Un court roman pourtant très dense que ce petit livre de
Philippe Claudel. Ces 180 et quelques pages sont un concentré de mélancolie, de nostalgie et de poésie où l'on suit Monsieur Linh de l'Asie à l'Europe, puis de l'Europe à l'Asie quand « le pays » – son nom n'est jamais mentionné – manque au vieil homme et qu'il tente de le retrouver à travers ses rêves. Car Monsieur Linh a dû fuir son village, son pays et la guerre. Avec son unique petite fille.
Ce roman est dense parce que ce que vit Monsieur Linh dans son pays d'accueil est riche en découvertes et en rebondissements : le dortoir dédié aux réfugiés à son arrivée, sa rencontre avec Monsieur Bark, cette nouvelle amitié qui adoucira son quotidien, son déménagement au « château », etc. Ce livre illustre bien le fait qu'il est plus que difficile de quitter son pays bien aimé à cause de la guerre et de débarquer dans un pays inconnu, avec tout ce cela comporte : le choc culturel, le climat, la barrière de la langue. Monsieur Linh a bien du mal à s'adapter à cette grande ville qui fourmille de voitures, lui qui vivait dans un village qui ne comptait que douze familles… Ce roman est également très puissant car il est raconté du point de vue de Monsieur Linh. On comprend donc d'autant mieux ce choc culturel et on est tour à tour révolté, attristé ou amusé par les déboires du vieil homme qui ne connaît même pas son âge. Et au-delà de ce choc culturel, c'est aussi de traumatisme lié à la guerre et à la perte d'êtres chers dont il est question dans ce livre. Comment est-il possible de supporter la mort d'êtres proches, la mort de ses enfants qui ont perdu la vie lors d'un bombardement ?
Avec des sujets si sensibles,
La petite fille de Monsieur Linh aurait pu être une lecture difficile. Ou larmoyante. Ce ne fut pas le cas. Grâce à l'écriture de
Philippe Claudel, j'ai trouvé ce roman mélancolique mais très doux et poétique. Il a un peu la saveur de la citronnelle et des cigarettes mentholées de Monsieur Bark.