Dans la dernière édition du Masque (nouvelle traduction de
Alexis Champon), il y a une quatrième nouvelle "Trio à Rhodes", également résolue par Hercule Poirot. le recueil est dans le pur style d'
Agatha Christie, avec des intrigues qui paraissent insolubles et des fausses pistes semées au gré de leur progression jusqu'aux dénouements finaux qui réservent leur lot de surprises jusque dans les toutes dernières pages. le plus intéressant dans ces nouvelles c'est bien souvent bien sûr, comme dans les romans, l'identité du / de la / des coupable(s) mais aussi et surtout la motivation, le mobile qui a mené au crime, on retrouve cela dans la plupart des romans d'
Agatha Christie, parfois ces motivations sont bassement et terriblement banales (l'attachement amoureux d'un couple qui veut se libérer d'un tiers encombrant en récupérant sa fortune au passage, c'est le cas de l'une des nouvelles de ce recueil mais, même dans ce cas, l'histoire étant tout à fait imprévisible, elle peut alors être purement passionnante (ce thème est par ex. repris avec brio dans "
Mort sur le Nil", la dimension psychologique prend alors bien plus d'ampleur dans le format "roman" que dans une nouvelle, et l'intérêt s'en trouve bien entendu décuplé). Parfois, le mobile est purement affectif, c'est le cas de deux nouvelles dans ce recueil et c'est ce qui les rend aussi tant attachantes : l'amitié dans un cas, l'amour maternel dans l'autre, mais là encore, le format "roman" permet je trouve d'apprécier davantage les dimensions psychologiques et les circonstances dramatiques qui se sont tissées autour du crime, en rendant les conclusions moins abrutes, en les amenant par des faits qui sont connus d'abord de façon parcellaire, et distillés petit à petit au gré des points de vues de différents personnages, on en arrive ainsi à mieux comprendre les personnages de l'intérieur (on retrouve cela par exemple dans "
Cinq petits cochons", l'aspect génial de ce roman ayant été d'aborder le crime sous l'angle d'un cold case avec la notion sous-jacente de sacrifice en réparation). Enfin, le crime peut aussi servir l'ambition personnelle, c'est le cas de "L'invraisemblable vol", dans cette nouvelle il n'y a pas de meurtre mais simplement une disparition de papiers "très importants, classés secret défense..." l'intérêt de l'intrigue n'en est pas amoindri mais il n'y a pas d'affect, sa conclusion s'en trouve par là même dénuée d'émotion et d'empathie par rapport aux autres nouvelles du recueil, l'intérêt de sa lecture est bien présent mais il manque alors le coup au coeur, celui qui excuse en quelque sorte par sa dimension affective un peu (beaucoup) le /la/les coupables, celui qui dévoile la faiblesse du criminel et que j'aime aussi recevoir en lisant la conclusion d'un bon polar (c'est très souvent présent chez
Agatha Christie). Dans ce recueil de nouvelles je n'ai trouvé cela que dans "
Feux d'artifices" et dans "Le miroir du mort", mais les deux autres nouvelles se lisent aussi avec grand intérêt.