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sur 1706 notes
Je suis amoureux, depuis le premier roman que j'ai lu de sa main, de l'écriture de Sorj Chalandon. Et cette sixième rencontre, en ce qui me concerne, que je me suis empressé de vivre sachant la sortie prochaine d'un nouveau roman, n'a pas fait varier d'un pouce mon admiration. « Empressé » est un bien grand mot puisque j'ai laissé passé un an entre Mon traître et Retour à Killybegs. Aucune raison particulière, en tout cas aucune bonne. Mais une fois encore, je quitte Chalandon subjugué. C'est tendre et éprouvant, direct, coupant, taillé dans la chair de la grammaire sans jamais ôter toute sa délicatesse au verbe. Vraiment, c'est l'auteur français contemporain que j'aime le plus lire.

Et pourtant, malgré ma pâmoison, Sorj avait cette fois un défi à relever : car j'ai sur l'idée de la traîtrise, comme tout bon épargné qui se respecte, un point de vue bien tranché : je le dois en partie à une étudiante que je fréquentais plus jeune, Sihem, une femme aussi intelligente et intègre qu'elle était belle et forte et qui, sur la question des harkis, m'avait livré son coeur meurtrie d'algérienne. La guerre n'est jamais belle, et chaque camp compte ses faits de gloire et ses honteuses actions. Mais quand on est dans le camp qui est assailli, bousculé, traqué, humilié, torturé, calomnié, appauvri, dépossédé, on a un seul devoir : résister, à la hauteur de ses moyens, ne serait que par le silence si l'on n'a d'autre arme ou le courage de l'action. Mais on résiste ! On se le doit comme on le doit à sa famille, son peuple, ses amis : ce clan dans lequel on est, peut-être par le plus grand des hasards, mais qui vous fait ; on ne pense plus « je » mais « nous » ! En l'honneur de tous les siens, morts ou vivants. C'est le seul espoir d'avenir digne, c'est le respect que l'on doit aux martyres. La traîtrise est la pire des choses.

Chalandon, qui ausculte l'histoire à travers le coeur des hommes, qui l'écrit avec les maux du tourment, sur des lignes qui errent au gré des événements subis, qui flirtent avec le précipice, mais sans jamais pourtant quitter des yeux un horizon clément ; Chalandon qui soulève la poussière que laissent les idées courtes et les mots trop vite balancés pour mettre à jour les vérités secrètes, profondes, celles qui ont été enfouies, dissimulées, et qui révèle ainsi la complexité de la chose humaine, est presque parvenu à me convaincre : le traître, aussi, certains a tout le moins, est homme parmi les hommes, bataillant avec ses propres démons, plein de ses raisons et peut-être, oui peut-être, porteur d'une lumière qu'il est cruel de recouvrir sans même la regarder.

Par ce grand roman, encore, il a de toute façon rendu justice à certains d'entre eux : cette justice qui rime avec la politesse du coeur et le respect de chacun, qui accepte d'écouter et s'efforce d'entendre, qui ne toise pas mais qui regarde, au fond des yeux, celui qu'il faut tout de même juger sur ses actes les moins nobles.

Chacun se fera son idée sur le sujet. Une chose est certaine, c'est une fois encore, un texte bouleversant d'humanité.
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Retour à Killybegs n'est pas une suite à Mon traître mais un complément.
Les personnages sont identiques et la cause reste la même : les conflits en Irlande du Nord. Ici, nous découvrons l'histoire de Tyrone Meehen - Denis Donaldson, le personnage réel et comment Antoine Chalons, le luthier français -Sorj Chalandon, se sont rencontrés et son questionnement sur la trahison de celui qui se disait son ami.
Dans ce volume, le lecteur suit le parcours du traître depuis son enfance jusqu'à sa mort. On y apprend aussi comment et pourquoi il a été amené à trahir ses amis, la cause pour laquelle il se bat, son pays.
Son ami Antoine - Sorj- se pose énormément de questions sont les liens d'amitiés tissés entre les deux hommes. Ce volume est encore plus poignant que le précédant "mon traître". Au départ Sorj Chalandon est un journaliste pas un écrivain. il couvre des faits, ne raconte pas des histoires. Ces faits ont bouleversé sa vie. Il a alors mis par écrit cette douloureuse histoire. Mon traître et retour à Killybegs sont deux ouvrages expiatoires.
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J'ai la soixantaine, et pour moi le conflit irlandais était en toile de fond pendant des années dans ma jeunesse, mon adolescence, jusqu'à mes années étudiantes mais sans essayer jamais de savoir ce qui se passait vraiment. Les deux livres indissociables que sont "mon traître" et "retour à ..." m'ont permis enfin de comprendre (pas d'adhérer, pas d'excuser) ces accès de violence que l'on voyait sur nos écrans et dans nos journaux. "mon traître" a été un coup de coeur, "retour à ..." est peut-être encore plus poignant: on suit ici dans toute sa vie complexe, compliquée, dure, mais aussi pleine d'amour, un jeune irlandais pauvre, devenu un combattant puis un traître (je ne dévoile rien). On voit ce qu'est une sale guerre (y en a t'il de propres?) entre "occupants" (anglais) et "occupés", et on peut se demander ce qu'on aurait été, nous, dans de telles situations. C'est un livre superbement écrit, profondément humain, rempli de personnages réels, vrais, dont on touche l'âme. Merci à Jorg Chalandon pour ces cadeaux infiniment précieux que sont ces deux ouvrages.
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Ceux qui auront lu "Mon traitre" liront forcément "Retour à Killybegs", la lecture indispensable pour savoir et peut-être comprendre pourquoi Tyrone Meehan a trahi.
Dans le premier livre Antoine nous racontait son Irlande, dans celui-ci Tyrone va nous donner un autre éclairage, le sien, certaines scènes seront fascinantes car vécues par les deux hommes mais racontées cette fois par Tyrone, c'est terriblement efficace en terme d'émotions et de psychologie.
L'auteur nous offre ici un récit d'une force phénoménale en même temps qu'un cours d'histoire magistral, pour moi jusqu'à cette lecture, le conflit nord irlandais c'était l'IRA contre l'armée anglaise, les opprimés contre les oppresseurs, c'est en fait bien plus compliqué que cela.
Ce récit va décrypter le pourquoi d'une haine poussée à son paroxysme entre deux communautés, entre voisins de rue souvent, une haine tellement viscérale qu'il faut être irlandais pour la comprendre et ce quel que soit le drapeau que l'on vénère.
Ce qui fait la force de cette histoire est que tout ce qui est écrit est vrai bien que romancé, on comprend comment l'engagement commence dès l'enfance avec une rage et une haine chevillées au corps.
On comprend les règles impitoyables qui régissent les comportements et verrouillent les coeurs d'un peuple, pas seulement des combattants.
On sera stupéfait d'apprendre la "position" discutable des catholiques nord irlandais dans le conflit pendant la seconde guerre mondiale, compréhensible bien qu'indéfendable aujourd'hui.
Les descriptions des conditions inhumaines de détentions font froid dans le dos pour les gens que nous sommes aujourd'hui, même rétrospectivement, il s'agit d'une histoire vraie rappelons-le. Quand je pense que Tyrone fut libéré en janvier 1981 après 13 ans d'incarcération le jour même ou je fêtais mes 18 ans et ma majorité toute neuve à une heure d'avion de là...
Je ne vais rien dévoiler de plus, simplement dire que ce scénario n'a rien à envier aux plus brillants romans d'espionnage, que la perversité humaine n'a pas de limites, dire aussi que certaines destinées sont vraiment cruelles, quel roman, quelle histoire !
A la fin il sera compliqué d'avoir un jugement je crois, c'est un récit éprouvant psychologiquement, un récit hors norme et un livre unique.
J'avais pris une énorme claque avec "Mon traitre", j'en ai pris une autre avec "Retour à Killybegs" !
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Ce roman permet de donner un regard nouveau sur une période agitée de l'Irlande. En effet, l'auteur décide de prendre le parti de décrire l'IRA de l'intérieur pour analyser les raisons de ce mouvement, les excès dans tous les camps et une paix finale qui garde un goût amer pour les deux camps. le personnage principal est fort et possède un véritable charisme et on vit à travers ses yeux son engagement dans l'IRA, sa montée en puissance, une volonté de fer, sa trahison, sa déchéance, mais également ses états d'âme. Un roman d'une rare puissance sur la violence de ce conflit. A lire absolument.
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Un superbe décor: Guinness, tourbe, briques noircies, pierres usées, landes.

Des hommes en guerre, aussi inflexibles dans chaque camp, appuyés sur leurs convictions renforcées par chaque décès ou maltraitance du camp d'en face. Un cercle infernal, auquel Tyrone Meehan tente d'échapper par la "traitrise". Non pas à l'issue d'une réflexion argumentée. Mais peu à peu, avec un déclencheur majeur qui sera..... le remords. 

Mais ce livre est également un portrait, touche après touche, qui conte l'évolution de Tyrone Meehan, ses hésitations, ses regrets, comment sa jeunesse, l'IRA, ses amis, sa femme ont peu à peu façonné ce qu'il est devenu avant de trahir. 
Un beau livre tout en subtilité dans le décor violent qui nous fait vivre de l'intérieur cette "guerre d'Irlande".
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Qu'as-tu fait, petit homme ?

Tyrone Meehan a trahi. On le sait dès le début, on le sait surtout si on a lu « Mon traitre » avant. Après le récit du trahi, voici le récit du traître. 25 ans de double jeu. Pourquoi en vient-on à donner ses frères? A abandonner le combat d'une vie ? Quand on a été un héros de l'IRA, on vit comment après ça ?
A 81 ans, Tyrone revient dans le petit village qui l'a vu naître. le processus de paix a sonné la fin du conflit mais il est désormais « le traître ».

Loin des clichés sur l'Irlande, la confession de Tyrone Meehan nous révèle toute la complexité de la question irlandaise, le fardeau de l'engagement, la saleté de la guerre quelque soit son camp.
La tourmente du destin de Tyrone est une nouvelle fois l'occasion pour Chalandon de creuser dans l'obscurité de l'âme des hommes. Il le fait avec sensibilité, délicatesse, profondeur, sans aucun manichéisme, sans jugement avec la maestria émotionnelle qu'on lui connaît.
C'est rude, c'est tragique, c'est beau, c'est un grand roman français.
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Second livre lu de Sort Chalandon, après le quatrième mur : cet auteur deviendra probablement l'un de mes auteurs préférés.
Deux livres sur deux conflits radicalement différents (l'un sur la guerre du Liban, l'autre sur celle d'Irlande), mais vus du point de vue de l'humain, des gens qui sont au coeur des combats.
Pas d'analyse politique dans ce récit, néanmoins une certaine prise de hauteur permise par la narration autorise des sauts dans le temps pour finalement voir ce qui ressort de tous ces destins détruits.
Malgré quelques effets de manches ("Antoine rentrait dans nos rangs. Il quittait sa vie sans amour par amours de nos vies"), le style est droit et percutant, très "cinégénique".
Coup de coeur, ce genre d'ouvrage ne laisse pas indemne.
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C'est la même histoire que "Mon traitre", mais racontée du point de vue du traitre (ami du Français). Magistral ! On comprend enfin les motivations de ces gens, et de cet homme qui va trahir pour servir sa cause (et ramener la paix). Il n'y a pas de « gentils » et de « méchants », juste la misère, la souffrance et l'espoir. Très belle écriture.
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Une histoire basé sur celle d'un combattant de l'IRA, qui s'étend sur 50 ans. le personnage est un irlandais typique, bourru et imbibé de Guiness, aux principes vissés dans le corps.
La description du dilemme auquel il fait face est très bien faite.
La structure du roman avec les anner retour entre sa dernière année et les étapes de sa vie est également bien articulée
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