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Critiques de Dai Sijie (458)
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Balzac et la Petite Tailleuse chinoise

Parce qu'ils portent la double faute d'avoir étudié au collège et d'avoir des parents ''ennemis du peuple'', le narrateur et son ami Luo sont envoyés en rééducation dans un village de montagne. Entre les rizières et la mine, les conditions de vie sont difficiles mais les deux adolescents ont su endormir la méfiance des villageois grâce à leur talent de musicien, pour le narrateur, et de conteur pour Luo. Et puis, la campagne recèle aussi quelques trésors cachés. Par exemple, la fille du tailleur, la jolie Petite Tailleuse ou encore la valise pleine de livres que le Binoclard, un autre rééduqué, cache quelque part dans sa masure.



Balzac, Tolstoï, Dumas et bien d'autres tentations, toute cette littérature subversive, interdite, qui titille l'imagination, et les sens, de deux adolescents perdus à la campagne, sans trop d'espoir de rentrer chez eux. Et pourtant, qu'ils sont libres ! Les livres pour apprendre, comprendre, ressentir, pour s'évader loin de la montagne, de la Chine, du communisme, de la révolution culturelle, pour découvrir l'individualisme, et pourquoi pas l'égoïsme, le plaisir, l'amour, la sensualité, la liberté. Et si le contexte est rude, le travail épuisant, parfois dangereux, la menace d'une dénonciation toujours possible, Luo et son ami sont suffisamment optimistes, délurés, culottés, amoureux de la vie, pour donner au roman un souffle vital irrésistible.

Dai SIJIE prouve, s'il en était besoin, que la littérature est le plus grand vecteur de connaissances, d'évasion et de liberté. Cette ode aux classiques occidentaux est une petite merveille, une lecture joyeuse et optimiste où l'amour des livres brille à chaque page de la lueur de l'espoir. Un bijou !
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Balzac et la Petite Tailleuse chinoise

Lors de la Révolution Culturelle de Mao Zedong, deux lycéens que leurs parents bourgeois rendent « ennemis du peuple » sont envoyés en rééducation dans un village pauvre et isolé des montagnes du Sichuan. Ils survivent au dénuement et aux éprouvantes conditions de travail des rizières et des mines de charbon en se racontant des histoires, jusqu'au jour où, de manière inespérée, ils tombent sur un roman De Balzac miraculeusement soustrait aux autodafés. Cette lecture interdite va changer leur vie, et surtout celle de la fille du tailleur dont ils sont tous deux amoureux.





En partie autobiographique, ce livre est saisissant à maints égards, à commencer par la découverte d'un village arriéré tout droit sorti d'un autre siècle, où un simple réveil-matin fait figure d'objet si extraordinaire que sa sonnerie matinale en devient presque sacrée, où il est si compliqué de se procurer les choses les plus usuelles que le tailleur ambulant est attendu comme le Messie, et où, de manière générale, hygiène, conditions de vie et niveau d'instruction font dresser les cheveux sur la tête.





Mais l'épicentre de la révolte des deux garçons est la sensation d'étouffement provoquée par l'interdiction et la destruction des livres. Pour plaire à la fille du tailleur, et malgré les interdits, ils n'auront de cesse de lui faire découvrir la magie des histoires, puis celle des livres, ouvrant ainsi la porte à un champ de possibles totalement inexistants jusqu'alors pour la jeune femme.





Hommage aux classiques de la littérature occidentale, ce roman met parfaitement en lumière le formidable pouvoir des livres, irremplaçables vecteurs de connaissances, d'émancipation et de liberté. Coup de coeur.


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L'Évangile selon Yong Sheng

C'est une vie très extraordinaire que celle du grand-père de Dai Sijie.

Fils de charpentier confectionneur de sifflets pour colombes et premier pasteur chinois de Putian, une ville côtière du sud de la Chine, Yong Sheng avait fait son église de la grande chaumière construite de ses propres mains. Lieu transformé à son initiative en orphelinat au départ des congrégations américaines en 1942 et confisqué au moment de la révolution culturelle pour y installer un pressoir à huile, il y avait vécu l'enfer, condamné à la rééducation par des travaux forcés monstrueux. Des vicissitudes pour Yong Sheng, devenu très vieux, qui malheureusement ne s'arrêtèrent pas là...



Dai Sijie est un conteur hors pair qui nous emporte dans la vie hautement romanesque de son grand-père, de la République populaire chinoise à la Chine de la Longue marche et de la révolution culturelle de Mao qui broient les opposants ou supposés tels. Les images de Dai Sijie (il est cinéaste) sont magnifiques et envoûtantes, tellement sordides aussi qu'elles nous brisent le coeur devant tant de souffrances et d'humiliations infligées aux hommes. Dai Sijie qui ne finit pas sur une note triste ; alors que Yong Sheng se meurt dans des circonstances indignes, il dit encore de son vieil aguilaire calciné : « Mon vieil arbre avait connu toutes les vicissitudes de la vie. Il était mort, avait vécu l'enfer, mais dans les profondeurs de la terre, il était ressuscité. » preuve qu'au seuil de la mort le vieil homme n'avait pas perdu sa foi.
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Balzac et la Petite Tailleuse chinoise

La France fut un temps le refuge principal des dissidents chinois. La plupart étaient des intellectuels, écrivains, cinéastes ou philosophes chassés par la dictature communiste et trouvant là une opportunité unique de continuer leur oeuvre. C'était le cas de Dai Sijie qui s'inspirant de sa propre histoire situa ce roman pendant la révolution culturelle. Comme l'auteur l'avait été lui-même dans sa jeunesse, deux fils de médecins considérés comme des ennemis du peuple étaient envoyés en camp de rééducation dans un village reculé de la campagne chinoise. L'entreprise d'abrutissement par le travail battait alors son plein sur tout le territoire et les enfants d'anciens notables connaissaient le sort bien peu envieux des esclaves de la terre. le labeur étant le maitre mot, il restait peu de distraction à ces jeunes gens habitués aux lumières de la ville. Heureusement leur culture cinématographique et leurs talents de conteur allaient leur permettre de retenir l'attention des villageois car dans ces régions reculées peu d'habitants avait eu l'occasion d'aller dans une salle obscure. Chaque soir pour tromper leur ennui et pour garder un semblant de lien avec la civilisation, il se lançait dans la description d'un long métrage devant une foule ébahie. Et puis un jour leur vie aux camps va changer grâce à la rencontre dans le village voisin de la fille du tailleur qui va former avec eux un trio inséparable. Elle va changer surtout par l'intermédiaire d'un livre de Balzac trouvé chez un camarade qui deviendra pour eux une vraie source d'enrichissement et d'évasion. Les deux jeunes érudits vont profiter de cet ouvrage pour ouvrir la petite tailleuse à la culture et au plaisir de la lecture au point que se rendant compte de sa condition, elle finira par partir vers d'autres horizons laissant derrière elle les deux amis et leur avenir incertain. Outre l'immersion dans l'univers concentrationnaire chinois du temps de Mao, ce livre exposait à quel point l'écriture pouvait être une arme contre l'obscurantisme et un facteur d'émancipation. A lire pour tous les lecteurs sensibles à ce message...
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Les caves du Potala

En 1968, le Tibet est occupé par la Chine, le Dalaï-Lama en exil, et son palais du Potala aux mains de gardes rouges, acharnés à anéantir objets sacrés et œuvres d’art bouddhiques. Emprisonné et torturé pour crime contre-révolutionnaire, le vieux Bstan Pa résiste mentalement en se remémorant sa vie de peintre : son apprentissage auprès d’un maître, sa progression jusqu’à sa nomination au service des plus hautes autorités tibétaines, son bonheur de consacrer son existence à la méditation et à la beauté.





En opposant un vieux sage versé dans l’art et la contemplation à une bande de très jeunes révolutionnaires haineux et violents, dans un face à face où, malgré les apparences, l’asservissement de l’un aux autres est loin de paraître définitivement acquis, Dai Sijie réussit à incarner tout le conflit entre une Chine encore aujourd’hui obsédée par la sinisation de son voisin et un Tibet que l’occupation chinoise n’a jamais réussi à vider de sa culture et de son identité.





Face à l’obscurantisme, au fanatisme et à la barbarie, le récit nous fait découvrir, dans un luxe de détails colorés, le raffinement de l’art des tankas, ces rouleaux peints caractéristiques de la culture bouddhiste tibétaine et servant de supports à la méditation. Après avoir suivi leur élaboration minutieuse et l’apparition de leurs couleurs sous les doigts et le pinceau parfois à un seul poil de Bstan Pa, c’est un crève-coeur d’assister à leurs autodafés aux côtés de leur créateur qui, privé de son art, garde la force de continuer à peindre mentalement.





Après la littérature vecteur d’émancipation dans Balzac et la petite tailleuse chinoise, Dai Sijie choisit cette fois la peinture pour un nouvel acte de résistance à la violence et à l’aliénation au travers de l’art et de la création. Il nous livre un très beau texte, d’une grande puissance d’évocation et d’une poésie lumineuse, malgré la brutalité qui endeuille ses pages.


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Les caves du Potala

Les prémices du conflit entre la Chine et le Tibet visant l'annexion ont commencé en 1966. le 14 ème Dalaï Lama est exilé en Inde depuis 1959. Nous sommes en 2020. Rien n'est réglé pour les tibétains.

Daï Sijie choisit ce contexte de dominant-dominé pour son nouveau roman.



En 1968 le Palais du Potala, résidence et lieu d'étude et de recherche des Dalaï-lamas successifs, est occupé par des gardes rouges. "Le loup" chef de ces jeunes révolutionnaires fanatiques chinois enferme Bstan Pa, le peintre officiel du Dalaï lama dans les anciennes écuries du palais. Il veut lui faire avouer un crime contre révolutionnaire imaginé de toute pièce. Qui gagnera? le prisonnier ou le bourreau?



Dai Sijie pose une plume extrêmement fine sur cet épisode terrifiant de 1968. Il me semble qu'il n'a pas choisi certains détails par hasard. Les gardes rouges sont étudiants aux beaux-arts. Ils détruisent avec acharnement, avec délectation des pièces d'une grande valeur artistique. Ils étudient l'art et couvrent les stupas d'immondices. Cependant, leur attirance pour l'art ne les empêche pas de profaner les reliquaires des dalaï-lamas, de brûler des piles d'ouvrages calligraphiés à l'encre d'or, de renverser les statues, de détériorer les portraits. Décidément, le fanatisme est un rouleau compresseur destructeur irréfléchi et barbare que rien ne peut arrêter, même pas la passion.



Bstan Pa le sait et pour tenir, pour faire face à la souffrance physique et morale, il va dérouler sa vie comme on déroule un tanka, avec précision et délicatesse. Les souvenirs sublimes affluent nous donnant à nous lecteurs atterrés l'occasion de lire une histoire exceptionnelle, lui donnant à lui la force de tenir.



Ce texte alterne en permanence l'harmonie, la méditation, la sensualité le raffinement et la cruauté, l'horreur, l'acharnement, la destruction.





Le loup et ses sbires cognent de la façon la plus ignoble qui soit et la beauté, sorte d'anesthésiant trouve encore et encore un espace où il se faufile et s'impose.

Qui pliera le premier? Qui sera vainqueur?



Ce texte relativement court peut être le symbole du bouddhisme et de l'esprit des dalaï-lamas, apôtres de la non violence. Il fait partie intégrante du conflit Chine-Tibet. Enfin, à titre individuel, il donne une place de choix à l'harmonie vitale que chacun a en soi et peut développer pour contrer les agressions extérieures.



Je remercie vivement l'auteur, les éditions Gallimard et l'opération Masse critique privilégiée pour m'avoir fait vivre ce moment unique où beauté et laideur s'affrontent. Un livre marquant à plus d'un titre.





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Balzac et la Petite Tailleuse chinoise

Nous sommes dans la Chine communiste de Mao au début des années 1970.

Deux jeunes gens Luo et le narrateur sont envoyés dans la montagne pour y travailler et abolir leurs envies de nourrir leur esprit intellectuel.

Ils sont victimes de cette mesure car leurs parents médecin et dentiste sont considérés comme des traîtres dangereux pour le régime.

Dans le village voisin, ils rencontrent "le binoclard" un jeune homme quasi aveugle sans ses lunettes. Il possède des livres d'auteurs occidentaux cachés dans une mallette mais il ne veut pas l'avouer. Les livres sont très convoités par les deux jeunes. Le binoclard se montre proche du régime communiste pour pouvoir retourner dans sa ville.

Luo va tomber amoureux de la petite tailleuse et va la sortir de sa condition, lui ouvrir des horizons en lui lisant des extraits de Balzac difficilement obtenus des mains du camarade à lunettes.

C'est un livre merveilleux où la narration est semblable à un conte dont l'écriture est très belle.

Les faits font suite ,de longues années après, à un essai d'Alain Peyrefitte "Quand le Chine s'éveillera" que j'avais lu quand j'avais 17 ans et qui m'avait totalement surprise.
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Balzac et la Petite Tailleuse chinoise

Sur ma lancée... après la lecture captivante de trois textes de Xinran, dont "Chinoises", j'ai eu envie de relire un récit personnel d'un auteur chinois, ayant vécu avec son meilleur ami, respectivement âgés de 17 et 18 ans, la "rééducation" au fin fond des campagnes chinoises. Là, il s'agissait d'un village très pauvre, isolé dans les montagnes...Les adolescents, en question, sont les enfants de cadres, l'un médecin, l'autre , dentiste...



"Deux mots sur la rééducation : dans la Chine rouge, à la fin de l'année 68, le Grand Timonier de la Révolution, le président Mao, lança un jour une campagne qui allait changer profondément le pays : les universités furent fermées, et les "jeunes intellectuels", c'est-à-dire les lycéens qui avaient fini leurs études secondaires, furent envoyés à la campagne pour être "rééduqués par les paysans pauvres" (...)

La vraie raison qui poussa Mao Zedong à prendre cette décision restait obscure (...)

Notre conclusion fut la suivante: Mao haïssait les intellectuels." (p. 13-14)



Les livres détruits, brûlés, interdiction de s'instruire...La grande ironie de "La Révolution culturelle" !!...Les seuls livres tolérés : le petit livre rouge de Mao, et les ouvrages purement scientifiques !



Un texte qui apprend de multiples détails, usages du quotidien chinois, hors des villes, dans des campagnes ignorantes du monde extérieur et de ce qui se peut se passer dans le pays même... Des mondes, univers

parallèles difficilement rejoignables...sauf dans cet épisode narré par l'auteur, où les deux jeunes gens ... pour tenter de persuader un troisième camarade

(qui possède une valise de livres interdits, cachés) de leur prêter un ou deux livres, vont récolter d'un vieux meunier isolé, des vieilles chansons traditionnelles ...[ pour rendre service à ce camarade récalcitrant... qui veut tenter , par le biais de sa mère, poétesse,

de les faire publier...]





"Souvent, après minuit, on éteignait la lampe à pétrole dans notre maison sur pilotis, et on s'allongeait

chacun sur son lit pour fumer dans le noir. Des titres de livres fusaient de nos bouches, il y avait dans ces noms des mondes inconnus, quelque chose de mystérieux et d'exquis dans la résonance des mots, dans l'ordre des caractères, à la manière de l'encens tibétain, dont il suffisait de prononcer le nom, " Zang Xiang", pour sentir le parfum doux et raffiné (...)

- Et maintenant, où ils sont , ces livres ?

-Partis en fumée. Ils ont été confisqués par les Gardes rouges, qui les ont brûlés en public, sans aucune pitié, juste en bas de son immeuble. "(p. 65)



Une relecture faite avec plus d'attention...et toujours autant de plaisir... J'avais également vu avec grand intérêt l'adaptation cinématographique de ce livre...



J'avais par contre totalement zappé la chute de ce récit...inattendue... montrant aussi que la liberté que donne les Livres, la lecture de la littérature peut faire s'envoler "votre amoureuse" , vers la ville et ses

propres rêves...!! Un livre touchant... et précieux témoignage d'une période terrible de l'histoire

chinoise !...



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Balzac et la Petite Tailleuse chinoise

J'avais été un peu déçu par ma découverte de Dai Sijié : Par une nuit où la lune ne s'est pas levé. Une "babelionaute" m'avait alors recommandé ce titre de l'auteur. Je m'étais promis de le lire. C'est chose faite et il me faut remercier @Erveine et son conseil. Balzac et la Petite Tailleuse chinoise était un titre prometteur, il m'a tellement plus enthousiasmé. Une belle histoire, simple, très réussie, qui plonge au cœur du quotidien d'intellectuels en rééducation agraire lors de cette période troublée de la longue Histoire chinoise que fut la révolution culturelle. Malgré la rudesse d'une ruralité éloignée du progrès, la culture, que le régime de Mao combattait, résiste à l'obscurantisme, se fraye un chemin dans ce monde paysan fruste, participe de l'espoir, ouvre les âmes à l'amour et émancipe une jeune paysanne pour qui Balzac sera en quelque sorte, la pomme qu'Ève croqua. Le lecteur et l'auteur que je suis parfois ont ressenti une forte empathie pour la poésie littéraire de ce roman qui place LE LIVRE au centre et de la trame dramatique et de l'épanouissement humain.
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Balzac et la Petite Tailleuse chinoise





Sous le joug de la Révolution Culturelle lancée par Mao Zedong, deux amis d'enfance sont astreints à rejoindre un hameau reculé de montagne dans la province du Sichuan. 



Luo et le narrateur comptent parmi les millions de zhiqing - jeunes instruits - envoyés à la campagne afin d'y être "rééduqués par les paysans pauvres". 



"Nous n'étions ni les premiers ni les derniers des cobayes utilisés pour cette grande expérience humaine."



Éloigné du berceau familial sans perspective de retour, les adolescents doivent apprendre à composer chaque jour avec l'extrême rudesse des conditions de vie mais aussi de travail. 



Pourvus d'une grande vivacité d'esprit, ils parviennent à endormir la méfiance des villageois en tirant profit de leur talent de conteur. 



Tous les livres étant interdits hormis ceux au service de la propagande communiste, qu'elle n'est pas leur joie de trouver fortuitement une valise remplie de tels trésors. 



"Nous la débarrassâmes de ses liens, et l'ouvrîmes silencieusement. À l'intérieur, des piles de livres s'illuminèrent sous notre torche électrique; les grands écrivains (...) nous accueillaient à bras ouverts (...). J'avais l'impression de m'évanouir dans les brumes de l'ivresse."



Cette découverte inespérée pourrait bien bouleverser leur existence ainsi que celle de la petite tailleuse chinoise dont ils sont amoureux …



*



Sensible, touchant et non dénué d'humour, ce roman d'apprentissage est un très bel hymne à la puissance de la littérature.



Source infinie de plaisir, d'évasion, de connaissance et formidable vecteur d'émancipation, elle a le pouvoir de transformer nos vies. Les personnages en feront ici l'inoubliable expérience. 



Si le récit retrace une période sombre de l'Histoire et nous offre par ailleurs une vision saisissante de la ruralité chinoise au début des années 70, il se focalise davantage sur leur parcours d'initiation placé sous l'influence des classiques occidentaux.



Pas à proprement parler autobiographique, Dai Sijie a toutefois entremêlé à la fiction des éléments issus de sa propre histoire. Lui-même aura connu cette jeunesse sacrifiée sur l'autel de l'idéologie maoïste.



Une lecture aussi brève que prenante à découvrir!



***



"Ouvre un livre, c'est lui qui t'ouvrira." (Proverbe chinois)

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Balzac et la Petite Tailleuse chinoise

Le narrateur et Luo sont deux dangereux intellectuels, coupables du double crime d'avoir terminé leurs années de collège et d'avoir des parents ennemis de la révolution. En conséquence, on les envoie en rééducation dans un petit village d'agriculteurs perdu dans les montagnes. Entre l'agriculture et le travail dangereux dans les mines de charbon, leur vie n'est pas très enviable. Seul leur talent de conteur leur permet de gagner quelque peu l'estime des villageois.



Pendant une visite chez un de leur compagnon d'infortune, le Binoclard, leur attention est attirée par une valise suspecte, qui doit contenir des livres, pourtant interdits. Un peu de chantage et de pression plus tard, un livre de Balzac tombe entre leurs mains. Cet unique livre va leur ouvrir les portes d'un univers qui leur est totalement inconnu, les seuls autorisés en Chine étant les livres d'économie marxistes. Il fera partager leurs découvertes avec la Petite Tailleuse, qui est devenue entre-temps la petite amie de Luo.



Un beau livre à découvrir, qui nous fait à la fois découvrir la vie dans une dictature, et nous force à nous interroger sur la place des livres dans la vie : seuls témoins d'une époque qui disparaîtraient avec eux, garants d'idées ou même de sentiments presque disparus.



Serions-nous les mêmes aujourd'hui si nous n'avions lu aucun livre de toute notre vie ?
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Balzac et la Petite Tailleuse chinoise

C'est un roman instructif , il permet de comprendre l'élan de la révolution culturelle pour combler le fossé entre la classe aisée de la ville et les paysans d'une campagne perdu, même si la méthode est calamiteuse.

La campagne de Mao est vue comme initiatique pour ces jeunes, ils apprennent à prendre le goût de l’initiative, leur responsabilité, et à jouer avec le système et découvrent les premiers émois.

La grande finesse de Dai Sue est d'avoir pu créer du suspense avec l'histoire d'amour afin d'amener la citation de Balzac pour surprendre le lecteur à toute fin du livre.

La citation de Balzac est tellement surprenante dans le contexte qu'elle génère un débat entre les lecteurs. C'est très bien fait !

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Les caves du Potala

Ma première participation à Masse Critique ! Merci à Babelio et aux éditions Gallimard pour cette découverte.



Peu de peuples, dans la seconde moitié du XXème siècle, ont été traités aussi cruellement que les tibétains, prisonniers dans leur propre pays, obligés de contempler la destruction d’un des plus riches patrimoines du monde et de voir nier jusqu’à l’existence de leur culture. Et peu de sujets font autant partir les chinois au quart de tour. Après l’invasion du Tibet en 1950, la Chine de Mao toléra quelques années son système orthogonal au communisme. Puis la révolution culturelle éclata. Elle fit plusieurs millions de morts, causa des destructions colossales, déchaina une violence et un niveau de cruauté inimaginable… Et suscita l’enthousiasme des intellectuels d’extrême-gauche français. Le Tibet la subit de plein fouet. Ses milliers de monastères furent détruits, les trésors qu’ils contenaient brûlés…



Mettre en scène un moine spécialisé dans la peinture sacrée à cette période est donc un choix acéré. L’histoire se construit en alternant les moments du passé, sa formation et ses années dans les sphères du pouvoir, et le présent, où un groupe de Gardes Rouges l’a pris pour cible. Une façon de mieux illustrer l’ampleur des destructions, et la folie collective ayant déferlée sur un pays qui ne cherchait que la paix. La documentation est impressionnante, les références aux lieux, aux coutumes et aux rituels religieux denses et pointues.
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Balzac et la Petite Tailleuse chinoise

Deux jeunes étudiants sont envoyés en rééducation par le travail dans la campagne chinoise, pendant la révolution culturelle. Ils ont trouvé une astuce pour garder une étincelle d'espoir. L'un violoniste, l'autre conteur, ils parviennent à sauvegarder la part de rêve qui est en eux.

Les romans défendus, source d'évasion et d'enchantement, armes redoutables contre l'obscurantisme, leur permettront de survivre dans ce monde d'ignorance et de brutalité.



Un roman à la fois magique et cruel, dont les faits semblent irréels tellement ils sont insensés. J'ai eu l'impression de lire un conte, dans lequel le génie bienfaisant était un livre, venu exaucer les vœux de ces deux jeunes garçons , emprisonnés par un sortilège maléfique.



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L'Évangile selon Yong Sheng

«  Mon dieu ! pourquoi ne m'a t- on pas condamné à mort plutôt que de m'infliger la peine de travailler dans cet atelier primitif ?

Quand mon corps éreinté tombera - t- il enfin sous le rouleau de pierre de la meule , sous les

sabots des boeufs , sous le marteau suspendu, dans la chaudière ou à l'intérieur du tronc creux, où il sera réduit en purée dégoulinante ?



«  Lorsqu'un groupe de colombes volaient dans le ciel, les sifflets attachés à leur queue offraient un concert symphonique grandiose d'une étonnante qualité ...Chaque instrument présentait une tessiture différente , il y avait des barytons, des ténors , des contraltos, des sopranos qui se répondaient subtilement ...pour enchanter le spectateur d'une symphonie flamboyante ... ».



Voici deux extraits ——significatifs et contrastés——- de cette autobiographie flamboyante où l'auteur fait revivre l'histoire extraordinaire, surprenante de son grand- père YONG SHENG .



Né en 1911, fils de charpentier, confectionneur de sifflets pour colombes ,sifflets qui coûtent très cher, recherchés par les connaisseurs, premier pasteur chrétien, chinois de Putian , une ville côtière du sud de la Chine, placé en pension chez un pasteur américain Yong Sheng suivra l'enseignement de sa fille Mary, institutrice de l'école chrétienne.



Marié très jeune , de force pour que sa grand- mère vive, une tradition séculaire , il fera des études de théologie à Nankin..



Il restera pasteur pendant quatorze ans jusqu'en 1949 .



Tout bascule la même année avec l'avènement de la République populaire ....



Je n'en dirai pas plus sauf que cet homme bon, naïf et vertueux ne baissera jamais les bras , animé par une force de résilience extraordinaire il sera arrêté , broyé , torturé , brisé par le nouveau régime totalitaire sans jamais oublier l'aguilaire , un arbre planté à sa naissance ...



Ce livre foisonnant , somptueux , poétique —— difficile à lire lors des passages qui relatent la cruauté et les années de souffrance ——-de cet homme modeste et digne —-nous conte une partie instructive de l'Histoire de la Chine au 20 ° siècle ,ses errances , ses horreurs, sa cruauté aveugle , ses brimades monstrueuses , ses raffinements liés à la torture, à l'ignorance et au fanatisme ....

Les expressions sanglantes côtoient des passages de la bible, certains moments sont lumineux, lyriques , inspirés , poétiques, l'écriture est visuelle, ample et cinématographique.



L'auteur est un fabuleux conteur, cette vaste fresque romanesque ——biographie romancée ——tourmentée et inoubliable questionne sur la foi en la vie, la capacité de résilience , la sensibilité et la transformation par la religion .

Comme « Balzac et la Petite Tailleuse chinoise » ce roman ne se raconte pas ...

Il se lit ...

Je le conseille mais il faut prendre son temps, il ne se dévore pas d’une traite .

Bien sûr , ce n’est que mon avis .





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Balzac et la Petite Tailleuse chinoise

Il est un peu difficile de rentrer dans ce roman mais une fois qu'on y arrive, le roman est très prenant.



Avec Balzac et la Petite Tailleuse chinoise, on fait la connaissance de deux jeunes garçons qui sont envoyé a la campagne par le parti de Mao pour être rééduquer. Toute culture est interdite et leur faute et d'avoir eu des parents lettrés et issu d'une bonne condition qui les ont envoyer a l'école. A la campagne, le but est donc de les faire travailler au coté des paysans. Ils vont faire la connaissance de la petite tailleuse chinoise, dont très vite, Luo, va apprécier sa compagnie.

Et puis dans le village, un autre garçon et la en rééducation, et il cache une valise pleine de livres interdits : Balzac ou encore Dumas et bien d'autres....

"Ce petit livre s'appelle "Ursule Mirouët"....

Brusquement, comme un intrus, ce petit livre me parlait de l'éveil du désir, des élans, des pulsions, de l'amour, de toutes ces choses sur lesquelles le monde était, pour moi, jusqu'alors demeuré muet."



La lecture va alors changer leur vision du monde et les faire grandir :

"Balzac lui a fait comprendre une chose: la beauté d'une femme est un trésor qui n'a pas de prix."



C'est un roman que j'ai beaucoup aimé, l’écriture de l'auteur, Dai Sijie, est agréable et rend le roman très fluide. J'ai également adoré ce voyage en Chine, pays tellement différent culturellement et politiquement.



C'était ma première rencontre avec Dai Sijie, mais certainement pas la dernière. Le complexe de Di, un autre de ses romans attend bien sagement dans ma PAL, il devrait vite en sortir.
Lien : http://missmolko1.blogspot.i..
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Balzac et la Petite Tailleuse chinoise

Un roman initiatique comme je les aime.

Il m'a fait penser à diverses reprises dans la façon de raconter (très bonne traduction au passage) au "Grand Meaulnes" et à son univers plein d'odeurs, de couleurs, de sensualité et de mystère.

Le passage à l'age adulte, à la maturité va se faire ici par le biais de la lecture et en particulier des livres de Balzac.

La symbolique du livre évolue au cours du roman :

de livre-interdit (révolution culturelle) à livre-péché (désir de transgresser l'interdit) et enfin au livre-révélateur (sensualité ,sexualité et liberté) .

J'ai beaucoup aimé ce livre et son univers envoutant.





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L'Évangile selon Yong Sheng

Étant agnostique, je suis venu vers ce roman autobiographique avec beaucoup de curiosité. L'Évangile selon Yong Sheng est bien un roman, avec toute sa richesse romanesque qui le caractérise, mais il puise aussi dans l'histoire, la petite et la Grande Histoire de la Chine, fascinante et terrible si l'on mesure à quel point cette histoire a pesé de manière effroyable sur le destin de millions de femmes et d'hommes. La petite histoire concerne plus précisément l'itinéraire de vie du grand-père de l'auteur, Dai Sijie. C'est donc une sorte de biographie teintée de romanesque.

Ce récit s'ouvre sur l'enfance de Yong Sheng. Nous sommes dans un village proche de la mer, en Chine méridionale, au début du vingtième siècle.

Les premières pages m'ont enchanté, je me suis pris de tendresse pour un vol de colombes, découvrant ainsi que dans ce lieu, une sorte de coutume incitait à accrocher des sifflets aux rémiges de ces oiseaux, faisant entendre de merveilleuses sonorités, parfois d'une harmonie étonnante, au-dessus des maisons. J'ai trouvé ces premières pages d'une grâce inouïe.

Placé en pension chez un pasteur américain, le jeune Yong Sheng va suivre l'enseignement de sa fille Mary, institutrice de l'école chrétienne. C'est elle qui fait naître la vocation du garçon. Elle éveille aussi en lui une forme de désir féminin qui ne le quittera jamais, la vision des seins de cette femme, un jour par hasard, ne le quittera jamais.

Yong Sheng, tout en fabriquant des sifflets comme son père, décide de devenir le premier pasteur chinois de la ville.

Au début du récit, viennent se mêler quelques superstitions ancestrales, notamment ce merveilleux épisode où l'enfant qu'est Yong Sheng doit être opéré d'une ectopie testiculaire. La grand-mère vient alors, comme une furie, faire irruption dans la salle d'opération, invoquant les dieux, pensant qu'il s'agit d'une circoncision, empêchant l'opération et déterminée à tuer le chirurgien. C'est drôle.

Plus tard, moins drôle, nous découvrons les méfaits de l'avènement et de l'installation de la République Populaire de Chine en 1949 et bien après, la révolution culturelle...

Rien n'est épargné dans l'humain lorsqu'une dictature s'installe à jamais, pose ses jalons comme une pieuvre. Ceux qui étaient amis hier, peuvent devenir ennemis demain. Et pourquoi pas dès aujourd'hui...

Yong Sheng vivra ces événements quasiment au même endroit, d'où il est issu. Il y a presque comme une forme d'unité de lieu dans ce récit. Tour à tour, sa maison devient un lieu religieux, une sorte d'église, puis un lieu d'accueil pour les orphelins au départ des congrégations américaines en 1942. Lors de la révolution culturelle l'endroit devient un pressoir à huile.

Yong Sheng traverse ce temps avec sérénité et douleur et nous avec lui. Il affronte avec sa seule bonté la cruauté du régime communiste qui va broyer l'âme de la Chine. Un arbre semble suivre cela dans sa courbure et sa capacité de résilience, survivre aux vicissitudes, c'est un aguilaire. Il vit, meurt, renaît de manière improbable.

J'ai beaucoup aimé l'art de conter de l'auteur, entre poésie et douleur. C'est une des grandes beautés de ce roman. Même si parfois certaines longueurs existent, il faut patienter car le récit mérite ce temps qu'on peut accorder à sa lecture, être appréhendé par cette patience pas à pas jusqu'à sa fin. Vraiment jusqu'à sa fin ultime, jusqu'à la note finale, puisqu'il est question du magnifique concerto pour violon en ré majeur de Beethoven qui s'invite à la toute fin du récit.
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Les caves du Potala

Le Potala, ancienne demeure du dalaï-lama au Tibet, est tombé aux mains des gardes rouges de la révolution culturelle chinoise.

Ces jeunes étudiants de l'école des beaux-arts, complètement fanatisés, ont emprisonné un vieux peintre de tankas qui, sous la férule bienveillante de son maître Snyung Gnas, fut longtemps au service de grand chef spirituel.

Bstan Pa, torturé, malmené, assiste impuissant à la profanation des oeuvres d'art bouddhiques et se remémore une vie dédiée à la peinture sacrée.



Le récit est construit de façon à ce que le contraste entre l'harmonie de la tradition séculaire raffinée et la brutalité dévastatrice révolutionnaire soit criant et nous choque.

Essentiellement narratif, il renvoit à d'innombrables notes en fin de volume.

112 notes pour 170 pages...c'est beaucoup.

Pour qui a patience et passion, c'est autant d'enrichissement et de connaissances accumulées, pour les autres, cela peut paraître laborieux et scolaire.

Dai Sijie connaît son sujet à la perfection et on le sent touché par l'anéantissement de ce qui reste l'expression d'une philosophie ancestrale.



Tout en reconnaissant à ce roman une valeur historique incontestée en terme de recherches et de références, j'avoue avoir été trahie par ma concentration et m'être quelque peu dispersée.

Je me demande dans quelle mesure un tel livre ne devrait pas se lire par bribes, par paragraphes, en parrallèle avec une autre lecture, afin de ne pas tomber dans le piège de l'impatience.

Il ne s'en goûterait que mieux...
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Balzac et la Petite Tailleuse chinoise

Rééducation de deux ados chinois envoyés dans le plus paumé des villages de la montagne du Phénix du Ciel. Généralement de deux ans, cette vie de souffrance risque d'être perpétuelle pour ces fils de médecins, ennemis du peuple. Les sauveront le violon qu'ils ont pu garder et les stratégies qu'ils conçoivent avec la complicité de la seule personne instruite, la petite tailleuse, pour obtenir du 'Binoclar' un des ouvrages interdits dévoilant la vie occidentale, l'amour, le sexe.



C'est super bien tourné, d'une écriture sobre et efficace.



J'y retrouve les situations délicieusement cocasses de 'La trève' de Lévi, comme ce chef révolutionnaire et borné mais qui chaque mois les envoie deux jours à la ville pour qu'à leur retour ils racontent exhaustivement au village la séance de ciné.

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