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EAN : 9782494062351
288 pages
Editions Fugue (05/01/2024)
4.04/5   12 notes
Résumé :
Au temps où la banlieue était à la campagne, on rencontrait parfois sur les marchés des dresseurs de rats. C’est le métier d’Urbain, qui habite un petit pavillon avec sa fille Paulette, surnommée Belette. Sa rencontre avec Modard, acrobate de cirque, et leur complicité scellée autour de quelques bouteilles de sauvignon vont infléchir leur destin : sauront-ils ensemble déjouer les affreuses manœuvres qu’un voisin ourdit au fond de son hangar ? Élucider la mystérieuse... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Un petit moment de bonheur, la lecture de ce roman de Jean-Pierre Ancèle « Rose museau ». A moins que vous soyez allergique à la bébête, n'hésitez pas à vous le procurer.
Cocasse, truculent, un peu déjanté, tous les ingrédients sont présents pour passer un agréable et amusant moment avec des dialogues mitonnés aux petits oignons.
Aux temps où la banlieue (parisienne) était à la campagne, sur les marchés, on rencontrait des attractions pittoresques.
Urbain ne déroge pas à la règle, il est dompteur. Ah oui, dompteur d'ours, me direz-vous ? Que nenni, dompteur de rats. Il côtoie le père Mistol avec sa chorale d'oiseaux et Bourfre le vendeur de chats, quelle ménagerie ! qui ne fait pas forcément bon ménage.
Ce jour-là, l'attraction d'Urbain a attiré une dizaine de badauds, deux rats progressent sur une planche longue de trois mètres et arrivent sur la petite plateforme que forme l'un des deux escabeaux aux extrémités, rejoints bientôt par trois autres. le dresseur émet quelques sons gutturaux et de brefs sifflements et tire de sa poche une guimbarde, oreilles et moustaches frémissent : « les cinq rats entamèrent sur la plateforme une curieuse chorégraphie qui s'ouvrit sur une ronde, puis le premier tourna sur lui-même avant de sauter par-dessus les quatre autres arc-boutés côte à côte, en appui sur le museau et les pattes arrière. La figure achevée, les rats firent le tour de la plateforme pour finir assis comme des enfants jouant à la chandelle ».
Pendant ce temps, seul dans sa cage un gros rat semble dormir, museau dans le ventre. Urbain raconte à Modard , un spectateur avec qui il a entamé une discussion, qu'il n'ose plus sortir ce dernier. Un mois plus tôt, ce rat facétieux s'est échappé pendant l'exhibition de ses congénères et a infligé les pires outrages aux chats enchainés du père Bourfre parti soulagé sa prostate et mangé des saucisses. Pourtant, c'est la star, le clou du spectacle « triple pirouette renversée amorcée par un pivot espagnol et terminé par une double roue vrillée », et cela le désole d'autant plus.
Une idée germe dans la tête de Modard, cet ancien trapéziste de cirque qu'un malheur a désoeuvré. Il veut en entretenir Urbain et se trouve à le raccompagner chez lui. Les deux hommes s'attablent autour de bouteilles de Sauvignon pour parler du projet. L'alcool aidant les langues se délient et les deux protagonistes se racontent leur vie peu commune. Modard fait la connaissance de Paulette surnommée Belette, la jeune fille d'Urbain, gentillette mais qui a un problème avec la grammaire et la syntaxe et d'un inquiétant voisin Mompro…, affublé de lunettes en yeux-de-guêpe, qui
transforme, dans le hangar de la propriété, des carcasses récupérées en une étrange mixture.
Modard réussit, enfin, à expliquer à Urbain son projet, il envisage de faire un numéro de voltige avec notre rat vedette.
Rassurez-vous, les méchants seront châtiés !
De cet univers loufoque, certains resteront, peut-être, à la porte mais pour moi c'est un grand oui. Classé roman noir mais sortant des sentiers battus, avec ces trois personnages principaux attachants, sa lecture fut pour moi un moment de légèreté, un comble pour ce type de littérature.
Merci à l'agence Trames et aux Editions Fugue, pour cette évasion.
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Un texte très surprenant et qui ne manque pas de mordant !

On identifie rapidement l'auteur des réflexions en italique, ce qui confère au récit un petit quelque chose de magique. Mais ce qui fait tout l'attrait de ce roman étonnant, ce sont les dialogues. Originaux par l'art qu'a l'auteur de restituer les travers de langage des personnages, par l'humour parfois un peu noir qui transparait au détour d'un paragraphe, par l'originalité du sujet et au second degré la morale que tout cela implique.

C'est très réussi, déstabilisant à souhait et attachant par le charisme des personnages. La description habile et drôle d'un microcosme inattendu, qui restitue également l'ambiance particulière du coeur du vingtième siècle.

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Le portrait de la première de couverture
m'a tout de suite tapé dans l'oeil :
un drôle de type l'air rongeur aux oreilles décollées
affublé d'un petit nez rose et humide
chaussé d'une paire de lunettes de soleil
habillé d'un perfecto et d'un col à Mao.
Top ! Tout l'air d'une souris déglinguée.
En espérant que ce ne soit pas une souricière,
je tente mon coup à la Masse critique de Babelio
et reçoit ce Rose museau qui est vraiment au poil !
En fait de souris, c'est un gros rat qui est à l'affiche.
En plus d'être fortiche, c'est la terreur des chats
et il s'avère aussi bien plus malin que les humains...
Ce Rose museau de Jean Pierre Ancèle
a vraiment de la gueule et de la gouaille !
Les dialogues font souvent mouche,
les grenouilles jouent de la trompette,
les belettes s'embrouillent avec la syntaxe
et recherchent désespérément Félie qui n'est plus ici aussi,
les dresseurs de rats dératent, les acrobates font le cirque,
les hercules de foire nous tordent de rire
et les rats mènent une drôle d' enquête !
Un univers déjanté et de haute voltige comme je les aime.
Après le clap de la fin, je sens encore ce Rose museau frétiller...
Je remercie masse Critique Babelio et les éditions Fugue pour la découverte
de cet auteur que je vais, de ce pas, suivre à la trace.
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Un numéro époustouflant

Un rat qui nous livre ses confidences est la vedette de ce premier roman. Jean-Pierre Ancèle, qui retrace la genèse d'un numéro de cirque jamais tenté à ce jour, réussit son entrée en littérature avec un conte plein d'humanité et des dialogues joliment ciselés.

Ce matin au marché, Urbain, un dresseur de rats, propose son numéro au public. À son affaire, il réussit à récolter quelques piécettes dans la soucoupe qui circule parmi les spectateurs. Mais, il faut le souligner, la prestation du jour n'a rien d'exceptionnelle, d'autant que le rat le plus doué de la troupe est laissé au repos. Accusé d'avoir attaqué violemment à un chat, il est séparé de ses congénères.
Mais Modard, qui a assisté avec gourmandise au spectacle, reste convaincu du potentiel de cet animal. L'ancien trapéziste va se rapprocher d'Urbain et, après lui avoir raconté sa tragique destinée – il a perdu sa compagne et son gagne-pain quand son partenaire a laissé échapper sa compagne d'un trapèze situé à 8 m du sol – va lui proposer de s'associer pour créer un spectacle totalement inédit. Un numéro d'acrobatie associé à un rat.
Un projet qu'il va pouvoir détailler au dresseur qui a accepté de le prendre dans sa camionnette et de l'inviter chez lui.
Enfin, chez lui, c'est aller vite en besogne. La maison, le hangar et la cave où se trouvent les cages des rats sont à Bourfre, un homme peu commode qui peut chasser la petite compagnie à la moindre occasion. Mais pour l'heure Urbain et sa fille Paulette, que tous appellent Belette, peuvent encore profiter du domaine, même si l'entourage n'aime pas savoir tous ces rats à proximité.
La belle idée de ce roman, c'est de donner la parole au rat. Une sorte de contrepoint aux certitudes du dresseur, persuadé de son talent et d'un savoir-faire hors du commun, affirmant même qu'il était parvenu à décrypter le langage de ses bêtes de concours. La version de l'animal est bien différente, soulignant les défauts des uns, les préjugés des autres. Ce faisant, il va aussi faire état de suffisance, mais après tout, il reste l'acteur principal de cette tragi-comédie.
Soulignons que pour son premier roman, Jean-Pierre Ancèle fait montre d'une belle habileté à tricoter des dialogues qui entraînent le lecteur avec bonheur dans cette fête foraine. On s'amuse, on s'indigne, on se laisse emporter d'une émotion à l'autre tout au long de cette quête d'un numéro qui fera date dans les annales des arts du cirque.
NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu jusqu'ici! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre. Vous découvrirez aussi mon «Grand Guide de la rentrée littéraire 2024». Enfin, en vous y abonnant, vous serez informé de la parution de toutes mes chroniques.

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Il faut rendre à César ce qui est à César. Même quand il s'appelle Jean Jacques.
Sans mon libraire, je n'aurais sans doute pas jeter un regard sur le museau de ce bouquin même si son pelage ne passe pas inaperçu en rayon.

On y croise un dresseur de rat, un trapéziste à la recherche d'un nouveau partenaire, une Paulette appelée Belette, des seconds rôles qui en valent des premiers et surtout des rats dont le plus doué semble goûter la compagnie sexuelle des chats.

Un roman qui déborde d'inventivité tout en assumant un côté rétro, façon banlieue parisienne et gouaille franchouillarde. Un travail d'équilibriste rondement mené, porté par une profusion de dialogues au poil.
Pour faire un parallèle cinématographique, je le verrais bien dans la filmographie de Jeunet et Caro, à la confluence du réalisme poisseux, du burlesque et de la poésie.

Difficile de classer la bête dans un style. Sa place se trouve quelque part entre le noir léger et le rose profond, juste à côté des romans de janvier à ne pas manquer.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Un rat échappé, ça arrive. Les miens, sans me vanter, jamais. Avant ce coup-là, je veux dire. Qu’est-ce qu’ils iraient faire ailleurs, je vous le demande. On s’entend bien, eux et moi. Et puis je les ai à l’œil. Mais celui-là, il m’avait piégé à faire semblant de dormir. Pendant que j’étais parti lui courir après, les autres attendaient. Mettez-vous à leur place, ils ne savaient pas s’ils devaient continuer ou s’interrompre jusqu’à mon retour. Ils faisaient la gueule quand je suis revenu, surtout qu’en plus il a fallu remballer dare-dare avant la fin du numéro.
— Mais, les circonstances... concéda Modard.
— Arrêter un numéro en plein milieu, vous imaginez ?
— Ça, il faut des circonstances...
— On est d’accord, et là, question circonstances, j’étais servi. Ça ne fait rien, ils n’étaient pas contents. Conscience professionnelle. C’est qu’ils travaillent dur, vous savez. Et ils ont leur fierté, leur fierté d’artistes. Mais le père Mistol avait entendu Bourfre dire qu’il allait me crever, et mes rats aussi. C’est un sanguin, ce type-là. Remarquez, ça se comprend, avec ses chats tout bancals, plus un seul qui pouvait tenir seulement assis. Et impossible de les approcher. Même après lui, ils en avaient.
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Les premières pages du livre
Indécis toujours, Modard fit un pas en avant. Pantalon noir collant à ses maigres jarrets avec, aux pieds, semblables à des chaussons de danse, de fines chaussures de toile noire, l’homme, qu’il voyait de trois quarts, semblait d’un autre temps. Une tignasse rousse, serrée, presque rase, lui tapissait le crâne et la nuque puis se perdait dans le col élimé d’une redingote grise boutonnée jusque sous le menton. À ses chevilles en grosse pelote de poils, trois rats blottis les uns contre les autres attendaient qu’on ouvre leur cage. La couleur de leur pelage évoquait celle de la redingote. Un quatrième, séparé de ses compagnons par un solide grillage, semblait profondément endormi.
Autour du dresseur, une dizaine de badauds, nez en l’air, suivaient la progression de deux rats le long d’une étroite planche longue d’environ trois mètres, posée à chacune de ses extrémités sur la petite plateforme de deux escabeaux de bois. Sûrs de leur affaire, les rats avançaient sans hâte. Le premier faisait quelques pas, s’arrêtait, regardait devant lui, sur les côtés, vers le sol, semblait d’un bref coup de museau évaluer la distance à parcourir puis reprenait sa progression. Il ne se retournait jamais. Non loin derrière, le second rat suivait sans impatience. Il n’avait pas à se préoccuper d’éventuelles embûches, l’autre s’en chargerait.
Aussi pouvait-il considérer tout à loisir les spectateurs en dessous.
Comme la fois précédente, Modard ressentait un curieux malaise. Aucun doute, le rat passait les spectateurs en revue, comme s’il avait eu l’intention de se souvenir d’eux.
À quoi est-ce que ça peut penser un rat avançant en équilibre sur une planche au-dessus des gens?
Est-ce que ça pense? tentait de se rassurer Modard.
Soudain, le premier rat glissa, faillit tomber entraîné vers le bas par son cul qu’il avait gras, mais, enfonçant ses griffes dans le bois, il réussit un habile rétablissement. Il se hissa de nouveau sur la planche, reprit l’aplomb et se remit en marche, toujours suivi de son compère plus curieux qu’inquiet.
Alors là, on peut dire que ça a été moins une. Je leur ai pourtant montré. Combien de fois ? Bon, enfin, y a pas de bobo. Heureusement qu’il l’entretient, sa planche. Pour ça, on ne peut pas dire, il est sérieux, Urbain.
En dessous, les badauds s’étaient reculés. Pas envie de se prendre un rat sur la gueule.
Parvenus à l’extrémité de la planche, les deux rats s’assirent sur la plateforme. Immobile jusque-là, le dresseur plaça devant eux un morceau de quelque chose qu’ils se mirent aussitôt à lacérer et dont il ne resta bientôt plus trace. Ils ont fait des progrès. Faut dire, je les ai fait bosser ces deux-là. Les autres aussi, mais eux, ils passent en premier, alors, hein, pas de faux pas.
Prêts à entrer en scène à leur tour, trois autres rats sortirent alors de la cage, gravirent rapidement à la queue leu leu les barreaux et rejoignirent les deux autres sur la petite plateforme.
Seul dans la cage au pied de l’échelle demeurait derrière la grille de séparation le rat qui semblait dormir, museau dans le ventre.
La consigne ne tarda pas. Modard entendit le dresseur adresser aux trois rats quelques sons gutturaux mêlés de brefs sifflements aigus. Rien là d’un véritable langage, pourtant il ne faisait aucun doute que le dresseur communiquait avec ses bêtes. Immobiles, oreilles et moustaches tendues, museau pointé vers le dresseur, les animaux lui accordaient toute leur attention. Le dresseur se tut et tira de la poche de sa redingote une guimbarde qu’il pressa contre ses incisives. Oreilles et moustaches semblèrent frémir davantage. Les vibrations de la lamelle d’acier montèrent crescendo des dents du dresseur tandis qu’il esquissait un pas de danse. Reprenant ce pas, les cinq rats entamèrent sur la plateforme une curieuse chorégraphie qui s’ouvrit sur une ronde, puis le premier tourna sur lui-même avant de sauter par-dessus les quatre autres arc-boutés côte à côte, en appui sur le museau et les pattes arrière. La figure achevée, les rats firent le tour de la plateforme pour finir assis comme des enfants jouant à la chandelle.
En bas, les gens applaudirent avec enthousiasme ce numéro impeccablement réglé. Impassible, le dresseur ramassa près de la cage une soucoupe de faïence ébréchée qu’il fit lentement passer parmi les spectateurs. De son bras tendu, il écarta bientôt ceux du premier rang pour permettre à tous de déposer pièces ou rares billets.
Franchement, il est bien ce numéro. Je suis sûr que les gens ne se rendent pas compte du boulot qu’il faut pour ça. Et pendant ce temps, moi, je me fais chier dans cette cage, tout seul, derrière la séparation. Mais c’est moi qui devrais y être là-haut pour leur faire voir de la vraie voltige, pour leur en mettre plein les yeux. Mais non, à attendre que ça passe, à ronger ce bout de grillage, plus pour passer le temps qu’autre chose. Si ça continue, je le coupe le grillage et alors là, alors là...
Modard s’était glissé jusqu’au second rang. Il déposa deux pièces dans la soucoupe et examina le visage de l’homme. Parmi les taches de rousseur, deux yeux gris sous un front étroit et d’épais sourcils roux, un nez court et pointu, une bouche à peine dessinée. Sous la mince lèvre inférieure, au-dessus du menton pointu aussi, on devinait une mouche couleur de rouille.
Quel âge pouvait-il avoir ? Trente ans ? Quarante? Il faut qu’il ait un âge, quand même, songea Modard, sans bien savoir si c’était nécessaire.
La quête achevée, l’homme empocha la soucoupe et son contenu, puis adressa un imperceptible signe de tête aux rats toujours assis, immobiles. Ils descendirent illico l’échelle jusqu’à la cage. Les badauds commencèrent lentement à se disperser.
Bon, c’est bien, ils ont bien bossé. Urbain va être content de la soucoupe. Évidemment, c’est pas comme quand je faisais mon numéro. Là, ça sonnait et ça trébuchait dans la porcelaine. Mais bon sang, qu’est-ce qu’il a bien pu venir lui raconter, le vieux des oiseaux ? C’est depuis ce coup-là, depuis qu’il est venu lui parler que je suis tricard. C’est quand même moi le clou, c’est moi qui fais les grosses soucoupes au marché. Alors ?
En dépit de l’heure matinale, le spectacle était fini, mais sur la vaste place cerclée de hauts marronniers, le marché aux animaux du dimanche achevait son installation, offrant aux curieux d’autres points d’intérêt – marchands de bonbons, de gâteaux, de savon, et la cheminée fumante et noircie de la grosse machine d’un brûleur de cacahuètes.

Pourquoi donc part-il si tôt ? se demanda Modard.
Le dresseur replia les deux escabeaux qui supportaient la planche, appuya l’ensemble contre un arbre et souleva à deux mains la cage aux rats. Il se dirigea vers une petite camionnette blanche garée à deux pas le long du trottoir, posa la cage et ouvrit la portière arrière.
— Beau spectacle, dit Modard en s’approchant, remarquable comme ils vous obéissent. On ne voit pas ça tous les jours. Vous partez déjà ? La matinée commence à peine.
Le dresseur se retourna et considéra en silence cet intrus et sa question.
— Reculez, ordonna-t-il soudain. Modard fit deux pas précipités en arrière.
— Des sandalettes, dit le dresseur, et sans chaussettes... Non, vraiment... Les rats, ça raffole des pieds. Surtout les orteils. C’est charnu, les orteils, croquant, que de la viande et du cartilage. Et juste à portée.
Baissant les yeux, Modard vit contre le grillage cinq rats agglutinés, une masse compacte de poils gris foncé parsemée du rose tendre de leurs museaux. Les mailles de la cage se hérissaient de longues incisives.
— Ils n’avaient pourtant pas l’air bien méchant sur la planche.
— L’air ? Ce sont des rats, répondit le dresseur, ils n’ont pas d’air, juste leur nature.
— De rats.
— De rats. Saleté de grillage. Je m’en serais bien tapé un. Deux ? Peut-être. Un amuse-gueule, pour me consoler un peu de rester attaché dans la cage. L’orteil, c’est du cartilage, bien tendre, pas tout à fait de l’os, ça se mordille, et ça se suçote, une friandise, on peut faire durer. Bien sûr, ça n’est pas nourrissant, juste du plaisir. Il n’y est pour rien, ce type, mais des sandalettes, franchement...
Le dresseur plaça la cage à l’intérieur de la camionnette, enfourna les deux escabeaux repliés et la planche avant de refermer sans bruit la portière.
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- Moinet m'a dit que je l'appelle Jazz, parce qu'elle gonfle les joues . Comme ça, tiens, vous voyez ?
- Ah oui, dit Modard, en effet. Il faudrait lui acheter une trompette, plaisanta-t-il.
Une trompette, fit Belette, qu'est-ce qu'il raconte ? Les grenouilles ça joue pas de trompette.
- Ah non ? Et alors pourquoi gonfle-t-elle les joues ?
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Projetée par la fluorescence de trois tubes au néon contre une des parois de parpaings à l'intérieur du hangar, l'ombre démesurée d'une limace géante semblait figée dans une verticale obscène.
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Il se creusait la tête, aussi loin de la solution qu'un détective amateur à l'avant-dernière page d'un roman policier anglais.
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