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Citations de Annie Dillard (94)


Mais il existe une autre manière de voir qui implique qu'il faille s'abandonner. Quand je vois de cette manière-là, je vacille, transpercée, vidée de toute substance.
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La page dans la pureté de ses possibilités ; la page de ta mort, à laquelle tu opposes toutes les excellences défectueuses que peut réunir ta force vitale : cette page t'apprendra à écrire.

p.79
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Parfois, au milieu de leur sommeil, au plus noir de la nuit, quand soufflait un vent métallique et qu'à travers la vitre, les étoiles forçaient la chambre, ils se réveillaient au même instant, comme s'il venait de se produire un tremblement de terre. La passion revenait-elle qu'ils éclataient de rire.
Parfois, le jour ou la nuit, il les écoutait respirer, elle et lui, vieux comme les océans - pleins d'expérience. Ils s'étreignaient et regardaient, chacun par-dessus l'épaule de l'autre, le naufrage qu'était le monde, en tenant à distance tout de qui était en ruine ou défeuillé. Ou alors, ils le berçaient, ce monde, entre eux deux, comme un enfant mortellement malade - avec amour, mais sans lui dire tout ce qu'ils savaient.
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Qui m’apprendra à écrire ? désirait savoir un lecteur.
La page, la page, cette blancheur éternelle, la blancheur de l’éternité que tu couvres lentement, affirmant le griffonnage du temps comme un droit, et ton audace comme une nécessité ; la page, que tu couvres opiniâtrement, que tu détruis mais en affirmant ta liberté et ton pouvoir d’agir, comprenant que tu détruis tout ce que tu touches, mais le touchant néanmoins, parce que agir vaut mieux qu’être là dans l’opacité pire et simple ; la page, que tu couvres lentement de l’entrelacs tortueux de tes viscères ; la page dans la pureté de ses possibilités ; la page de ta mort, à laquelle tu opposes, toutes les excellences défectueuses que peut réunir ta force vitale : cette page t’apprendra à écrire.
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Je m’intéresse aux emplois du temps. Même lorsque nous lisons de la physique, nous nous informons de la moindre particule. Que vais-je donc faire ce matin ? Nous vivons, notre vie, bien sûr, comme nous passons nos journées. Ce que nous faisons de cette heure, de cette autre, est ce que nous faisons tout court. Un emploi du temps protège du chaos et du caprice. C’est un filet pour attraper les jours. C’est un échafaudage sur lequel l’ouvrier peut se camper et travailler à deux mains sur des pans temporels. Un emploi du temps est un simulacre d’ordre et de raison. Une imposture réfléchie puis concrétisée ; c’est un havre de paix dans le naufrage du temps ; c’est un canot de sauvetage à bord duquel tu te retrouves, des dizaines d’années plus tard, toujours en vie. Chaque journée est identique à la précédente, si bien que tu te rappelles ensuite leur succession comme une forme floue et puissante.
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L’amour lui avait si soudainement bondi dessus qu’elle pensait sérieusement que personne n’avait jamais analysé d’un peu près ce phénomène. Où en était-il question dans la littérature? Quelqu’un avait bien dû écrire quelque chose à ce sujet? Ça avait dû lui échapper. Il était temps de tout relire.
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Un jour, il y a longtemps, les Maytree furent jeunes. Ils vivaient sur ce qui semble, encore aujourd'hui, la surface même de l'Antiquité : tout au bout du cap Cod, le « cap aux morues », cette sablonnière minérale exposée aux intempéries. La péninsule en cet endroit était plus qu'étroite entre deux plans d'eaux. Son altitude en moyenne était de quelques pieds au-dessus du zéro des cartes.
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La tentation de mettre de côté quelque chose de bon pour un endroit meilleur, pour plus tard, est le signal de le dépenser maintenant. Autre chose émergera plus tard, quelque chose de mieux. Toutes ces choses viennent par-derrière, par en dessous, comme l'eau d'un puits. De même, la tentation de garder pour toi seul ce que tu as appris et non seulement honteuse, elle est destructrice. Tout ce que tu ne donnes pas librement et en abondance devient perdu pour toi. Tu ouvres ton coffre-fort et découvre des cendres.
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Assembler un livre est intéressant et enthousiasmant. C'est suffisamment difficile et compliqué pour requérir toute ton intelligence. C'est la vie à son plus haut degré de liberté. Ta liberté d'écrivain n'est pas la liberté d'exprimer des opinions outrées ou abruptes ; tu n'a pas droit aux divagations. C'est la vie à son plus haut degré de liberté si tu as la chance de pouvoir essayer, car tu choisis tes matériaux, tu inventes ton projet et tu te donne to propre rythme. En démocratie, tu peux même écrire et publier tout ce que tu veux sur n'importe quel gouvernement ou institution, même si ce que tu écris est manifestement faux.
La contrepartie de cette liberté, c'est bien sûr que ton travail est tellement dépourvu de sens, tellement destiné à toi et à toi seul, et tellement futile aux yeux du monde, que personne d'autre que toi ne se demandera si tu le fais bien ou si tu le fais tout court. Tu es libre de rendre chaque jour plusieurs milliers de décisions de justice circonstanciées. Ta liberté est un sous-produit de la trivialité de tes journées.
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Car l'essentiel n'est ni vous, ni moi, ni ce que nous aurions pu devenir. Ce qui compte, c'est que nous prenions conscience de ce qui nous entoure, que nous découvrions un lieu, que nous trouvions un globe en orbite, sur lequel nous pencher, réfléchir et sauter. Ce qui importe, c'est le moment où une vie s'ouvre, où nous sentons qu'elle touche - avec un sifflement électrique et un cri - notre monde actuel, cette sphère minérale ocellée.
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La conscience fond sur l'enfant comme une hirondelle de mer touche sur le sol l'ombre de ses pattes tendues ; très précisément, doigt après doigt. L'hirondelle replie ses ailes pour se poser ; son ombre s'incline, s'étend sur le sable à la rencontre de son ventre, et l'enveloppe.
Comme n'importe quel enfant, je me coulai en moi-même à la perfection, comme une plongeuse rencontre son reflet sur la piscine. Le bout de ses doigts pénètre le bout des doigts sur l'eau, ses poignets glissent le long de ses bras. La plongeuse s'enveloppe totalement dans son reflet, scellant celui-ci aux doigts de pied, et revêtue de ce reflet, elle sort de la piscine, pour toujours.
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Le prêtre que je ne connaissais pas, avait la soixantaine. il était grand ; il portait sa lassitude avec décontraction, se tenait bien droit et contrôlait sa respiration. Chaque fois qu'il s'agenouillait devant l'autel et qu'il se relevait, ses genoux craquaient. Ce craquement de genoux, c'était de la belle musique d'église.
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"La jeunesse assemble ses matériaux pour construire un pont jusqu'à la lune, note tristement Thoreau, ou peut-être un palais ou un temple terrestre; l'âge mûr se résoud enfin à les utiliser pour bâtir une cabane."
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De longues grappes de fleurs blanches pendaient des caroubiers. L'été dernier, on m'a raconté une légende Cherokee, qui parle des caroubiers et de la lune. La déesse de la lune commence avec une grosse boule, la pleine lune, qu'elle balance avec force en plein ciel. Toute la journée se passe à la récupérer ; alors, elle en rogne un copeau et, de nouveau, elle la lance, la récupère, puis en rogne un autre morceau, la relance, et ainsi de suite. Elle consomme une lune par mois, et ça dure toute l'année. Et puis, comme le raconte le géologue du Parc National, Bill Wellman, "quand c'est qu'le printemps arrive, elle en a jusqu'aux genoux, des rognures de lune", alors, elle part à la recherche de son arbre favori, le caroubier, et elle suspend les minces copeaux de lune à ses branches. Et moi, je les avais là sous les yeux, les fleurs de caroubiers, rassemblés en pâles croissants.
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Pourquoi ne trouves-tu jamais aucun écrit sur cette pensée particulière dont tu parles, sur ta fascination pour une chose que personne d’autre ne comprend ? Parce que c’est à toi de jouer. Voici une chose que tu trouves intéressante, pour une raison difficile à expliquer. C’est difficile à expliquer parce que tu ne l’as jamais lu sur aucune page ; voila par où commencer. Tu as été créé en ce monde pour donner voix à cela, à ton propre étonnement. « La partie la plus exigeante d’une vie vécue en artiste est la stricte discipline par laquelle il se contraint à travailler obstinément au plus près du nerf de sa sensibilité la plus intime. » Anne Truit, la sculpteur, dit cela. Thoreau le dit d’une autre manière : connais ton os personnel. « Poursuis, reste avec, encercle encore et toujours ta vie … Connais ton os personnel : ronge-le, enfouis-le, déterre-le et ronge-le encore
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Les gens qui lisent ne sont pas trop paresseux pour allumer la télévision ; ils préfèrent les livres.
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Pourquoi lisons-nous, sinon dans l'espoir d'une beauté mise à nu, d'une vie plus dense et d'un coup de sonde dans son mystère le plus profond (p91)
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Plutôt que d'écrire un livre, je le veille, comme une amie à l'agonie. Durant les heures de visite, j'entre dans sa chambre avec terreur et je compatis à ses nombreux désordres. Je lui tiens la main es espérant que son état va s'améliorer.(p70)
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La jeunesse assemble ses matériaux pour construire un pont jusqu'à la lune, note tristement Thoreau, ou peut-être un palais ou un temple terrestre ; l'âge mur se résoud enfin à les utiliser pour bâtir une cabane (p13)
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On ne s'étonnera pas que la vie d'un écrivain - telle qu'elle est - soit d'une fadeur qui frise l'isolation sensorielle. Beaucoup d'écrivains accomplissent fort peu de choses hormis rester assis dans de petites pièces en évoquant le monde réel. Voilà pourquoi tant de livres décrivent l'enfance de l'auteur. L'enfance de l'écrivain a peut-être été l'occasion de sa seule expérience de première main. Les écrivains lisent des biographies littéraires et s'entourent d'autres écrivains, pour se convaincre obstinément de cette notion ridicule : une occupation raisonnable et digne de durer pendant tout notre séjour sur cette planète consiste à passer ce temps assis dans une petite pièce, en compagnie de bouts de papier.
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Vous êtes infiniment triste
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Vous compatissez, mais au fond, vous vous en fichez un peu
Tant mieux ! Vous detestez ces petites bêtes

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