Citations de Sylvie Testud (167)
Celui qui craint la pauvreté, fuit le miséreux, celui qui craint la souffrance, fuit le malade, je fuyais les "laissés de côté". La peur de ressembler aux désoeuvrées me faisait les haïr. L'envie de me sentir différente me poussait à les dédaigner.
Pourquoi rien n'a l'air de ce qu'il est ? Pourquoi ce qui n'est pas logique se produit ? Ce qu'on attend n'arrive jamais ?
J’ai donc un père. Cette découverte que je fais à l’âge de trente-quatre ans est tardive, mais de taille. Que dois-je faire ? Trente-quatre ans que je réponds : « Je n’ai pas de père. » Devant les mines compatissantes, je réponds depuis trente-quatre ans : « Je n’ai pas de père, mais je m’en fiche, c’est comme ça. »
Affaire réglée, fin de discussion.
— Tu ne parles que de ta mère, et ton père ?
— J’en ai pas.
— Et ton nom ?
— C’est le sien, mais je ne le connais pas.
Ça m’a toujours agacée, cet intérêt des autres pour un homme, une histoire qui n’était pas la leur.
Il y a des gens qui ont des têtes à farce, et d’autres des têtes à sérieux. A douze ans, ma sœur aînée a une tête à sérieux pire qu’un adulte. Quand on a douze ans et une tête à sérieux comme la sienne, faut faire des canulars. C’est là que ça marche !
Elle ne me répond même pas. Elle tourne la tête de gauche à droite pendant cinq secondes. « Fais gaffe, quand même, de pas passer de tête à sérieux à tête à baffes. » Cinq secondes pendant lesquelles je la regarde et je me dis : « T’as de la chance d’être protégée par les autorités. »
Toutes ces choses qui font la vie lui sont étrangères. Cet homme n'est pas en vie. "Il" est un survivant.
Si le courage peut se mesurer à la hauteur de la trouille qui lui fait obstacle. Si le courage se quantifie. Si on peut juger le courage à l’intensité de ce qu’on doit surmonter, alors je m’autoproclame la fille la plus courageuse que je connaisse.
Valet de nuit d'Adrien. Offert par sa mère. Elle aurait dû lui filer la notice qui va avec le cadeau, il continue de "ranger" ses chemises par terre.
Se savoir vivant, c'est merveilleux.
Les "bonnes surprises", je n'en ai pas beaucoup de souvenirs. Chaque fois que j'ai baissé la tête, je me suis pris le poteau.
Moi, je trimballe un carnet. Dedans, je note toutes les broutilles qui rendent la vie insupportable, en l'occurrence à moi.
Même en ne laissant rien au hasard, le résultat n'est jamais celui espéré.
Les courses demandent un minimum de préparation si on ne veut pas en oublier la moitié ni y passer la journée.
N’importe quoi ! J’ai répondu n’importe quoi à toutes les questions au téléphone ! Cette journaliste a fait un entretien avec une débile mentale. Je n’ai rien compris à ce qu’elle demandait. J’ai éclaté de rire quand la réceptionniste m’a prévenue que j’allumais ma cigarette à l’envers. J’avais envie que ça finisse. Je fixais ma valise. Je me suis rongé les ongles. La main droite y est passée. J’ai répondu à côté de la plaque. Je voulais rentrer chez moi. Loin. Chez moi, c’est à cinq cents kilomètres. Je dois prendre le TGV. Mon rempart de sécurité. Je suis une personne neuve lorsque je foule le bitume parisien. Mon train part à 20 heures.
Si le courage peut se mesurer à la peur à surmonter, alors je me proclame la fille la plus courageuse du monde.
Selon Adrien, il vaut mieux voir son intimité déflorée, ses objets malaxés, ses secrets éventés, que de suer du matin au soir et du soir au matin.
Si je m'offre une femme de ménage, je ne colle plus au train d'Adrien, lavette à la main, dès qu'il mange une pomme, "si t'en fais tomber par terre".
Si je m'offre une femme de ménage, j'exhale d'autres parfums que le Paic-citron, l'ammoniaque ou l'eau de Javel.
Quand je suis seule dans l’appartement, je m’empêche de dormir pour écouter les bruits.
Je me suis toujours posé beaucoup de questions. Sur la vie, bien sûr, mais aussi sur l'utilité de notre existence. Qui sommes-nous dans l’univers ? A quoi servons-nous ? Quelle est notre importance dans cette immensité ? Tout ce qui fait l'essence de l'homme. Sa force, ses faiblesses. Ce qui le rend si fascinant.
Si on te claque la porte au nez, rentre par la fenêtre.
La guillotine n'a d'intérêt que si le condamné veut vivre !
Le mensonge est l'oxygène de la respiration sociale.