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EAN : 9791096315239
200 pages
Caurette éditions (29/01/2020)
4.38/5   4 notes
Résumé :
Pierre Christin est indubitablement l'homme qui, dans les années soixante-dix, a révolutionné la bande dessinée. Journaliste, scénariste, homme de lettres, il enfante des chefs-d'œuvre et travaille avec les maîtres du 9e art, depuis plus de cinquante ans. Avant-gardiste et visionnaire, sa plume a toujours été vagabonde. On lui doit bien sûr Valérian, mais aussi des ouvrages qui sont parmi les premiers romans graphiques, de la politique-fiction, des chroniques et des... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Je remercie vivement les Editions Caurette et Babelio pour ce bel ouvrage reçu dans le cadre de l'opération Masse Critique Non-Fiction 2021. Il est au format BD (à peu près la taille des albums Dargaud mais avec beaucoup plus de page) et riche d'illustrations reprenant couvertures, planches ainsi que des photos prises par Christin lors de ses nombreux voyages, y compris celles préparatoires pour ses scénarios.

Comme il a été réalisé avec la complicité de Christin, sa construction est un modèle pour une monographie : deux longues interviews en entrée, "Dr Christin" sur sa vie en général et "Mr. Linus" sur sa carrière dans la BD (Linus était son pseudo pour les premières éditions de Valérian). Puis des chapitres thématiques : ses héroïnes (et son hommage à Annie Goetzinger, disparue récemment), des photos de jeunesse ou plus tardives, des textes critiques et des témoignages de ses complices ou autres (Jean-Claude Mézières forcément, Dionnet, son assistante, et même son fils !), un chapitre thématique sur ses « Correspondances » (série d'albums de reportages en collaboration avec une pléiade de dessinateurs), des interviews de groupe (notamment avec Luc Besson et Mézières à l'occasion de la sortie du film Valérian et la cité des milles planètes)... Enfin, une bibliographie à la fin pour se jeter sur ce qu'on avait manqué.

Bref c'est très complet, même si cette construction se traduit par quelques redites. Et oui : le maître se répète parfois d'une interview à l'autre, probablement moins un signe de gâtisme précoce que du côté répétitif des interviews et questions auxquelles sont soumis les auteurs.

On y découvre la triple vie de Pierre Christin : scénariste certes, mais aussi professeur universitaire et reporter. Il n'était pas un scénariste reclu à la mode de Bébel dans le Magnifique, loin de là. Il a été professeur puis également directeur de l'IUT de journalisme de Bordeaux, et c'était visiblement bien plus qu'un job alimentaire. Il a parcouru le monde, pour son plaisir et pour des reportages. On se demande bien dans quel ordre, d'ailleurs (j'ai mon opinion, j'ai écris plaisir en premier). On y découvre au passage un homme non seulement admirable mais aussi très attachant, généreux dans sa volonté de transmettre et faire progresser ses étudiants et collaborateurs. On y glane de nombreuses anecdotes. Mais surtout, cette passion du journalisme et des reportages a fortement nourri ses scénarios, à contribuer à leur richesse et leur caractère novateur.

Parce que côté novateur, il a introduit des héroïnes dans un monde de la BD jusqu'alors très masculin. de la conscience politique, écologique, avec les Valérian puis avec Enki Bilal (et jusqu'à créer le genre de la politique-fiction avec Les Phalanges de l'ordre noir), tout cela en évitant soigneusement le préchi-précha et en se concentrant sur les histoires à raconter. de l'intimisme, particulièrement avec Annie Goetzinger. du reportage aussi est surtout, à partir de L'étoile oubliée de Laurie Bloom puis dans ses Correspondances.

Au final, et c'est le principal, ce livre m'a donné l'envie d'en lire bien davantage.

Je me suis rendu compte que je connais finalement très peu Christin. Je suis de la génération qui a pris Les Phalanges de l'ordre noir et Partie de Chasse en pleine poire, mais j'en avais surtout retenu Bilal. Et puis j'avais lâché l'affaire avec L'étoile oubliée de Laurie Bloom, lui préférant les BD de Bilal seul. Aux point de rater le Sarcophage (sur Tchernobyl), qu'il me faut absolument. Plus tard, j'ai plongé dans leurs Mémoires d'Aujourd'hui et leur ai trouvé un petit côté baba-écolo suranné tout en reconnaissant la force des histoires racontées. Beaucoup plus tard, la série des Valérian et Laureline et enfin le premier Léna. Et bien ce n'est que la partie cachée de l'iceberg et je sens que je vais plonger pour gratter la partie immergée, maintenant que je connais mieux celui qui en est à l'origine.
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Pour cibler ce grâce à quoi Pierre Christin est essentiellement (re)connu, on retiendra de première intention (l'homme a tant d'autres cordes à son arc, on en reparlera) le fait central, qu'en compagnie du dessinateur Jean-Claude Mézières, il fut le « papa-mots » (lire le scénariste) de « Valerian, agent spatio-temporel ». Ce volumineux (et passionnant) cycle BD a contribué, dès ses premières planches publiées en 1967 sous forme de feuilleton hebdomadaire dans « Pilote, mâtin quel journal », durant vingt-deux tomes et six décennies, à sortir la BD des 60's de l'ornière des « publications pour la jeunesse » strictement encadrées. La saga Valérian ne fut pas, historiquement et d'évidence, la seule force à l'ouvrage ; l'explosion créatrice de la BD made in France des 70's fut un travail collectif enthousiaste quand, par exemple et entre autres, tous ceux du Pilote qui « s'amusaient à réfléchir » y contribuèrent avec tant de coeur et de succès ; mais Christin, par sa polyvalence scénaristique au service de nombreux dessinateurs y apporta un axe fécond autour duquel ses histoires gravitèrent en multiples duos scénariste/dessinateur de luxe.

Les « petits Mickeys » d'alors, si réalistes furent t'ils, à l'égal des « petits hommes verts » de la SF filant vers l'expérimentation de la New Wave britannique, vont passer sous son impulsion créatrice de l'état d'enfance à celui d'adulte. le 9eme art français va croquer à pleines dents dans un avenir peu à peu mâture qui tiendra toutes ses promesses.

« Pierre Christin, le grand rénovateur du récit en bande dessinée » passe en revue les nombreuses facettes du personnage. Elles sont étonnamment imbriquées les unes au service des autres, une pour toutes et toutes pour une, comme autant de poupées-gigognes ou à l'image de ces patates de mathématiques modernes qui voient des parts d'elles-mêmes se chevaucher et se partager leurs influences. La raison de créer de Christin semble être de ne rien gâcher de toutes les vies qui habitent l'homme : scénariste, prof et directeur universitaire, musicien et collectionneur de jazz, journaliste, homme de lettres, chroniqueur…

Cette luxueuse et magnifique monographie, j'use d'euphémismes pour la décrire, part à l'assaut enthousiaste (et communicatif) de toute une carrière tissée de passions diverses ; d'avant-gardisme graphique; de révolutions scénaristiques nécessaires ; d'explorations de thèmes frais (la politique enfin abordée, la geo-politique itou, l'écologie comme une prise de conscience … s'insèrent peu à peu en arguments de lecture). Christin défriche, explore et concrétise les potentialités d'un art relativement jeune.

L'ouvrage, paru en 2020, est une co-production entre les Editions Caurette et le magazine dBD. Son socle repose sur 6 articles non inédits parus dans ce dernier. Ils furent copieusement actualisés pour la circonstance. L'iconographie est représentative de l'homme et de l'oeuvre, de ses intentions, de ses objectifs et de la manière dont ils ont été atteints. Et en plus c'est un bien beau régal pour les yeux.. !

A l'origine, passionné de BD et désireux d'y oeuvrer, conscient de ses prédispositions à « monter » des histoires, sur le point de renoncer à cause de ses faiblesses avouées en dessin, Christin fut l'un des premiers à penser que dessinateurs et scénaristes pouvaient, à la convergence des parallèles de leurs arts respectifs, oeuvrer en commun. le tout allait se montrer se montrer plus grand que la somme des parties. de cet amalgame de compétences il entrevit, pour lui, un métier à sa portée. Valerian naquit et pesa de son succès. le chemin était ouvert mais pas encore balisé. Scénariste : un vrai job désormais, que Christin a poussé vers l'âge adulte et la reconnaissance non seulement de ses pairs mais de ceux qui, au départ, étaient loin d'être convaincus. Sa force de frappe : la passion pour un art nouveau et l'émulation qu'il produisit chez d'autres. Il est ainsi devenu un pivot autour duquel a gravité tant de destins graphiques (Bilal, Tardi, Lesueur, Annie Goetzinger, Juilliard … etc).

Pierre Christin m'est nostalgie sur le fil de vie des sept dernières décennies écoulées. A cheval sur deux siècles, du crépuscule des 60's à l'orée des 20's, il a nourri mon imaginaire. En pur amateur, tant de mes années à lire de la BD (un peu), du polar (itou), de la SF et du Fantastique (surtout), du « mauvais genres » (toujours) ; souvent me cachant toujours me passionnant, indifférent aux avis de ceux qui n'y entrevoyaient que de bien trop juvéniles « petits Mickeys », de si peu crédibles « petits hommes verts », des univers inutilement et juvénilement fantasmés, bien trop naïfs, crédules et décalés du réel. C'est que, derrière, pour les détracteurs, il y avait la vraie vie à prendre au sérieux et qu'avec de telles fadaises rien ne s'y ferait. La littérature générale était ce qu'on m'imposait, la SF ce que je m'étais choisi et qui, quelque part, bon an mal an, a conduit une large part de ma vie. Il fallait alors avoir la certitude de la maturité latente de ces genres pour continuer à y croire.

Valerian me fut ce que j'entrevoyais et appréciais dans la SF. le coeur de cycle battait SF, le mien itou. de quoi matcher entre nous ? Evidemment. le cycle a su m'enthousiasmer dès première parution en album (1971).

Au rang des influences on peut creuser et trouver :
_Déjà, rien que le titre, « La cité des eaux mouvantes », avait tout pour faire rêver. Je devais, plus tard, l'emporter en filigrane de lecture pour le « Monde englouti » (1962) de J.G. Ballard. Si çà ce n'est pas du paradoxe temporel ..!
_Valerian est, le sous-titre de la série le précise, un « agent spatio-temporel ». Et c'est tout à fait çà. Space opera au rythme des immensités noires et vides traversées via l'hyper-espace, planet-opera via le bestiaire E.T. ébouriffant peu à peu édifié (« La faune de l'espace » de van Vogt n'est pas loin et fait partie des influences avouées dans la monographie). Empire Galactique entrevu comme celui d'Asimov dans Fondation. Voyages dans le temps au regard des paradoxes de même eau accumulés (dont Christin aura, faiblesse avouée dans la monographie, de la peine à se dépêtrer pour finir le cycle) (Poul Anderson et sa « Patrouille du temps » sont en ligne de mire)

Et puis Laureline, la chaste copine de Valérian prit du corps et du caractère, du charme et de la séduction, voire même un certain sex-appeal stylé et de grande classe. Valerian, dégommé du premier plan, se fondit dans le background. Laureline prenait le pouvoir. Christin et surtout Mezières, semble t'il, lui laissèrent l'initiative du scénario. Laureline, un prénom tout en douceur bientôt accolé à celui de Valérian au titre générique de la série. Une rousseur flamboyante (pour qu'en vignettes, du premier coup d'oeil, on la distingue bien du fond D E.Ts. aux incertaines et quelques fois peu ragoutantes particularités physiques. Mezières l'a voulu de premier plan sous les feux de la rampe. Un minois délicieux. Une silhouette de mannequin, élancée, toute en rondeurs fines étirées (Mezières l'affine, la cajole et ne cache pas sa préférence sur Valérian à la dessiner). Une voix sexy en bulles, câline en phylactères, espiègle en mots. Une meuf qui affiche même un sacré caractère. Décidée et maitresse d'elle-même annoncent ses expressions de visage. Valérian, montré insipide s'efface. Luc Besson, en interview incluse dans la monographie (un long chapitre est consacré à l'adaptation au cinéma), dira qu'il tomba amoureux jeune de cette fille de papier. Je peux comprendre et même jalouser. Laureline, c'est la classe élégante dans les gestes et les attitudes, le style jusque dans le scaphandre bibendum qui pourtant ne montre rien, la femme rêvée, celle d'une vie, des amours et des emmerdes, des disputes et des câlins, bref le fantasme intégral ( « Laureline veux-tu m'épouser ? Même si j'ai vieilli et pas toi »).

Christin fut aussi, au mitan des 70's, au coeur d'une SF française engagée dont il essaya de se démarquer (il s'en explique) non pas tant de ses idées que de la force de persuasion disproportionnée qui leur était appliquée, l'auteur de quelques romans, dont l'un, quand même, fut accueilli dans la mythique collection argentée Ailleurs & Demain de G. Klein chez Robert Laffont. Son titre : « Les prédateurs enjolivés »). Un autre, « le futur est en marche arrière », qui en collectionneur SF que je suis fait partie des raretés à débusquer au détour des étals de bouquinistes. Christin semble n'avoir désormais qu'un regard lassé et beaucoup de recul, sur cette époque durant laquelle la SF française s'est enlisée ; les forums de SF ne se lassent pas d'y revenir pour remuer les antagonismes entre membres. L'auteur semble désormais préférer sa production littéraire généraliste (« ZAC » par son thème pourrait, par exemple, me plaire).

Christin est polyvalent, on le voit ; le voici maintenant infatigable reporter globetrotter. A vélo le plus souvent, apaisant sa boulimie de voyages autour du monde, nourrissant sa soif journalistique d'un monde sans cesse en mouvement, curieux d'une géopolitique qui convulse et soubresaute. Les changements perçus lui semblent centripètes, par vagues venues des banlieues se brisant sur les façades touristiques figées et inamovibles des centres-villes. Les quartiers périphériques grouillent d'inattendus photographiques qui nourriront au retour des illustrateurs de renom ou en herbe chargés d'en faire des carnets de voyage.

On trouve inclus dans la monographie un article/reportage journalistique hallucinant (ce n'est pas de la SF mais du réel) consacré à Tchernobyl après l'accident mais avant la fermeture totale du site. Quelques pages qui n'auraient pas désavoué J.G Ballard Ballard dans ses apocalypses immobiles. Son titre : « Sarcophage », le texte est illustré par Bilal.

Merci à Babelio, Masse Critique, l'auteur, Caurette Ed. et dBDmagazine d'avoir chatouillé la fibre nostalgique d'un adulte resté addict aux années Pilote, Metal Hurlant et (A SUIVRE) qui suivirent… etc qui prirent inlassablement et successivement le relais d'une BD à la française adulte qui a toujours su se renouveler et prouver la part littéraire de son âme.

Ainsi pour conclure, coucou nostalgique à mes années lycée au coeur des 70's, celles du « journal Pilote qui s'amusait à réfléchir », revue BD iconoclaste à minima, jadis disponible tous les mardis à l'étal du tabac-presse (en compagnie, hélas, des premières Gauloises Bleues).

Lien : https://laconvergenceparalle..
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Voilà un titre qui risque fort d'intéresser voire enchanter les amateurs de bd. Moi en tout cas, ça fait un moment qu'il me faisait de l'oeil : depuis que j'en avais vu des piles dans l'antre du Vaisseau Moebius à Angoulême en marge de la magnifique expo « Dans la tête de Pierre Christin ». J'avais alors eu la chance de non seulement visiter l'exposition mais également assister à la rencontre « Autour de Pierre Christin » pour laquelle il était entouré de ses complices de toujours Jean-Claude Mézières, Enki Bilal et André Juillard. Univers très masculin me direz-vous. La talentueuse Annie Goetzinger à qui ce livre est dédié aurait sans doute été de la partie si malheureusement elle ne nous avait pas quittés quelque temps auparavant. Il ne me manquait donc pour être comblée que cette passionnante monographie. C'est à présent chose faite grâce à Babelio et aux Editions Caurette qui me l'ont fait parvenir à l'occasion d'une masse critique non fiction et je les en remercie.

« Je m'étais promis de ne jamais écrire d'autobiographie, car je me méfie de tous les appareils de célébration, aussi modestes soient-ils. » Ainsi débute la préface de Pierre Christin pour l'album Est-Ouest paru en 2018 chez Aire Libre. Et bien tant pis pour lui et tant mieux pour nous si sa modestie a été mise à mal. On ne peut que se féliciter de son accord et sa contribution à cet ouvrage sorti donc conjointement à l'exposition qui le mettait à l'honneur à Angoulême. Vont servir de base à cette monographie, les entretiens réalisés pour un hors-série du mensuel dBD en 2011. A cette occasion, Pierre Christin avait posé deux conditions : être interrogé par deux journalistes – ce seront Christophe Quillien et Frédérique Pelletier – et légender lui-même l'iconographie. Telle va donc être la matière première du livre séquencé en 15 chapitres dont le dernier n'est autre qu'une bibliographie très détaillée de ses différents écrits : un subtil agencement de documents plus captivants les uns que les autres comprenant entretiens, témoignages de ceux qui ont compté, photos, planches et couvertures d'albums.
Deux chapitres nous font pénétrer dans le coeur du sujet : « Docteur Christian » et « Mister Linus ». Docteur Christian, c'est l'enfant, l'adolescent, le journaliste, le prof d'université, le pédagogue, le musicien grand amateur de jazz, le journaliste, le romancier, le globe-trotter... Mister Linus, c'est le raconteur d'histoires qui nous fait partager son parcours et sa vision du métier depuis ses débuts à Pilote où il avait pris ce pseudo en référence aux Peanuts.

Le scénariste aux mille facettes
« Le grand rénovateur du récit en bande dessinée », le titre parle de lui-même. Dans la lignée d'un Goscinny, il a contribué a donner ses titres de noblesse au métier de scénariste. Notre baroudeur a toujours aimé raconter des histoires et c'est son amitié avec Jean-Claude Mézières, le copain d'enfance, qui le mènera sur la piste du scénario de bande dessinée en dépoussiérant et renouvelant la SF. Et cela va être le début de la grande aventure de Valérian et Laureline et ses 22 tomes étalés sur un peu plus de 40 ans. Part belle est donnée à cette fabuleuse épopée spatio-temporelle tout au long de l'ouvrage. Dès ses débuts en tant que scénariste, Pierre Christin s'était donné pour but de défricher les terres encore inexploitées de la bd en explorant tous les genres possibles sauf le western et l'érotique. Après cette première incursion dans le domaine de la SF avec Mézières, il fera une courte intrusion dans le domaine du fantastique avec Tardi et ses Rumeurs sur le Rouergue. L'amitié et la complicité étant le nerf créatif essentiel du scénariste, il écrira des scénarios en fonction des dessinateurs. Avec Enki Bilal, puis plus tard André Juillard, il explorera la géopolitique alors qu'avec Annie Goetzinger, il sera question de bd intimiste. Il inaugurera le reportage autofictionnel avec Bilal et L'étoile oubliée de Laurie Bloom, style qu'il prolongera plus tard dans ses Correspondances avec divers artistes. Outre Est-Ouest, il abordera également la biographie à travers Robert Moses et en tout dernier lieu le remarquable Orwell paru en 2019 chez Dargaud.

Viennent aérer ces longs entretiens, des chapitres uniquement iconographiques sur ses héroïnes préférées, ses sélections d'aliens, ses lieux de rêves, ses souvenirs et également un hommage à Annie Goetzinger avec notamment le très émouvant extrait du scénario de la dernière aventure d'Edith Hardy « Quand je serai jeune » qui ne verra jamais le jour.
Un autre chapitre sera consacré aux témoignages, entre autres, de son assistante Stella Lory, la directrice qui prit sa suite à l'Institut de journalisme de Bordeaux, son éditeur allemand pour terminer en beauté avec - comment pouvait-il en être autrement ? - Jean-Claude Mézières. Les « Correspondances » de notre reporter sur le terrain feront l'objet d'un chapitre à elle-seules ainsi que quelques-uns de ses propres articles judicieusement choisis avant que les Valérian de Besson, Larcenet et Lupano ne viennent clôturer l'ouvrage.

On peut caractériser tout ouvrage par sa forme et par son fond. Concernant la forme, mention sans faute pour l'élégance sobre de ce livre particulièrement soigné. Quant au fond, j'émettrai un léger bémol dû à la présence de quelques redondances de certains propos qu'on retrouve dans différents chapitres. Mais bon, quand on aime, on ne compte pas...

Ouvrage foisonnant, passionnant richement documenté que tout amateur se doit de posséder dans sa bédéthèque. Une fois la lecture achevée, on n'a qu'une envie : ressortir, relire les ouvrages qu'on possède déjà et se précipiter en librairie ou bibliothèque pour découvrir les autres.
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Cet ouvrage est une mine, d'or, pour les béotiens de la BD dont je suis. Au fil des pages, on en apprend plus sur cet homme à la double-vie, professionnelle, qui s'est battu pour deux genres littéraire mesestimés et sous-estimés : la BD de science-fiction, les romans de science-fiction. Des interviews de ses copains dessinateurs nous dessinent un portrait plus intime de cette madame Irma qui a vu si justement certains aspects de nos temps modernes. Pierre Christin n'est pas avare de conseils et d'avis sur le métier de scénariste . Une bibilographie très complète vous donnera certainement envie de relire des Valerian, Agences Hardy et autres.
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critiques presse (1)
BDGest
16 septembre 2020
Personnalité hautement sympathique dotée d’une culture impressionnante et d’une envie contagieuse de raconter et de partager ses découvertes (à quatre-vingts ans passés, il continue d’écrire et d’entreprendre de nouveaux projets), Pierre Christin a laissé une marque indélébile et offert des heures de lectures inoubliables à des générations de lecteurs.
Lire la critique sur le site : BDGest
Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Il faut se rappeler que Dargaud, lors de son passage dans l'orbite de Média Participations, a été pris d'une espèce de crise de folie. La mode était déjà à dégraisser les effectifs, à réorganiser, à faire du management, que sais-je encore ? Les dirigeants de l'époque ont pris une maison d'édition pour un fabricant d'électroménager et se sont quand même séparés d'Enki Bilal, de Philippe Druillet et de beaucoup d'autres, soupçonnés d'être mal-pensants. C'est exactement comme si Gallimard avait viré André Malraux et Raymond Queneau.
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L'auteur d'un livret d'opéra doit faire preuve de modestie car il se met au service d'un art qui n'est pas le sien, comme le fait un scénariste qui écrit un scénario pour un dessinateur.
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"Rien n'est vrai, mais on ne peut pas le prouver" P. 122 (Olivier Christin)
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"A un moment, il faut arrêter de faire flop-flop dans le pédiluve..!" Page 110
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