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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Le grand Môme.
Dans une longue lettre datée du 28 septembre 1914 adressée à Else, une femme croisée naguère et idéalisée depuis, le lieutenant prussien Werner Heller, à la veille d'un assaut qu'il pressent fatal, se confie en transcrivant son amour indicible pour une femme entrevue à Paris. Pour atteindre sa vérité et la rendre audible, avec une délicatesse extrême, Werner Heller va fouiller au plus intime de lui-même, fouissant les mots, approchant la zone flottante et féconde du silence intérieur qu'une nuit blanche peut révéler.
A travers une lettre testamentaire fictive faisant l'aveu de l'amour à une quasi inconnue, passante baudelairienne par essence, Pierre Cendors réveille la poésie, lui redonne souffle, l'alimentant aux sources anciennes et toujours vives de poètes portés en soi, qu'elles émanent de Rimbaud, de Rilke ou d'Alain-Fournier conservant le souvenir aigu d'Yvonne de Quiévrecourt croisée à Paris et se métamorphosant en Yvonne de Galais dans le Grand Meaulnes. Au chapitre X, quand Pierre Cendors narre l'agonie d'un lieutenant français, la main cachant une blessure mortelle, bien que les mots fassent comme une ouate, le lecteur est frappé par la tragédie de la guerre qui gicle aux interstices des phrases. le poète sera jeté en fosse commune mais Heller, en récupérant les papiers du mort peut y lire : « L'amour est comme une première ligne de feu ».
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Subir un envoûtement à la lecture de ces phrases, qui coulent en nous, lecteurs chanceux d'avoir cet opus entre les mains.
Ce livre vous parle d'amour en une longue lettre vibrante.
1914 ? Heller lieutenant allemand croit sa fin proche. Il écrit à la femme française qu'il a rencontré juste avant la déclaration de guerre. Il devait faire son portrait mais la toile est restée vierge.
« Ce jeûne me rassurait sans m'illusionner. Devant vous, j'avais entendu une autre vie m'appeler à l'intérieur de ma vie. Loin d'être dupe sur la nature de mes sentiments pour vous, je veillai à ce que ceux-ci ne franchissent pas clandestinement une frontière sensible, la dernière, celle qui m'offrait encore un peu de terre ferme sous les pieds. Aussi me réfugiai-je dans un quotidien où j'étais sûr d'être le moins atteignable. »
En un condensé de mots précieux, de forme poétique, le lecteur voit éclore le sentiment amoureux.
Imagé et hypnotique, les mots coulent dans un temps suspendu entre l'immédiateté et l'infini souhaité.
« C'est une bouche close qui invite l'aveu, c'est les yeux d'une inconnue qui nous exaucent, c'est cette passerelle entre deux souffles, cette séparation des mondes brusquement abstraite dans la nocturne montée d'un désir. Et c'est cette senteur de bouquet déchiré dans l'oragée des corps. »
Le lecteur vit une aventure où il va faire le grand saut dans la beauté absolue de l'écriture de Pierre Cendors.
Tout y est vie qui pulse, les mots nous transpercent pour nous laisser pantois devant tant de magnificence.
« Les mots sont des yeux qui aident à sonder nos tréfonds, même à notre insu. »
Seul bémol, la police utilisée qui fait mal aux yeux.
©Chantal Lafon-Litteratum Amor 28 octobre 2019.
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Septembre 1914,

C'est le début de la guerre et tous les soldats espèrent déjà la fin du conflit pour pouvoir retourner chez eux. de son petit village où il a une permission, le lieutenant allemand Werner Heller écrit une lettre d'amour à une femme qu'il ne connaît pas et dont le souvenir l'accompagne dans les tranchées, face à la mort. Il ne sait que son nom. Un regard croisé à Paris, une main effleurée et un silence intense. La portée du silence est spéciale, puissante, plus bavarde et plus sincère que la parole.
Minuit en mon silence sont les mots écrits d'un jeune poète de sa garnison juste avant de mourir :
« Un jour, lieutenant, vous m'avez demandé pourquoi je m'étais engagé et ce que j'étais venu chercher dans cet enfer. La dévastation m'a conduit à cette guerre. Je n'ai pas besoin de vous dire que peu en reviendront. Et ceux qui en réchapperont seront tombés d'une autre manière. Moi, je suis tombé bien avant. Au moment de mon arrivée, je portais le deuil de mon enfance. J'avais vingt ans. Il était minuit en mon silence. »

Heller raconte dans sa lettre à Else un temps passé et ses césures, de l'enfance à l'adolescence et de l'adolescence à l'âge adulte. Il lui parle de l'amour qu'il a tout le temps cherché à travers les femmes de sa vie et qu'il nomme Orphia. Il lui dit la solitude et son avancée vers le front, la peur, ses hommes, et toujours le silence qui l'habite, le silence qui est comme une musique de mots.
Cette lettre peu ordinaire, si poétique, emplie de mélancolie et de passion retenue pour son idéal absolu qu'il écrit « inaccessible », est certainement l'ultime confession d'un homme qui se sait sacrifié.

Ce roman fait penser à d'autres histoires lues. L'auteur évoque la mémoire d'Alain-Fournier décédé en 1914, qui a écrit la magnifique histoire d'amour entre Augustin Meaulnes et Yvonne de Galais ; une silhouette qu'il voit lors d'un bal masqué, qu'il perd et qu'il recherche longtemps. le style épistolaire et la sonorité de la prose rappellent celui de Stefan Zweig, « Lettre d'une inconnue », et celui de Rainer Maria Rilke, « Lettres à un jeune poète », des auteurs du début du XXe siècle. C'est triste, idéaliste, chimérique et très beau.
Je vous recommande cette lecture…
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« Chère Else,
Je dois bientôt m'en aller, partir. Vous quitter. C'est la dernière nuit que je passe en tête à tête avec votre absence. C'est là, je le sais, toute la compagnie que je recevrai jamais de vous. Demain, je serai de retour au front. Je n'ai jamais pu mentir devant vous. Je m'avance sur un chemin où, dans quelques heures, à l'instant peut-être où vous lirez ces mots, je me serai déjà franchi. »
Ce premier paragraphe à peine terminé, je suis conquise.
Un lieutenant allemand, peintre, ayant vécu à Paris jusqu'à la mobilisation écrit une lettre à Else, une femme plus fantasmée que réelle rencontrée une seule fois.
« Vos pensées comme vos nuits me sont inconnues. Je ne vous connais que de loi et, pourtant, depuis notre rencontre à Paris, vous m'êtes devenues plus intiment liée que mon propre souffle. Vous êtes apparue sur mon chemin en l'ouvrant à sa plus secrète sente. »

Cette lettre, la recevra t'elle, la lira t'elle alors que le lieutenant Heller se prépare à partir à l'assaut au lever du jour. Il sait qu'il n'en sortira pas vivant. Cette assurance le pousse à parler d'amour d'intériorité, de dévoiler ses pensées à Else qu'il sublime en Orphia.
En chaque homme, madame, est une intensité errante qui recompose, femme après femme, le visage d'une seule. Inaccessible. Cruellement proche. Chacune d'entre elle la lui rappelle. Toute lui sont un exil.


Ce livre écrit « A la mémoire d'Alain-Fournier » qui fut l'idole de mon adolescence, est poésie et beauté. Tout comme l'auteur du Grand Meaulnes, il sublime une femme juste rencontrée et en fait LA femme, L'AMOUR. Lorsqu'il parle d'Orphée, l'ordonnance du lieutenant, qu'il prénomme Orphée, Pierre Cendors rend hommage à tous les poètes et artistes morts aux combats, qui ont donné des textes magnifiques.
Si les mots savent habiller nos sentiments et nos pensées, ils échouent à nous mettre à nu. La nudité de l'être use leur étoffe jusqu'à atteindre une transparence peu dicible.
La poésie, madame, c'est désimaginer le monde tel qu'on nous le vend. C'est découvrir qu'il n'est rien et que s'en éveiller est tout.
Un livre que j'ai pris plaisir à déguster, émerveillée par la richesse, la poésie du texte, retournant en arrière, juste pour le plaisir d'une phrase. Pierre Cendors, à travers le narrateur, interpelle sur la liberté, l'absurdité de la guerre.
Je n'avais pu entrer dans son précédent livre, « Archives du vent », le cinéma n'est pas mon domaine de prédilection, mais l'écriture de Pierre Cendors m'avait interpellée. Ravie d'avoir réitéré avec « Minuit en mon silence »

Lien : http://zazymut.over-blog.com..
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Sur le front en septembre 1914, Werner Heller, lieutenant de l'armée prussienne, prend la plume pour adresser une longue lettre - la première et peut-être bien la dernière - à une femme croisée à Paris. Il la connaît à peine mais elle occupe ses pensées, cristallisant un idéal d'amour. Il en a connu des femmes pourtant mais peut-être celle-ci dans son éloignement revêt-elle une aura tout autre. Ou alors est-ce l'omniprésence de la mort qui l'incite à ouvrir son coeur ?
Dans la longue lettre qu'il adresse à Else, le soldat, par ailleurs peintre, évoque ses camarades du front, et ce qui les tient ensemble dans la même ardeur effrayée. Mais c'est surtout son âme d'esthète qu'il livre : une pensée traversée par la poésie, la peinture, l'art en général comme essence même de la vie.
Une lettre pour un aveu d'amour, une missive comme la trace d'une vie éclairée par la beauté du monde, celle de la nature mais aussi celle née de la poésie.
Minuit en mon silence marque ma première rencontre - et quelle rencontre ! - avec l'univers de Pierre Cendors dont la plume érudite conduit avec lyrisme sur des chemins de pure beauté. Il y a dans ce roman-poème l'amour du verbe, des mots qui revêtent la vie d'atours somptueux. Tout semble ici faire poésie : les élans comme les arrêts des coeurs.
Lien : https://31rstfloor.wordpress..
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Il est minuit en son silence, aux tréfonds de l'obscurité sauvage qui l'habite ; recouverte d'un manteau de neige. Son âme la plus secrète est un paysage d'hiver habité par la nuit, le voile noir d'une enfance dont il porte le deuil ; constellée de flocons de neige portés par le vent, soufflés comme autant de mots de la langue maternelle d'une première existence cosmique. Un temps ancestral de vide et de gel. Sa nuit éclaire l'innommé de l'être par les vers d'un poème silencieux, le chant muet d'un infini. Déclamé par la voix recluse du silence ; porte d'entrée de l'inconnaissable, de l'inexplicable ; du réel absolu auquel rendre une âme prisonnière de sa liberté, à laquelle la vie n'appartient plus.
Il est minuit en un silence d'une mort à laquelle il se destine. Heller est un lieutenant allemand envoyé au front à l'automne 1914. Au crépuscule d'une vie qui le renvoie à l'enfance ; passage étroit entre son âme et le monde, il écrit une lettre d'amour à une femme qu'il pense ne jamais revoir.
Une lettre dont les mots légers comme des flocons de neige virevoltent, suspendus, jusqu'à notre esprit. L'écriture de Pierre Cendors ne se raconte pas, elle se vit. Sa prose est une poésie vibratoire qui atteint le lecteur au plus profond de lui. « Une langue de l'âme pour l'âme ».

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Coup de ❤ absolu pour ce texte d'une poésie admirable! Minuit en mon silence de Pierre Cendors, aux éditions le Tripode.

L'histoire se déroule au début de la première guerre mondiale. Un soldat allemand est envoyé au front. Il sait qu'il va mourir. Il écrit une lettre d'Amour à une femme française qui ignore cet amour. Une lettre d'une beauté incroyable.

Bien sûr il est question dans ce texte de sentiments amoureux, fulgurants, inavoués. Mais pas seulement. L'auteur pose aussi la question de la guerre, de son sens, des souffrances engendrées. le style est splendide, poétique, émouvant. On dirait du Stefan Zweig...
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Extrait de ma chronique :

"Le problème central qui préoccupe Pierre Cendors dans ce texte bref mais intense est de savoir comment il est possible de se connaître soi-même : à première vue, "ce que nous sommes demeure inconnaissable" (IV & IX), mais il est néanmoins possible de s'atteindre, par la médiation d'une femme (l'Else à qui s'adresse la lettre) ou d'un ami (le soldat surnommé Orphée) – une médiation qui s'accomplit paradoxalement par l'absence de l'une et le silence de l'autre.


Ainsi s'explique le titre du livre, "minuit en mon silence", qui est aussi l'heure où est arrêté le coeur d'Orphée (XIII). Dans cette vision des choses, ce qui importe n'est pas, comme chez André Breton, l'accomplissement de la relation amoureuse ou amicale, au contraire : c'est, comme dans le Grand Meaulnes d'Alain-Fournier, à qui le texte est dédié, la tension qu'elle fait naître en nous, pour nous pousser à désirer cette "autre vie en dormance" (XIV), cette déesse qui dort en chacun de nous, Orphia, et qui est notre véritable visage, "le secret pays de chacun" (XVIII) - ou la Nature telle que la voient Novalis dans Les Disciples à Saïs et Sabrina Calvo dans Sous la colline."


Lien : https://weirdaholic.blogspot..
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