Jean-Christophe Baiilly nous transporte dans le langage vers des territoires toujours inexplorés et surprenants. "Le Versant animal" ne fait pas exception à la règle. En interrogeant la figure de l'animal à travers les grands textes de la littérature, en dressant un bestiaire littéraire où la virevoltante chauve-souris répond à la vache placide, prenant appui sur Rilke, sur Kafka, pour un invetaire qui se déploie avec fantaisie, comme une fugue, l'auteur dresse, par la bande, un partait mouvant, "fractal" de l'espèce humaine.
Il en découle un texte qui s'avance comme une piste à travers le paysage hétérogène du vivant. le lecteur suit cette piste, il est tantôt animal traqué ou chasseur, explorant un infini de possibilités et de façons de vivre. Un très beau texte!
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Dans cet ouvrage, le regard tient un place importante! Les animaux sont les seuls êtres qui peuvent eux aussi nous voir. L'animal nous est proche et en meme temps lointain. Impossible pour nous de nous en approché, de le comprendre… pourtant parfois l'animal semble nous adresser un message avec l'aide du regard.
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Très remonté Jean Christophe Bailly ; les dossiers fâcheux dénaturant ce qu'il nomme le « texte parisien » sont trop nombreux pour être tous énumérés ici et les habitués des rues et du ciel de Paris lecteurs de ce petit essai d'humeur y trouveront au-delà du verbe parfois polémique les éléments d'une réflexion critique intéressante sur la ville développée ailleurs (La phrase urbaine, Seuil, 2013). Colère de l'auteur (à laquelle on s'accorde) quand il constate qu'à la brutalité des années soixante - refonte destructrice des Halles (dont la dernière mouture n'est pas mieux réussie que les précédentes), des berges de la Seine, de la Place des fêtes pour ne citer que ces trois exemples -, succèdent de nouvelles formes d'atteintes à l'espace parisien d'aujourd'hui qu'il dénonce en les répertoriant au fil de haltes en courts chapitres (37 en tout) à travers les rues, les monuments et les arrondissements de la capitale. S'arrêtant devant la Samaritaine dont la façade a été conservée mais le bâtiment complètement évidé au profit d'un hôtel de luxe, regrettant l'ambiance perdue du passage Véro-Dodat ou imaginant voir scié en deux le Panthéon par son milieu comme l'avait proposé jadis T. Tzara, racontant la démolition du théâtre de l'Ambigu, la métamorphose ratée de la bourse du commerce, ancienne halle aux grains, jusqu'à sa dévolution actuelle à la collection d'art du richissime collectionneur que l'on sait. Exemples emblématiques de dénaturation du patrimoine par effacement et dévitalisation de bâtiments, voire d'ilots entiers, ou par restauration abusive à des fins privées gommant toute imprégnation du passé. Formes destructrices plus récentes, coups bas ou coups tordus (tours Duo ou Triangle), mais plus insidieuses qu'auparavant, selon lui, confiscatoires de lieux autrefois ouverts ou dédiés à tous (l'ancien hôpital Laennec).
D'où sa charge à l'encontre de la nouvelle « smart city » qu'il voit poindre grâce à l'alliance d'édiles paresseux, de mécènes trop voraces (seul le baron Taylor échappe à son ire) et d'architectes narcissiques. Mais à côté des endroits qu'il ne fréquente jamais ou plus, de ceux qu'il évite, ce que je préfère retenir de ma lecture sont les lieux qui restent nombreux où ses pas le ramènent toujours. C'est « L'intact ou le sauf » du « texte parisien », façon J. C. Bailly et la qualité d'un « livre errant » célébrant un Paris de toujours avec ce que ses pages délivrent d'infinie poésie, de mémoire, de liens anciens noués entre la ville et la littérature, avec Villon, Rousseau, et De Balzac à Modiano. L'envolée du génie dans le ciel de la Bastille, les dames de pierres qu'il affectionne au Luxembourg, le silence hors du temps de la rue des Archives au milieu du fracas de la guerre en Ukraine, le souvenir de quelques livres (« le Murmure de Paris », A. M. Ortese ; « Les tours de Notre Dame », H. Thomas), ou de lieux délaissés, ces charbonniers et marchands de glace qu'il fait revivre lâchant leurs charges sur le pavé des cours maintenant interdites par les digicodes, une petite place oubliée (Hébert), le Paris des boulevards, des romantiques, celui de Baudelaire puis des Surréalistes et son épicentre de la Porte Saint-Martin (Paris surréaliste qu'il estime volontairement effacé de la mémoire parisienne). Millefeuille littéraire et archéologique, avec juste ce qu'il faut de nostalgie, qui s'inscrit, des toits aux comptoirs des cafés (de moins en moins nombreux malheureusement), à la liste d'un patrimoine inaliénable, indissociable du zinc et de la couleur de la ville, gris-bleu, dont J. C. Bailly parle très bien.
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J'ai acheté ce livre sur une erreur de casting, confondant Jean Christophe avec ..Jean Louis..bref ! Après un début étonné, donc (tiens, il s'est embourgeoisé ou c'est moi ?), j'ai très vite accroché car ces coups de coeur (et souvent de gueule ) sont d'un amoureux de Paris, celui de Brassaï et des surréalistes..livre très érudit que j'ai lu avec Google earth à portée demain..en attendant de me faire une opinion sur place lors d'un séjour à Paris.
Le style est cependant quand même assez alambiqué, on a même parfois l'impression que l'auteur s'est perdu dans sa phrase.. finalement à la troisième relecture, non, ça colle, mais c'est parfois un peu indigeste..
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neuf auteurs, Jean-Christophe Bailly, Jean-Marie Gleize, Christophe Hanna, Hugues Jallon, Manuel Joseph, Jacques-Henri Michot, Yves Pagès, Véronique Pittolo et Nathalie Quintane (et voilà que je réalise que les deux femmes sont renvoyées à la fin, veux croire que c'est un hasard ou un honneur) - neuf parcours différents - neufs façons différentes, très, d'aborder le thème.
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9 textes sur "Poésie et politique" incluant 2 excellents essais historico-critiques, et 3 bombes littéraires.
Cette récente livraison des précieuses éditions La Fabrique rassemble 9 textes, allant chacun d'une dizaine à une trentaine de pages, et ainsi 9 manières d'aborder le lien entre poésie et politique.
"Ce livre, où il est question de poésie, réunit des écrivains qui ont en commun de ne pas trop aimer qu'on les traite de poètes. Elles et ils ne tiennent pas non plus à ce que leur travail d'écriture soit qualifié de poésie. (...) Dans une grande diversité - dont ce livre rend compte -, leur écriture est hantée par la politique, bien que celle-ci soit rarement le thème dominant de leur travail. (...) La poésie telle qu'ils l'envisagent est une opération pratique, concrète, où l'on ne se raconte pas d'histoires et où l'on pense l'art comme un acte - individuel, certes - mais aussi comme un lieu public, une scène ouverte."
Avec "L'action solitaire du poème", Jean-Christophe Bailly propose un remarquable texte théorique, où l'on parcourt Mallarmé, Rimbaud, Goethe, Celan, Pound, ou encore Mahmoud Darwich, bien sûr. "Le poème qui laisse entrer en lui la rumeur de l'Histoire ne peut jamais le faire gratuitement et sans risque".
Avec "Opacité critique", Jean-Marie Gleize nous convie à un tour d'horizon de la manière dont les successeurs des poètes engagés de la génération 1970 travaillent aujourd'hui. "Une certaine négation de la politique par la poésie est politique. Surtout si l'on veut bien admettre par ailleurs cette pratique de l'écriture de poésie comme négation endurante de "la" poésie : aucun message achevé, refus de la revendication, maintien à hauteur d'énigme, réalisme radical."
Avec "Actions politiques / Actions littéraires", Christophe Hanna décortique magistralement les implications de la métaphore d'une "bombe littéraire", tandis qu'avec "De quelques points d'intersection", Yves Pagès décrypte le rôle de la mémoire des mots dans la construction d'une identité politique, que Véronique Pittolo, dans "POPOPA - Poésie, politique & Sarah Palin", convoquant Robespierre et Spinoza, relit le storytelling des acteurs politiques contemporains à l'aune de leur poésie absente, et qu'enfin Manuel Joseph, avec "Corps de grève", lie habilement les pieds écrasés d'un ouvrier accidenté du travail aux morts en prison de prisonniers politiques.
Moins théoriques mais extrêmement percutants, les trois textes les plus enthousiasmants du recueil sont "Astronomiques assertions" de Nathalie Quintane, splendide échafaudage sur une relecture moderne des prophéties de Nostradamus, "Toi aussi, tu as des armes, essaie de t'en souvenir" de Hugues Jallon, fantastique reconstruction du parcours de Michel Frois, gourou militaire contre-insurrectionnel puis patronal, et enfin, "Toi aussi, tu as (encore) des armes ?" de Jacques-Henri Michot, qui tente une passionnante élucidation de la phrase du "Journal" de Kafka qui sert de titre à l'ensemble de ce recueil, grâce notamment à une lecture rusée de Harold Pinter, Leslie Kaplan ou Roland Barthes.
"1.5.8. Écrire ne me semble pas être noter, sous figure plus ou moins nubileuse, un genre de Weltanschauung.
1.5.9. Oui mais à la longue, dit-on, cela fait un genre de nuage, qui fait un genre de Weltanschauung (ou alors comme pour Françoise Sagan : une petite musique).
1.5.9.1. I am not Françoise Sagan."
(Nathalie Quintane)
"la Biennale de l'équipement électrique, porte de Versailles
paralysée par la grève générale
la France se désagrège, dit-il
le pays tourne à l'envers, répète-t-il
enrageant du silence patronal
qui n'arrive pas à se faire entendre
(force muette, dans l'adversité ne préférant pas, vraiment pas, dépêchant ses miliciens équipés de barre de fer à la sortie des usines)"
(Hugues Jallon)
Un recueil précieux sur un thème ô combien passionnant.
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L'anecdote, c'est ce qu'à choisi Jean-Pierre Bailly pour évoquer 68, année pré-érotique, dont les cinquante ans vont être "fêté" par des tonnes de livres et de documentaires pour consolider un peu un mythe qui n'en a pas besoin et qui, il faut l'avouer, n'excite aujourd'hui plus grand monde. Bailly lui reste les pieds sur terre. Un peu désenchanté, il se remémore surtout des instants, des lumières, les convergences, l'impatience mais aussi le détachement, les changements provoqués sur lui par ces événements inattendus dont on a, paradoxalement, trop attendu, les désillusions de la lutte, etc. Le texte est court, lumineux, intime, et c'est peut-être le seul qu'il faudrait lire sur 68 car loin des clichés, il donne le ressenti d'un jeune homme qui va trouver sa voie, celle de l'écrivain. Beau, en toute simplicité.
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Dans ce texte écrit en 2004 et publié en 2018, Jean-Christophe Bailly donne sa vision - limitée bien sûr- des événements qu'il a vécus depuis Nanterre. Domine dans ses lignes la sensation de jeunesse, de vitalité et d'improvisation.
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La première pièce, qui a été écrite pour la Biblioteca Palatina à Parme, peut être jouée dans la salle de lecture d’autres bibliothèques à la tombée du jour. Elle met en scène les documents qui profitent de l’absence des lecteurs pour sortir des rayons et évoquer leur relation au monde.
La seconde ne peut être détachée de son lieu de naissance et se déroule comme un parcours, une visite clandestine dans la villa et le parc de la Fondation Magnani-Rocca à Mamiano di Traversetolo, près de Parme.
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