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Citations de Jean Giraudoux (579)


HECTOR
Écoute-la, Cassandre. Écoute ce bloc de négation qui dit oui !
Tous m’ont cédé. Pâris m’a cédé, Priam m’a cédé, Hélène me cède.
Et je sens qu’au contraire dans chacune de ces victoires apparentes, j’ai perdu.
On croit lutter contre des géants, on va les vaincre, et il se trouve qu’on lutte contre quelque chose d’inflexible qui est un reflet sur la rétine d’une femme.
Tu as beau me dire oui, Hélène, tu es comble d’une obstination qui me nargue !
HÉLÈNE
C’est possible. Mais je n’y peux rien. Ce n’est pas la mienne.
HECTOR
Par quelle divagation le monde a-t-il été placer son miroir dans cette tête obtuse !
HÉLÈNE
C’est regrettable, évidemment.
Mais vous voyez un moyen de vaincre l’obstination des miroirs ?
HECTOR
Oui. C’est à cela que je songe depuis un moment.
HÉLÈNE
Si on les brise, ce qu’ils reflétaient n’en demeure peut-être pas moins ?
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ISABELLE : D'imagination ? Figurez-vous que sur ce point j'avais des doutes. Sur ce point la vie avec un fonctionnaire m'effrayait un peu. Le métier de contrôleur des Poids et des Mesures comporte beaucoup d'imagination ?

LE CONTRÔLEUR : Pouvez-vous en douter ?

ISABELLE : Donnez-moi un exemple.

LE CONTRÔLEUR : Mille, si vous voulez. Chaque soir, quand le soleil se couche et que je reviens de ma tournée, il me suffit d'habiller le paysage avec le vocabulaire des contrôleurs du Moyen-Age, de compter soudain les routes en lieues, les arbres en pieds, les prés en arpents, jusqu'aux vers luisants en pouces, pour que les fumées et les brouillards montant des tours et des maisons fassent de notre ville une de ces bourgades que l'on pillait sous les guerres de Religion, et que je me sente l'âme d'un reître ou d'un lansquenet.
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ANDROMAQUE
Alors je vous en supplie, Hélène. Vous me voyez là pressée contre vous comme si je vous suppliais de m'aimer. Aimez Pâris ! Ou dites-moi que je me trompe ! Dites-moi que vous vous tuerez s'il mourait ! Que vous acceptererez qu'on vous défigure pour qu'il vive !... Alors la guerre ne sera plus qu'un fléau, pas une injustice. J'essaierai de la supporter.
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Chaque arbuste par moi jadis fut sans doute si surpris qu'il porte depuis mon naufrage les fruits d'un autre. Ici les pommiers donnent des oranges, les figuiers des cerises. Ici un monde, où fleurs, oiseaux, animaux et insectes, confondus dans le bonheur, n'ont pas eu le temps à mon arrivée de reprendre leurs attributs: des bêtes poilues pondent des œufs, des poissons couvent. Tout ce que les poètes seuls voient en France, on le voit ici à l’œil nu: les arbres boivent à la mer par de vraies trompes qui se contractent quand elle est trop salée. Tout ce qu'on dit pas antiphrase des femmes à Paris, on peut le dire vraiment de moi; mon teint est nacré, poudré de vraie nacre, mes lèvres sont de corail, poudrées de vrai corail. les couleurs aussi ont été recollées trop vite, les feuilles sont carmin ou pourpre, les fruits sont verts dès qu'ils sont mûrs.
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(...) tous sur le bateau d'ailleurs l'auraient nommé ainsi - il balançait des écorces d'oranges creuses sans les couler, il se retirait doucement de deux mètres quand du côté de la chine on le tirait, il léchait les pieds nus des femmes légères de Panama, couronnées de chapeaux à plumes - et même nous l'aurions peut-être appelé le Magnanime, le Sûr entre tous, l'Ami véritable - il semblait de toutes ses vagues ne regarder que vous seule, comme les yeux des visages dans les réclames - le Pacifique!
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On croit lutter contre des géants, on va les vaincre, et il se trouve qu'on lutte contre quelque chose d'inflexible, qui est un reflet sur la rétine d'une femme.
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HECTOR
Ton fils peut être lâche. C'est une sauvegarde.
ANDROMAQUE
Il ne sera pas lâche. Mais je lui aurai coupé l'index de la main droite.
HECTOR
Si toutes les mères coupent l'index droit de leur fils, les armées de l'univers se feront la guerre sans index... Et si elles lui coupent la jambe droite, les armées seront unijambistes... Et si elles lui crèvent les yeux, les armées seront aveugles, mais il y aura des armées, et dans la mêlée elles se chercheront le défaut de l'aine, ou la gorge, à tâtons...
ANDROMAQUE
Je le tuerai plutôt.
HECTOR
Voilà la vraie solution maternelle des guerres.
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Ceux qui ne voient que l'amour dans le monde sont aussi bête que ceux qui ne le voient pas.
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Jean Giraudoux
Servir! C'est la devise de ceux qui aiment commander.
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MERCURE
[...] Il convient d’y remplacer d’urgence les notions divines par les humaines… Que pensez-vous ? Que croyez-vous ? Quelles sont vos vues de l’univers, maintenant que vous êtes homme ?

JUPITER
Mes vues de l’univers ? Je crois que cette terre plate est toute plate, que l’eau est simplement de l’eau, que l’air est simplement de l’air, la nature la nature, et l’esprit l’esprit… C’est tout ?

MERCURE
Avez-vous le désir de séparer vos cheveux par une raie et de les maintenir par un fixatif ?

JUPITER
En effet, je l’ai.

MERCURE
Avez-vous l’idée que vous seul existez, que vous n’êtes sûr que de votre propre existence ?

JUPITER
Oui. C’est même très curieux d’être ainsi emprisonné en soi-même.

MERCURE
Avez-vous l’idée que vous pourrez mourir un jour ?

JUPITER
Non. Que mes amis mourront, pauvres amis, hélas oui ! Mais pas moi.

[...]

MERCURE
Très bien ! Et ce ciel, qu’en pensez-vous ?

JUPITER
Ce ciel, je pense qu’il est à moi, et beaucoup plus depuis que je suis mortel que lorsque j’étais Jupiter ! Et ce système solaire, je pense qu’il est bien petit, et la terre immense, et je me sens soudain plus beau qu’Apollon, plus brave et plus capable d’exploits amoureux que Mars, et pour la première fois, je me crois, je me vois, je me sens vraiment maître des dieux.

MERCURE
Alors vous voilà vraiment homme !… Allez-y !


Acte I - Scène 5
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"Je n'aime pas beaucoup connaître les sentiments des autres. Rien ne gêne comme cela. C'est comme au jeu quand on voit le jeu de l'adversaire. On est sur de perdre."
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BUSIRIS
Mon avis, princes, après constat de visu et enquête subséquente, est que les Grecs se sont rendus vis-à-vis de Troie coupables de trois manquements aux règles internationales. Leur permettre de débarquer serait vous retirer cette qualité d'offensés qui vous vaudra, dans le conflit, la sympathie universelle.

HECTOR
Explique-toi.

BUSIRIS
Premièrement, ils ont hissé leur pavillon au ramat et non à l'écoutière. Un navire de guerre, princes et chers collègues, hisse sa flamme au ramat dans le seul cas de réponse au salut d'un bateau chargé de bœufs. Devant une ville et sa population, c'est donc le type même de l'insulte. Nous avons d'ailleurs un précédent. Les Grecs ont hissé l'année dernière leur pavillon au ramat en entrant dans le port d'Ophéa. La riposte a été cinglante. Ophéa a déclaré la guerre.

HECTOR
Et qu'est-il arrivé ?

BUSIRIS
Ophéa a été vaincue. Il n'y a plus d'Ophéa, ni d'Ophéens.

HÉCUBE
Parfait.

BUSIRIS
L'anéantissement d'une nation ne modifie en rien l'avantage de sa position morale internationale.
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Jean Giraudoux
Plus encore que le roi des sports, le football est le roi des jeux. Tous les grands jeux de l'homme sont les jeux avec une balle. (...) La balle est dans la vie ce qui échappe le plus aux lois de la vie. Elle a sur la Terre l'extraterritorialité de quelque bolide provisoirement apprivoisé. (...) En plus de son propre principe, celui du rebondissement, de l'indépendance, l'équipe donne à la balle le moteur de onze malices et onze imaginations.
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Dans ce pays qui est le mien on ne s'en remet pas aux dieux du soin de la justice. Les dieux ne sont que des artistes. Une belle lueur sur un incendie, un beau gazon sur un champ de bataille, voilà pour eux la justice.
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Andromaque :

Je ne sais pas ce qu'est le destin.

Cassandre :

Je vais te le dire. C'est simplement la forme accélérée du temps. C'est épouvantable.
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Sur nos fautes, nos manques, nos crimes, sur la vérité, s'amasse journellement une triple couche de terre, qui étouffe leur pire virulence : l'oubli, la mort, et la justice des hommes. Il est fou de ne pas s'en remettre à eux. C'est horrible, un pays où, par la faute du redresseur de torts solitaire, on sent les fantômes, les tués en demi sommeil, où il n'y a jamais remise pour les défaillances et les parjures, où imminent toujours le revenant et le vengeur. Quand le sommeil des coupables continue, après la prescription légale, à être plus agité que le sommeil des innocents, une société est bien compromise.
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Jean Giraudoux
Les pays sont comme les fruits , les vers sont toujours a' l'intérieur.
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Il n'y a pas deux façons de se rendre immortel ici-bas, c'est d'oublier qu'on est mortel.
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ULYSSE — Le privilège des grands, c'est de voir les catastrophes d'une terrasse.
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MERCURE
(...) Tournez-vous.

JUPITER
Que je me tourne?

MERCURE
Les hommes, comme les dieux, s'imaginent que les femmes ne les voient jamais que de face. Ils s'ornent de moustaches, de poitrines plastronnantes, de pendentifs. Ils ignorent que les femmes feignent d'être éblouies par cette face étincelante, mais épient de toute leur sournoiserie le dos. C'est au dos de leurs amants, quand ceux-ci se lèvent ou se retirent, au dos qui ne sait pas mentir, affaissé, courbé, qu'elles devinent leur veulerie ou leur fatigue. Vous avez un dos plus avantageux qu'une poitrine! Il faut changer cela!

JUPITER
Les dieux ne se tournent jamais. D'ailleurs, il fera nuit, Mercure.

MERCURE
C'est à savoir. Il ne fera pas nuit si vous gardez ainsi sur vous-même le brillant de votre divinité. Jamais Alcmène ne reconnaîtrait son mari en ce ver luisant humain.

(Acte I, Scène 5)
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