Les ouvrages critiquant la peine de mort ne manquent pas, mais celui-ci a été rédigé par Camus, et c'est sans doute pour cela que je l'ai choisi, afin de signer après avoir persisté dans mon positionnement contre celle-ci.
Que d'arguments en sa défaveur, et que de bons arguments ! Je me demande encore comment est-il possible de soutenir la mort autorisée, comment l'esprit humain peut-il raisonner pour permettre ce genre d'aberration qui va à l'encontre de l'humanité et qui n'a jamais empêché quiconque de tuer.
Camus nous éclaire de sa plume lumineuse, dans un style toujours aussi éloquent et ne laissant pas de place au doute, il démonte un par un les -peu nombreux- arguments des conservateurs -à l'époque- de cette pratique barbare, la seule idée qu'il estime pouvoir être soumise à un réel débat est celle de la peine de mort justifiée pour celui dont on sait qu'il est irrécupérable, qui sévira à nouveau et dont on est persuadé qu'il ne changera jamais ; mais le peu de doutes que l'on peut avoir est rapidement dissipé, même sur ce terrain-là. La peine de mort pouvait et peut encore trouver son sens dans une société totalement tournée vers la religion -ne sachant pas comment agir avec un individu, l'on remet son jugement à Dieu en l'assassinant-, mais pas dans une société laïque comme celles qui existent aujourd'hui.
Je ne vais pas vous exposer chacun des arguments qu'emploie Camus pour nous rallier à son point de vue, sachez seulement qu'ils sont incontestables et très bien amenés.
Un court et bon livre qui nous rappelle pourquoi l'abolition d'une telle pratique était nécessaire. Lisez-le si vous êtes dans le doute, et lisez-le même si vous ne l'êtes pas ou plus, ça ne fera que vous conforter dans votre opinion, ou ébrécher les enceintes de celle-ci dans le cas où elle s'avère contraire à celle de l'auteur. Vous prendrez conscience que "ni dans le coeur des individus, ni dans les moeurs des sociétés, il n'y aura de paix durable tant que la mort ne sera pas mise hors la loi", et ce dans le monde entier.
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Un vibrant discours anti peine de mort qui était courageux à cet époque ne l'oublions pas,ar cett eposition était loin de faire l'unanimité ! IL est d'autant plus important de lire cet ecrit afin de se donner une idée du courage de l'auteur !
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Lorsque les nazis procédaient en Pologne à des exécutions publiques d'otages, pour éviter que ces otages ne crient des paroles de révolte et de liberté, ils les bâillonnaient avec un pansement enduit de plâtre. On ne saurait sans impudeur comparer le sort de ces innocentes victi- mes à ceux des criminels condamnés. Mais, outre que les criminels ne sont pas les seuls à être guillotinés chez nous, la méthode est la même. Nous étouffons sous des paroles feutrées un supplice dont on ne sau- rait affirmer la légitimité avant de l'avoir examiné dans sa réalité. Loin de dire que la peine de mort est d'abord nécessaire et qu'il convient ensuite de n'en pas parler, il faut parler au contraire de ce qu'elle est réellement et dire alors si, telle qu'elle est, elle doit être considérée comme nécessaire.
La peine capitale ne saurait intimider celui qui ne sait pas qu'il va tuer, qui s'y décide en un moment et prépare son acte dans la fièvre ou l'idée fixe, ni celui qui, allant à un rendez-vous d'explication, emporte une arme pour effrayer l'infidèle ou l'adversaire et s'en sert, alors qu'il ne le voulait pas, ou ne croyait pas le vouloir. Elle ne saurait en un mot intimider l'homme jeté dans le crime comme on l'est dans le malheur.
Quand la suprême justice donne seulement à vomir à l'honnête homme qu'elle est censée protéger, il paraît difficile de soutenir qu'elle est destinée, comme ce devrait être sa fonction, à apporter plus de paix et d'ordre dans la cité. Il éclate au contraire qu'elle n'est pas moins révoltante que le crime, et que ce nouveau meurtre, loin de réparer l'offense faite au corps social, ajoute une nouvelle souillure à la première.
Nous en savons assez pour dire que tel grand criminel mérite les travaux forcés à perpétuité. Mais nous n'en savons pas assez pour décréter qu'il soit ôté à son propre avenir, c'est-à-dire à notre commune chance de réparation.
Rencontre avec Denis Salas autour de le déni du viol. Essai de justice narrative paru aux éditions Michalon.
-- avec l'Université Toulouse Capitole
Denis Salas, ancien juge, enseigne à l'École nationale de la magistrature et dirige la revue Les Cahiers de la Justice. Il préside l'Association française pour l'histoire de la justice. Il a publié aux éditions Michalon Albert Camus. La justice révolte, Kafka. le combat avec la loi et, avec Antoine Garapon, Imaginer la loi. le droit dans la littérature.
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02/02/2024 - Réalisation et mise en ondes Radio Radio, RR+, Radio TER
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