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EAN : 9782864321644
103 pages
Verdier (28/02/1993)
3.86/5   7 notes
Résumé :

TEMPS MACHINE

François Bon

Qu’une usine est partout et aujourd’hui toujours comme d’entrer dans une maison d’enfance. Roulement au fond des bruits, l’odeur reconnaissable d’huile chaude, sous les doigts le nylon épais des portes et la lenteur certaine du temps, certitude qu’on est là pour tenir jusqu’au terme du compte.

Qu’on marche dans des rues de ciment sous verrière, qu’on surplombe les aires de chargement et ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Autobiographie d'un auteur ingénieur mécanicien : 10 ans d'usines dans le monde entier, et ce que ça a signifié...

Publié en 1992, dix ans après ses débuts littéraires, ce récit autobiographique raconte à sa manière bien spécifique les dix années de l'auteur entre les Arts & Métiers et sa décision de quitter l'industrie pour l'écriture, entrecoupées de quelques plongées dans l'enfance de ce fils de mécanicien et d'institutrice.

Ingénieur mécanicien, travaillant à la Sciaky, société qui reste aujourd'hui l'un des leaders mondiaux de l'ingénierie de soudure de haute technicité, le narrateur revient sur la vocation technique et mécanique, l'ascenseur social des années 70, le profond sentiment d'aliénation communiqué par la formation, la hiérarchie et l'usine, la fraternité et la camaraderie des missions difficiles, les usines anonymes dans le monde entier, le danger et les accidents du travail omniprésents, le blues progressif du technicien qui voit monter le pouvoir exclusif des financiers et des "faiseurs de vent", la fin d'un certain monde,...

Un texte qui en dit long sur l'érosion d'une certaine foi en la technique au quotidien, sur les racines de la désindustrialisation, mais aussi sur les pièges sociaux et humains qui y sont à l'oeuvre, tout en constituant, en une centaine de pages, une formidable ode au métal, à la mécanique et à l'industrie comme combat avec la matière récalcitrante...

"Fantôme que l'école, alignement des laboratoires de chimie et de métallurgie, salles d'informatique et plus haut les dortoirs où maintenant la meute, deux mois passés, leur fichait la paix, compensant l'initiation et l"humiliation par cette intégration à une fausse république de privilèges, le sentiment d'une réussite définitive déjà jouée par l'abaissement d'abord accepté à cette comédie des visières, des deux cents hurlant leurs insultes et les tours à genoux sur le carrelage de la salle nue, mais le goût pris peu à peu des séances de cinq heures à composer sur épure d'une machine ou le calcul d'engrenages, l'écriture obligée de copies rendues noires pour exprimer même ce dégoût où on était de l'organisation sociale qu'on vous forçait à ingurgiter par le détail gestion des stocks, rentabilité et cette notion tout aussi calculable de travail masqué (on fouillait parfois dans les anciens dortoirs des moines pour lire les copies calligraphiées d'il y a un siècle, rien n'avait été jeté)."

"Accroupi un matin à six heures dans le fond de l'armoire de puissance pour revisser la serrure de sécurité desserrée, en sueur l'épaule gauche contre les trois barres conductrices du quatre cent quarante volts triphasé, tenant d'une main la clé et de l'autre le petit boîtier de serrure et voir soudain deux mètres au-dessus de sa tête s'enclencher le triple contacteur à relais, le quart de seconde qu'il faut pour s'éjecter d'une trappe et comment ça suffit à la plus violente peur, faute de la colère qui ne vient qu'après."

Déroutant par moments, exaltant à d'autres, ce récit touchera sans doute profondément celles et ceux qui ont (quelles qu'en soient les raisons) arpenté le sol inégal d'usines de mécanique, un peu partout, et fournira aux autres la chance paradoxale d'approcher un univers bien particulier, où le grandiose et le misérable sont étroitement associés.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Et non pas fiction que dans ce que nous appelions laboratoire, au bout des allées poussiéreuses après le hall de câblage nous travaillions à ces machines dont l’appellation le premier jour ne m’évoquait rien et qui prennent ensuite le volume entier du crâne : machine à souder par faisceau d’électrons d’abord une odeur, ces allées et leur crasse, le bruit des meules et le métal brûlé, les robots qu’on essayait ne marchaient pas encore vraiment comme il faut mais c’était curieux déjà dans la pièce noire ce bras tordu bougeant à trois mètres son électrode mobile tandis que le clavier et l’écran affichaient des suites opaques de nombres et codes que nous apprenions à manier.
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Le monde est fragile, et s'alourdit : les morts sont dans les immeubles et attendent, ils descendent dans les villes au soir, les morts débordent parce que même dans les cubes de tôle des campagnes on les rejette à côté pour ne plus servir de rien, ce n'est plus un siècle à mains, les morts restent là debout et c'est pire encore de les voir non plus hurler ni se plaindre mais attendre au bord des entrepôts. L'encombrement obligé des salons autour du téléviseur, la quasi-loi, accroché au mur, de posséder un fusil de chasse comme au 31 du mois sous les immeubles le tas plus haut que les fenêtres du premier étage, qui se fait des meubles jetés pour d'autres aussi beaux. Le monde de formica tombera et les morts emmèneront avec eux ceux qui se contentaient d'aller au cinéma, lire leurs magazines, auront passé en abandonnant la révolte aux mains noires qui n'en avaient plus la force et vivez donc, en attendant.
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Vidéo de François Bon
A l'occasion du salon "Rendez-vous de l'histoire" à Blois, rencontre avec François Bon autour de son ouvrage "Sapiens à l'oeil nu" aux éditions CNRS.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2323506/francois-bon-sapiens-a-l-oeil-nu
Note de musique : © Scott Holmes
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