbare dans sa répression, perd peu à peu de son hégémonie, à la faveur d'une seconde rébellion, laissant un espoir politique provisoire à l'étudiant. Anticartésien, l'ordonnancement des sept chapitres suit le fil conducteur chaotique de carnavals, massacres et autres scènes de carnage où la chronologie et l'espace, bousculés, permettent toutes les identifications à tous les régimes autoritaires d'Amérique Latine. Alejo Carpentier, toujours à distance du passé, pose le présent comme seul temps possible pour les changements, temps que l'être humain doit réinvestir pour ne pas s'enfermer dans une répétition des expériences passées.

Avec sa langue baroquisante et son humour décapant, Alejo Carpentier met l'écriture au service de la dénonciation des abus de pouvoir et de la répression notamment des intellectuels dont le passage en prison, en Amérique Latine, fut presque un passage obligé.
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Concert baroque

Roman où il est question en premier lieu de musique et tout particulièrement de l'opéra d'Antonio Vivaldi "Montezuma". Dans ce livre la musique tient la première place, mais le lecteur y trouve beaucoup d'informations ayant trait à la culture, l'Histoire, la littérature. L'auteur évoque la conquête du Mexique par Cortès et la capitulation de Montezuma. Au 18 ème siècle, un créole mexicain, part en voyage vers la vieille europe. Après un séjour en Espagne, il se pose pendant un temps à Venise où il rencontre plusieurs grands musiciens baroques, notamment Vivaldi... Mais dans ce roman étrange car ne respectant pas du tout la chronologie, un pique-nique est organisé dans le cimetière Saint-Michel à proximité de la sépulture d'Igor Stravinski. La villégiature se déroule à l'époque du Carnaval ou toutes fantaisies et badinages sont permis... Rêve, fable? Louis Amstrong, lui même, fait résonner sa trompette dans une salle de concert de Venise... alors qu'une locomotive, tirant des voitures des Wagons-lits Cook, venait à peine de quitter la gare de la Sérénissime.

Un peu plus de 100 pages pour une écriture intense et un récit touchant au merveilleux.
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Concert baroque

Une bulle de champagne ! Un tourbillon de musique, de couleurs, de sons. Entrez dans le monde d’Alejo Carpentier et laissez-vous bercer par la musique.



Je n’ai peut-être pas toutes les clés pour comprendre toutes les subtilités de ce livre à sa juste valeur, n’étant pas musicienne et n’y connaissant pas grand-chose, mais j’ai aimé l’écriture et les sensations procurées par cette lecture. Je me suis simplement laissée porter.

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Concert baroque

Tout est baroque dans ce roman, à commencer par l’histoire. Au XVIIIème siècle, un riche mexicain d’origine espagnole se rend au carnaval de Venise. Il fait escale à La Havane où son valet (qui est aussi son musicien) meurt de la peste. Il engage pour le remplacer un jeune noir cubain doué pour la musique. Ils s’ennuient durant leur première étape en Espagne puis s’embarquent pour Venise, le maître déguisé en Montezuma et le valet en lui-même. Ils rencontrent un prêtre, Vivaldi, qui les présente à Haendel et à Scarlatti. Les époques s’entrechoquent et s’entremêlent : ils se retrouvent dans un cimetière près de la tombe d’un compositeur nommé Igor Stravinsky et le final du roman est un concert de Louis Armstrong (il y est aussi question de tour Eiffel et de wagons-lits !). Je ne m’y connais pas assez ni pour repérer toutes les références ni pour apprécier cette tentative de transposer la musique dans une œuvre littéraire, mais il émane du texte une grande vitalité et le lecteur est embarqué dans un tourbillon de sensations. Cette histoire déjantée rend un très bel hommage au métissage culturel, musical et littéraire. Quant au style d’écriture, il arrive à créer un texte déjanté, échevelé, rythmé et virevoltant, plein de sons et de couleurs. Le lecteur n’a qu’à se laisser porter, emporté dans une joyeuse sarabande baroque. Une très belle découverte !
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