«
Exercices de joie » est le troisième volet d'un triptyque commencé avec «
Plus haut que les flammes » et poursuivi avec «
La main hantée »
La joie, mot totem brandi et assumé par
Louise Dupré tout du long de ce recueil. Joie qui a pour compagnons la souffrance et la détresse. Joie qui ne renonce pas et va de l'avant, malgré les catastrophes.
« Tu ne t'es pas demandé combien de temps on peut marcher à côté d'une joie qui n'est pas à soi. Tu t'es simplement levée et tu as avancé, comme s'il suffisait de mettre un pied devant l'autre pour éloigner la détresse. »
Vers libres et prose alternent pour une poésie de l'ordre de l'intime dont la voix sincère emprunte le « tu » pour mieux partager avec nous, lecteur, cette quête de la tendresse. « Donner un sens à la joie, est-ce une épreuve insurmontable ? »
« Tu te contentes de penser joie en souriant, tu vois encore petit, tu as si peu changé depuis l'enfance. »
Mais pour vivre, il faut aussi savoir garder la tête hors de l'eau. Supporter, oui, mais aussi s'insurger.
« Tu t'inscris dans l'humanité qui résiste sans hurler. »
On trouve de l'humilité dans ce retour sur une vie où le bonheur défile et se déguise.
« Tu as réussi/ à survivre/ toutes ces années
En devenant une fille/ de joies/ raisonnables
Souvent confondues/ avec le bonheur. »
La poétesse consacre plusieurs pages éclatantes sur la maternité, l'amour et l'enfant à protéger
« Tu devais protéger le monde dans l'indigence de tes bras. » Ce sera « la marche à l'amour » « car l'amour pour un enfant, il chemine comme il peut ».
Il y a urgence à résister à la violence lorsqu'on est mère car « l'amour d'un enfant …ça se loge sous la peau pour l'éternité d'une vie. »
Donner la vie mais, également, envisager sa mort sans renoncer car « il y a encore des paroles à déposer sur la détresse. »
Il y a de la sérénité dans l'acceptation de la mort à venir, parce que la mort ne signera pas le renoncement.
« Tu veux mourir humaine. Humaine comme aimante. »
Et la joie, « robe de lumière » la joie intimement liée aux morts, cette joie que tu appelles, « comme si elle pouvait te reconnaitre. Comme si tu commençais à lui appartenir. »
Louise Dupré est de ces poétesses qui ne renoncent pas, qui cherchent à s'élever au-delà de la détresse ; Et cette conviction profonde que tout reste possible sur terre est réconfortant, elle l'affirme avec simplicité et générosité :
« Tu ne crois pas au ciel, mais tu as toujours cru en la bienveillance de la terre, c'est là le mystère de ta foi. »
Cette poésie, lucide et puissante, est un bouleversant hymne à la vie et à la résistance. Après cette lecture, pratiquons nous aussi ces «
exercices de joie » avant qu'il ne soit trop tard.
Je remercie les éditions
Bruno Doucey et Babelio pour cette lecture.