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Critiques de Ernst Jünger (145)
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Sur les falaises de marbre

Héros de la Première Guerre mondiale, Ernst Jünger s'attira les foudres du parti nazi à la publication, en 1939, de Sur les falaises de marbre. Roman de l'attente, de la frontière incertaine, baigné dans une atmosphère étrange où le lecteur est balancé entre la quiétude d'un été et l'attente d'un drame, Sur les falaises de marbre interroge durablement notre monde : conscients que la barbarie est à nos portes, qu'attendons-nous pour réagir et assurer nos vies ?

Le roman se déroule dans un pays imaginaire, la Marina, menacé au nord par un État barbare où règne un mystérieux conquérant, le Grand Forestier. Il règne, à la Marina, une douceur de vivre remarquable et le narrateur et son frère vivent dans un ermitage où ils se consacrent à la botanique. La menace les fait s'interroger, mais ils préfèrent demeurer à l'écart du monde : ils seront vite rattrapés par les évènements et forcés d'affronter le Grand Forestier.

L'écriture de Jünger est poétique et s'attache à la description de ces instants précieux car menacés. Le désengagement du monde apparait comme une possibilité, puisque l'histoire est un cycle et que la destruction fait partie de la nature de l'homme. Sur les falaises de marbre est une allégorie : celle d'un monde menacé par sa propre destruction.
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Sur les falaises de marbre

On a dit que cet ouvrage de Jünger rejoignait (ou était rejoint) par "Le désert des Tartares" de Buzzatti et surtout par "Le rivage des Syrtes" de Julien Gracq (qui déploient de grandes splendeurs langagières, à la différence de la belle sobriété du livre allemand). Ces trois romans sont des variations sur le thème de l'invasion barbare, de la destruction d'un ordre ancien, souvent sage et profondément raffiné, du retour à la barbarie. Si l'un des princes d'Orsenna voit dans ce retour une forme de régénération, préférable à la stagnation, les personnages de Jünger ne donnent pas du désastre (ici, métaphore du retour nazi aux lois féroces de la Nature) une interprétation si optimiste. La seule question est de rester digne face à la meute, et de sauver ce qui peut l'être. .
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Chasses subtiles

Dans ce récit autobiographique contemplatif, Ernst Jünger (1895-1998) montre le bonheur que lui procura la collection d'insectes.

Il y met en évidence :

- les émotions de la quête de l'insecte convoité, souvent associée à de lointains voyages et aux rencontres d'autres amateurs,

- la joie de sa trouvaille, ou de celle d'un insecte inattendu,

- la satisfaction ressentie lors de la capture,

- la jubilation intellectuelle éprouvée lors de l'examen de l'objet convoité,

- le contentement de la découverte, lorsque l'animal n'est pas encore connu de la communauté scientifique,

- la satisfaction de la possession d'une collection, l'examen de spécimens y figurant permettant notamment de se remémorer des moments associés à leur trouvaille.



C'est une véritable passion que dépeint Ernst Jünger.

La manière dont il décrit les insectes, particulièrement les coléoptères, m'a parfois - mais (trop) rarement - fait penser à l'écriture de Jean-Henri Fabre. La démarche de Jünger - contrairement à celle de Fabre dont il cite plusieurs fois le nom - n'est cependant pas scientifique : il témoigne simplement de son vécu et ne procède à aucune expérimentation avec ses proies. Plusieurs références à l'astrologie sont même surprenantes, semblant témoigner d'une adhésion de l'auteur à des croyances qu'elle véhicule.



L'auteur allemand a connu deux guerres mondiales, durant lesquelles il a combattu.

Dans "Orages d'acier" (1920), il témoigna de son expérience de soldat dans les tranchées.

En 1923, il suivit des études de sciences naturelles et d'entomologie. Pendant l'entre-deux guerres, il adopta des positions nationalistes, qui lui furent reprochées après la défaite du Troisième Reich. Approché par le parti nazi dès le milieu des années 1930 en raison de son statut d'ancien combattant et de son nationalisme affiché, il refusa d'y adhérer. D'ailleurs, il haïssait Hitler. Lors de l'avancée des troupes alliées, il demanda aux hommes qu'il commandait de déposer les armes.

Ces épisodes de sa vie sont peu évoqués dans ce livre mais ils semblent avoir marqué son oeuvre. Je donnerai très prochainement mon avis sur "Orages d'acier" dont je viens de débuter la lecture.

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Orages d'acier

Concernant Ernst Jünger et son récit autobiographique sur la Première Guerre mondiale "Orages d'acier" André Gide écrivait : "Orages d'acier, est incontestablement le plus beau livre de guerre que j'aie lu."

André Gide avait du flair car "Orages d'acier", écrit "à chaud" et publié en 1920, a été depuis constamment réédité, et pas seulement en Allemagne. Un siècle après son écriture "Orages d'acier" demeure l'un des meilleurs témoignages, écrit par un combattant -jeune lieutenant, sur cette guerre. Ernst Jünger décrit avec acuité le quotidien des soldats, la fatigue, les blessés, les morts, mais aussi avec une très grande force les assauts, la peur qu'il faut dominer, la logique, l'incohérence et l'ivresse des batailles.
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Traité du rebelle, ou le recours aux forêts ; s..

Ernst Jünger est un penseur intéressant et surtout déroutant, car ses réflexions se construisent à l'écart des grands systèmes qui les rendraient repérables, étiquetables (gauche, droite, marxisme, nationalisme, etc). Donc le lecteur, désorienté, risque de perdre son temps à chercher "d'où vient" la réflexion qu'il suit, et à oublier l'intérêt propre et la grande étrangeté du livre. Cet intérêt et cette étrangeté résident dans le lien inattendu que Jünger établit entre la plus ancienne tradition, celle du retrait "dans la forêt", et la notion ultra-moderne de rébellion. Jünger était sceptique devant les grandes révolutions du XX°s, qui cherchaient à créer collectivement un nouvel ordre humain et un nouvel homme. Pour lui, la rébellion n'était pas un impératif moderniste et collectif de changement global ( à la manière du caricatural "Indignez-vous", au pluriel), mais un acte individuel, celui qui oppose tout individu libre à tout ordre social, serait-il juste et protecteur. On le voit, il n'entre dans aucune case, pas même celle de l'anarchisme, fût-il "de droite".

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Traité du rebelle, ou le recours aux forêts ; s..

Jünger est un auteur hors normes, et le Traité du Rebelle est injustement méconnu, du moins en France. Les liens de l'auteur avec le nazisme n'y sont sans doute pas étranger. On a pourtant tout à gagner à lire ce traité. Outre la qualité de sa plume, Jünger porte un regard intéressant sur le concept de rébellion.
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Héliopolis

Héliopolis est un livre étrange que l'on peut classer dans la science-fiction, l'héroic fantasy, le conte ou la légende. Junger a essayé de recréer un monde qui a survécu à un cataclysme nucléaire.

Le plus important n'est pas tellement l'intrigue : la venue de Lucius, un grand dignitaire, son implication dans un complot et son départ vers d'autres lieux, que la description d'une civilisation techniquement extrêmement avancée, mais politiquement écartelée entre l'élitisme du Prince et le populisme du Bailli. Cette société vit dans une guerre civile quasi permanente, avec ses castes supérieures et inférieure et ses boucs émissaires, les Parsis, habiles commerçants, fins artisans et redoutables financiers...

Nous sommes dans un très grand livre, du niveau de "1984" , "Le meilleur des mondes" ou " Le seigneur des anneaux". Junger profite des diverses situations pour exposer ses idées sur la philosophie, la psychologie, la théologie ou la sociologie. Il se montre d'une extraordinaire clairvoyance sur la nature humaine, la société ou les progrès techniques à venir. Publié en 1949, ce livre décrit des panneaux lumineux à peine mis au point à notre époque, un appareil appelé "Phonophore" qui n'est autre que notre portable en mieux. Il a même imaginé un réseau de type Internet avec un demi-siècle d'avance. Un précurseur Junger, une sorte de Jules Verne.

Pour faire court, un livre foisonnant, inrésumable, un peu hermétique, très poétique et surtout empreint d'une grande nostalgie pour notre esprit chevaleresque perdu...
Lien : http://www.etpourquoidonc.fr/
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Sur les falaises de marbre

L’exposition du thème et le style déconcertent dès les premières pages. Le narrateur et le frère Othon — deux moines-soldats retraités d’une guerre antérieure — vivent dans « l’Ermitage aux blancs buissons » (une apposition homérique souvent répétée), sur une crête rocheuse où ils entretiennent religieusement une collection botanique qui symbolise à la fois nature et culture : « Tel était le royaume » (p 46). Ils vont participer du côté des vaincus à une guerre d’extermination dont ils réchappent, grâce à une collusion avec le clan des vainqueurs. Quelle peuvent être leur morale et leur religion, s’ils en ont une ? Leur voisin très honoré du cloitre de la Falcifera est chrétien, mais nos héros respectent aussi bien les douze Dieux et Vesta. Alors sans doute la Nature car tout le livre, jusque dans l’action la plus noire, est marqué par un symbolisme floral, celui du « grand lis doré de Cipango » dans leurs jardins, celui du « sylvain rouge » dans la nuit sanglante ; les princes des serpents et des chiens de guerre, la Griffone et Chiffon Rouge, achèvent en combat singulier la guerre absurde et abominable des hommes.



On pense au romantisme allemand, à l’opposition nietzschéenne de l’apollinien et du dionysiaque, à la sagesse grandiose et dédaigneuse d’Empédocle chez Hölderlin. Mais ces filiations sont insuffisantes. Jünger a sa pensée et son style propres, épiques et sombres tous deux : « Il arrive aisément, quand nous avançons vers l’inconnu, que la juste mesure nous échappe » (p 32). Alors où sommes-nous ? Dans un monde sans femme, en dehors de celles « dont le seul travail et celui des hanches » (p 65) et de la vieille Lampusa, un peu sorcière, grand-mère du petit Erion « né de mon amour pour Sylvia, la fille de Lampusa » (on ne saura rien de plus de cet amour fécond). Un monde anhistorique par le grand ton, le vocabulaire souvent archaïque, le costume, l’environnement domestique, la production agropastorale, les armes (la seule mention d’une arme moderne est celle d’un fusil pour la chasse au caïman !), les hiérarchies et les religions. L’action est pourtant postérieure à Linné (1707-1778) qui est mentionné à plusieurs reprises (le narrateur est botaniste, Jünger est un entomologiste professionnel). Des lieux sont nommés – Bretagne, Provence, Uppsala, Amboise, Rhodes —, d’autres sont évoqués – Burgondie, Maurétanie – et d’autres sont imaginaires quoique d’une sonorité familière – Campagna, Marina, Alta Plana. Nous sommes dans un monde de frontières géographiques, temporelles et morales : « Tel était le royaume dont le cercle s’offrait au regard autour des falaises de marbre. De leur sommet, nous voyions la vie, bien cultivée sur un sol antique et fortement nouée, s’épanouir comme la vigne et porter ses fruits. Et nous voyions aussi ses frontières : les monts, où la haute liberté, mais sans la plénitude, habitait chez les peuples barbares, et vers le septentrion les marais et les sombres profondeurs, où guette la sanglante tyrannie » (p 46). C’est le monde de Jünger, héros de la guerre de 14, un monde où les idées, les passions, les combats anarchiques et sacrificiels n’ont pas de finalité ni de stratégie, un monde apocalyptique, à la recherche de l’action et de l’achèvement, au sens où l’on achève les chevaux ou les civilisations. Le narrateur a fréquenté autrefois l’homme du mal, bénignement nommé le grand Forestier, que la critique assimile à Hitler. Impossible à la lecture d’interpréter le livre « comme une protestation contre l’hitlérisme » ce que prétend absurdement la quatrième de couverture, oubliant que la Wehrmacht a fait tirer les Falaises à 20 000 exemplaires en 1942 pour ses librairies du front.



Reconnaissons à Jünger l’ambiguïté, la provocation et l’ironie (un technicien de la guerre qui sera décapité se nomme Braquemart !) pour saluer avec Buzzati et Gracq son originalité dans l’amour du combat perdu : (son ami Belovar) « avait lutté vaillamment, car autour de lui gisait une moisson d’hommes et de chiens. Il avait ainsi trouvé une mort à sa mesure, dans le tourbillon de la chasse terrible où de rouges chasseurs harcèlent à travers les forêts le gibier rouge, et dans laquelle mort et volupté sont profondément unies. Longtemps je regardai les yeux de l’ami couché dans la mort, puis de la main gauche je versai sur sa poitrine une poignée de terre. La grande Mère, dont il avait célébré les fêtes farouches et qu’enivre un sang joyeux, est fière de tels enfants ».



Les Falaises ont le kitsch et le message ambigu de Wagner, mais aussi sa grandeur et sa perfection formelle.



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Le Boqueteau 125

Avant de développer ma critique, cette citation de Julien Hervier:



"Si l'on voulait conclure sur Jünger, il faudrait avant tout éviter la facilité qui tend à accorder autant d'importance, sinon plus, à sa légende d'homme d'action, engagé dans la guerre, la politique et l'aventure, qu'aux milliers de pages de son œuvre d'écrivain."



Ce court récit développe un chapitre d' Orages d'acier considéré par Gide comme le meilleur livre de guerre jamais écrit. On doit au germaniste Julien Hervier cette traduction récente (2000)(1) conforme à la dernière édition voulue par Ernst Jünger. Rappelons que ce dernier faisait partie des sturmtruppen de l'armée impériale allemande pendant la première guerre mondiale et qu'il a participé à la seconde comme officier, tout en se démarquant politiquement du pouvoir nazi.



Dès les premières lignes, Jünger feuillette tranquillement a posteriori ses carnets de notes du front de la grande guerre. Il y a les notes posées et soignées écrites dans une confortable maison des Flandres, les griffonnages maladroits et déformés pris sous un intense bombardement et encore les phrases survoltées et illisibles saisies après l'assaut au fond d'un entonnoir ou d'un bout de tranchée. De tout cela l'auteur tire un récit réfléchi, aseptisé, trop peut-être en regard de la barbarie qu'il couvre. Les horreurs, le bruit et la fureur ne sont pas éludés certes mais, et ceci est très personnel et n'enlève certainement rien à la beauté du texte, j'ai parfois éprouvé un hiatus ténu, subtil, mais gênant, entre des mots voulus élégants et la réalité qu'on sait.



L'auteur affiche distinctement son inclination militaire: "... jamais je n'avais vécu avec autant d'insouciance qu'en campagne. Tous est clair et simple, mes droits et mes devoirs sont réglementés,... j'ai mille compagnons d'infortune et surtout, à l'ombre de la mort, toutes les questions se résolvent dans une agréable insignifiance. (...). L'entourage est viril et sans ménagements, il s'agit de risquer le suprême enjeu ; on se rend compte que l'on a de la moelle dans les os et du sang dans les veines." Les soldats enrôlés n'ont pas tous manifesté un avis aussi accommodant.



On se bat pour des idées : "... dans ce combat où l'on se dispute un atroce champ de ruines surlequel s'affrontent deux images du monde,...." Et les grandes idées sont les plus abstraites : "Ô parcelle de France ensoleillée où nous ont jetés des forces plus puissantes que nous, ne crois pas que nous gardions un cœur impassible au sein de ces devastations. (...). Tu ne seras pas épargnée, car rien ne peut être épargné quand la vie des peuples est en jeu." Et puis l'histoire commande : "Il semble merveilleux que l'histoire puisse advenir quand on connaît la résistance que l'homme oppose à son appel." On sait hélas qu'aucun ordre nouveau (sic) espéré à l'époque n'est né du long gâchis.



Ces réserves énoncées, il faut convenir qu'il s'agit d'une magnifique narration de guerre, empreinte du souci d'exactitude et de la note lyrique d'un romancier d'exception. Pour preuve la belle description du pays du front que je vous invite à découvrir dans la rubrique "Pages marquées" de mon blog.



Le boqueteau représente un endroit stratégique à tenir ou à gagner. Dérisoire, limité, il symbolise la guerre de position et d'usure des tranchées: on déclenche l'enfer pour des arpents gagnés au prix d'énormes efforts et dégâts humains. Jünger fait merveille pour relater les actions qui conduisent au contrôle du petit bois. On mesure l'intensité dramatique de ces affrontements où le corps à corps est toujours de mise: "...l'instant où, sortant de son embuscade, on se trouve face à face avec un homme à courte distance. Tous les sens sont alors saisis d'un frisson qu'on ne peut comparer avec aucun autre sentiment. .... : à un stade où une troupe est encore capable de continuer longtemps à se battre avce l'aide de la machine, elle peut n'être déjà plus en mesure d'affronter le choc d'homme à homme."



Lors de ce conflit, les méthodes de guerre on grandement changé à la suite des progrès techniques et de l'industrialisation. La puissance de feu est devenue telle qu'elle modifie radicalement l'art de la guerre: "Le feu a pour caractéristique d'être infiniment plus favorable à la défensive qu'à l'offensive." Jünger analyse ces évolutions dans le dernier chapitre Feu et mouvement qui témoigne du pouvoir de réflexion et de synthèse de l'auteur allemand.



Les Falaises de Marbre avaient été une révélation: j'attendais donc beaucoup de ce livre-ci mais malgré un texte parfait, je ne me suis pas senti dedans. Sans comparaison sur le plan purement littéraire, j'avais beaucoup apprécié À l'ouest rien de nouveau de E.R. Remarque et j'espérais inconsciemment retrouver celui-ci dans le combat pour le boqueteau. Mais c'était oublier la vision radicalement différente de la guerre que proposent les deux livres.



(1) L'ancienne remonte à 1932
Lien : http://marque-pages.over-blo..
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Orages d'acier

Cette période est à la fois proche et tellement lointaine. Dans ce journal de guerre, pas de haine pour celui d'en face, pas d'appesantissement sur son sort.

La mort peut arriver à tout moment, c'est à la fois violent et absurde.

Pourquoi l'un reste en vie au contraire d'un autre.

Dans quel état d'esprit ressort t'on de cet enfer ?

Un livre fort

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Journal, tome 4 : 1945-1948 La cabane dans ..

Après tout, le prophète hébreu Isaïe fait partie du patrimoine culturel humain et l'on ne doit pas s'étonner de le voir cité dans ce contexte, dans le titre du volume et lors des lectures que fait le narrateur de la Bible, au moment où l'Allemagne traverse une forme d'apocalypse. Jünger a su, par l'exil intérieur, se distinguer des bouchers et des assassins nazis, dès 1939 et "Sur les falaises de marbre", et si son journal témoigne de la rencontre de la grande Histoire et de son histoire personnelle, il montre aussi, de manière fascinante, quelles peuvent être les stratégies de survie d'un individu libre au milieu de la fin du monde. En ce sens, ce tome ne fait que continuer les précédents du journal de guerre, puisque n'ayant à souffrir rien de ce que les victimes du Reich avaient à subir, Jünger en est néanmoins, lui-même, un témoin désapprouvant ce qu'il voit sans pouvoir le dire, supportant de prêter son nom, son corps et sa personne à la destruction d'un monde qu'il aime.
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Journaux de guerre, tome 2 : 1939-1948

Pioché chez un bouquiniste à Grenoble ,après un échange avec ce sympathique collectionneur (tout ce qui touche à la seconde guerre mondiale, c'est dire ) il me répondit que Jünger fut sans doute " l un des occupants le plus fréquentable " ,pour preuve ce carnet de route parisien * où sont pointés avec ironie, acide souvent, les traits marquants de ces Français pris dans la tourmente.

Débrouille, combines, tractations sans oublier les recommandations et passe droits Bref le cinéma en a rendu compte sous toutes les facettes .

Bien écrit par un francophile ( anti nazi ) ce journal mérite attention ouvrant bien des horizons vers l 'Europe des sixties >>>l'UE.



Nb : je le rapprocherais des témoignages de von Kageneck , autre Allemand talentueux.



* découvert- ou dénoncé ?- il paya son audace par un séjour à l'Est d'où il revint vivant, contrairement à tant de ses camarades.
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Orages d'acier

Belle découverte, je l'avais acheté il y a quelque temps et je craignais de l'ouvrir, étant resté hermétique au seul livre que j'ai lu de l'auteur, le Coeur aventureux. Pour ceux qui seraient comme moi, rassurez-vous, c'est un simple livre de témoignage sur la première guerre mondiale. Je le trouve supérieur littérairement à certains livres du même type qui ont pu être écrits côté français, comme le Feu de Barbusse. Mon seul regret est l'absence de traitement de la question de l'armistice et de l'effet sur les troupes allemandes, ce moment est traité d'une seule phrase, éclipsé par l'obtention de la médaille "pour le mérite", cette célèbre décoration prussienne qui n'était décernée qu'à la crème de la crème, dont le visionnage du film Blue Max ou le Crépuscule des Aigles vous permettra de comprendre toute l'importance. Je me suis un peu intéressé à la polémique sur l'auteur, je la trouve parfaitement injustifiée. Certes, comme beaucoup d'autres, Jünger a été soldat pendant la seconde guerre mondiale, mais il n'était absolument pas un partisan du régime, détestant tout particulièrement la politique d'Hitler envers les juifs. Lui reprocher des écrits nationalistes écrits dans les années 1920, dans un contexte politique dégradé, me paraît excessif et injustifié. Pour revenir à l'Orage d'acier, j'en ai apprécié le style, très précis, à l'allemande, avec des petites envolées, mais jamais trop romantiques. Pour la plupart de l'ouvrage, Jünger est opposé aux Anglais, heureusement. ça m'aurait fendu le coeur de le voir tirer sur des français. J'ai appris par la suite que Jünger était très francophile, ayant servi dans la légion étrangère à 18 ans, juste avant que la guerre n'éclate. ça ce ressent à la lecture, il n'a jamais de mots durs ou xénophobes contre ses adversaires, qu'ils soient Anglais, Anzacs (Néo-Zélandais & Australiens), Hindous, ou encore Français, et ce même dans des circonstances où ça pourrait être compréhensible, avec tous ses amis qui tombent, les un après les autres, sous le feu ennemi . Jünger me réconcilie un peu avec la littérature allemande.
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Orages d'acier

En janvier 1915, le jeune Ernst Jünger, à peine âgé de vingt ans, arrive sur le front quelque part dans la Champagne crayeuse non loin de la petite ville de Bazancourt. L’ambiance qu’il y découvre lui semble plutôt calme. Les temps de permission à l’arrière se passent en joyeuses beuveries parmi une population française amicale. Mais tout change soudainement quand il se retrouve du côté des Eparges. Là, c’est un véritable baptème du feu pour lui, un déluge de fer et de feu avec une hécatombe de soldats. Lui-même est blessé à la cuisse. Rétabli, il remonte sur le front à l’automne suivant du côté de Douchy, mais cette fois à titre de sous-officier. Il participe à la première bataille de la Somme où à nouveau il est blessé légèrement. Il s’illustrera ensuite à la bataille de Cambrai ainsi qu’à celle des Flandres. Il aura comme adversaire des Français, des Hindous, des Ecossais et des Néo-Zélandais. Il sortira vivant et décoré de toutes ces années de guerre mais avec sept blessures dont certaines fort graves et rien moins qu’une vingtaine d’impacts dans le corps.

« Orages d’acier » est le témoignage au jour le jour d’un soldat allemand lambda qui monte les échelons, subit toutes les épreuves de cette terrible guerre, le froid, la boue, l’humidité, les rats, les gaz, les pilonnages d’artillerie, les combats à la grenade ou au corps à corps avec un courage et une abnégation remarquable. Son récit assez brut de décoffrage reste dans la lignée d' « À l'ouest rien de nouveau » d’Eric-Maria Remarque côté allemand ou des « Croix de bois » de Roland Dorgelès, voire du « Feu » d'Henri Barbusse côté français. Mais sans aucun romantisme ni pathos. Junger ne se plaint jamais. Il subit tout avec calme et constance. Il parle français, s’entend parfaitement avec les gens qui le logent et n’a pas le moindre mot haineux ou méprisant envers ses adversaires. Chevaleresque, il leur rend hommage pour leur courage et leur détermination quand certains sont ses prisonniers. Il est même très impressionné par la bravoure des Highlanders écossais. Son récit, qui n’est qu’une longue suite de combats, de descriptions de soldats blessés ou tués de toutes les manières possibles et imaginables, donne une idée de ce que nos anciens ont dû endurer des deux côtés de la ligne de front.
Lien : http://www.bernardviallet.fr
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La guerre comme expérience intérieure

Un essai pour le moins original sur la guerre... Assez fascinant, quasiment le livre d'un fou mais essentiel, pour moi, à la compréhension du bouleversement radical dans l'histoire contemporaine que fut la Grande Guerre. Ce livre fut écrit dans la période « militante » d'Ernst Jünger, alors figure intellectuelle de ce qu'on appellera plus tard la révolution conservatrice. On ne peut qu'apprécier l'évolution ultérieur de cet écrivain, abandonnant ses positions nationaliste-révolutionnaires pour un individualisme paisible et tourné vers la vie intérieure, résolument hostile à L'Etat-Léviathan.
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Orages d'acier

Orages d'acier porte bien son nom...... Du ciel tombent inlassablement des milliers de tonnes de bombes......

Au fond de leur tranchées..... Les histoires et les visions des soldats allemands.

De la souffrance, du bruit , de la fumée....de la boue.....

Cela paraît si incroyable de se trouver dans un tel enfer que notre esprit d'aujourd'hui trouve cela totalement irréel.

Et pourtant non ce fut une réalité !!

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Sur les falaises de marbre

Selon les spécialistes de la critique littéraire, que j'admire au plus haut point, ce livre serait le chef d'œuvre de Ernst Junger?.. Certes poétique et imaginaire, style envoutant mais, je m'y suis beaucoup emmernuyé.

Critique du nazisme ?..disons critique de la barbarie en général, n'oublions pas les autres , la noire et la rouge en particulier, bref j'étais sans doute trop petit pour ce trop grand livre.

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Orages d'acier

Orages d’acier – Ernst Junger



Ce sont les mémoires ou plutôt les quelques années que l’auteur a passées dans l’horreur de la première guerre mondiale. Il a fêté ses 20 ans sur le front et a terminé la guerre la guerre a 23 ans bardé de médaille et de blessures.



Il y a des moments terribles dans ce récit, la description de la vie dans les tranchées, les premiers combats, les camarades qui tombent les uns après les autres, les bombardements incessants.



Mais je ne sais pas si c’est la traduction, mais par moment j’ai eu l’impression que certaines descriptions manquaient d’émotion et puis il y a cette fascination pour la guerre et les combats. Malgré toutes ces blessures il retourne à chaque fois se battre.

Était-ce la fougue et l’inconscience de la jeunesse ?



Malgré tout on retrouve les mêmes témoignages que dans les récits des écrivains français



Cette guerre n’était qu’un massacre inhumain et inutile

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Héliopolis

Ce livre, Dune et le film Blade Runner sont les sources où j'ai puisé pour écrire mon roman de science-fiction. J'aime l'image du proconsul qui a un seul dossier sur son bureau, minimalisme, la formation d'officier qui me rappelle par moment ''Les Cadets''. Et il y a la vigne, ces mélanges post-modernes avant l'heure, la technologie avancée mêlée à de vieux meubles... Après être passé à travers ses journaux de guerre, j'ai pu saisir un peu mieux les trames subtiles de Jünger.

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Orages d'acier

Ernst Jünger décrit ici la première guerre mondiale dans sa phase : guerre de positions. C'est toute la vie du troupier dans les tranchées de première ligne, dans les avant-postes : la montée en lignes, la prise de position, les bombardements, les assauts, la relève. Autant de témoignages vibrants de cette première guerre mondiale déjà lointaine. Particulièrement remarquable : le chapitre "La Bataille de la Somme."
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