Citations de Jean Giraudoux (579)
Chaque guerre est la toute dernière.
On n'a le droit de sauver une patrie qu'avec des mains pures.
Mais ce que j’ai à vous dire aujourd’hui, c’est que la guerre me semble la recette la plus sordide et la plus hypocrite pour égaliser les humains et que je n’admets pas plus la mort comme châtiment ou comme expiation au lâche que comme récompense aux vivants.
Hector : Mais ce que j'ai à vous dire aujourd'hui, c'est que la guerre me semble la recette la plus sordide et la plus hypocrite pour égaliser les humains et que je n'admets pas plus la mort comme châtiment ou comme expiation au lâche que comme récompense aux héros.
SOSIE
Dormez, Thébains ! Il est bon de dormir sur une patrie que n’éventrent point les tranchées de la guerre, sur des lois qui ne sont pas menacées, au milieu d’oiseaux, de chiens, de chats, de rats qui ne connaissent pas le goût de la chair humaine. Il est bon de porter son visage national, non pas comme un masque à effrayer ceux qui n’ont pas le même teint et le même poil, mais comme l’ovale le mieux fait pour exposer le rire et le sourire. Il est bon, au lieu de reprendre l’échelle des assauts, de monter vers le sommeil par l’escabeau des déjeuners, des dîners, des soupers, de pouvoir entretenir en soi sans scrupule la tendre guerre civile des ressentiments, des affections, des rêves !… Dormez ! Quelle plus belle panoplie que vos corps sans armes et tout nus, étendus sur le dos, bras écartés, chargés uniquement de leur nombril… Jamais nuit n’a été plus claire, plus parfumée, plus sûre… Dormez.
Acte I - Scène 2
ANDROMAQUE : Oh ! justement, père vous le savez bien ! Ce sont les braves qui meurent à la guerre. Pour ne pas y être tué, il faut un grand hasard ou une grande habileté. Il faut avoir courbé la tête ou s'être agenouillé au moins une fois devant la danger. Les soldats qui défilent sous les arcs de triomphe sont ceux qui ont déserté la mort. Comment un pays pourrait-il gagner dans son honneur et dans sa force en les perdant tous les deux?
PRIAM : Ma fille, la première lâcheté est la première ride d'un peuple.
ANDROMAQUE : Où est la pire lâcheté? Paraître lâche vis-à-vis des autres, et assurer la paix? Ou être lâche vis-à-vis de soi-même et provoquer la guerre?
DEMOKOS : La lâcheté est de ne pas préférer à toute mort la mort pour son pays.
[E]n Bavière, j’eus de bons camarades ; j’eus, dans une lumière acide, sous un vent mordant, sous un ciel ténu, d’énormes camarades ; deux à la brasserie de la Bêche, deux à la brasserie des Franciscains, deux à la brasserie Royale ; amis qui vidaient lentement leur cruchon, sans beaucoup de rêves peut-être, sans beaucoup de vertige ni de frénésie : mais la bière, après tout, n’est pas de l’opium.
ANDROMAQUE. - Je t'aime, Hector.
HECTOR , montrant sa joue. - Oui. Mais ne m'embrasse pas encore tout de suite, veux-tu ?
ANDROMAQUE. - Tu as gagné encore ce combat. Aie confiance.
HECTOR. - Je gagne chaque combat. Mais de chaque victoire l'enjeu s'envole.
Nous ne commettrons pas l'erreur des romanciers qui se croient tenus, quand ils ont leur titre, d'écrire en supplément le roman lui même
la guerre me semble la recette la plus sordide et la plus hypocrite pour égaliser les humains
Moi je ne suis plus dans le jeu. C’est pour cela que je suis libre de venir vous dire ce que la pièce ne pourra vous dire. Dans de pareilles histoires, ils ne vont pas s’interrompre de se tuer et de se mordre pour venir vous raconter que la vie n’a qu’un but, aimer. Ce serait même disgracieux de voir le parricide s’arrêter, le poignard levé, et vous faire l’éloge de l’amour. Cela paraîtrait artificiel. Beaucoup ne le croiraient pas. Mais moi qui suis là, dans cet abandon, cette désolation, je ne vois vraiment pas ce que j’ai d’autre à faire !
Les gens ont pitié des autres dans la mesure où ils auraient pitié d'eux-mêmes. Le malheur ou la laideur sont des miroirs qu'ils ne supportent pas.
Puis l'adversaire arrive, écumant, terrible. [...] On a de l'amour pour lui. On aime sa verrue sur sa joue, sa taie dans son oeil. On l'aime... Mais il insiste... Alors on le tue.
FEMME NARSES - [...] Comment cela s'appelle-t-il, quand le jour se lève comme aujourd'hui, et que tout est gâché, que tout est saccagé, et que l'air pourtant se respire, et qu'on a tout perdu, que la ville brûle, que les innocents s'entretuent, mais que les coupables agonisent, dans un coin du jour qui se lève ?
[...]
LE MENDIANT - Cela a un très beau nom, femme Narsès. Cela s'appelle l'aurore.
La mort a ceci de bon qu'on peut se confier à elle.
Quand un village a besoin d’un député, c’est simple: on prend le plus bête (cité dans le « Journal inutile » de Paul Morand, 10 mai 1973).
Dès que la guerre est déclarée, impossible de tenir les poètes. La rime, c'est encore le meilleur tambour.
Ferme les yeux, tout ce que tu vois t’appartient.
O vous qui ne sentez pas, qui ne touchez pas, respirez cet encens, touchez ces offrandes. Puisqu'enfin c'est un général sincère qui vous parle, apprenez que je n'ai pas une tendresse égale, un respect égal pour vous tous. Tout morts que vous êtes, il y a chez vous la même proportion de braves et de peureux que chez nous qui avons survécu et vous ne me ferez pas confondre, à la faveur d'une cérémonie, les morts que j'admire avec les morts que je n'admire pas. Mais ce que j'ai à vous dire aujourd'hui, c'est que la guerre me semble la recette la plus sordide et la plus hypocrite pour égaliser les humains et que je n'admets pas plus la mort comme châtiment ou comme expiation au lâche que comme récompense aux vivants. Aussi qui que vous soyez, vous absents, vous inexistants, vous oubliés, vous sans occupation, sans repos, sans être, je comprends en effet qu'il faille en fermant ces portes excuser près de vous ces déserteurs que sont les survivants, et ressentir comme un privilège et un vol ces deux biens qui s'appellent, de deux noms dont j'espère que la résonnance ne vous atteint jamais, la chaleur et le ciel.
L'amour comporte des moments vraiment exaltants, ce sont les ruptures.