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EAN : 9791041414765
240 pages
Points (02/02/2024)
3.77/5   64 notes
Résumé :
Années 2010, un journaliste vit de l’intérieur les convulsions de l’entreprise de presse pour laquelle il travaille depuis un certain temps : rachat, brutalité managériale, obsession du profit envers et contre tout... À l’occasion d’un plan de départs volontaires, il prend ses cliques et ses claques en saisissant au vol une opportunité de reconversion professionnelle. Mais, dans les méandres des organismes de formation qui sont un business à part entière, rien ne va... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (23) Voir plus Ajouter une critique
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En 10 chapitres, Éric Faye raconte le lent démembrement économique et humain d'une entreprise de presse mondiale, plus vraie que nature.

Attention bijou !

Je n'aime ni l'économie, ni les histoires relatives au " grand capital ". Et pourtant, j'ai été totalement séduite par ce roman au titre emprunté à notre président de la République.
« Je traverse la rue et je vous trouve un travail » est une petite phrase apocryphe, reprenant une phrase prononcée par Emmanuel Macron le 15 septembre 2018 sur le fait de trouver un travail : « Je traverse la rue, je vous en trouve ».

Notre « héros », Aurélien Babel, 57 ans, " hypersensible, froussard et poète " mais aussi et surtout journaliste chez MondonNews, dresse un autoportrait doux amer. Ce personnage - presque réel - nous parle sans complaisance du déroulé des événements survenus dans son service de rédaction qui font montre d'une guerre économique assez terrible, livrée ici dans toute sa splendeur mais aussi avec démesure contre ses employés.

Guerre propre et lente, méthodique toujours, décrivant le poison progressif annihilant une entreprise et les plus vulnérables. Dans ce réquisitoire, personne n'est épargné. Ni la grande machine, ni les employés pourtant sages et fidèles (mais aussi lâches et vils), ni le business de la formation, ni le système politique « pourri de l'intérieur », ni « la gauche ma douleur », et encore moins son personnage principal, « cet homme qui ne se pose pas en s'opposant et qui louvoie ».

Bref, tout le monde en prend pour son grade. Situé entre la plume désespérée et lucide de Jean-Paul Dubois et l'humour mélancolique et coincé de Fabrice Caro, il y a l'épopée labyrinthique d'Éric Faye, et Aurélien Babel, le « pauvre » journaliste « rêveur d'élite » qui dépose avec justesse son « parcours du combattant pour réussir à perdre son emploi ».

Soyons clair… ce n'est pas le sujet qui m'a touché, c'est le traitement que l'auteur en fait. Sa langue riche, son style oscillant entre phrases impeccables et esprit gouailleur multiplient les mots d'esprit et les expressions imagées, et je m'en suis délectée.

Il établit la radiographie sociologique d'une France malade de ses dirigeants politiques, patronaux et de ses actionnaires sans scrupule.
Ce n'est pas triste, c'est un texte d'une intensité rare, souvent « amusant », il est écrit comme un témoignage, un journal intime, un hommage « aux autruches de la classe moyenne ».

Merci à Babelio et aux Editions du Seuil de m'avoir choisie pour découvrir ce roman très largement appréciée.

Lien : http://justelire.fr/il-suffi..
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Il suffit de traverser la rue. Ce titre ne rappelle-t-il pas la phrase d'un certain EM ? Il est donc évident que ce livre parle du monde du travail et du chômage. Un journaliste va accepter la reconversion sociale que propose l'entreprise dans lequel il travaille. Aurélien, 57 ans, a un bon salaire, est dans le genre un employé modèle. Comment réagir face à ce qui semble du grand n'importe quoi ? C'est absurde, drôle, triste et tellement actuel ! Bien apprécié le ton de l'auteur mais trop attendu, après l'avoir fini, pour faire dans le détail.
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En dix chapitres incroyablement justes, l'auteur narre le destin d'Aurélien Babel, 57 ans , journaliste à Mondonews , depuis presque toujours ———-hypersensible, froussard et poète,—— une entreprise de presse «  mondialisée » , se retrouvant au chômage à l'issue d'un plan social, licencié avec trente de ses collègues, pourtant correctement rémunérés , à l'image de notre héros ( une certaine classe moyenne voire supérieure ).


Je ne suis pas coutumière de l'économie ni familière des histoires du Grand Capital et pourtant j'ai été séduite .
L'auteur pointe avec justesse et sans complaisance les enjeux de la mondialisation de l'information et de la précarisation du métier .

Mais ce roman ne s'adresse pas seulement à l'entre - soi de cette profession , bien au contraire , mais plutôt à l'ensemble du système social .

Au fil du roman l'auteur décortique avec grâce , drôlerie , ironie savoureuse la chronologie de la perte d'emploi , vécue au jour le jour, pas à pas , par Aurélien et ses collègues.
Les signes annonciateurs, apparemment bizarres , comme l'externalisation de l'assistance informatique à Chandannagar en Inde,

l'ambiance exécrable dûe aux rumeurs fondées ou non , les ravages , l'abattement , la stupeur lorsque le couperet tombe , la volonté , bien vite oubliée de se rebeller , l' obsession du profit envers et contre tout , les grandes et toutes petites lâchetés afin de tenter de s'en sortir mieux que ses collègues, la course aux indemnisations, les pires méandres de l'accompagnement dans la reconversion professionnelle , la formation au Pôle Emploi, des séances de coach irrésistibles de drôlerie , nimbées pourtant de tristesse.

La galerie de personnages ——victimes collatérales de la mondialisation ——-sont dépeintes de façon très précise, observées avec minutie , cette classe moyenne, en fait très peu armée pour faire front , incapable de se mobiliser, face à ce type de méthode , résister à cet asservissement volontaire.

Et n'oublions pas la réponse du Président de la République face à un jeune chômeur , lors des journées du patrimoine 2018 : «  Je traverse la rue et je vous en trouve , du travail » .
C'est ce titre qui m'a fait emprunter ce livre à la médiathèque.
J'avais lu avec bonheur en 2017 : «  Eclipses-japonaises  » .

Un roman brillant , éclairant , sur un mode grinçant , drôle , un tantinet désespéré à propos de la vie au travail, l'ordinaire néo - libéral..
Rien de bien neuf, dans le monde décrit par Éric F.
La presse, le cinéma nous racontent , chacun à leur façon, comment beaucoup d'entreprises démantelées , délocalisées, contraignent leurs employés à changer de métier
C'est d'une tristesse terrible …. ….
Un ouvrage social, grinçant, avec ce qu'il faut d'humanité et de retenue qui souligne l'absurdité des situations et ces mécanismes implacables .

Le héros dit «  À ma façon , je suis la foule » .
«  Cette foule qui a perdu le sens du combat . Elle s'est résignée » .
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C'est un regard plutôt triste mais aussi terriblement juste que pose Eric Faye sur notre société à travers le prisme d'une entreprise de presse "mondialisée" et de ses employés basés en France. Il ne s'agit pas ici du monde ouvrier plus souvent pris pour thème par les écrivains, ni même des contrats précaires mais d'une certaine classe moyenne (voire moyenne supérieure) matérialisée ici par des journalistes confirmés, ancrés dans leur entreprise depuis des années, correctement rémunérés, à l'image du héros, Aurélien Babel rédacteur chez Mondonews depuis presque toujours et qui observe de façon assez léthargique les transformations de son environnement. de toute façon, lui, ce que l'intéresse c'est de préserver du temps pour écrire des poèmes, alors il a savamment écarté toute opportunité de progresser. Depuis l'entrée en Bourse de l'entreprise de presse, la pression budgétaire se fait sentir. Des petites choses qui agrémentaient le quotidien sont supprimées, comme la livraison hebdomadaire de la corbeille de fruits ou l'arrosage des plantes. Plus ennuyeux, le support informatique est regroupé en Inde. Et puis, plus grave, les rumeurs font état de transferts de services entiers vers la Roumanie ; il y avait déjà eu le coup de la jeune recrue envoyée sur la côte ouest des Etats-Unis pour éviter de passer une partie de la veille en horaire de nuit (malin). On commence à parler de plan de départ, d'indemnités... Classique.
Classique mais ce sur quoi Eric Faye met l'accent c'est le renoncement d'individus pourtant habitués à manier l'information, à la challenger, bref à faire travailler leurs neurones. le renoncement face à la grosse machine capitaliste mondialisée et ses méthodes de management bien rodées et surtout repérables de loin. Et si tout le monde refusait ? se prend à rêver Aurélien, si on se mettait tous en grève ? Ce qui se dessine est bien loin du combat. Chacun calcule, se prend à rêver d'un break voire d'une pré-retraite déguisée - après tout on l'a bien mérité après toutes ces années à jouer les bons petits soldats - et la compétition s'engage même entre les volontaires puisque les places sont limitées. le système avance, droit dans ses bottes, sûr de lui. Et ça marche...
Oui, le constat est triste, cette résignation a quelque chose de moche et d'emblématique d'un état d'esprit général ; c'est très justement mis en musique de la part de l'auteur (le côté gentiment kafkaïen du parcours entre cabinet d'aide à la conversion et conseiller pôle emploi, le cynisme assumé du système), son Aurélien Babel est terriblement humain dans ses faiblesses et sa façon de se convaincre qu'il fait pour le mieux. Tous ceux qui ont un jour travaillé dans une grande entreprise avec ce type de pilotage et d'enjeux financiers ne pourront que reconnaître la troublante ressemblance avec des situations ou des personnages ayant existé. L'exercice littéraire permet d'en souligner les contours et de donner à percevoir les émotions et sentiments contradictoires face à ce type d'environnement. C'est parfaitement réussi.
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A travers le portrait d'un journaliste qui va être licencié après 30 ans de bons et loyaux services, Eric Faye porte son regard à la fois ironique , lucide et désespéré sur le monde du journalisme et les turbulences que connaît ce secteur d'activité aujourd'hui.
Aurélien Babel subit de plein fouet la mondialisation
« A ma façon je suis la foule,
Je suis une part de la foule, cette part qui, dans les années 2010, forme sans doute la première génération à avoir aussi peur en temps de paix »

Dans ce récit Eric Faye s'attaque au capitalisme contemporain et l'étrange « passivité » qu'il suscite.

Son entreprise va changer ses méthodes de gestion :
La plupart des services supprimés et certaines activités journalistiques délocalisées dans des pays de l'Est de l'Europe ou en Inde.

« Arrêtons nous un instant sur Constanta, qui soit dit en passant, se prononce quelque chose comme « Constandza ».
Le grand port roumain sur la mer noire et la deuxième agglomération du pays, après Bucarest. Depuis quelques années, considérant que Chandannagar ne pouvait remplir la totalité des missions touchant l'Europe, MondoNews avait créé un hub dans la partie orientale du vieux continent, appelé à traiter de plus en plus de tâches retirées aux gros salaires d'Europe de l'Ouest. « Le Chandannagar de la mer Noire », comme on l'appelait déjà… Ceux qui nous dirigeaient du haut des tours de Seattle ne semblaient s'intéresser à cette région du monde que pour ses salaires de misère et son droit du travail magnifiquement préhistorique. Les faire trimer pour rien, ces Untermenschen d'ex-communistes, les faire trimer bien plus que ces avachis de Frenchies… »

Eric Faye met en scène la manière dont la méfiance infuse entre les différents salariés : chacun craint pour sa place…

Suivra le plan social très « conditionné » et agrémenté de critères de départage …

« j'ignore pourquoi il ne s'est rien passé ce jour-là.
Pourquoi aucun des recalés n'a allumé la mèche de la connotation.
Je ne me l'explique toujours pas. Faut-il l'imputer à notre propension au mimétisme - j'entends par là une forme d'inertie en vertu de laquelle si les uns ne bougent pas, les autres les imitent ? "

Cette tragédie moderne est dénoncée avec beaucoup d'humour mais aussi du désespoir face au renoncement
à se battre...












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critiques presse (4)
Telerama
20 février 2024
Eric Faye pointe avec justesse les enjeux de la mondialisation de l’information et de la précarisation du métier, c’est l’ensemble du système social qui est ici décortiqué, avec toute la grâce de l’écriture romanesque.
Lire la critique sur le site : Telerama
OuestFrance
06 mars 2023
Éric Faye, lui, livre aussi un portrait de la vie au travail, mais sur un mode plus grinçant et désespéré, quoique très drôle. Son titre, Il suffit de traverser la rue, fait référence à la fameuse phrase lancée par Emmanuel Macron à un jeune horticulteur en mal d’emploi.
Lire la critique sur le site : OuestFrance
Marianne_
06 février 2023
Doté d'un titre en référence à une déclaration d'Emmanuel Macron sur les chômeurs, le nouveau roman d'Éric Faye est une fable grinçante sur l'ordinaire néo-libéral.
Lire la critique sur le site : Marianne_
LeFigaro
06 février 2023
Le livre d’Éric Faye n’a rien d’un tract syndical. C’est une œuvre d’art.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
«  Souvent, dans les romans ou dans les films sur le monde du travail, des salariés à bout séquestrent leur patron dans son bureau. Ils alertent les médias .Ils badigeonnent les murs de slogans rouges ou noirs pour que les téléspectateurs se repaissent d’images fortes le soir, au journal télévisé .

Ou bien, autre ressort dramatique, il arrive qu’un employé un peu plus à bout que les autres se défenestre sur son lieu de travail.
La tension est à son comble.
Manifestations, grands serments d’unité s’ensuivent. Soudés , les faibles l’emportent.
Larme à l’œil chez les lecteurs ou téléspectateurs car, depuis toujours , on aime voir David venir à bout de ce salaud de Goliath » .
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A la veille de mon rendez-vous, j'ai consulté leur site internet. "Opportunities : des conseillers éclairent votre avenir". Sur la page d'accueil, il était proposé de « Démarrer son outplacement » ou de développer des «comportements de leadership ». On vous suggérait « d'oser le coaching » et vous parlait d' « exploitation de réseau ». Qu'allais-je faire dans ces bureaux et que trouverais-je à leur dire ? Il le fallait bien pourtant. Les photos qui illustraient "outplacement" et "leadership" prêtaient à sourire : les hommes y portaient cravate bleu marine et chemise blanche, bleu pâle à la rigueur. Quant aux femmes, elles étaient en tailleur, fines et grandes. La jupe était de rigueur. Parité absolue : un homme une femme, un homme une femme ; et sur dix photos, quatre blancs mais aussi quatre noirs et deux asiatiques. Les femmes étaient bien roulées et les hommes baraqués, parfaitement proportionnés. Et tout ce petit monde échangeait des sourires. C'était "cool" et sacrément "fun", chez Opportunities
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Aussi avons-nous appris à nous méfier d'eux. [Les Anglais] suscitent l'animosité. Ils sont notre cible favorite, avec des blagues comme celle-ci :
"Pourquoi dit-on que le soleil ne se couchait jamais sur l'Empire Britannique ?
- Parce qu'on ne peut pas faire confiance à un Anglais dans l'obscurité."
Nous citons aussi Swift l'Irlandais : "Brûlez tout ce qui vient d'Angleterre, sauf le charbon."
(p. 91)
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«  Je suis une part de la foule, cette part qui , dans ces années 2010, forme sans doute la première génération à avoir autant peur en temps de paix.
Non pas peur que la guerre éclate , ce n’est pas ça …..

Peur de la Paix…

La paix comme offensive soft pour chasser l’humain du monde qu’il a engendré .
Oh! Il n’y a rien à dire: c’est une guerre propre , et lente, méthodique .

Et sans merci. L’homme civilisé est apparu au début de l’holocène, et n’aura besoin ni de l’arme atomique ni du dérèglement climatique pour parvenir à ses fins »….
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«  Qu’as - tu fait de ta vie, mon vieux, depuis la dernière fois?
De notre vie? .
Il y a une grande part de nuit en chacun de nous, je crois.
À ne pas confondre avec «  La part d’ombre » , bien sûr.
La «  Part de nuit » , c’est ce qui nous reste d’instinct et d’intuition, sous une chape de rationalité .
Notre part chamanique, qui échappe à la Machine et aux tentations de domestication. » .
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Videos de Éric Faye (20) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Éric Faye
Le romancier et essayiste Eric Faye sera au Belvédère du Rayon Vert de Cerbère du 11 septembre au 9 octobre, pour une « résidence duelle transfrontalière ». Organisées par les Rencontres cinématographiques internationales Cerbère-Collioure, ces résidences interrogent la notion de frontière en invitant concomitamment deux écrivains ou écrivaines, l'un(e) de langue française à Cerbère et l'autre de langue espagnole ou catalane à Portbou – Yolanda Gonzalez cette année.
Crédit de la vidéo : « Rencontres cinématographiques de Cerbère-Collioure ».
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