Agatha Christie a bercé mon adolescence littéraire. Il me reste encore des souvenirs très précis de ma découverte de son univers, via notamment les célèbres
Dix petits nègres ou
le crime de l'Orient-Express. Je lis depuis un polar ou je regarde un film policier avec un oeil différent, envisageant toujours le plus invraisemblable... mais qui reste possible. Cela m'a parfois amené à trouver la solution avant les autres... ou à me retrouver déçu par des intrigues bien trop simplistes de certains de ses collègues auteurs. Bref, méfiez-vous, lire
Agatha Christie, c'est changer à jamais son regard sur un genre littéraire.
J'avais commencé il y a bien longtemps une liste des Livres lus, à lire, les séries en cours. J'ai retrouvé cette liste dans un vieux fichier Excel, et tout en haut figurait
le crime du golf. Les challenges divers m'incitent à me pencher vers
Agatha Christie, et c'est avec plaisir que je la retrouve ainsi, ainsi que ma plus ancienne PAL.
Ce tome est uniquement le deuxième de la série des Hercule Poirot écrit par l'auteur, après
la mystérieuse affaire de Styles, que l'auteure évoque d'ailleurs brièvement dans le roman. le "couple" Hastings-Poirot est donc tout neuf mais Christie choisit déjà de nous l'installer comme un vieux duo de compères trainant leur bosse depuis longtemps et se connaissant parfaitement. Cette complicité est un des ressorts secrets de la réussite de la série des Hercule Poirot. L'auteure sait que nous ne pourrons pas nous identifier parfaitement à Poirot, puisqu'il trouvera des choses que nous serons bluffés de découvrir. Elle nous offre donc Hastings, peut-être moins doué mais du coup plus humain (alors qu'il est Anglais, un comble... English friends, it's just a joke, don't get offensed). On se trompe avec lui, on découvre ce que Poirot savait déjà la plupart du temps en même temps que lui, on retombe des nues l'instant d'après avec lui également... J'avoue que sur ce tome j'ai réussi à dépasser Hastings à plusieurs reprises, mais sans doute étais-je moins aveuglé par mes sentiments.
Bref, Christie a déjà mis en place tous les ingrédients de son succès dans cette enquête. J'ai même vérifié que je ne l'avais vraiment pas lu car un vrai sentiment de familiarité m'a saisi à certains moments... et il m'était déjà arrivé de relire un Christie sans me rendre compte que je l'avais déjà lu... et de me tromper à nouveaux dans le choix du meurtrier (c'était
Jeux de Glaces, si je ne m'abuse). Lire un
Agatha Christie, c'est comme regarder un James Bond. On sait ce qu'on va y trouver, mais on reste surpris à chaque instant, émerveillé par le talent de l'auteure. On ne s'ennuie pas une seconde et on dévore les romans comme s'il s'agissait de petites nouvelles.
Je vais tâcher de revenir plus régulièrement à cette madeleine de
Proust littéraire, afin de venir à bout de la totalité de l'oeuvre de cette grande dame de la littérature anglaise... avec en plus le filtre qui se rajoute aujourd'hui pour moi de la lecture féministe. Je ne réalisais pas dans ma jeunesse ce que pouvait signifier pour la cause des femmes en littérature la réussite de Christie dans un genre à l'époque si machiste. Et je relis maintenant les romans en appréciant aussi certaines remarques pertinentes qu'elle glisse dans les discours de ses personnages féminins (voir la citation que j'ai sélectionné), ainsi que le rôle qu'elle fait jouer en général à ses personnages féminins, jamais des potiches décérébrées comme pouvaient l'être certains clichés du roman noir. Et particulièrement dans ce roman, la galerie des personnages féminins est diverse et très riche, loin des stéréotypes de son époque.