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Critiques filtrées sur 2 étoiles  
La philosophie a quelque chose de fort pratique: on peut l'utiliser pour défendre à peu près n'importe quelle opinion. Il suffit de sélectionner ses sources. Tiens, par exemple, Aristote avait bien justifié l'esclavage!

Comte-Sponville en appelle à Kant, à Rousseau, et surtout à Pascal, pour défendre le capitalisme. Lequel n'en avait pas vraiment besoin, d'ailleurs: il me semble qu'il se porte plutôt bien.

Sa théorie repose habilement sur l'utilisation du mot "ordre", terme popularisé par Pascal pour exprimer le fait que le corps, la raison, et le coeur sont régis par des lois différentes. Comte-Sponville le transpose à sa guise, et décide que l'économie et la morale sont de deux "ordres" différents, que chacune est régie par ses propres lois, et que par conséquent l'économie ne peut être morale. Il nous affirme que l'économie, comme par exemple les maths ou la physique, est une science; il est vrai que si la pomme chute de l'arbre, la morale n'a rien à voir là-dedans.

Mais, à part la classique loi de l'offre et de la demande, quelles seraient ces fameuses "lois" incontournables de l'économie? L'auteur ne s'engage pas dans ce débat, dont on sait qu'il est controversé, les économistes se disputant beaucoup sur ces sujets. Il se borne à nous seriner que les êtres humains seraient "naturellement" habités par le désir de posséder, de s'enrichir. Il semble donc être passé à côté de nombre de travaux d'anthropologues et d'historiens du travail... Marshall Salins, Philippe Descola, David Graeber, ou encore, Dominique Méda. La prédominance de l'argent, de la propriété, on peut la dater du 17ème siècle. Les grecs et les romains méprisaient le travail; l'Eglise catholique prônait la pauvreté. C'est le développement du protestantisme qui a chamboulé le paysage: tout à coup, le fait de s'enrichir n'était plus négatif. Au contraire, cela marquait la reconnaissance par Dieu de la valeur d'un individu.

Compte-Sponville, disais-je, a soigneusement sélectionné ses sources. Il en appelle beaucoup au Rousseau du Contrat social, mais on ne trouvera aucune référence au Discours sur les inégalités. Rousseau, en avance sur l'anthropologie, y avançait déjà que la source des inégalités est dans le développement de la propriété privée. Et que celle-ci n'avait rien de naturel: nombre de sociétés dites "primitives" l'ignoraient totalement.

Et si la morale et le capitalisme n'ont vraiment rien à voir, peut-être Comte-Sponville pourrait-il nous montrer en quoi il favorise (ou pas) le développement de ces grandes vertus, dont il s'était fait le chantre? La justice, par exemple? Il ne peut ignorer l'emprise de l'économie sur la politique, que l'on voit tous les jours (*). Il a certainement lu Milton Friedman, connu pour avoir déclaré que trop de démocratie mettait l'entreprise en danger.

Si à la place du mot "ordre", il avait utilisé les mots de domaine, ou de système, sa théorie montrerait ses faiblesses. L'ordre, cela s'impose, cela fait indiscutable, incontournable: qui serait pour le désordre? Mais dans la réalité, tout est imbriqué... Comme le défend Edgar Morin dans sa Méthode, l'organisation influence le système, et réciproquement, dans une boucle continue. Depuis l'invention de l'agriculture, jusqu'à la révolution industrielle, puis à l'émergence du secteur tertiaire, l'histoire ne cesse de montrer que l'organisation de la production influe sur le système social.

Très logiquement, Comte-Sponville sépare l'économie, les sciences, et la politique, de l'éthique, où il confine les valeurs des individus. Même s'il admet du bout des lèvres que les frontières ne sont pas closes, on lit en filigrane dans son bouquin le récit habituel des adeptes de l'individualisme et du développement personnel: certes, la société marchande capitaliste n'est pas parfaite, mais c'est comme ça, c'est la moins pire de toutes, et ceux qui en souffrent peuvent toujours se réfugier dans leur sphère de valeurs privée: l'amour, la compassion, la politesse...

(*) la liste en serait infinie, du renversement du gouvernement Allende au Chili par les multinationales américaines, au développement de ce que l'on appelle les banlieues moches, en passant par l'affaire Orpea, la mainmise sur les groupes de presse par des milliardaires, les crédits d'impôts accordés aux mécènes qui leur permettent de valoriser leur collections d'art,....
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Clair, pédagogique, facile à lire... C'est marqué sur la 4e de couv' mais ce n'est pas ce que j'ai constaté, mais alors pas du tout ! C'est juste du marketing et j'aurais dû me méfier. J'ai acheté ce livre et je le regrette.

Tout d'abord l'auteur est insupportable. Il a des intérêts avec les grandes entreprises qui lui commandent souvent des séminaires, il n'est donc pas du tout libre de sa pensée. Pour le grand auteur des Grandes vertues, on repassera. Ce grand philosophe aime s'écouter parler, se trouve très éloquent, même à l'écrit ça se sent. D'ailleurs ce texte est une adaptation d'une conférence. Mr Comte-sponville sait bien gérer sa petite entreprise...

Si vous voulez gagner du temps, contentez-vous du chapitre-titre, c'est le plus court et le plus intéressant. Dans le reste du livre c'est le philosophe qui fait son intéressant. Dans la forme c'est absolument illisible. L'écriture est hachée, maniérée, bourrée de guillemets, de points d'exclamation, de virgules et de parenthèses, de digressions et autres anecdotes. André Comte-Sponville étale sa confiture culturelle à n'en plus finir. Ca en devient totalement indigeste et incompréhensible. C'est du gloubiboulga philosophique très théorique, avec énormément de notions en italique et autres locutions latines.

Dans le fond le sujet est intéressant mais l'auteur est tellement antipathique et antipédagogique qu'on a juste envie de fermer ce livre et de ne plus jamais écouter ni lire ce monsieur. Ce livre a failli me dégouter de la philo...
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