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Florent Bussy (Autre)
EAN : 9782369352440
128 pages
Le Passager Clandestin (25/08/2020)
3.75/5   4 notes
Résumé :
"C'est en tant que morts en sursis que nous existons désormais". Infatigable pourfendeur de la bombe atomique, Günther Anders (1902-1992) qui préférait au titre de philosophe celui de "semeur de panique" , a fait des catastrophes de son siècle le point de départ de ses réflexions. Il a analysé le décalage périlleux, provoqué par la société industrielle, entre nos compétences techniques et nos facultés d'imagination. Alors que la technique rend infinie notre capacité... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Un grand merci à Masse Critique et aux éditions le passager clandestin pour l'envoi de ce petit livre.

C'est un des volumes de la collection Précurseurs -ses de la décroissance, qui se composent d'une présentation d'un auteur et de ses principales positions sur le thème, suivie d'un recueil de textes. Comme souvent, le recours direct aux textes de l'auteur est plus parlant que la présentation.
Mais commençons par Günther Anders, Monsieur "Autrement". C'est un pseudonyme, Günther Anders est né Günther Stern mais après avoir été refusé à l'habilitation de philosophie il pratique le journalisme où on lui demanda de choisir un pseudonyme. Il avait étudié auprès des plus grands penseurs de l'entre-deux guerres (Husserl, Heidegger, Jonas), a été marié à Hannah Arendt et était le cousin de Walter Benjamin. Rien que ça. Lors de l'arrivée des nazis, il s'exila à Paris puis en Californie. Il revient en Europe en 1950 et s'installe à Vienne.
Pour Anders, l'humanité a subi une double catastrophe dans les années 1940: l'extermination de masse et la production de la bombe atomique. Ses ouvrages, notamment L'obsolescence de l'homme et Nous, fils d'Eichmann, sont une tentative pour penser les changements radicaux qui en découlent. C'est que la possibilité de la destruction totale de l'humanité change les données de base de la morale. La philosophie ne doit plus être réservée à une élite entraînée à son maniement mais doit concerner tous les humains puisque la question posée est celle de la survie de chacun, et de l'humanité même. Désormais la question morale n'est plus: Comment se comporter en tant qu'humains? Mais: L'humanité doit-elle survivre? L'angoisse existentielle prend une tout autre dimension. Car si l'humanité disparaît, s'il n'y a plus personne pour se souvenir de ce que les hommes ont vécu, c'est comme si la totalité des hommes avait vécu en vain. Tout sens est aboli.
Cela me fait penser à un passage de la route de Cormac McCarthy où le protagoniste visite une maison abandonnée dans laquelle il y avait une bibliothèque, désormais sans objet. Les humains doivent dès lors avoir les yeux fixés sur l'apocalypse à venir, être lucides sur leur responsabilité, ne pas avoir peur d'avoir peur. C'est au prix de cette lucidité qu'ils pourront éviter l'auto-destruction. le problème anthropologique identifié par Anders est celui du décalage prométhéen; l'homme a des facultés d'émotion et d'imagination trop limitées par rapport à ses capacités techniques. Il est incapable de se représenter et de s'émouvoir à propos d'événements d'une telle ampleur. de plus, par les modes de production et d'organisation de nos sociétés, chaque humain n'est plus acteur que d'une infime partie des processus. Les conséquences de ses actes lui deviennent invisibles. C'est en cela que nous sommes des fils d'Eichmann: nous oeuvrons à un processus de destruction dont nous ne nous sentons pas responsables. On peut penser à la façon dont Sebald analyse l'attitude des Allemands de 1943-1945, qui considéraient les bombardements qu'ils subissaient comme une catastrophe naturelle à laquelle ils n'avaient aucune part.
On voit immédiatement l'application qui peut être faite de ces positions aux défis du 21e siècle: catastrophe climatique et effondrement du vivant.
Même si le terme de précurseur n'est peut-être pas très approprié, Günther Anders a en effet produit des réflexions qui nous sont utiles pour penser notre présent. Il faut donc remercier une fois encore l'éditeur et l'auteur de ce petit volume d'en produire une introduction tout à fait accessible. C'était bien le voeu de Günther Anders.

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La croissance industrielle mènera-t-elle l'humanité à sa perte ? Ce petit livre n'est pas un roman d'anticipation, mais juste le constat d'un homme qui a passé sa vie à étayer une thèse. Florent Bussy nous résume le travail de Günther Anders à la manière d'un scientifique vulgarisant ses travaux, permettant ainsi au grand public de saisir toutes les subtilités de notions philosophiques intéressantes mais qui paraissent souvent abstraites aux non-initiés.
Je trouve que cette collection est une excellente idée. Car on ne tombe jamais dans une trop grande simplification du propos, qui lui en ferait perdre son essence et prendrait le lecteur pour un simple d'esprit. Ici, tout l'intérêt est de donner à réfléchir sur les conséquences néfastes engendrées par une croissance rapide et sans limite, et sur l'importance de la décroissance pour sauver une humanité en péril.
J'ai été interpellée par la vision d'Anders, philosophe avant-gardiste, dont les écrits toujours d'actualité, résonnent d'un avertissement funeste dont nous ne saisissons, malheureusement, toujours pas l'urgence. Nous avons appris à nous servir du nucléaire comme d'une énergie dite propre, puis nous l'avons utilisé en tant qu'arme de destruction massive. Nous avons créé des machines-outils afin de soulager les ouvriers, puis nous avons licencié ces derniers. Nous avons appris à produire toujours plus et plus vite, au détriment d'une nature dont notre survie dépend.
Si j'ai beaucoup apprécié d'être ébranlée dans mes convictions et mes croyances populaires, et que je suis curieuse d'explorer les autres titres de cette collection, je dois tout de même mettre un bémol. Premièrement, même si les interventions de l'auteur permettent de bien saisir les détails et le contexte, j'ai trouvé dommage de seulement effleurer certains sujets en lien avec le thème. Mais il est vrai que le format ne se prête pas vraiment à un élargissement du sujet. Deuxièmement, la taille des caractères est très petite, même trop petite, ce qui rend cette ouvrage inaccessible à une grande partie du lectorat. J'insiste vraiment sur ce point car cela a, par moment, rendu ma lecture désagréable.
Mais que vous soyez étudiants, érudits, philosophes, historiens ou, comme moi, simples curieux, je vous invite à lire cet ouvrage.

Lien : https://www.facebook.com/Nos..
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Les éditions le passager clandestin  ont créé une collection très intéressante, "Les précurseur.ses de la décroissance" qui nous permet de découvrir de grandes figures présentes et passées qui ont critiqué en leur temps contre la dérégulation de nos sociétés de consommation qui ont fait de la croissance infinie un idéal de progrès.
Philosophes, sociologues, écologistes, politiques...Leur pensée est mise en contexte, décryptée et rendue accessible au plus grand nombre. Dans le cadre de l'opération Masse Critique de Babelio j'ai eu l'occasion de découvrir l'ouvrage consacré à Günther Anders, philosophe qui se dénommait comme "semeur de panique".
Farouchement anti nucléaire, il a vu les atrocités du 20e siècle, et a construit sa pensée philosophique autour de la modernisation et de ce qui peut y advenir de pire : banalisation du mal, industrialisation des génocides, armes de destruction massive...Une excellente entrée en matière pour découvrir des concepts clés tels que "l'obsolescence de l'homme" et le "décalage prométhéen", présentés et introduits par Florent Bussy, suivi de quelques extraits finements choisis de ses ouvrages phares.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Étant donné que la technique est notre enfant, il serait aussi lâche que stupide de parler de la malédiction qui lui est innée comme d'une malédiction venue un jour fortuitement s'égarer dans notre maison par une porte dérobée. C'est notre malédiction.
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Aie le courage d'avoir peur.
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Face à l'idée d'apocalypse, notre âme déclare forfait.
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Video de Florent Bussy (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Florent Bussy
À travers ses discours, ses utopies politiques ou sa pratique artistique, William Morris (1834-1896) a, dès l'Angleterre victorienne, alerté sur les effets destructeurs de l'industrialisme, tant écologiques que sociaux. Convaincu que la beauté donne sens à l'existence, le peintre a appelé à l'épanouissement personnel et à l'émancipation collective, grâce à la réappropriation des activités créatrices.
Pour en parler, Aliette Hovine reçoit : Florent Bussy, professeur de philosophie en lycée Charles-François Mathis, historien, professeur d'histoire contemporaine Jérémie Cerman, professeur d'histoire de l'art contemporain à l'Université d'Artois, Arras
Visuel de la vignette : papier peint réalisé par William Morris + portrait de William Morris / Getty
#art #economie #industrialdesign
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