Il s'agit d'un livre autobiographique, tragique, d'une beauté et d'une maladresse hors normes, une errance sans autre fin que la mort.
Résumons l'histoire vraie : alors qu'ils sont en train de signer leur divorce, Aron Gageac – écrivain et homme politique argentin subversif – jette un verre d'acide au visage de celle qui a été son épouse pendant presque trente ans, Eligia, féministe engagée en politique, rivale d'Evita Perón. Leur fils Mario, vingt-deux ans assiste à la scène. Pour accompagner la reconstruction du visage, il passera deux années à suivre sa mère de clinique en clinique, les meilleures, de Buenos Aires à Milan, un voyage, plutôt une errance. Il erre entre la quête de sa mère, la mémoire du père, les bas-fonds et leurs mauvais vins des grandes villes.
Jorge Barón Biza transforme son histoire familiale en une fiction dans son seul et unique roman. Lucide, impitoyable, sans aucun atermoiement ni larmoiement,
le Désert et sa semence est le récit de la recherche pour ce jeune homme de son identité, à travers le visage de ses parents aussi monstreux soit-il (sa mère physiquement réellement et rien ne nous est épargné et son père moralement mais tout aussi concrètement).
Une quête vaine puisque
Jorge Baron Biza
s'est suicidé peu après avoir achevé son unique oeuvre, en 2001.
Ce livre m'a attiré pour sa quatrième de couverture mais davantage pour l'illustration de couverture, d'une beauté et d'un symbolisme extraordinaires. Et il me semble qu'il est important d'évoquer ces artistes (traducteurs, illustrateurs) qui accompagnent lumineusement les oeuvres littéraires.
En effet,
Lorenzo Mattotti (né en 1954) était l'illustrateur idéal pour l'histoire tragique de la famille Biza, tant ses dessins oscillent entre douceur, cruauté, solitude, tendresse, représentant des êtres rêvés ou cauchemardesques bien en chair… dans un monde aux couleurs à vif : rouges, gris, noirs, et une épuration des traits alliant les lignes et les courbes de manière dérangeante.
Tout comme ce livre, dérangeant, mais inoubliable.