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sur 346 notes
Captif ou invité?
Ou comment le gouvernement de Vichy se voit offrir une villégiature sur les bords du jeune Danube en 1944. Un sauve-qui-peut avec la caisse de l'Etat et des oeuvres d'art du patrimoine.

Le prince de Hohenzollern fut contraint par Hitler de laisser les clés de son château de Sigmarigen à Pétain et sa suite, en déroute devant l'avancée des alliés. Bel endroit prestigieux, hôtellerie dorée et tables garnies quand la population subit restrictions dans ces temps de déconfiture allemande.

Empilés dans cette énorme bâtisse à tourelles et à chapiteaux, les membres de cette France fantoche vont jouer un simulacre de pouvoir, gangrénés par les rancoeurs personnelles et une guerre civile intestine de "haines recuites", s'ennuyant ferme, complotant ferme, vivant de rumeurs et de mesquineries au dessus d'un village envahi d'une véritable colonie d'émigrés français.

Collaborateurs de tous poils, chefs de cabinets, ambassadeurs, écrivains, miliciens, militaires, Pétain et Laval en tête doivent cohabiter et se faire entretenir, invités contraints et forcés, aux frais des nazis et aux bons soins du personnel domestique dirigé par Monsieur Stein, majordome mélomane et narrateur.
Une situation à la limite du burlesque ( "Maréchal, nous voilà" .. coincé dans l'ascenseur!) que cet observateur va devoir gérer avec compétence et discernement.

J'ai pris le parti de prendre mon temps pour une lecture concernant une époque dont je n'ai que peu de connaissances politiques, si ce n'est générales. On peut rapidement être noyé sous l'avalanche de personnes que Pierre Assouline ressuscite.
Se présentent alors deux options: une lecture diagonale pour juste apprécier le contexte de ce déménagement national, ou faire une chasse aux informations sur Wikipédia, pour avoir au moins la photo des personnes citées, et en connaitre le destin final, guère glorieux.

Une vraie tragédie antique...

A chacun de faire son choix...
Pierre Assouline est encore et toujours passionnant.
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C'est une page peu connue de notre histoire et de la Seconde Guerre mondiale que nous conte Pierre Assouline dans son roman Sigmaringen.
Cette ville du sud de l'Allemagne devint, de septembre 44 à avril 45, le refuge de millier de français collabos et miliciens, fuyant devant l'avancée des troupes alliées en passe de libérer notre pays.
Parmi eux, le maréchal Pétain, le Président Laval et les ministres du régime de Vichy que les Allemands placèrent en résidence au château de la ville.
Réfugié selon les uns, prisonniers selon les autres, difficile de savoir.
C'est un observateur peu ordinaire qui nous raconte ces semaines de pseudo-captivité.
Le majordome.
Assumant ses fonctions en toute neutralité, il règne en maître sur le personnel du château. Il gère, le service, bien sûr, l'intendance, les conflits, il observe les comportements, il voit, il entend, mais il fait passer son métier avant tout.
C'est par sa bouche que l'auteur nous narre les derniers jours du régime Pétainiste en exil, les querelles, les inimitiés, les suspicions. Il passe en revue les différents protagonistes parmi lesquels un écrivain célèbre.
J'aime beaucoup ces livres qui nous entrainent dans des méandres historiques et qui, en nous distillant des informations, n'en garde pas moins un côté romanesque.



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Je viens de terminer le livre de P Assouline : Sigmaringen. Aimé ? oui et non. L'histoire basée sur les souvenirs du majordome en chef Julius Stein responsable, durant l'absence forcée de la dynastie des Hohenzollern, région Bavière-Bade-Wurtembourg fait revivre l'occupation de cet immense château réquisitionné au profit de l'ancien gouvernement de Vichy et tout le gratin de collaboration française en 1944. Environ deux millepersonnes depuis les plus importants chefs fascisants et leurs épouses, se répartiront des espaces délimités très soigneusement en raison de leur inimitié, et jalousies. le Maréchal Pétain, et son entourage personnel siègeront au dernier étage du^château, dit "l'Olympe". Julius veillera sur l'organisation générale des lieux aidé par l'ancien personnel domestique allemand resté en place. Jeanne Wolfermann, française, prendra, elle, en charge le personnel domestique français choisi par des collaborateurs en qualité de majordome également ce qui créera quelquefois quelques susceptibilités de pouvoir vite résolues. Julius mène cependant la direction du domaine avec toute l'expérience acquise au cours de trois générations de majordomes; il mettra tout son talent et sa diplomatie pour mener à bien la tâche que lui ont confiée les princes propriétaires du domaine, exilés par la force des choses dans un autre château ;Wilfingen. C'est alors que commence la comèdie du pouvoir que prétendent exercer les anciens politiciens collaborateurs de l'Allemagne nazie. le maréchal se considère prisonnier, restera isolé dans l'Olympe à l'écart de tout compromission. Laval, ex-membre du gouvernement Vichy, logé à l'étage au-dessous, s'occupe de réorganiser ses fonction, tout en préparant une défense éventuelle de son ancienne position, face à l'hostilité du général de Brinon, et tous les chefs de parti, Déat, Darnand, Doriot et la troupe de miliciens à leur service. Céline, fera fera des apparitions au cours d'une brève conférence et plus tard en dans le village, où il logera dans une petite chambre avec son chat Bébert. Au centre de ce petit territoire de Sigmaringen où la guerre n'a pas encore pénétré, dans ce château où évitent de se croiser des personnages bouillant de haine et de jalousie , certains rèvent de refaire une Europe Allemande, on assiste à une idylle entre les deux majordomes.
Dans le village vivent des français exilés pour cause de collaboration. On rencontre un personnage hurluberlu apostrophant les passants,vêtu de haillons, nommé l'homme-poubelle, qui s'occupe à lire des journaux. Au bout de quelques mois l'atmosphère de promiscuité inévitable, nourrie de soupçons d'espionnage, de délation jusqu'au moment où les bombardements entraînent la dispersion, l'affolement des personnages, qui sentent venir la fin de leur équipée, devant l'avancée des armées alliées. Beaucoup d'entre eux trouveront les moyens de s'enfuir. Céline réussira à gagner le Danemark..La gestapo, les SS évacueront les lieux, remplacés par les troupes françaises. Julius resté sur place, gardien des biens de ses maîtres aura une des plus grande surprise de sa vie de majordome en découvrant un personnage démasqué en qui il avait toute confiance.
Neuf mois plus tard, on le retrouve dans un train roulant vers l'Alsace où il se rend à un mariage,où deux autres grandes surprises l'attendront, je n'en dirai pas plus...

Ce que j'ai moins aimé, c'est l'histoire amoureuse entre les deux majordomes, Assouline voulait-il allèger le romman avec un brin de sentiment, cela m'a semblé incongru. de même que la face cachée du majordome en qualité de choriste extraordinaire, et pour finir la tombée des masques de deux personnages dont je ne dévoilerait pas rôle et l'identité. Sinon dans l'ensemble j'ai trouvé le roman intéressant surtout dans la partie histoire de la collaboration, qui rappelera des souvenirs aux plus anciens..
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« Au fond, nous étions plus lucides qu'eux, ce qui n'était pas difficile eu égard au monde de chimères dans lequel ils évoluaient. » Ainsi s'exprime Julius Stein, majordome de la famille Hohenzollern, à propos des hommes du gouvernement de Vichy, venus se réfugier, sur ordre d'Hitler, au château de la famille à Sigmaringen à l'automne 1944.
Pierre Assouline nous montre ainsi un pan de l'Histoire moins connu (du moins pour ma part), celui de la collaboration des politiciens français dès la première heure de l'Occupation allemande et leur déconfiture finale. C'est à travers les yeux des domestiques que l'on assiste aux tractations de couloirs, aux luttes fratricides, « quelque chose comme une guerre civile entre partisans d'un même monde. » Pétain et sa femme, logés à un étage, Laval et sa femme dans celui du dessous, à l'écart de leurs ministres logés dans une autre aile, tout ce beau monde ayant soin de s'éviter le plus possible. Un sentiment de fin de règne que l'on sent à chaque page tournée, servi par une prose efficace et recherchée. Louis-Ferdinand Céline, qui avait suivi les réfugiés français à Sigmaringen, apparaît fugitivement dans ce roman et j'ai très envie de lire son récit D'un château l'autre sur le même sujet.
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Dans le château de Sigmarigen en 1944 se trouve le gouvernement de Vichy. La famille princière Holenzollern doit quitter les lieux, elle laisse son majordome principal : Julius. C'est par lui que nous apprenons la condition de ces détenus privilégiés. de petits secrets aux petites mesquineries, tout y passe en discrétion. On découvre le gouvernement de Vichy préoccupé plus par leur situation de privilégié que par l'horreur de la guerre en dehors du château. Julius tombe sous le charme de Jeanne Wolfermann, gouvernante française. Un espion règne parmi eux,mais qui est-il ?
Un huis-clos sarcastique s'installe entre les protagonistes. Assouline nous raconte cette période de l'histoire méconnue par son grand talent de conteur.
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Julius Stein, majordome à Sigmaringen, château des princes Hohenzollern et prince lui même de tous les majordomes, figure altière, hiératique autant qu'effacée par le prestige de sa fonction, d'éducation tant discrète qu'érudite, nourrie de la grande culture des Lumières et du romantisme allemand, grand intendant, maître des cérémonies et des taches ancillaires du château qu'il instruit avec sagesse et panache, un personnage de l'ombre au service des princes et un grand seigneur dont les vertus d'abnégation et d'humanité le mettent peu à peu en lumière, durant cette période d'occupation du château allemand de septembre 44 à avril 45, où se réfugient Pétain et toute une suite de collaborateurs, composant le gouvernement en exil de l'Etat français, fuyant le débarquement des Alliés en France.

Le personnage de Julius est au centre du roman "Sigmaringen", sa plaque tournante et Pierre Assouline en fait l'observateur privilégié d'un microcosme politique dont le pouvoir en exil est en état de décomposition, avant de prendre une nouvelle fuite dispersée et fatale à l'arrivée des armées Alliées.

Dans ce monde en fuite, que protègent les ors et le faste d'une noblesse qui leur offre gite et couvert sur ordre d'Hitler, aristocratie qui dans sa majorité ne se serait jamais commise avec le national-socialisme, sans toute fois le condamner et le combattre, attachée à la préservation de ses privilèges, viennent s'agglutiner tous ces politiques français ralliés au nazisme, "les petits marquis de la collaboration" (Celine) les Doriot, Rabatet, de Brion, Laval ... accompagnés pour certains par leur épouse, comme Pétain. Cette haute classe allemande doit sa survie à son haut lignage aristocratique et une certaine neutralité, elle ne sert personne, excepté ses propres causes qui sont de nature supérieure.

Assouline par les yeux de Julius regarde tout ce monde s'agiter, avec une certaine jubilation non ostentatoire et un esprit critique et rigoureux. Julius dans sa passion érudite du lied schubertien consigne dans un carnet depuis 1933 toutes les atteintes portées par le fascisme à la vie culturelle et musicale de l'Allemagne, les concessions d'un Furtwängler, une flèche décochée à Karajan qui fricota avec les jeunesses hitlériennes. Nous aurons surtout quelques confidences sur Celine, alias docteur Destouche, médecin des pauvres, dont il nous donnera un portrait assez sympathique, sans omettre son coté caractériel, atrabilaire, avec son chat Bebert en goguette, accompagné de sa femme. Avec quelques éclairs de génie, Julius qui le croise : "alors docteur toujours seul", à quoi il répondit aussitôt "je m'entraîne à la mort". On sait la présence de la camarde dans chaque page du "Voyage au bout de la nuit".
Arrivent les troupes alliées avec un déluge de feu, qui épargneront Sigmaringen, "voici venir la mort avec sa gueule de raie".
Assouline nous donne une série de portraits de la collaboration, ainsi Pétain qui se met à l'écart de ce milieu interlope, nourri au grain de la jalousie, des ambitions et des petites entorses aux règles humanitaires, Darnand "ce soldat tout d'un bloc", Doriot ses intrigues, ses espions, ses vacherie dans la satire, Bonnard le plus cultivé des ministre qui s'exprimait dans le beau langage, "pas de quoi faire hennir les constellations".
Cette galerie est émaillée de nombreuses anecdotes, sur le service du château, un vol de couverts, un chantre sublime qui se fait entendre incognito à l'office du dimanche, la vie grouillante au bas du château qui rassemble de plus en plus de réfugiés français, les farces du docteur Destouche, une taupe SS dans le personnel du château ... et dès avril 44 , la débandade, un monde en déroute et atterré qui continue de fuir l'avancée inexorable des troupes alliées qui finissent par investir le château. Nous ne pouvons ici en faire le compte.

Pour donner du poids et attacher plus facilement le lecteur au récit, très haché par tous ces différents épisodes d'histoire confidentielle qui s'alignent dans un désordre très construit, Assouline autorise Julius à vivre finalement une romance délicate, en demie teinte avec Mlle Wolfermann qui est au service du maréchal Pétain et qui s'avérera avec l'arrivée de l'armée française en avril 44, être un agent des services secrets dans la résistance. L'auteur nous offre ici quelques pages brèves, étonnantes, émues et fortes, d'une tendresse retenue et mélancolique. L'amour romantique entre Saint Preux et Julie dans "la nouvelle Héloise", peut se rhabiller. Ici , l'émotion est garantie sans ogm, ne serait ce que pour faire la promotion de l'adage où de beaux sentiments peuvent vraiment nourrir une bonne littérature. Merci monsieur Assouline.
Au final ce livre est d'excellente facture, son écriture me semble un peu "verticale", le récit est assez cumulatif, très respectueux de ses sources historiques (prodigieux travail documentaire) et le dénouement à l'arrivée des forces alliées, nous saisit d'une émotion inattendue, qui vient en contrepoint de la grande maîtrise mesurée de ce majordome hiératique, maître des horloges.



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Pourquoi ce livre est raté ? Parce que ça n'est ni un ouvrage d'historien, ni une biographie... C'est quoi, en fait ? J'en sais rien... Un roman ? Oui, bien sûr... Tout est « roman », aujourd'hui, y paraît-que-nouz-autres-blaireaux-achetons-mieux-quand-c'est « roman »... Pondez-nous donc des « romans » et c'est marre ! Pardonnez ma franchise... Me suis forcé à finir ce livre (acheté en folio au kiosque Relay d'un aéroport : "ma" libraire m'en avait tressé les éloges ! Qu'est-ce qu'on s'en fiche, d'ailleurs, de mon propos anedcdotique ci-devant !). Juste un banal récit de plus, banalement "foisonnant", empli de personnages à ras bord... Alors quoi ? Une « fresque » ? On aimerait... Un décor de théâtre idéal avec ces escaliers partout qui permettent aux clans rivaux ou ennemis d'éviter de s'y croiser... MAIS... Pierre Assouline n'a peut-être pas pris le temps de trier, de se relire, de raboter, de poncer... Abondance de sentences, parfois... ou de « petits faits vrais » sur-signifiants... Deux personnages centraux de « gentils » aux psychologies vaguement clichetonnantes (amoureux à l'eau de rose, censés nous offrir un contraste « romanesque » à la pourriture humaine ambiante) et surtout, hélàs, totalement improbables... Encerclés qu'ils sont de salauds en pagaille : la toile de fond du château des Hohenzollern "squatté" par la pègre vichyste-IIème partie... le problème avec ces salauds du "Sigmaringen" de Pierre Assouline ? C'est qu'on finit par tous les confondre... à part peut-être le mec qu'a un bérêt, puis porte l'uniforme SS... Celui-là, on se le repère bien : c'est Darnand, le salaud de chef de la Milice ! le vilain... Bref, on s'en fout de tous ces cons-là... Même le Céline avec son chat et ses petites manies, et ses deux nanas... Ou ces agents secrets de Londres déguisés en clochard ou en gouvernante de Pétain... Pt'être tout cela fut "réel" mais ici tellement mal amené par l'auteur, mal fagoté, quoi ! Comme la silhouette de ce Céline d'Epinal (je parle de l'imagerie...). Comme je regrette que Pierre Assouline se soit lancé dans le roman... Des travaux comme "Simenon" et "Hergé" étaient si maîtrisés, sérieux, INDISPENSABLES... Pourquoi ainsi créer (après tant de mois ou d'années d'effort de documentation, certes !) de nouveaux mauvais romans en cette pénible surproduction française contemporaine ? L'euphorie critique habituelle du réseau serré de flagorneurs des "professionnels de la profession"/Seine autour cet ouvrage n'y changera rien... C'est raté c'est raté ! Copie à refaire, grmmmblll' ! Changez-moi tout d'abord vos deux personnages centraux (Le Majordome-"chantre" en fait 'achement "secret" et la Gouvernante-Agente secrête)... Allez, rompez ! Pardon, Pierre Assouline pardon... Ah, comme je regrette déjà ma mauvaise colère, moi humble p'tit lecteur" de province" et tout p'tiot (comme le Docteur) écrivâillon obscur, aigri, forcément aigri... (hé hé !)
Lien : http://www.regardsfeeriques...
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Après un long travail d'historien, recoupant biographies, mémoires, documents historiques et rencontres avec les descendants de la famille Hohenzollern, Pierre Assouline nous livre un roman de belle facture et d'une grande précision.
Julius Stein, le narrateur interne de ce récit, est majordome au château de Sigmaringen. Consciencieux, discret et attentif au moindre détail, il veille sur le personnel allemand du château ainsi que sur le personnel français arrivé avec le gouvernement de Vichy. Il est aidé dans sa tâche par Mlle Wolfermann, Alsacienne au service du maréchal. Rien de ce qui se dit ou se vit au château ne lui échappe. Il nous conte donc la vie des expatriés français, un des épisodes les plus infamants de la fin de l'occupation en France dont il est nécessaire de faire mémoire. Même s'ils sont nombreux ceux qui préfèreraient passer sous silence ce fait bien peu glorieux.

Julius, sans sortir de sa réserve, nous raconte les clans au sein du gouvernement en exil, les dissensions, les réunions de travail de ceux qui croyaient encore diriger la France. -Et avouaient avoir l'intention de rentrer bientôt chasser les usurpateurs.-

Pierre Assouline nous livre à la fois un récit proche de Downton Abbey où nous suivons la vie du personnel de maison et les exigences de leurs tâches et une comédie tragique mettant en scène un gouvernement qui refuse de voir la vérité en face. Il s'intéresse aussi à la vie de plus de 2000 civils français expatriés dans le village, partisans de Vichy, collaborateurs, lâches dont le moindre ne fut pas Céline, pourfendeur des juifs et auteur de pamphlets antisémites. Malgré sa morgue coutumière, il apparait ici comme un pauvre hère cherchant soulager ses semblables (il était médecin avant d'écrire) en achetant des médicaments pour les malades. Il ferait presque pitié.

J'ai beaucoup aimé découvrir cet épisode de l'Histoire à travers Julius, personnage attachant. Il sert des gens qu'il n'estime pas et dont il réprouve les actes mais le fait avec dignité et excellence. Ses yeux et ses oreilles nous confient le quotidien du château, mêlant petite et grande histoire. C'est indéniablement un plus que d'avoir eu l'idée d'en faire le narrateur.
Pour moi, ce roman est un coup de coeur.
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"Sigmaringen" de Pierre Assouline
Vichy-sur-Danube ou la tragi-comédie bouffone de l'Etat français à Sigmaringen

Sud de l'Allemagne, Sigmaringen, le château des Hohenzollern où échoue en sept 1944 la caravane des damnées. Contraints par les nazis, arrivent dans ce château le Maréchal Pétain, chef de l'Etat français, Laval, de Brinon, le general Bridoux, Marion, le Dr Menetrel, Luchaire. Il y a les ministres "actifs" et les ministres "passifs" qui traînent à leur suite une cohorte de collaborateurs, miliciens, LVF, escrocs, putains, proxénètes, trafiquants, faussaires, illusionnistes, femmes fatales, paumés, dandys, gigolos, pauvres gens, gens simples, croyants, curés...

Morne tragédie où les comédiens fous de la France de Vichy agitent vainement leurs petits bras. Heureusement, il y a le Dr Destouches alias Louis Ferdinand Céline, écrivain-poète (et sa femme Lucette, danseuse + son ancienne maîtresse Lucienne Delforge, pianiste et chanteuse).. Au moins lui ne croyait en rien avant, continua à Sigmarigen à ne pas croire, et ne croira pas plus pendant son exil au Danemark, et après à son retour en France !
Je me promets de lire "D'un château, l'autre".


Dans ses livres précédents, Pierre Assouline m'avait habitué à des textes mieux ficelés. Malgré le grand bonheur que j'ai toujours trouvé à le lire, avec "Sigmaringen" j'ai cherché l'auteur que j'aime. Cet auteur qui a de l'affection pour ses personnages, qui les décrit et les suit avec une grande délicatesse.
Peut-être les êtres de "Sigmaringen" étant si détestables, lui ont-ils fait rater son livre ?

Il a certes lu beaucoup d'ouvrages relatifs à cette période, mais sans doute en a-t'il trop avalé car ce qui est sorti du shaker n'est pas un bon cocktail.

Son intrigue, il l'a fait jouer, côté allemand, par Julius Stein, majordome de profession, et, côté français, par Mrs Wolfermann, intendante. Ces 2 personnages principaux sont un copié-collé des 2 protagonistes, Mr Steven, butler, et Mrs Kenton, gouvernante, du livre "Vestiges du Jour" écrit par Kazuo Ishiguro. Si encore il les avait remixé, why not ! Mais malheureusement, il fait penser et évoluer ses personnages tels qu'ils sont dans "Vestiges du Jour". Et là ça ne fonctionne absolument plus car je me suis senti troublé et embrouillé par ce couple que je retrouve dans "Sigmaringen" et j'en oublie les autres personnages, qui sont, eux, historiques et qui justifient l'existence de ce livre. Je me suis donc retrouvé avec 2 histoires parallèles qui n'interagissent pas.

Il a même reproduit cette scène magnifique dans le film Vestiges du Jour lorsque Mrs Kenton surprend Steven en train de lire un roman. Elle le force à lui montrer son bouquin qu'il presse contre lui pour ne pas dévoiler que son roman sent "l'eau de rose". de même quand Mlle Wolfermann force Stein à dévoiler, en fouillant dans sa poche, le contenu des fiches sur lesquelles ce même Stein notait depuis l'avénement de Hitler tous les interprètes et compositeurs juifs interdits de musique en Allemagne et souvent obligés de s'exiler pour échapper à la mort nazie. Improbable, ridicule ! Grotesque coïncidence ! Stein n'est qu'un simple majordome qui travaille chez les Hollenzollern, famille qui n'est pas connue pour être sémitophile.
Ce casting n'était pas nécessaire. Pierre Assouline aurait du se concentrer sur les personnages historiques.

A l'époque, chez les peuples du monde entier, le problème juif n'était pas monté jusqu'à la conscience compassionnelle que nous connaissons aujourd'hui. Il était enfoui, mis sous terre, nié, voire beaucoup ont été complices, certes non-actifs, de la mise à l'écart de cette communauté.

Dans "Lutetia", livre brillant, Pierre Assouline avait bien souligné cette situation d'ignorance ou de désintérêt pour le problème spécifique juif dans la conscience populaire en 1945 quand les seuls juifs qui ont survécu sont rentrés des camps.

Dès lors que les nazis les déménagent de France vers Sigmaringen, ces hommes et femmes politiques et les autres qui les accompagnent, ne sont plus rien. Ils jouent dans un théâtre d'ombre, tournent sur eux-mêmes et parlent seuls comme dans un dans un asile, crient et bavent dans ce nid de coucous (pour reprendre le titre d'un film) . Il leurs manque l'entonnoir sur la tête. Leurs cerveaux tournent à vide. Leurs pensées, démentes. Ils vivent sur une planète qui n'est plus dans l'orbite de l'histoire, cette histoire qui marche chaussée des bottes de 7 lieux

Passou (c'est le surnom donné par les blogueurs dans le blog de Pierre Assouline "La République de Livres") a fait un livre "normal" alors qu'il aurait du écrire une oeuvre déjanté et absurde.

Ce qui aurait été intéressant à travailler, c'est cette Cour de Miracle, cette nef aux fous, ce drame shakespearien, cette bande de Mangeclous à la dérive dans l'espace-temps historique.

A part l'intrigue qui ne passe pas, l'écriture est belle et harmonieuse avec ce ton de d'intimité qui est la marque de l'auteur. Mais aie ! il a utilisé ce verbe que je déteste issu du langage journalistique : tutoyer qq chose.

Pourvu qu'un réalisateur n'ait pas l'idée de tourner un film à partir d'un tel scénario !

Pierre Assouline, auteur connu, très médiatisé, n'a pas d'inquiétude à avoir. Son livre n'est pas bon mais son seul nom le fera vendre.
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"Sigmaringen, c'est la communauté réduite aux caquets."

Ce roman de Pierre Assouline se lit avec plaisir. Il séduira ceux qui s'intéressent à l'histoire trouble de la France de Vichy, autant que les amateurs de littérature de l'entre-deux-guerres et des auteurs entrés dans la légende noire, qu'il met en scène – Céline au premier plan, évidemment. Quand on lit ce "Sigmaringen", on a forcément en tête la version fabuleuse qu'en a donné l'écrivain dans "D'un château l'autre". Bébert lui-même est présent (le chat de Céline, pour ceux qui ne sont pas familiers de sa biographie), aux côtés de Lucette Almanzor et de Lucienne Delforge. On croise aussi Lucien Rebatet, auteur des "Décombres" ou des "Deux Étendards", parmi d'autres. On sent que l'auteur se plaît à donner vie à ces noms illustres et parfois maudits. Imaginez un peu, jouer les démiurges avec de telles figures !

C'est dans sa description de l'atmosphère claustrale où germent les querelles et croissent les inimitiés qu'Assouline excelle. Il livre des portraits remarquables de personnages historiques (les membres des gouvernements surtout, Laval, Brinon, Déat, Bonnard, etc.), et déroule des dialogues où brille l'esprit français. En ce temps-là, les hommes politiques savaient encore en faire preuve… Que voulez-vous, à défaut de pouvoir agir, on parle. On critique. On assassine à coups de bons mots. On forge de folles théories. On échafaude, trame, machine. Pour conjurer l'ennui et la peur.

La suite de la critique est sur mon blog !
Lien : https://litteraemeae.wordpre..
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