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Pierre-Louis Rey (Éditeur scientifique)
EAN : 9782070337316
224 pages
Gallimard (02/05/2008)
4.04/5   1981 notes
Résumé :
«En février 1905, à Moscou, un groupe de terroristes, appartenant au parti socialiste révolutionnaire, organisait un attentat à la bombe contre le grand-duc Serge, oncle du tsar. Cet attentat et les circonstances singulières qui l'ont précédé et suivi font le sujet des Justes. Si extraordinaires que puissent paraître, en effet, certaines des situations de cette pièce, elles sont pourtant historiques. Ceci ne veut pas dire, on le verra d'ailleurs, que Les Justes soie... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (147) Voir plus Ajouter une critique
4,04

sur 1981 notes
J'ai vraiment du mal à m'enthousiasmer pour les écrits d'Albert Camus. Ça me chiffonne toujours un peu car l'homme m'est sympathique, j'admire sa droiture, sa loyauté et même d'une certaine façon son combat mais quand je me prends à le lire directement, il n'émane de moi qu'un morne et peu satisfaisant : « Mmm ouais, sans plus... »

Je ne peux pas dire, par exemple, que cette pièce, Les Justes, soit inintéressante, non, absolument pas. Mais si je veux être honnête avec vous et avec mon ressenti, je ne peux pas dire non plus que je la trouve captivante, ni émouvante, ni motivante, ni toutes ces choses en " vante " qu'on nous vante. Il ne ressort de moi que le triste " décevante " qui souvent m'épouvante quand il vente le soir au crépuscule...

La réflexion centrale de cette pièce est celle de la justification d'un crime pour raison politique. N'est-on pas tout aussi bourreau que le dictateur si notre moyen d'action est le crime ? Peut-on, pour un bien hypothétique et futur, faire présentement un acte vil et pendable ?

Le contexte retenu par Albert Camus et qui s'appuie sur des faits historiques réels (tous les personnages de la pièce ont réellement existé et l'attentat dont il est question fut perpétré le 17 février 1905 contre le grand-duc Serge Alexandrovitch de Russie) est celui de la révolution russe (revendication pour l'installation du communisme en lieu et place d'une autocratie tsariste de type dictatorial) mais il pourrait tout aussi bien s'appliquer à n'importe quelle révolution. le personnage de Stepan rappelle étrangement notre brave Robespierre, droit dans ses bottes et prêt à tout pour aller jusqu'au bout de l'idée, quitte à être plus dictatorial que le dictateur même.

La question du jugement est également soulevée. de tels fanatiques assassins, espèrent-ils autre chose que la mort ? Est-ce les punir que de les faire mourir ? (Je vous conseille à ce propos Les Sept Pendus de Leonid Andreïev qui répond ou qui prolonge admirablement cette pièce.) À l'époque de l'écriture de la pièce, la peine de mort était encore très largement répandue, même dans les démocraties occidentales qui l'ont depuis, peu à peu, abandonnée.

Ici, la question se pose, et les terroristes révolutionnaires russes de Camus n'ont probablement rien de très différent avec les terroristes kamikazes palestiniens d'aujourd'hui. Ils sont convaincus d'être des justiciers et d'oeuvrer pour le bien public en se faisant exploser contre un bus quelconque et en massacrant un maximum d'innocents.

Si l'on renonce à ce levier d'action, quel autre moyen choisir pour qu'il soit efficace et qu'il abrège rapidement la souffrance des peuples ? En ce sens, Albert Camus amène des questionnements intéressants et bien sentis. Par contre, je reste toujours dubitative sur le « style » Camus, qui m'indispose presque, tellement je le trouve plat, morne, sans âme, sans vie, telle une mue de cigale dont le petit corps musicien aurait déserté la scène.

Bref, pas ma tasse de thé stylistiquement parlant, mais comme je l'avais déjà longuement évoqué pour L'Étranger, je vais m'arrêter là car ces menues considérations ne sont que mon avis, pas toujours très juste, c'est-à-dire, bien peu de chose.
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En Russie un groupe de 5 socialistes révolutionnaires préparent un attentat contre le despote Grand Duc Serge. Kaliayeb un des membres de l'organisation se sacrifie pour lancer la bombe, mais voilà, ce jour là dans la calèche le Grand Duc est accompagné de son neveu et sa nièce, de jeunes enfants. Kaliayeb renonce...
Deux jours plus tard, Kaliayeb passe à l'action et tue le Grand Duc, il sera arrêté.

Chaque membre de cette organisation joue un rôle différent mais est porté par la même cause.
- Kaliayeb est un idéaliste, en tuant le grand duc pense écraser le despotisme et s'identifie à un justicier.
- Stepan est plus radical, il est prêt à tuer même des innocents comme les 2 enfants pour sauver d'autres enfants russes qui meurent de faim. Il n'a aucun état d'âme, pendant 3 ans il a été prisonnier et fouetté, sa femme s'est suicidée pour protester d'où sa détermination.
- Dora joue un rôle important dans le groupe, elle est conciliante et influente, elle oblige les révolutionnaires à réfléchir sur le sens de leur acte. Partagée entre son amour pour Kaliayeb et sa cause, elle est parfois dans la confusion et souffre.
- Annenkov chef du groupe est l'homme de raison et Voinov est vulnérable et hésitant dans son engagement.

Basé sur des faits réels, cette pièce à 5 actes nous amène à plusieurs réflexions sur le terrorisme, le sacrifice, la justice, le despotisme, la peine de mort...

Chaque individu qui défend une cause extrémiste pense toujours qu'elle est juste mais l'est-elle forcément pour les autres !
Se sacrifier pour une idée relève de son propre choix, chacun décide de sa vie ou de sa mort que ce soit pour des raisons personnelles ou idéologiques, mais tuer pour une idée même si la cible est la pire des espèces humaines est-elle justifiée, a-t-on le droit de tuer ou de juger si quelqu'un doit mourir !
Tuer le despotisme par le terrorisme est-ce vraiment un juste aboutissement !
Tuer pour que d'autres vivent donne-t-il raison aux exécutants et pour le coup sont-ils des terroristes ou des résistants contre la tyrannie russe !
Chacun aura sa propre opinion sur le sujet et pourra débattre sur cet attentat à sa guise.
Mais avant tout, tuer pour une cause même juste, n'est-ce pas aussi un meurtre ?

« Les justes » est une oeuvre essentielle qui fait réagir, mais c'est également une tragédie amoureuse celle de Dora et Kaliayeb, une histoire d'amour dramatique puisqu'elle est incompatible avec la cause révolutionnaire qu'ils défendent.
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Belle et grande pièce de théâtre qui aborde des sujets sérieux et fait passer des messages. Pièce dédiée à la lutte contre l'oppression. Pièce qui est un plaidoyer pour la fidélité à la cause, fidélité sans faille puisqu'elle peut être couronnée par la mort sur l'échafaud. Pièce qui met en avant l'amitié et la fraternité dans le combat, qui fait réfléchir aussi aux conséquences d'une action. Pièce qui porte un regard sur la justice, la peur, la trahison, le reniement, le recours à la religion. du grand théâtre, du bel ouvrage, de la grande littérature. Une superbe oeuvre d'Albert Camus.
Lien : http://araucaria20six.fr/
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La relecture d'un livre découvert à l'adolescence est toujours un peu risquée et d'autant plus que cette oeuvre avait eu un fort impact. C'est donc avec la crainte d'être légèrement déçue que j'ai relu « les justes » de Camus dont je gardais un souvenir assez intense. Par bonheur, cette relecture fut aussi bonne, peut-être même meilleure, que la première.

En général, en matière de théâtre, je recherche avant tout la beauté stylistique. C'est pour ça que j'apprécie tout particulièrement le registre de la tragédie d'inspiration antique avec ses situations épurées et ses dialogues finement ciselés. Avec « les justes » on est assez loin de ce registre. Si le texte est bien écrit, il n'est pas flamboyant non plus, il ne subjugue pas le lecteur. La force de cette oeuvre est la réflexion politico-philosophique qu'il porte. Ce questionnement sur l'usage de la violence pour défendre des idées est brillamment posé et donne vraiment à réfléchir. de plus, Camus n'impose jamais à son lecteur un point de vue réducteur, il l'invite à se poser des questions, à réfléchir et à se faire ses propres opinions. Il ne juge pas ses personnages de façon péremptoire, s'il ne loue pas leurs actes, il ne les condamne pas définitivement non plus. La nuance, c'est ce qui manque trop souvent quand des sujets graves sont abordés. Dans une société où tout va trop vite, il faut rapidement se faire une opinion tranchée sur n'importe quel sujet sans prendre le temps d'une véritable réflexion. Même les intellectuels d'aujourd'hui ont tendance à céder à cette injonction à se ranger dans un camp de façon urgente. Pourtant, rien n'est jamais si simple. Selon moi, le rôle de l'intellectuel n'est pas forcément de prendre position à tout prix mais plutôt de poser les pistes de réflexion tout en étant dans une démarche de constante remise en question, ce qui n'empêche pas d'être engagé et d'avoir des idéaux. Voilà pourquoi lire une pièce comme « les justes » est particulièrement important et bénéfique. La relire est une expérience encore plus riche. A la réflexion intellectuelle portée par la pièce, s'ajoute une dimension plus personnelle. Comparer les façons dont on reçoit le texte à deux époques de sa vie met en lumière sa propre évolution de pensée et je trouve ça intéressant.

Cela faisait une éternité que je n'avais pas lu Camus. Cette redécouverte me donne envie de continuer à le lire et relire.
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C'est vrai que j'ai toujours eu un peu de mal avec les écrits d'Albert Camus, non pas avec l'écriture en elle-même mais en raison des sujets car cela est m'a toujours un peu dérangée, mise mal à l'aise (je fais notamment allusion ici à L'Etranger que j'ai lu il y a de nombreuses années déjà) mais là, j'avais envie de découvrir ses pièces de théâtre.

Il est ici question d'un sujet qui, bien que véridique mais romancé (enfin adapté en pièce de théâtre) s'est déroulé au début du siècle dernier et qui pourtant demeure toujours d'actualité : peut-on mourir pour une idée ? Dora Doulebov, Ivan Kaliayey (notre héros), Stepan Fedorov, Boris Annenkov (le chef) et Alexis Voinov sont un groupe de révolutionnaires communistes appartenant à "L'Organisation" s'étant fixé pour but d'assassiner le Grand-Duc afin de faire entendre leur voix, celui du peuple russe qui est en grande souffrance.

Seulement, la première opération échoue car si tous sont prêts à donner leur vie pour une idée et à abattre le dit grand-duc, il en est autrement lorsqu'ils le trouvent (enfin, le premier qui se trouvé chargé de mettre en place le dit attentat) face à des enfants, qui, eux, n'ont rien demandé et incarnent, bien qu'ils appartiennent à une haute lignée, encore l'innocence. Si ils se disent donc prêts à mourir pour leur idéal, ils ne sont cependant pas tous prêts à le faire à n'importe quel prix !

Une pièce de théâtre qui m'a permis donc de me réconcilier un tant soit peu avec les écrits de Camus. Un ouvrage très vite lu, mais qui je pense sera long à digérer tant les faits décrits ici restent malgré tout, toujours d'actualité. A découvrir et à faire découvrir !
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Citations et extraits (294) Voir plus Ajouter une citation
DORA
Ouvre les yeux et comprends que l'Organisation perdrait ses pouvoirs et son influence si elle tolérait, un seul moment, que des enfants fussent broyés par nos bombes.

STEPAN
Je n'ai pas assez de coeur pour ces niaiseries. Quand nous nous déciderons à oublier les enfants, ce jour-là, nous serons les maîtres du monde et la révolution triomphera.

DORA
Ce jour-là, la révolution sera haïe de l'humanité entière.

STEPAN
Qu'importe si nous l'aimons assez fort pour l'imposer à l'humanité entière et la sauver d'elle-même et de son esclavage.
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Je sais maintenant qu'il n'y a pas de bonheur dans la haine.
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KALIAYEV : C'est cela l'amour, tout donner, tout sacrifier sans espoir de retour.
DORA : Peut-être. C'est l'amour absolu, la joie pure et solitaire, c'est celui qui me brûle en effet. À certaines heures, pourtant, je me demande si l'amour n'est pas autre chose, s'il peut cesser d'être un monologue, et s'il n'y a pas une réponse, quelquefois.
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STEPAN : Je n'aime pas la vie, mais la justice qui est au-dessus de la vie.
KALIAYEV : Chacun sert la justice comme il peut. Il faut accepter que nous soyons différents. Il faut nous aimer, si nous le pouvons.
STEPAN : Nous ne le pouvons pas.
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Mourir pour l'idée, c'est la seule façon d'être à la hauteur de l'idée.
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Vidéo de Albert Camus
Rencontre avec Denis Salas autour de le déni du viol. Essai de justice narrative paru aux éditions Michalon.
-- avec l'Université Toulouse Capitole


Denis Salas, ancien juge, enseigne à l'École nationale de la magistrature et dirige la revue Les Cahiers de la Justice. Il préside l'Association française pour l'histoire de la justice. Il a publié aux éditions Michalon Albert Camus. La justice révolte, Kafka. le combat avec la loi et, avec Antoine Garapon, Imaginer la loi. le droit dans la littérature.


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02/02/2024 - Réalisation et mise en ondes Radio Radio, RR+, Radio TER
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