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Critiques de Nathalie Sarraute (279)
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Enfance

Une belle autobiographie, livrée avec sensibilité et émotion par l'auteure. Histoire d'un exile et d'une acculturation, histoire d'un rapport mère-fille, Enfance est une autobiographie que j'ai lu en classe et dont j'apprécie d'autant plus la valeur avec le recul des années.
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13 récits d'enfance et d'adolescence

Recueil de récits sur l'enfance et l'adolescence de plusieurs auteurs différents. Les extraits des ouvrages présentés sont souvent intéressants, et sont suivis de ressources pédagogiques.

Conçu pour les élèves de troisième.
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Martereau

Ayant beaucoup aimé « Enfance », j’ai ouvert avec confiance « Martereau ».

Et bien, j’ai arrêté très vite.

Rien compris. Qui est ce Il ? Qui est ce Elle ? Qui est ce Je ?

Si à la page 40, je n’ai toujours pas compris, ça commence à m’agacer.

Se plus le style est dense, serré, c’est trop détaillé.

J’abandonne

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Le Planétarium

C'est une chose qui m'arrive rarement, mais j'ai abandonné au bout de trois chapitres ce livre, vaincu par l'écriture de l'auteur. Ai je eu tort ? Aurais-je dû continuer plus avant ? Je ne sais pas, mais cette écriture sans syntaxe bourrée de point de suspension m'a prodigieusement agacé, au point de me faire renoncer à poursuivre une lecture si difficilement compréhensible.

De plus, je suis réfractaire à cette position du Nouveau Roman qui veut la disparition des personnages et trames narratives classiques. Désolé pour eux, mais le lecteur réac que je suis en a désespérément besoin...

Une rencontre manquée, mais je suis sûr que ce livre saura trouver son public.
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C'est beau

Un couple, un enfant.

Le couple regarde ... admire, une oeuvre d’art et n’ose pas prononcer «c’est beau» en présence de leur fils qui ne s’intéresse qu’aux BD, à la TV, aux juke-box, aux matchs, aux policiers. Peur du jugement ? Peur de ne pas savoir communiquer ? Peur de salir ce qui est important à leurs yeux ? Peur de faire éclater la cellule familiale ?

«On a peur parce qu’on sent une fermeture insultante ...un ignoble mépris ... une menace sournoise ... que ces gens-là font peser sur tout ce qui compte, ils avilissent, ils aplatissent tout... tout ce qui donne du prix à la vie ...on a honte devant eux de profaner ... on a envie de soustraire à leur contact... de mettre à l’abri ... il ne faut surtout pas les provoquer ... qu’ils n’approchent ... enfin, rien que d’y penser ...quelle horreur ... pourquoi parler de ça ? personne n’en parle, par pudeur ... par simple décence ... Mais qui ne le sent pas ?



C’est toute leur frustration qui s’entend là car enfin, leur fils a «l’esprit très libre. Il ne s’en laisse jamais accroire... Pas d’argument d’autorité avec lui. Il passe tout au crible.» «Et bien, (dit la voix) alors, de quoi vous plaignez-vous ? qu’est-ce qui vous fait tant souffrir ? tout est pour le mieux ? Soyez contents. Soyez fiers. A chacun son bonheur.»



Le fils finira par consentir que «c’est chouette». «Maintenant je le saurai. (dit le père ) Il peut suffire d’un mot pour ! ... Oui (dit-elle), pour que tout change ... pour qu’on s’entende ... pour qu’on puisse ... oui, n’est-ce pas ?»

La mère, sur ce demi-succès, pleine d’espoir, fera une autre tentative, mais musicale cette fois ; avec Boucourechliev ( musique électroacoustique ), Webern ( musique atonale ) pour finalement se rabattre sur Mozart. Vite, vite trouver un consensus qui réconcilie. Le père ne le supportera pas. Retour à la case départ.



Dans cette édition, une préface et un dossier enrichissent le propos de la pièce.

Ce souvenir d’enfance de l’auteur : «Je me rappelle quand j’avais une douzaine d’années, j’avais lu « Guerre et Paix « et cela avait été pour moi un tel bouleversement. En classe, on parle de Tolstoï et le professeur de littérature dit : Est-ce que quelqu’un , ici, à lu guerre et paix ? Personne ? Même pas vous, Nathalie, qui pouvez lire le russe ? « Je n’ai rien dit. parce que l’idée que le professeur allait se permettre de parler de cette «merveille», m’était insupportable. Il ne fallait pas qu’il y touche de près ou de loin dans un langage quelconque, qu’il effleure ça. Et qu’il demande, en plus, mon avis ! que je commence à parler de cette «merveille» avec des mots ordinaires.



Une belle réflexion des rapports que chacun d’entre nous entretient avec une oeuvre d’art (littérature, peinture, musique). De la difficulté de communiquer ses émotions. De se laisser convaincre par celles des autres. Quand le silence dit ce que les mots ne peuvent pas dire. Un silence pesant, constitué de toutes ces petites voix intérieures qui interviennent, à note insu, et chamboulent en nous des jugements que nous croyions arrêtés.

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Les Fruits d'or

N°1859– Avril 2024.



Les fruits d’or – Nathalie Sarraute – Gallimard.

Prix international de littérature en 1964.



Il s’agit d’un roman intitulé « Les fruits d’or », comme celui que signe Nathalie Sarraute, un roman dans le roman, une mise en abyme. Le véritable sujet est le roman lui-même dont parlent de nombreux intervenants. Il s’agit surtout de vilipender tous ces pseudo-intellectuels qui, souvent sans les avoir lus, se croient obligés de porter des jugements esthétiques variant de la dithyrambe à la critique au vitriol, de tenir des discours convenus avec force postures étudiées, sur des romans qui viennent de sortir, de faire état avec véhémence de leur avis souvent glané ailleurs ou qui se croient inspirés en baptisant « génial », « stupéfiant » ou « un chef-d’œuvre », un livre auquel ils n’ont rien compris, ou qui encensent un roman au seul motif que l’auteur est connu. Cela tient davantage à leur volonté de briller en société en formulant des jugements définitifs que d’entretenir leur culture ou de goûter la beauté d’un texte et ils ne tarissent pas d’éloges sur le talent de cet auteur, font des plans sur la comète sur sa carrière, clament bien fort leur soutien en exagérant l’importance de l’œuvre. Cela ne se limite pas aux best-sellers et notre auteure évoque un tableau de Courbet à qui cet aréopage réserve le même sort. Tout cela a un côté jubilatoire même si cet entre-soi prête beaucoup à l’ironie peut-être un peu facile.

Ce livre est pour moi l’occasion de renouer avec « Le nouveau roman » dont Nathalie Sarraute était un des auteurs emblématiques. Ce mouvement littéraire apparu dans les années 50 se caractérise par un récit assez neutre où il n’y a aucune trame, aucun rebondissement, ou les personnages sont flous, sans caractère particulier, qui éprouvent de la difficulté à se parler et à se comprendre. Il n’est même pas question ici de l’auteur du roman dont le nom, Brehier, est à peine mentionné. Le texte est narratif et emprunte souvent à la fiction, les personnages qui ici s’expriment n’ont aucune personnalité et l’écriture est sans recherche littéraire. La fin, souvent inattendue prend la forme d’une chute. Ici on peut considérer que « Les fruits d’or » finit par s’imposer, à être apprécié, même contre certains de ses détracteurs quand d’autres l’ont carrément oublié, l’oubli étant le lot de la plupart des romans.

Le nouveau roman a donc voulu révolutionner l’écriture. Je me souviens qu’un de mes professeurs de français qui, sceptique et quelque peu ironique, disait du nouveau roman qu’il avait la caractéristique essentiel d’être nouveau ! Qu’en reste-t-il aujourd’hui, quand Marguerite Duras, une autre auteure emblématique de ce mouvement, a obtenu un franc succès non démenti à ce jour, mais je ne suis pas sûr qu’elle ait toujours illustré ce mouvement au cours de son œuvre et deux auteurs couronnés par le Prix Nobel de littérature, Patrick Modiano et Annie Ernaux ont surtout parlé d’eux au point de tomber dans le solipsisme. Le nouveau roman a donc été une tentative de révolutionner la littérature qui en avait déjà connu beaucoup, alors pourquoi pas ? Depuis le début de son existence, le roman a déjà subi nombre d’évolutions, de l’humaniste au baroque, au classicisme, au romantisme, au naturalisme, au réalisme, au symbolisme...quant à l’Oulipo, l’expérience qu’il mène sur le langage est originale et cela n’a pas échappé au jury Goncourt qui a décerné son prix en 2020 à « l’Anomalie » d’Hervé Le Tellier, Alfred Jarry comme Georges Perec (cités par Sarraute à propos du mot « oneille ») ont eux aussi été tenté d’’y imprimer leur marque et ils ne sont heureusement pas les seuls.. Qu’en reste-t-il ? Je ne suis pas expert mais Il est certain que si les romans actuels racontent une histoire avec souvent un étude de personnages, le mode d’expression des auteurs, à quelques brillantes exceptions près, a globalement changé pour adopter un forme plus spontanée, proche du langage parlé, loin en tout cas d’un recherche d’images poétiques ou de vocabulaire.

Il reste que ce livre est jubilatoire, (pas celui dont parle Sarraute qui n’est qu’à peine évoqué, mais le sien) et parler ainsi d’un livre sans en rien dire reste une performance. C’est en tout cas pour moi l’occasion d’en connaître davantage sur ce « Nouveau roman » tout juste effleuré dans ma lointaine scolarité. C’est aussi peut-être une sorte de leçon à tous ceux qui parlent des livres des autres !
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Les Fruits d'or

Avec Les Fruits d'or, je fais une incursion dans le mouvement littéraire du Nouveau roman. Nathalie Sarraute est d'origine russe. Elle est née en 1900. C'est une lectrice de Virginia Woolf. En 1964, elle reçoit le prix international de littérature pour ce titre.

Je me réjouie d'avoir découvert ce mouvement littéraire de cette façon même si le premier tiers du roman m'a dépouillée de mes repères. Le thème de la littérature et de sa réception, m'intéresse, donc, je me suis laissée porter par la forme, le style et le rythme. Il y a un roman dans le roman. En effet, Bréhier est l'auteur de Les Fruits d'or. Nathalie Sarraute ridiculise la "haute société littéraire", leur tutelle sur ce qui est beau, sur les règles castratrices de la "bonne" littérature, une littérature pétrifiée. Elle évoque la difficulté pour les voix discordantes de se faire entendre mais surtout écouter. "La littérature est une œuvre d'art."

C'est assez jubilatoire.
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Le Planétarium

Alain et Gisèle Guimiet se trouvent plutôt à l'étroit dans leur appartement. Tante Berthe vit dans un cinq pièces dans lequel se verrait bien les Guimiet, d'autant que la brave dame vit seule, et on ne rajeuni pas, un appartement plus fonctionnel lui conviendrait bien mieux pensent-ils. Alors quand elle évoque à mot couvert la possibilité de quitter l'appartement, Alain qui a été très proche de tante Berthe dans sa jeunesse, n'aura de cesse de mettre la pression sur elle, d'envoyer son père comme émissaire et d'en venir à la menace pour que la dame âgée libère en vitesse l'appartement convoité. Et puis il y a cette Germaine Lemaire, une auteure en vogue qu'Alain a rencontré et qui lui a fait un accueil gracieux. Il s'imagine déjà avoir ses entrées chez l'artiste.



Le planétarium demande une certaine participation du lecteur, Nathalie Sarraute exploite sa technique de la sous-conversation, un infra-langage où la psychologie et la pensée intime des personnages précéde la formulation par la parole pour confirmer ou infirmer leur vrai mobile. On est pas toujours sûr de l'identité du locuteur, la révélation en est retardé. de plus on a des épisodes qui se répètent du point de vue de personnages différents mais avec un décalage chronologique. C'est surprenant à prime abord mais on s'y fait rapidement. le planétarium met en scène avec férocité les milieux bourgeois. Deuxième incursion dans le nouveau roman, à réitérer.
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Martereau

Lire Nathalie Sarraute c'est accepter de plonger dans une sorte d'abîme , c'est sortir de soi et de toutes formes d'individuation pour accéder à cet état du "juste avant" qui détermine notre relation au monde , ce moment où tout se joue avant l'acte ou la parole tissés par les fils invisibles qui relient l'ensemble du monde vivant , monde-racine de ces fameux Tropismes .



Martereau , un de ces premiers "romans" ( qui a dit plutôt anti-roman , Sartre il me semble ...) est une déclinaison de ces tropismes .



Alors parce qu'il faut bien quelque matériau , c'est à travers un jeune garçon maladif en pension chez son oncle et tante , doté d'une hypersensibilité que d'aucun qualifieront de pathologique , lui prêtant névroses en tous genres , que Nathalie Sarraute déploie toutes cette structure souterraine , cette "sous-conversation" , qui régit , alimente , les relations humaines ,

Oeuvre intimiste alors et dans la fibre psychologique ?

Non , et peut-être même pourrait-on parler d'anti-psychologie .



C'est un long monologue intérieur , fait de soubresauts , de changements de conscience , de perceptions fugaces , l'une chassant l'autre , ou plusieurs dans la simultanéité que se construit ce "roman" .



C'est une sorte de dépliement de la pensée du jeune narrateur qui s'imbibe de tous les états de préconscience des gens qui l'entourent . Position assurément inconfortable mais riche de toute l'essence des choses et des actes en devenir .



Si Nathalie Sarraute s'attache à planter ses "personnages " ou "anti -personnages" ( ce qui me semble plus juste ) dans un milieu bourgeois avec tous les codes et les travers présupposés , on devine aisément que c'est parce que celui-ci lui est plus familier( et par là-même plus facile à utiliser ). Mais il est certain qu'il ne faudrait en aucun cas y voir une simple satire sociétale , le décor et milieu n'étant en aucune manière la matière de son oeuvre . Ni même l'histoire qui n'est qu'un prétexte .



Encore une fois j'ai adoré l'expérience de lecture que nous propose cette auteure inclassable ( bien que classée dans le mouvement "nouveau roman " mais qui regroupe des écrivains si différents que je n'adhère pas à cette étiquette facile ) , je me sens incroyablement libre dans ces eaux à fleur de surface , dans le pressenti .

La fracture littéraire que constitue cette approche ,qui fut novatrice et reste unique encore aujourd'hui , place cette écrivaine parmi les plus grands génies littéraires .

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Enfance

Les souvenirs d'enfance à la sauce Sarraute sont plus des réminiscences constamment interrogées, examinées sous tous les angles, qu'un récit reconstitué après coup et un peu édifiant. C'est tout l'intérêt de ce livre passionnant sans jamais être ennuyeux, dont le parti pris très analytique renouvelle ce genre littéraire bien encombré, sans jamais effacer l'émotion et la poésie qui irriguent ses ouvrages les plus réussis. Une douce porte d'entrée dans le "nouveau roman", réputé difficile d'accès.
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Martereau

Ma bibliothèque regorge de titres classiques, lus pendant mes études de lettres, il y a trente ans, et jamais réouverts depuis. Nathalie Sarraute a été une découverte très forte de ces années. J’avais été scotchée par l’originalité de l’ovni qu’est Le planétarium. Parmi les folios jaunis que je possède d’elle, il y avait ce Martereau… Dans ce roman de 1953, Nathalie Sarraute nous plonge dans l’intimité d’une famille bourgeoise parisienne, nous plaçant principalement dans les pensées d’un narrateur, un jeune homme, un neveu maladif et fragile, qui a été recueilli par son oncle, sa tante et sa cousine. Ce neveu est assez mal à l’aise, attentif à chaque imperceptible signe qui ponctue les conversations, mouvements du visage, reculs, pauses, ton. Il présente à la famille son ami Martereau, un être plus naïf, plus sincère dans ses propos, dont tout le monde finit par faire grand cas. L’oncle est tellement séduit qu’il n’hésite pas à confier de l’argent à cet homme afin qu’il achète pour lui une petite maison de campagne. Martereau accepte. Aucun reçu n’est délivré et le comportement de Martereau peut tout à coup amener à douter de sa probité. A-t-on bêtement fait confiance ? Je n’avais gardé aucun souvenir de ce récit, un brin exigeant par sa façon d’être seulement situé dans les pensées des personnages. Il faut s’accrocher pour en suivre le flux, mais ce fut en réalité au final un régal. J’ai pensé à Proust pour l’écriture, mais également à la nouvelle du Collier de Maupassant pour l’histoire. Ce texte est d’une force inouïe, d’une grande ironie et d’une grande classe. J’ai aimé son regard acéré. Lit-on assez Nathalie Sarraute de nos jours ?
Lien : https://leslecturesdantigone..
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Tropismes

Un petit coup au moral. Voilà la seule chose que je retire de ce livre pourtant culte. À vrai dire, je viens tout juste de commencer ma lecture... qu'elle se termine déjà. À peine 80 pages. 80 pages en fait bien inutiles, car je n'ai absolument rien ressenti. C'est pour cela que je n'ai pas le moral. Je me dis que je suis passé à côté de quelque chose d'important, que j'ai manqué d'attention, que je n'ai pas su voir, comprendre, sentir...

Alors, je relis quelques chapitres (comme autant de paragraphes) et... toujours rien. Il ne se passe rien. Ni en moi. Ni dans le livre...

Eureka. Mais c'est peut-être cela l'idée ? C'est un livre sur le rien. Un rien que rien ne comble ni ne soustrait. C'est cela ? Haha, la bonne blague, quelle sacrée blagueuse cette Nathalie... !
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Enfance

Ce livre est en fait une promenade dans les souvenirs de Nathalie Sarraute. Elle essaye de retracer avec une délicatesse infinie les sensations que peut ressentir un enfant, ses peines cachées et ses joies.



Chaque phrase anodine s'enfonce, se grave dans la tête de l'enfant. Mais l'enfant est seule et malgré l'indifférence qui l'entoure, elle se forme son petit monde loin du monde des adultes. Elle trouve refuge dans les cours où elle peut enfin se considérer comme égale aux autres. Qu'elle importance qu'elle soit délaissée par sa mère Russe et Juive. A l'école, chaque élèves est considéré objectivement en fonction de ses points. Et c'est cet espace de liberté qu'est l'école qui lui permettra de se réaliser.
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Tropismes

N°1860– Avril 2024.



Tropismes – Nathalie Sarraute – Les éditions de Minuit.



C’est un recueil de vingt quatre textes courts et indépendants les uns des autres, paru en 1939 dans l’indifférence quasi générale après avoir été refusé notamment par Gallimard et qui ne connut le succès que vingt en plus tard lors de sa réédition. Ce détail relativise les choses quant au talent de notre auteure, cet ouvrage étant considéré comme fondateur du mouvement littéraire dit du « nouveau roman ». Il n’est pas interdit de penser que ces circonstances ont nourri la trame de son roman « Les Fruits d’or » paru en 1963. 

Le tropisme est une réaction d’orientation générée par un agent physique ou chimique, par exemple dans le cas du tournesol qui recherche le soleil. Au sens figuré, c’est un sentiment fugace, bref, inexpliqué face à un phénomène banal. Chaque texte s’attache à étudier la réaction d’inconnus, hommes et femmes, en contact avec leurs semblables, met en scène des personnages non définis, à peine esquissés, sans lien entre eux, juxtaposés, qui vivent un moment de leur vie d’une manière presque indifférente et qui se termine bizarrement dans une sorte d’expectative où rien ne se passe que des faits anodins, comme si l’intérêt de leur vie se résumait à une attente, à une immobilité (le verbe attendre revient souvent). Cette absence d’action se double d’une sorte de négligence, une sorte de lassitude face aux choses qu’on laisse se dérouler d’elles-mêmes sans qu’on fasse rien pour en modifier le cours. C’est le contraire du mouvement, un peu comme la tiédeur d’un dimanche après-midi qui distille l’ennui, la solitude, le temps qui passe inexorablement, mais aussi l’indifférence à l’autre quand la méchanceté qui est une des particularité de la nature humaine, ne vient pas bouleverser l’agencement de ce morne décor. Alors s’installe la peur de l’autre et aussi la haine, le plaisir de déranger sa vie, d’étouffer ses habitudes, ses espoirs avec des mots médisants, des actions malsaines parfois, pour le seul plaisir de se prouver qu’on existe ou d’exorciser sa propre lassitude de vivre. Cette vie artificielle s’étire, s’emploie à parler de tout et surtout de rien, à faire des plans sur la comète, à médire d’autrui, à exercer son imagination débordante et malveillante dans des domaines futiles et inutiles. Cette superficialité trouve aussi sa réalité dans la volonté de suivre la mode qui est à la fois changeante et frivole. Cette vie marginale, égoïste, ne se limite pas aux petites gens, ceux qui ne laissent aucune trace de leur passage, mais s’étend également aux intellectuels suffisants dont la conscience qu’ils ont de leur supériorité les distingue du commun, ceux qui trouvent dans la foi religieuse et ses rituels surannés une raison de vivre ou ceux que la culture enivre parce qu’elle entretient leur différence et leur en donne la certitude d’être différents, ceux qui se plaisent à croire que la vieillesse leur a conféré une forme de sagesse et donc d’importance avec des pouvoirs exorbitants ou que rien ne doit venir bousculer leur décor familier et immuable.

Il s’agit d’un essai dont la rédaction, cherche à redéfinir une nouvelle manière d’écrire, en réaction contre la seconde guerre mondiale, ses excès et ses violences, notamment la volonté nazie dont elle a été la victime d’exterminer les juifs.



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L'Ere du soupçon

C’est Stendhal qui a dit que “le génie du soupçon est venu au monde” et c’est Nathalie Sarraute, partisane farouche du nouveau roman qui fait sienne cette notion, en l’adaptant dans sa prise de démolition et de déconstruction du roman traditionnel. Dans cet essai théorique, publié en 1956, Sarraute appelle à un “soulèvement” contre le roman classique dont le modèle le plus illustratif est le roman balzacien ; ce type de roman d’après Sarraute, s’attache plus aux formes qu’à la réalité. Aussi importants que sont les éléments constitutifs du roman traditionnel, ils sont incapables de rendre à la réalité son vrai visage, sa vraie dimension.



L’intrigue, les descriptions, les dialogues, les personnes et leurs caractères… Tous ces éléments du roman classique ne sont que pur formalisme. Pour Sarraute, la réalité est ailleurs. Et cet “ailleurs” ce sont “les tropismes”. Les tropismes, pour elles, sont à la source secrète de notre existence, elle les définit comme des “mouvements indéfinissables qui glissent très rapidement aux limites de notre conscience ; ils sont à l’origine de nos gestes de nos paroles, des sentiments que nous manifestons, que nous croyons éprouver”, tout auteur qui veut rendre son roman plus réaliste doit mettre à jour ces tropismes. “L’ère de soupçon” est, en quelque sorte, la synthèse de toutes les idées de Nathalie Sarraute sur le nouveau roman, idées qu’elle a d’ailleurs admirablement appliqués dans toutes ses œuvres.
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Enfance

C'est avec pudeur et retenue que Nathalie Sarraute près de quatre-vingt après, évoque son enfance, avant que les souvenirs s’estompent dans les brumes du passé. Sa prime jeunesse est ballottée entre la Russie, son pays natal, l'Allemagne et enfin la France. Allusivement on comprend que son père s'installe en France et que sa mère retourne en Russie. Chacun refait sa vie. L'auteure reverra de loin en loin sa mère, distante et lunatique. C'est avec sa belle mère d'abord et une demi-sœur ensuite qu'elle devra composer. Elle n'est pas à proprement parlé maltraitée, mais sa belle mère lui rappelle qu'il elle est, sans égard pour son jeune âge, des mots qui blessent et fragilisent. Le père est aimant, mais pas assez présent.



Enfance est une oeuvre douce-amère, mis en musique par les deux voix de Sarraute, celle qui prend en charge le récit, et la conscience qui interroge, encourage, refrène. Un beau livre sur l'enfance, ses menus plaisirs, ses naïvetés, et son cortège de blessures, tout ce passif que nous lèguent nos parents.
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L'Ere du soupçon

Découvrir la théorie du "flux de conscience" et comment l'employer en littérature pour apporter un autre point de vue ou de la complexité au récit a été un choc pour moi.

J'avais sans doute déjà lu des romans qui employaient ce type de narration mais j'ai trouvé son analyse brillante.
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Enfance

Magnifique autobiographie ! L'auteur nous transmet de façon simple et belle ses souvenirs d'enfance. On est plongé dans la vie de cette petite fille avec ses préoccupations toutes simples et beaucoup moins. La forme du dialogue ajoute un vrai plus à la narration et permet de mettre une voix d'adulte rendant la voix d'enfant encore plus attachante !
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L'Ere du soupçon

Pour être précis, cette édition Folio regroupe quatre articles de Nathalie Sarraute sur la littérature : "De Dostoïevski à Kafka" (1947), "L’ère du soupçon" (1950) , "Conversation et sous-conversation" (1956) et "Ce que voient les oiseaux" (1956). En analysant les œuvres des auteurs qui ont contribué au renouvellement du roman moderne (Dostoïevski, Kafka, Woolf, Joyce ou Proust), Sarraute évoque les conséquences de ce renouvellement sur son œuvre, ainsi que sur celle de nombreux auteurs de son époque. Cet essai permet de poser un autre regard sur les fictions de Sarraute, non pas en les « expliquant », car la littérature n’est pas là pour nous expliquer quoi que ce soit, mais en montrant que l’auteure de Tropismes avait le souci constant d’offrir à ses lecteurs, à chaque parution, de nouvelles perspectives littéraires.
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Pour un oui ou pour un non

Il s'agit d'une pièce de théâtre. Je ne pense pas que j'aurais eu un quelconque plaisir à lire ce texte. Mais l'entendre! quel bonheur! surtout lorsque les interprètes sont J-L Trintignant et A. Dussolier.



Quelle finesse pour un sujet aussi difficile!



Le sujet : l'un des amis (ils n'ont pas de nom), on va dire Dussolier, est un homme plutôt introverti voire effacé, qui a tendance à fuir les mondanités, qui les méprise et qui n'a pas, sur le plan professionnel suivi une carrière époustouflante, ce dont il se fout éperdument ; l'autre, son ami de toujours, on va dire Trintignant, est un homme plus extraverti, qui a "réussi" dans sa vie professionnelle et familiale et qui a un caractère plus ouvert que son ami.

Trintignant s'aperçoit que son ami lui fait la gueule. Il ne comprend pas pourquoi et il l'interroge.



Au début, Dussolier déclare qu'il ne fait pas la gueule. Trintignant insiste tant et si bien que Dussolier finit par avouer que quelque chose l'a gêné, dernièrement, dans l'attitude de son ami.



Et Dussolier finit par avouer ce qui l'a gêné: un jour, explique-t-il, il s'était vanté devant son ami d'avoir réussi quelque chose, ou d'avoir entrepris quelque chose (je ne me souviens plus trop quoi); il avait oublié qu'il s'agissait pour son ami de quelque chose de tout à fait ordinaire. Alors qu'il se rendait subitement compte du côté ridicule de la situation, son ami, Trintignant, lui a répondu sur un ton (faussement ?) admiratif : "c'est bien...ça"!.



Et toute la première moitié de la pièce tourne autour de ce : "c'est bien....ça"!.



Trintignant dit: "et tu me fais la gueule, parce qu'un jour, je t'ai dit: "c'est bien ça"?

et Dussolier répond: "tu ne m'as pas dit : c'est bien ça! tu m'as dit: "c'est bien....ça"!



avec une suspension entre c'est bien et ça...



Nous, spectateurs, nous comprenons tout à fait ce que veut dire Dussolier. Nous comprenons que, dans ce silence, entre "c'est bien" et "ça", c'est le mépris qui s'est insinué...



Et les protagonistes vont même aller jusqu'à chercher de braves gens pour exposer devant eux la situation et leur demander, objectivement, si il y a lieu de rompre un lien d'amitié pour ce motif.



La question parait donc être la suivante : l'amitié peut-elle survivre au mépris?

Dussolier n'est-il finalement qu'un paranoiaque ? est-ce que, objectivement, on peut rompre un lien d'amitié sur des éléments aussi ténus ??

Sont-ce des éléments ténus ??

Ce petit décalage entre "c'est bien" et "ça" n'est-il pas la partie visible d'un iceberg; cet iceberg étant le relâchement du lien d'amitié entre les deux hommes.



Le récit se poursuit, et finalement, Dussolier, qui était l'accusateur, devient l'accusé. Trintignant se souvient de ce qui l'agace chez lui. C'est le genre donneur de "leçon de vie": Dussolier contemple...Contrairement au commun des mortels qui ne voient rien, lui, il voit ce qui est "là"; personne ne peut le comprendre..

Il est très énervant.

On comprend tout à fait ce que Trintignant critique chez son ami.



A la fin de la pièce on ne peut s'empêcher de se classer dans la catégorie "Trintignant" ou dans la catégorie "Dussolier".



Une oeuvre étonnante...qui, à mon avis, peut être surtout appréciée par la catégorie "Dussolier"! (Mes amis les contemplatifs, si vous voyez ce que je veux dire!).



Comment peut-on imaginer un tel sujet et le traiter avec une telle finesse, une telle justesse de ton ?



Un grand bonheur que vous pouvez visionner de suite...!

http://www.youtube.com/watch?v=N2MwpAWQxxg&hd=1



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