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EAN : 9782841161973
89 pages
Cheyne (25/02/2014)
4/5   2 notes
Résumé :
Helen, la narratrice de cette histoire, part à la recherche de son père, qu'elle n'a pas connu, et dont le destin est entouré de beaucoup de mystère. Tous ceux qu'elle interroge lui fournissent des réponses qui sont comme autant d'énigmes ou de faux-fuyants qui la trompent, et derrière lesquels la vérité se dérobe. Ainsi la quête d'Helen, qui est aussi celle de son identité - motif récurrent dans l'oeuvre de Marie Cosnay - prend-elle l'allure d'une longue épreuve in... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Un récit tellurique, un road movie, une enquête familiale, une quête d'identité, une plongée dans l'histoire européenne du 20e siècle, tels sont les multiples visages de ce texte de Marie Cosnay.
Le fils de Judith retrace le parcours intérieur et initiatique d'Helen, jeune femme sans passé qui a grandi recueillie par Quentin Wilmer, vieil écrivain perdant la mémoire et les mots. A la recherche de ses origines, elle reconstruit l'histoire de sa famille disparue, traverse le siècle et les frontières. 1938, 1968, 1973, le 21e siècle, l'Allemagne, la Bohême, la France sont les dates et lieux de la rupture, de l'exil pour les personnages de ce récit, tous marqués par l'histoire européenne. La quête du mystère de sa naissance conduit Helen à élaborer une architecture familiale marquée par la tragédie, la passion et la douleur où tous prennent place, père et mère retrouvés, frère inconnu, aïeul trop tardivement questionné. Une part d'ombre cependant demeure, le fils de Judith, à la fois muette figure humaine et création littéraire dont le contenu nous demeurera inconnu.
Marie Cosnay, par une écriture épurée, brassée par les éléments naturels, montagnes, océans, forêts, feux, habitée par les corps, sang, peaux, os, rend paysages et figures liés, indissociés. Les destins humains épousent les puissances qui les outrepassent. Les tentatives d'interprétation du monde, qu'elles soient littéraires ou mathématiques apparaissent à la fois exaltantes et fragiles, menacées par l'oubli et l'usurpation.
Le livre se clôt comme il a commencé, par un portail qu'une jeune femme tente d'ouvrir. Cette fin nous donne à voir un personnage décentré, observateur, qui introduit un changement de perspective. Son regard (celui du fils de Judith ?) entoure et clôt le récit de la quête d'Helen en une bulle narrative que l'on voit s'éloigner en silence.

Par bien des aspects, le fils de Judith semble faire référence à l'oeuvre du poète Paul Celan dont Nelly Sachs, citée en exergue, était proche.
"Et des nombres étaient
tissés dans
l'innombrable. Un, mille, et ce qui
devant, derrière,
était plus grand que soi, plus petit, mené
à terme, puis dans une métamorphose
à rebours et suivie,
transformé en un
jamais germinant."
Paul Celan, "Les syllabes douleur" dans La rose de personne, José Corti, 2002.
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"Quelque chose nous dépassait. Nous délaissons les sommets et les plaines, nous nous moquons des visions en étages. nous prenons l'ensemble dans un même regard."

Il y a des lectures dont il est difficile de parler, parce qu'on n'a pas tout compris, parce qu'elles laissent un gout indéfinissable, parce qu'on ne sait pas trop quoi en penser. Je ne savais pas dans quoi je mettais les pieds, mais j'y suis allée pleine de bonne volonté et prête à prendre le taureau par les cornes.

"On pense qu'on va parler des évènements qui firent une vie, mais ce n'est pas exact."

Helen rentre chez son père adoptif, Quentin Wilner B., qu'elle a quitté des années plus tôt sans donner de nouvelles. Elle y revient pour chercher des réponses. Elle en trouvera mais pas aux questions qu'elle se posait. Quentin lui confie une enveloppe et une adresse à Hambourg. Là elle devait en apprendre plus sur Eugen, le fils de Quentin, mathématicien accusé d'usurpation qui s'est suicidé dans les montagnes, non loin de là où Quentin la trouva, bébé, des jours plus tard.

Ceci est une sorte de fil conducteur, un fil de plomb autour duquel on a construit un récit, éclaté, déviant, en plusieurs morceaux. L'histoire d'Eugen rejoint celle d'Helen et celle de Quentin, avec ses voyages, ses carnets, ses livres, ses folies, ses amours désastres et sa lente dissolution. On n'est pas habitué, comme lecteurs, à ce brouillage, à cette rupture dans le récit vers l'onirisme, où les montagnes se font houleuses et bleues comme la mer mais où il demeure le même désir de destruction. L'auteur invoque un monstre marin qui avale les vies et les broie. Il y a les mots incapables de raconter. le récit n'est pas celui ordonné de la fiction. le réel se mêle et se confond au rêve et à l'inconscient dans un mouvement de spirale qui révèle et cache tour à tour et ramène toujours vers le centre, la quête de soi-même.

Le fils de Judith est un livre exigeant à ne pas mettre entre toutes les mains. Lecteurs aguerris, laissez vous surprendre par ses sinuosités, laissez-vous porter par son langage poétique, laissez les mots prendre corps et vous dissoudre. Quelque chose m'échappe, sans aucun doute, mais rien n'empêche d'apprécier la beauté de cette fuite.
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Helen s'en est allée, longtemps. Elle a fuit son père d'adoption, le vieux Quentin, et la ville où elle a grandi. "Je choyais tout ce qui me préparait à la mort", dit-elle (p. 11). La vie, dès les premières pages de ce récit poétique, est une spirale immense et pénétrante. Après s'être longtemps écartée du centre, il est temps d'y revenir. L'appel est aussi énigmatique qu'impérieux. Aussi, revoilà Helen devant la maison du vieux Quentin dont la bibliothèque a brûlée jadis. Peu de mots, des enjambées démesurées qui mènent à la tombe du frère inconnu où Helen fut découverte. "Mon fils Eugen aurait l'âge d'être ton père." (p. 15). Quentin part en laissant une enveloppe et Helen saute dans un train pour Hambourg. C'est le début de bien des trains à la recherche, semble-t-il fortuite, d'Eugen : le frère, le père, le génie, le disparu toujours proche. de gare en gare, souvent vides, Helen croise des personnalités hallucinées, qui ne parlent qu'à demi-mot, pour la guider vers elle-même.

Ne cherchez pas vraiment d'histoire, il n'y en a pas ou si peu - pour filer la métaphore. de voyage il est bel et bien question pour mieux l'éclater, et comme tout est cercle, les éléments s'enchaînent éparses pour recomposer ce mouvement centripète. Tout se mêle dans ce récit émouvant, tortueux et exigeant. En un mot : poétique. Il y a bien la trame du retour chez soi mais subvertit car l'ancrage n'existe pas : ce que l'on retrouve, c'est l'immensité, la permanence des dissolutions. Il y a cette ascendance qu'Helen cherche désespérément mais qui n'est déjà plus là lorsqu'il s'agit de la toucher du doigt.
Les éléments sont lacunaires ; le puzzle est plein d'interstices que la langue vient remplir. Puisque les questions sont autant d'ombres projetées, la langue virtuose - rien de moins - de Marie Cosnay gratte la lumière, trace un violent trait noir, dépouille ou ensevelit. Tout est dans la langue qui tantôt maintient l'équilibre, tantôt précipite dans la lucidité ou l'abandon.

Ce court récit s'offre plein de beauté aux yeux amoureux des mots, aux esprits poètes et aux âmes errantes. Un style, un parti pris, qui ne plairont sans doute pas à tous en ce qu'ils appellent un lecteur actif et passionné. Pour ces derniers, le dernier opus de Marie Cosnay est un sacré petit bijou.
Lien : http://lapetitemarchandedepr..
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Un homme se noie dans les cylindres de vagues. Les rouleaux d'écume sont bleus de calcaire, du bleu de ces collines où va doucement mourir, bouche ouverte, son fils. Un enfant paraît à l'endroit où est mort le premier car rien ne disparaît. Le songe se fait mécanique, on voit surgir l'image d'un enfant dans un nid de bruyère et on s'entraîne à la répétition : image effacée, revenue, supprimée puis rendue encore, superposée au vide incommensurable.
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Videos de Marie Cosnay (17) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Marie Cosnay
avec Marie Cosnay, Agnès Desarthe, Lucie Taïeb, Geneviève Brisac. Modération : Francesca Isidori.
Samedi 19 septembre 2020 / 16 h
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